• Aucun résultat trouvé

Évaluation de la réforme de 1991

1.2 Les effets de la taxation des revenus capital sur les comportements

2.2.2 Évaluation de la réforme de 1991

La réforme de 1991 s’est trouvée concomitante avec la crise économique la plus importante en Suède depuis les années 1930. Entre 1991 et 1993, le PIB suédois a ainsi diminué de 5 %. Dans un tel contexte, il est difficile d’estimer quel a été l’effet de cette réforme fiscale de grande ampleur sur les recettes fiscales et la distribution des revenus. Ainsi, les évaluations existantes sont essentiellement des évaluations ex ante reposant sur des méthodes de simulation. L’idée était de mener des études simulant à partir de données antérieures à 1991 la structure socio-fiscale avant et après la réforme, et de faire des hypothèses sur les réactions comportemen- tales que devaient induire ces changements majeurs de législation socio-fiscale. De telles simulations avaient pour but de raisonner à conjoncture économique don- née.

Les effets sur les recettes fiscales et la redistribution. L’une des volontés du

gouvernement suédois de l’époque était de mener une réforme à budget constant. Ainsi, les baisses de recettes fiscales dues aux baisses de taux marginaux devaient être compensées par un élargissement des bases fiscales d’un ensemble large de

Évaluation d’impact de la fiscalité des dividendes

prélèvement obligatoires. Selon les prévisions gouvernementales de l’époque (Agell et al., 1996, voir), la baisse des taux marginaux de taxation sur les revenus devait réduire les recettes fiscales de 6 à 7 % du PIB. La suppression d’avantages fis- caux devait compenser cette baisse : 40 % de cette récupération devait être due à l’élargissement de la base fiscale relative aux revenus du capital, et 30 % à l’élar- gissement de la base de la TVA à taux plein. De telles prévisions laissent entrevoir, derrière cet objectif de neutralité budgétaire, une réallocation importante des pré- lèvements obligatoires entre agents économiques.

L’étude de Björklund et al. (1995) vise à estimer ces effets redistributifs, en si- mulant un coefficient de Gini avant et après réforme, à conjoncture économique inchangée. Leur premier résultat est une stabilité de ce coefficient entre les deux systèmes socio-fiscaux. Néanmoins, la stabilité de cet indicateur cache une hété- rogénéité importante entre revenus du travail et revenus du capital : alors que la redistribution opérée via la taxation du travail devient moins importante (du fait notamment de taux marginaux supérieurs moins élevés), la suppression des nom- breux avantages fiscaux liés aux revenus du capital rend la taxation du capital plus redistributive, et ce malgré la baisse des taux marginaux.

Les effets sur les comportements d’offre de travail des ménages. Blomquist

et al. (2001) procèdent au même exercice quelques années plus tard, en employant des méthodes statistiques plus récentes (méthodes non-paramétriques). Ils uti- lisent des données sur la période 1973-1990. À partir de ces données pré-réforme sont estimées des réactions comportementales relatives à l’offre de travail des agents. Les auteurs montrent, pour cette catégorie de comportement, une hausse des heures travaillées de 2,2 %, qui au total ne sont pas suffisantes pour atteindre la neutralité budgétaire (baisse de 3 % des recettes fiscales) et qui n’empêchent pas une hausse des inégalités. Plusieurs autres contributions ont étudié les réactions comportementales de la réforme de 1991 sur l’offre de travail ou sur les revenus

Chap. 2 – Expérience internationale

du travail (Klevmarken, 2000; Hansson, 2007).

Les effets sur les revenus du capital et l’investissement. En revanche, les tra-

vaux portant sur les effets de cette réforme sur les réactions relatives aux revenus du capital et aux réactions des entreprises sont plus rares. Les dispositifs d’avan- tages fiscaux supprimés concernant essentiellement les revenus du capital, la ré- forme de 1991 traite de manière très hétérogène les différents modes de détention du capital. La complexité de cette réforme, combinée au manque de données dis- ponibles à l’époque, et à la crise économique intervenant à la même période, rend délicate l’étude des revenus du capital dans le contexte de la réforme de 1991, avec néanmoins plusieurs tentatives d’évaluation.

Auerbach et al. (1995) cherchent aussi à quantifier le rôle de la réforme sur la chute de l’investissement des entreprises suédoises observée à partir de 1991. Les auteurs modélisent les changements du coût du capital résultant de la réforme, qui selon leurs résultats sont d’ampleur trop limitée pour expliquer la baisse observée de l’investissement.

Même si les effets agrégés sur les coûts de détention du capital sont relative- ment faibles, il n’en reste pas moins que la nature de cette réforme entraîne poten- tiellement un changement de l’allocation du patrimoine des ménages, du fait de la convergence des taux marginaux effectifs des différentes catégories de revenus du capital. Le principal changement de cette réforme est la hausse de la fiscalité sur les revenus fonciers relativement à la fiscalité sur les revenus des actifs financiers (du fait notamment des baisses de déduction des intérêts d’emprunt et de l’inclu- sion dans la TVA des dépenses afférentes au logement). Les comptes nationaux suédois pointent une hausse de 13 points de pourcentage du ratio entre l’endet- tement pour acquisition d’actifs et le revenu disponible de 1988 à 1992, alors que le taux d’épargne associé à l’acquisition d’actifs non-financiers baisse de 8 points de pourcentage sur la même période (Agell et al., 1996). Ces chiffres suggèrent un

Évaluation d’impact de la fiscalité des dividendes

déplacement du patrimoine des ménages des actifs non-financiers vers du patri- moine financier. Agell et al. (1995) avancent qu’un tiers de ces changements ma- croéconomiques sont imputables à la réforme fiscale de 1991.