Universit´e Claude Bernard–Lyon I CAPES de Math´ematiques : ´epreuve 2 Ann´ee 2006–2007
CAPES blanc 21/12/2006
Le probl`eme s’articule autour du groupe engendr´e par les matrices U =
1 2 0 1
et V =
1 0 2 1
.
Apr`es une premi`ere partie de pr´eliminaires, on montre qu’il est libre, ce qui conduit au premier dessin ; on l’utilise pour ´enum´erer les triplets pythagoriciens, solutions enti`eres de l’´equation c´el`ebre : x2+ y2= z2, avec l’arbre du deuxi`eme dessin.
On se place “dans” l’ensemble des nombres complexes C. Quand il sera question de g´eom´etrie, on consid`erera C comme un plan affine euclidien orient´e, de la fa¸con usuelle. On identifiera un
“point du plan” et son “affixe”.
On note P1 = C ∪ {∞} l’ensemble obtenu en ajoutant un ´el´ement not´e ∞ `a l’ensemble des nombres complexes C. On ´etend partiellement les op´erations de C `a P1 par les conventions :
∀a ∈ C, a + ∞ = ∞ + a = −∞ = ∞, a
∞ = 0.
Noter que 0 × ∞, ∞ − ∞ et 0/0 ne sont pas d´efinis.
Soit GL2(C) le groupe des matrices 2×2 complexes inversibles et, pour A = a b c d
∈ GL2(C), hA: P1 −→ P1
z 7−→
az + b
cz + d si z ∈ C et cz + d 6= 0,
∞ si z ∈ C et cz + d = 0, a/c si z = ∞ et c 6= 0,
∞ si z = ∞ et c = 0.
Avec les conventions sur le calcul avec ∞, et en ´ecrivant hA(∞) = a +∞b
c +∞d = a c,
on r´eunit toutes les formules en une seule : hA(z) = (az + b)/(cz + d) pour tout z ∈ P1. Une homographie est une application de P1 dans P1 de la forme hA. Par abus, on appellera parfois homographie la restriction d’une telle application `a certaines parties.
I G´en´eralit´es sur les homographies I.A Composition d’homographies
I.A.1) V´erifier que si A et A0 sont deux ´el´ements de GL2(C), on a : hA◦ hA0 = hAA0.
I.A.2) En d´eduire que l’ensemble des homographies est un sous-groupe du groupe des bijec- tions de P1. En particulier, on d´eterminera l’application r´eciproque d’une homographie.
I.A.3) V´erifier que pour tout A ∈ GL2(C) et tout λ ∈ C∗, on a : hA= hλA.
I.A.4) Inversement, montrer que si A et A0 sont deux ´el´ements de GL2(C) tels que hA= hA0, il existe λ ∈ C tel que A0 = λA.
I.B Homographies et birapport
Etant donn´e quatre complexes distincts z1, z2, z3 et z4, on d´efinit leur birapport par : [z1, z2, z3, z4] = z1− z3
z1− z4
×z2− z4
z2− z3
.
Cette d´efinition s’´etend `a quatre ´el´ements de P1. Par exemple, on a : [∞, 0, 1, z4] = z4. On fixe quatre complexes distincts z1, z2, z3 et z4.
I.B.1) Montrer qu’il existe une unique homographie h telle que h(z1) = ∞, h(z2) = 0, h(z3) = 1.
I.B.2) Que vaut h(z4) ?
I.B.3) Soit g une homographie. Notons, pour i ∈ {1, 2, 3, 4}, zi0 = g(zi) et h0 l’homographie telle que h0(z10) = ∞, h0(z20) = 0, h0(z03) = 1. Montrer sans calculs que h = h0◦ g, et en d´eduire que l’on a :
[g(z1), g(z2), g(z3), g(z4)] = [z1, z2, z3, z4].
I.C Homographies et cercles
Rappel : quatre points distincts A, B, C, D sont cocycliques ou align´es si, et seulement si (−→\
AC,−−→
AD) ≡ (−−→\ BC,−−→
BD) [π].
I.C.1) V´erifier que quatre points sont cocycliques ou align´es si, et seulement si leur birapport est r´eel.
I.C.2) En d´eduire que l’image d’un cercle ou d’une droite par une homographie est un cercle ou une droite.
I.C.3) Exemple
On note j l’homographie d´efinie par
∀z ∈ P1\ {0, ∞}, j(z) = 1
z ; j(0) = ∞ ; j(∞) = 0.
a. Montrer que j envoie la droite {z ∈ C : Re z = 1} sur le cercle de centre 12 et de rayon 12 (priv´e de 0).
b. Montrer que pour s > 1, j envoie la droite Ds= {z ∈ C : Re z = s} sur un cercle contenu dans le disque ouvert Q+ d´elimit´e par le cercle pr´ec´edent (priv´e de 0).
c. En d´eduire que j envoie le demi-plan P+= {z ∈ C : Re z > 1} sur le disque ouvert Q+. d. Donner sans justification l’image de la droite {Re z = −1} et du demi-plan {Re z < −1}.
II Le groupe Γ(2) = hu, vi : un groupe libre
On note u = hU et v = hV les homographies d´efinies par :
∀z ∈ P1, u(z) = z + 2, v(z) = z 2z + 1.
On note Γ(2) le groupe engendr´e par u et v dans le groupe des homographies. On note aussi P−= {z ∈ C, Re z < −1}, P+ = {z ∈ C, Re z > 1}, P0= {z ∈ C, −1 < Re z < 1},
Q−=
z ∈ C,
z +1 2
< 1 2
, Q+=
z ∈ C,
z −1 2
< 1 2
, Q0= C \ Q+∪ Q−. II.A Le groupe Γ(2)
On note Γ0 l’ensemble des homographies de la forme wk11w2k2· · · wnkn, o`u n ∈ N∗, (w1, . . . , wn) ∈ {u, v}n et (k1, . . . , kn) ∈ Zn.
II.A.1) D´emontrer que Γ0 est un sous-groupe du groupe des homographies et que Γ0= Γ(2).
II.A.2) Soit g ∈ Γ(2)\{Id}. D´emontrer qu’il existe un entier n ∈ N∗, ainsi que (w1, . . . , wn) ∈ {u, v}n et (k1, . . . , kn) ∈ Z∗n tels que
g = w1k1wk22· · · wnkn et ∀i ∈ {1, . . . , n − 1}, wi 6= wi+1. II.B Action de u et v sur certains disques
II.B.1) Repr´esenter sur un dessin P+, P−, Q+, Q− et F = P0∩ Q0.
II.B.2) V´erifier que l’image de P0 par une puissance quelconque non nulle uk, k 6= 0 de u est contenu soit dans P+, soit dans P−, selon le signe de k.
II.B.3) On note j l’homographie d´efinie par j(z) = 1/z. V´erifier que juj−1= v.
II.B.4) On a vu en I.C.3) que j(P±) = Q±. Qu’en d´eduit-on sur vk(Q0), pour k ∈ Z, k 6= 0 ? II.B.5) En d´eduire que
∀k ∈ N∗, ∀ε, η ∈ {+, −}, uεk(Qη) ⊂ Pε et vεk(Pη) ⊂ Qε. II.C Libert´e de Γ(2)
II.C.1) Soit n ∈ N∗, (w1, . . . , wn) ∈ {u, v}n et (k1, . . . , kn) ∈ Z∗n tels que wi 6= wi+1 pour 1 ≤ i ≤ n − 1. On pose g = wk11w2k2· · · wknn.
a. D´emontrer que g envoie F = P0∩ Q0 dans un des disques P+, P−, Q+, Q−. b. En d´eduire que g n’est pas l’identit´e.
II.C.2) Soit n, n0 ∈ N∗, (w1, . . . , wn) ∈ {u, v}n, (w01, . . . , wn00) ∈ {u, v}n0 et (k1, . . . , kn) ∈ Z∗n, (k01, . . . , k0n0) ∈ Z∗n0 tels que wi 6= wi+1 et w0i6= w0i+1 pour 1 ≤ i ≤ n0− 1.
On suppose que w1k1wk22· · · wnkn = w0 k110w0 k202· · · w0 kn0n00 .
D´emontrer que n = n0, (w1, . . . , wn) = (w10, . . . , w0n0) et (k1, . . . , kn) = (k10, . . . , kn00).
II.D Domaine fondamental Soit
H = {z ∈ C : Im z > 0}.
Dans cette question, on montre que les images de l’adh´erence F de F par les ´el´ements de Γ(2) recouvrent H.
On fixe z ∈ H, et on note
Oz = {g(z) : g ∈ Γ(2)} et Iz = {Im z0 : z0 ∈ Oz}
II.D.1) Montrer que pour g ∈ Γ(2) et z ∈ H, on a : Im g(z) = Im z
|cz + d|2.
II.D.2) Soit ε > 0. Montrer que l’ensemble Iz∩ [ε, +∞[ est fini.
(Indication : |cz + d| ≥ |c Im(z)| et |cz + d| ≥ |d| − |cz|.)
II.D.3) En d´eduire que l’ensemble Iz poss`ede un ´el´ement maximal.
II.D.4) Soit z0 ∈ Oz un ´el´ement dont la partie imaginaire est maximale. V´erifier qu’il existe g ∈ Γ(2) tel que −1 ≤ Re g(z0) ≤ 1 et Im g(z0) = Im z0.
II.D.5) Soit z00 ∈ Q+. Montrer que Im v(z00) > Im z00. Donner sans d´emonstration un ´enonc´e analogue pour Q−.
II.D.6) En d´eduire que g(z0) ∈ F .
II.D.7) Montrer enfin que z est l’image d’un ´el´ement de F par un ´el´ement de Γ(2).
III Le groupe ˜Γ = Ker(P SL2(Z) → P SL2(Z/2Z) On rappelle que
U =
1 2 0 1
et V =
1 0 2 1
. III.A Le groupe ˜Γ, un groupe presque libre
On note M2(Z) l’ensemble des matrices 2 × 2 `a coefficients entiers et Γ =˜
a b c d
∈ M2(Z) : ad − bc = 1, a ≡ d ≡ 1 [2], b ≡ c ≡ 0 [2]
. III.A.1) Montrer que ˜Γ est un sous-groupe de GL2(C) contenant U et V .
III.A.2) Soit a et c deux entiers non nuls tels que |a| 6= |c|. V´erifier que l’un des deux entiers
|a| − 2|c|
et
|c| − 2|a|
est strictement plus petit que max(|a|, |c|).
III.A.3) On d´efinit une fonction δ : ˜Γ → N par : δ(A) = max(|a|, |c|) si A =
a b c d
.
a. V´erifier que pour tout A ∈ ˜Γ, on a : δ(A) ≥ 1.
b. Montrer que pour tout A ∈ ˜Γ, si δ(A) > 1, il existe W ∈ {U, U−1, V, V−1} tel que δ(W A) < δ(A).
III.A.4) Montrer, par r´ecurrence sur δ(A), que pour tout A ∈ ˜Γ \ {Id}, il existe ε ∈ {−1, 1}, r ∈ N∗, (W1, . . . , Wr) ∈ {U, V }r et (k1, . . . , kr) ∈ Z∗r tels que
A = ε W1k1W2k2· · · Wrkr et ∀i ∈ {1, . . . , n − 1}, Wi 6= Wi+1.
III.A.5) En utilisant I.A.4) et II.C.2), montrer qu’une telle d´ecomposition est unique.
III.B Compl´etions d’une colonne
III.B.1) Soit m, n ∈ Z avec m ∧ n = 1. Montrer qu’il existe p, q ∈ Z tel que mq − np = 1.
III.B.2) On suppose que m est impair et n est pair. Montrer qu’il existe (p, q) ∈ Z2 tel que
m p n q
∈ ˜Γ.
III.B.3) Plus pr´ecis´ement, soit (p, q), (p0, q0) ∈ Z2. Montrer que les matrices A =
m p n q
et A0 =
m p0 n q0
appartiennent `a ˜Γ, si, et seulement s’il existe k ∈ Z tel que A0 = AUk. III.C La bijection Φ
On note Φ : ˜Γ → ˜Γ, A 7→ DAD−1, o`u D =
−1 0
0 1
. Calculer Φ(A) en fonction de A.
IV Enum´eration des triplets pythagoriciens
On appelle triplet pythagoricien (TP) un triplet (x, y, z) ∈ Z3 d’entiers tel que x2+ y2= z2.
On dira qu’un TP est primitif (x, y, z) si x, y et z sont premiers entre eux dans leur ensemble, positif si x, y et z sont strictement positifs.
IV.A R´eduction aux TP primitifs
IV.A.1) V´erifier que tout TP diff´erent de (0, 0, 0) est de la forme (dx0, dy0, dz0), o`u d ∈ N∗ et (x0, y0, z0) est un TP primitif.
IV.A.2) Montrer que si (x, y, z) est un TP primitif, alors x, y et z sont premiers entre eux deux `a deux, et que x et y sont de parit´e diff´erente. (En particulier, z est impair.)
IV.B Param´etrage des TP primitifs
Soit t ∈ R et 1 + 2it un point de la tangente en 1 au cercle unit´e. On note Z l’intersection du cercle unit´e et de la droite contenant −1 et 1 + 2it.
IV.B.1) Faire un dessin.
IV.B.2) Quelle relation y a-t-il entre t et l’argument de Z ? En d´eduire que l’on a : Z = 1 − t2
1 + t2 + 2t 1 + t2 i.
IV.B.3) Montrer que t est rationnel si, et seulement si les parties r´eelle et imaginaire de Z sont rationnelles.
IV.B.4) En d´eduire que (x, y, z) est un TP primitif si, et seulement s’il existe m, n ∈ Z, premiers entre eux et de parit´es diff´erentes, tels que
x = m2− n2 y = 2mn z = m2+ n2
ou
x = 2mn y = m2− n2 z = m2+ n2. IV.C Enum´eration des TP primitifs positifs
On note T l’ensemble des TP primitifs positifs (x, y, z) dont le premier ´el´ement x est impair, et on consid`ere l’application
f : Γ˜ −→ T
m p n q
7−→ |m2− n2|, 2|mn|, m2+ n2 . IV.C.1) V´erifier que f est surjective.
IV.C.2) V´erifier que, pour A, A0 ∈ ˜Γ, on a :
f (A) = f (A0) ⇐⇒ ∃ε ∈ {−1, 1}, ∃k ∈ Z, A0 = εAUk ou A0 = εΦ(A)Uk. IV.C.3) Montrer que tout ´el´ement de T est l’image par f d’un unique
Uk1V`1Uk2Vk2· · · UksV`s, o`u s ≥ 1, k1 ∈ Z, k2, · · · , ks∈ Z∗, `1, . . . , `s−1∈ Z∗, `s∈ N∗.
Commentaires picturaux : Le premier dessin de l’introduction repr´esente F et ses images par les ´el´ements de Γ(2), vus apr`es application de l’homographie h : z 7→ (z − i)/(z + i).
Quant `a l’arbre pour param´etrer T , il commence ainsi :
f (V )
-
@@
@@@R
f (V2)
1 PPPPP-q
f (U−1V )
1 PPPPP-q f (U V )
1 PPPPP-q
f (V−1U V ) f (U2V ) f (V U V ) f (U V2) f (V3) f (U−1V2) f (V U−1V ) f (U−2V ) f (V−1U−1V )