Mathématiques
Composition n o 5
17 janvier 2011
de 9h15 à 12h15
Ensembles, applications, dénombrement et structures algébriques élémentaires
Ï L’usage de la calculatrice est interdit durant l’épreuve.
Ï Le candidat attachera la plus grande importance à la clarté, à la précision et à la concision de la rédaction.
Ï Si le candidat découvre en cours d’épreuve ce qu’il croît être une erreur d’énoncé, il le préci- sera dans sa copie.
Ï L’épreuve comporte un problème de combinatoire et cinq exercices sur les ensembles, les applications et les structures algébriques élémentaires.
Problème
Dérangements d’un ensemble fini
Soientn∈N∗etEun ensemble fini de cardinaln.
Ï On note
E =©
f :E→E¯¯ f bijective et∀x∈E, f(x)6=xª On noteun=card(E) et on adopte la conventionu0=1.
Ï On rappelle qu’un point fixe d’une applicationf :F →F est un élémentxde l’ensembleF tel que f(x)=x.
Ï Dans ce problème, on dénombre les bijections deEdansEsans point fixe. Ces applications sont appelées lesdérangementsdeE. On cherche donc à calculer le cardinal deE.
Partie 1 — Préliminaires
1. 1. Calculeru1.
1. 2. On suppose dans cette question que nÊ2. Soit a∈E. 1. 2. a. Soit f ∈E. Montrer que f−1(a)6=a.
1. 2. b. Soit f ∈E telle que f(a)=f−1(a). Démontrer que la restriction de f àE\©
a,f−1(a)ª est une bijection sans point fixe deE\©
a,f−1(a)ª
surE\©
a,f−1(a)ª . 1. 2. c. Soit f ∈E telle que f(a)6=f−1(a). Soitx∈E\ {a}, on pose
g(x) =
½f(x) six6=f−1(a) f(a) six=f−1(a) Démontrer queg est une bijection sans point fixe deE\ {a} surE\ {a}.
Partie 2 — Calcul deun
Nous avons maintenant tous les éléments en main pour calculer unen fonction de n.
2. 1. Déduire de ce qui précède que
∀nÊ2, un=(n−1)·(un−1+un−2) 2. 2. On pose∀kÊ1,αk=uk−k·uk−1. Montrer que
∀kÊ1, αk=(−1)k On pourra raisonner par récurrence surk∈N∗.
2. 3. En déduire que
∀nÊ1, un=n!· Xn k=0
(−1)k k!
On fera apparaître un telescopage dans la somme grâce à la question précédente.
Exercice 1 — Posé à l’oral de l’Ecole Polytechnique en 2010 dans la filière PC
SoientEun ensemble et A,B,C dansP(E). Etablir que
A∪B∪C=(A\B)∪(B\C)∪(C\A)∪(A∩B∩C) On rappelle queA\B désigneA∩B oùB est le complémentaire deB dansE.
Exercice 2 — Injections et surjections
SoientA,B etCdes ensembles, f :A→Betg:B→Cdeux applications. Démontrer que : 1. Sig◦f est surjective etg injective, alors f est surjective,
2. Sig◦f est injective et f surjective, alorsg est injective.
Exercice 3 — La structure de groupe produit Soient (G,⋆) et (H,⋄) deux groupes. Pour tous couples (g,h) et¡
g′,h′¢
du produit cartésienG×H, on pose
(g,h)♥¡ g′,h′¢
=¡
g⋆g′,h⋄h′¢ Montrer que (G×H,♥) (prononcez «love») est un groupe.
Exercice 4 — Cas particulier du théorème de Jacobson
Soit (A,+,×) un anneau tel que
∀x∈A, x3=x
L’objectif de cet exercice est de prouver que (A,+,×) est commutatif. On notera plus simplement x y le produitx×y.
1. Rappelez la définition de la structure d’anneau.
2. Montrer que∀x∈A, 6x=0A. On pourra développer (x+1A)3+(x−1A)3. 3. Soient
A2={x∈A|2x=0A} et A3={x∈A|3x=0A}
3.a. Soitx∈A. En partant de l’égalitéx=3x−2x, établir quex∈A2+A3. 3.b. En déduire queA=A2+A3.
4. Les éléments de A2commutent.
4.a. Montrer queA2est une partie deAstable par+.
4.b. Soitx∈A2. Développer (x+1A)3et vérifier que 3x2+3x=0A. 4.c. Soitx∈A2. Déduire de ce qui précède quex2+x=0 puisx2=x.
4.d. Montrer que les éléments deA2commutent. On pourra développer (x+y)2pourxety appartenant au sous-ensembleA2.
5. Produits d’éléments de A2et de A3. Soientx∈A2ety∈A3. 5.a. Prouver quex×yety×xappartiennent àA2∩A3. 5.b. Vérifier queA2∩A3={0A}.
6. Les éléments de A3commutent. SoientxetydansA3. 6.a. En considérant (x+y)3−(x−y)3, vérifier que
x y×x+y x2+x2y=0A (⋆)
6.b. En multipliant parxdans l’égalité (⋆) une première fois à droite puis une seconde fois à gauche, montrer quex y=y x.
7. Montrer que (A,+,×) est commutatif.
Exercice 5 — Posé à l’oral de Centrale en 2010 dans la filière PSI
Soit (A,+,×) un anneau dont les éléments neutres pour+et×seront respectivement notés 0 et 1.
Soientaetbdeux éléments deAtels que 1+a×b soit inversible pour la loi×. Montrer que 1+b×aest inversible pour la loi×et que son inverse est égal à 1−b×(1+a×b)−1×a.
THE END
Corrigé du problème Dérangements d’un ensemble fini
Partie 1 — Préliminaires
1. 1. Sicard(E)=1, l’unique élément deE est l’identité, d’oùu1=0.
1. 2. On suppose dans cette question que nÊ2. Soit a∈E.
1. 2. a. Raisonnons par l’absurde en supposant f−1(a)=a. On obtient alors, en appliquantf : a=f(a). Ceci est absurde car f n’admet aucun point fixe.
1. 2. b. Soit f ∈E telle que f(a)=f−1(a). Notonsfe:E\©
a,f−1(a)ª
−→E\©
a,f−1(a)ª x 7−→ f(x)
Ï Puisquefeest la restriction de f à un sous-ensemble deEet puisque les uniques antécédents deaet f−1(a) parf sont respectivementf−1(a) eta, l’applicationfeest bien définie.
Ï fen’a pas de point fixe puisque
∀x∈E\©
a,f−1(a)ª
, fe(x)=f(x)6=x Ï L’applicationfeétant la restriction d’une bijection, elle est injective.
Ï f étant une surjection deEdansE, tout élément deE\©
a,f−1(a)ª
admet un unique
antécédent dansE parf, et d’après ce qui a été vu précédemment, cet antécédent appartient à E\©
a,f−1(a)ª .
1. 2. c. Soit f ∈E telle que f(a)6=f−1(a). Soitx∈E\ {a}, on pose
g(x) =
½f(x) six6=f−1(a) f(a) six=f−1(a)
Ï Soitx∈\{a}. Six=f−1(a), on ag(x)=f(a)6=a(carf est sans point fixe) et six6=f−1(a), on a g(x)=f(x) et doncg(x)6=apuisquef−1(a) est l’unique antécédent deapar f. Ainsig est bien définie.
Ï g n’a pas de point fixe puisque f−1(a)6=f(a) et∀x∈\©
a,f−1(a)ª
, g(x)=f(x)6=xcar f n’a pas de point fixe.
Ï Soientxetx′deux éléments deE\ {a} tels queg(x)=g(x′).
⊲ six6=f−1(a) etx′6=f−1(a), alorsf(x)=f(x′) d’où, par injectivité de f,x=x′.
⊲ six=f−1(a), alorsg(x)=f(a) et nécessairementx′=f−1(a) car
∀z∈E\©
a,f−1(a)ª
, g(z)=f(z) et puisqueaest l’unique antécédent de f(a) parf. On en déduit l’injectivité deg.
⊲ Siy6=f(a),yadmet par f un unique antécédentxqui appartient àE\{a,f−1(a)} ainsig(x)=y. On en déduit la surjectivité deg.
Partie 2 — Calcul deun
2. 1. Soitf ∈E. Commef(a)∈E\ {a}, il y an−1 choix possibles pourf(a). Pour chacun de ces choix def(a), dénombrons les applicationsf ∈E telles que :
Ï Cas 1 : f(a)=f−1(a). D’après la question 1.1.b., cela revient à dénombrer les bijections sans points fixes deE\ {a,f−1(a)} surE\ {a,f−1(a)}, il y en a doncun−2.
Ï Cas 2 : f(a)6=f−1(a). D’après la question 1.2.c., cela revient à dénombrer les bijections sans points fixes deE\ {a} surE\ {a}, il y en a doncun−1.
On a ainsi
∀nÊ2 ,un=(n−1)·(un−2+un−1) 2. 2. SoitnÊ1. D’après la formule établie à la question , on a
αn+1=un+1−(n+1)·un=n·(un+un−1)−n·un−un=nun−1−un= −αn La suite (αn)nÊ1est donc géométrique de raison−1, ainsi∀nÊ1,αn=(−1)n−1α1. Or α1=u1−u0= −1, on a donc
∀nÊ1, αn=(−1)n 2. 3. D’après la question précédente,
∀kÊ1, (−1)k k! =uk
k! − uk−1 (k−1)!
d’où
∀nÊ1, Xn k=1
µuk
k! − uk−1 (k−1)!
¶
=un
n! −u0= Xn k=1
(−1)k k! et puisqueu0=1, on obtient :
un n! =
Xn k=0
(−1)k k!
Corrigé de l’exercice 1 — Posé à l’oral de l’Ecole Polytechnique en 2010 dans la filière PC
Raisonnons par double inclusion.
Ï On aA\B⊂A,B\C⊂B,C\A⊂Cdonc
(A\B)∪(B\C)∪(C\A)⊂A∪B∪C d’où, puisqueA∩B∩C⊂A∪B∪C,
(A\B)∪(B\C)∪(C\A)∪(A∩B∩C)⊂A∪B∪C
Ï Soitx∈A∪B∪C. On suppose quex6∈A∩B∩C. Alors il n’y a que six cas possibles (qui ne sont pas deux à deux disjoints) :
⊲ x∈Aetx∈B: dans ce casx6∈Cd’oùx∈B\C;
⊲ x∈Aetx6∈B : dans ce casx∈A\B;
⊲ x∈B etx∈C: dans ce casx6∈Ad’oùx∈C\A;
⊲ x∈B etx6∈C: dans ce casx∈B\C;
⊲ x∈Cetx∈A: dans ce casx6∈B d’oùx∈A\B;
⊲ x∈C etx6∈A: dans ce casx∈C\A.
Dans tous les casx∈(A\B)∪(B\C)∪(C\A). On en déduit que
(A∪B∪C) \ (A∩B∩C)⊂(A\B)∪(B\C)∪(C\A) puis
(A∪B∪C)⊂(A\B)∪(B\C)∪(C\A)∪(A∩B∩C)
Corrigé de l’exercice 2 — Injections et surjections
1. On supposeg◦f surjective etg injective. Soitb∈Barbitraire. Alorsg(b)∈Cet commeg◦f est surjective, il existea∈Atel queg(f(a))=g(b). Par injectivité deg on déduit f(a)=b, ce qui montre la surjectivité def.
2. On supposeg◦f est injective et f surjective. Soientb,b′∈B tels queg(b)=g(b′). Par surjectivité def il existea,a′∈Atels que f(a)=betf(a′)=b′. Ainsi
g(f(a))=g(b)=g(b′)=g(f(b′)), d’oùb=b′, grâce à l’injectivité deg◦f. Cela montre queg est injective.
Corrigé de l’exercice 3 — La structure de groupe produit
NotonseGeteHles éléments neutress des groupes (G,⋆) et (H,⋄).
Ï La loi♥est, par définition, interne surG×H. Ï Pour tout (g,h) dansG×H, on a
½(g,h)♥(eG,eH)=¡
g⋆eG,h⋄eH¢
=(g,h) (eG,eH)♥(eG,eH)=(eG⋆eG,eH⋄h)=(g,h) Le couple (eG,eH) est donc un élément neutre pour la loi surG×H.
Ï Pour tout (g,h), (g′,h′) et (g′′,h′′) dansG×H, on a
¡(g,h)♥(g′,h′)¢
♥(g′′,h′′)=¡
g⋆g′,h⋄h′¢
♥(g′′,h′′)=¡
(g⋆g′)⋆g′′, (h⋄h′)⋄h′′¢
=¡
g⋆(g′⋆g′′),h⋄(h′⋄h′′)¢
=(g,h)♥¡
g′⋆g′′,h′⋄h′′¢
=(g,h)♥¡
(g′,h′)♥(g′′,h′′)¢
Ï Soit (g,h)∈G×H. Nous noteronsg−1(resp.h−1) l’ inverse deg (resp.h) pour la loi⋆(resp.⋄).
On a
(g,h)♥¡
g−1,h−1¢
=¡
g⋆g−1,h⋄h−1¢
=(eG,eH) et
¡g−1,h−1¢
♥(g,h)=¡
g−1⋆g,h−1⋄h¢
=(eG,eH) On en déduit que (g,h) est inversible pour la loi♥et que son inverse vaut¡
g−1,h−1¢ . L’ensemble (G×H,♥) a donc une structure de groupe.
Corrigé de l’exercice 4 — Cas particulier du théorème de Jacobson
1. On appelle anneau tout ensembleAmuni de deux LCI notées+et×telles que (A,+) est un groupe commutatif,×admet un élément neutre dansA,×est associative,×est distributive à droite et à gauche sur+.
2. Soitx∈A. On a
(x+1A)3=x3+3x2+3x+1A=x+1A et
(x−1A)3=x3−3x2+3x−1A=x−1A
d’où, après addition membre à membre, 2x3+6x=2xsoit encore 2x+6x=2xie 6x=0.
3. Egalité A2+A3=A.
3.a. Soitx∈A. Commex=3x+(−2x) avec 2(3x)=6x=0Aet 3(−2x)= −6x=0A, on a 3x∈A2et
−2x∈A3, d’oùx∈A2+A3.
3.b. On a clairementA2+A3⊂Acar+est une LCI surA. L’inclusion réciproque ayant été prouvée à la question précédente, on aA2+A3=Apar double inclusion.
4. Les éléments de A2commutent.
4.a. Soient (a,a′)∈A22. Comme 2(a+a′)=(a+a′)+(a+a′)=2a+2a′car+est associative et commutative, on a 2(a+a′)=0A+0A=0A. Ainsia+a′∈A2. Le sous-ensembleA2est donc stable par la loi+.
4.b. Soitx∈A2. On a
(x+1A)3=x3+3x2+3x+1A=x+1A et commex3=x, on a 3x2+3x=0A.
4.c. Soitx∈A2. Commexetx2appartiennent àA, on a
3x=2x+x et 3x2=2x2+x2=(2x)×x+x2=0A×x2+x2=0A+x2=x2 et doncx2+x=0A. Commex= −x(car 2x=0A), on en déduit quex2=x.
4.d. SoientxetydansA2. CommeA2est stable par+,x+y∈A2et donc, d"’après la question précédente, (x+y)2=x+y, d’où
(x+y)2=x2+x y+y x+y2=x+x y+y x+y=x+y ainsix y= −y x=y xcary x∈A2. Les élémentsxetycommutent.
5. Produits d’éléments de A2et A3. Soientx∈A2ety∈A3.
5.a. On a 2(x y)=(2x)y=0Ay=0Adoncx y∈A2. De plus, 3(x y)=x(3y)=x0A=0Adoncx y∈A3. On prouve de même quey x∈A2∩A3.
5.b. On remarque queA2∩A3={0A}. On a clairement 0A∈A2∩A3et, pour touta∈A2∩A3, 2a=3a=0Adonc
a=3a−2a=0A
6. Les éléments de A3commutent. SoientxetydansA3. 6.a. On a
(x+y)3−(x−y)3=¡
x2+x y+y x+y2¢
×(x+y)−¡
x2−x y−y x+y2¢
×(x−y)
=2x y x+2y x2+2x2y+2y3
Comme (x+y)3−(x−y)3=x+y−x−y=2y=2y3, on en déduit que 2x y x+2y x2+2x2y=0A
puis−x y x+ −y x2−x2y=0Acar 2x= −xet 2y= −y(carxetyappartiennent àA3). Ainsi x y x+y x2+x2y=0A.
6.b. On a
x y x2+y x3+x2y x=¡
x y x+y x2+x2y¢
x=0Ax=0A d’oùx y x2+y x+x2y x=0Acarx3=x. De plus, on a
x2y x+x y x2+x3y=x¡
x y x+y x2+x2y¢
=x0A=0A
d’oùx2y x+x y x2+x y=0Acarx3=x. On en déduit quex y=y x.
7. SoientxetydansA. CommeA=A2+A3(cf. question 3.b.), il existe (x2,y2)∈A22et (x3,y3)∈A23 tels quex=x2+x3ety=y2+y3. Ainsi
x y=(x2+x3)(y2+y3)=x2y2+x2y3+x3y2+x3y3=x2y2+x3y3
et
y x=(y2+y3)(x2+x3)=y2x2+y2x3+y3x2+y3x3=y2x2+y3x3
cary3x2=x2y3=x3y2=y2x3=0Apuisquex2y3,x3y2,y2x3etx3y2appartiennent àA2∩A3={0A} (cf. question 5). De plus,x2y2=y2x2(cf. question 4) etx3y3=y3x3(cf. question 6). On en déduit alors quex y =y x. L’anneau (A,+,×) est donc commutatif.
Corrigé de l’exercice 5 — Posé à l’oral de Centrale en 2010 dans la filière PSI
On a, par distributivité à droite et à gauche de×sur+: (1+b×a)ס
1−b×(1+a×b)−1×a¢
=¡
1−b×(1+a×b)−1×a¢
+b×aס
1−b×(1+a×b)−1×a¢
=1−bס
(1+a×b)−1−1+a×b×(1+a×b)−1¢
×a
=1−bס
−1+(1+a×b)×(1+a×b)−1¢
×a
=1−b×(−1+1)×a=1−b×0×a=1−0=1
carb×0=0 et 0×a=0 (cf. les règles de calcul dans un anneau). On prouve de même que
¡1−b×(1+a×b)−1×a¢
×(1+b×a)=1