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Article pp.659-674 du Vol.22 n°6 (2002)

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Les besoins en calcium et vitamine D durant la grossesse et la lactation

Bernard SALLE

Le calcium est un élément extracellulaire, contrairement au magnésium ou au phosphore. Il joue un rôle au niveau du squelette, puisqu’il en représente la matrice, mais aussi dans beaucoup d’autres fonctions : la conduction nerveuse, la division cellulaire chez le fœtus, la perméabilité membranaire, la contractibilité musculaire et les activités enzymatiques. Les activités enzymatiques ou les sécrétions de certaines hormones ne pourraient se faire sans calcium. L’insu- line, par exemple, ne peut être sécrétée que si la calcémie et le taux de calcium ionisé sont normaux.

RÉGULATION DU CALCIUM

Plus de 99 % du calcium se trouve dans l’os, au niveau du squelette. Une légère fraction se trouve dans les cellules et dans le liquide extracellulaire : chez un sujet possédant 1 000 g de calcium au niveau de son squelette seuls 1 000 mg de calcium sont retrouvés au niveau du liquide extracellulaire. Cepen- dant, le calcium du liquide extracellulaire est important car il relie les apports et le squelette et permet de conserver une calcémie stable (2,4 à 2,6 mmol/L ou 10 mg/dL). Le calcium est présent sous deux formes : une forme liée aux pro- téines (en particulier à l’albumine) et une forme libre (ionisée). Le calcium ionisé, ultra filtrable, représentant à peu près 60 % de la calcémie totale, assure le rôle physiologique. C’est lui, et non pas le calcium total, que régulent les hormones.

Aussi, il peut exister une calcémie normale avec un taux bas en calcium ionisé : un enfant peut alors convulser alors que sa calcémie est sensiblement normale

Titulaire de la Chaire de nutrition Danone 2000-2001, Chef du service de néonatalogie et de réanimation néo-natale de l’hôpital Édouard Herriot, Lyon.

Correspondance Bernardsalle@wanadoo.fr

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(cas des hypoalcaloses). De la même façon, un sujet peut avoir une hypocalcé- mie (observée chez la femme enceinte) alors que son taux en calcium ionisé est normal. Cette hypocalcémie n’induit donc aucun effet physiologique. Ainsi, lors d’un dosage de la calcémie, il faut également doser l’albuminémie car il existe un rapport entre calcémie, albuminémie et calcium ionisé. La présence d’une pathologie calcique et de certaines pathologies impose le dosage du calcium ionisé.

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La régulation du calcium est réalisée essentiellement par deux hormones qui régulent la calcémie et le calcium ionisé : la vitamine D et la parathormone. La vitamine D est une vitamine, bien qu’elle ne soit pratiquement pas apportée par l’alimentation mais synthétisée au niveau de la peau (ce qui est contraire à la définition d’une vitamine). Elle est surtout apportée par des produits médica- menteux (vitamine D2). Cette vitamine, synthétisée au niveau de la peau sous les effets des ultraviolets, est transportée jusqu’au foie (sous forme de vitamine D3) où elle est hydroxylée sur le carbone 25 en 25(OH)D. La 25(OH)D donne un reflet du pool vitaminique du sujet. La corrélation est de 10 à 1 entre le taux de D3 ou de D2circulant et le taux de 25(OH)D plasmatique circulant mais il est aussi beaucoup plus facile de doser la 25(OH)D que de doser la vita- mine D. Le statut en vitamine D d’un sujet est toujours établi en référence au statut en 25(OH)D du sujet. Il faut 10 mL de sang pour doser la D3, D2alors que pour la 25(OH)D, le dosage est radio immunologique : il suffit de 10 à 15 µL. La 25(OH)D est transportée par une β-lipoprotéine et est hydroxylée sur le carbone 1 au niveau du tube contourné proximal rénal. La forme active de l’hor- mone ainsi obtenue est la 1,25(OH)2D (1,25 dihydroxyvitamine D). La 1,25(OH)2D est une hormone et son taux plasmatique dépend de trois facteurs :

– le taux de calcium ionisé dans le liquide extracellulaire. Il existe des récep- teurs calciques sur certaines cellules et, en particulier, au niveau du tube contourné proximal et au niveau des parathyroïdes ;

– le taux de parathormone circulant. La parathormone (PTH) est l’hormone qui stimule la synthèse de 1,25(OH)2D. Lors d’un état d’hyperparathyroïdie,

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en particulier chez la femme ménopausée, l’élévation du taux de PTH sti- mule la synthèse de 1,25(OH)2D ;

– le taux de phosphore circulant. Il faut une hypophosphorémie importante pour que la synthèse de 1,25(OH)2D soit stimulée.

ORGANES CIBLES DE LA 1,25(OH)2D

La 1,25(OH)2D est l’hormone de l’absorption intestinale du calcium et du phosphore (mais pas de l’absorption du magnésium). Avec la PTH, elle mobilise le calcium et le phosphore du cristal osseux d’hydroxyapatite : elle déminéralise donc l’os mais elle le minéralise aussi car il existe des récepteurs sur l’ostéo- blaste. La 1,25(OH)2D agit aussi sur les parathyroïdes : la sécrétion de 1,25(OH)2D entraîne une diminution de la synthèse de PTH. Et inversement, une diminution de la sécrétion de 1,25(OH)2D permet une sécrétion de PTH : en fait, un phénomène de feed-back existe entre la sécrétion de 1,25(OH)2D et de PTH.

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Organes cibles de la parathormone (d’après CHAPUYet MEUNIER).

La PTH joue un rôle au niveau de l’os et du rein et, indirectement, de l’intes- tin (par la synthèse de 1,25(OH)2D). Elle augmente la réabsorption tubulaire du calcium et, comme nous venons de le voir, elle augmente la résorption osseuse.

Elle détruit l’os en stimulant l’ostéoclaste qui va résorber le cristal d’hydroxy- apatite. Ces deux hormones assurent la régulation calcique : ainsi, le calcium ionisé est l’élément central régulateur qui va stimuler, par sa baisse, la sécrétion de PTH et la synthèse de 1,25(OH)2D. La PTH sécrétée va aussi stimuler la sécrétion de 1,25(OH)2D. D’une part, ces deux hormones agissent sur l’os en le détruisant pour augmenter le taux de calcium circulant et, d’autre part, la 1,25(OH)2D stimule l’absorption intestinale du calcium. Grâce à ces deux phé- nomènes, la calcémie remonte. Puis, lorsque le calcium ionisé atteint un certain taux, le taux de PTH s’écroule, par réduction de sa synthèse et le taux de 1,25(OH)2D s’abaisse : la calcémie chute alors progressivement. La chute de calcémie entraîne une nouvelle sécrétion de PTH… On considère que toutes les 3 minutes, nous subissons un basculement entre diminution et augmentation du taux de calcium. Toutes les 3 minutes, nous sécrétons de la PTH et synthéti- sons de la 1,25(OH)2.

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Le taux normal de 1,25(OH)2D, chez un individu, se situe entre 60 et 80 nmol/L mais en réalité le taux plasmatique dépend du niveau de calcémie et de la sécrétion de PTH.

FEMME ENCEINTE

On peut se demander si la femme enceinte doit être supplémentée en cal- cium et en vitamine D, et quelles sont les relations avec son fœtus ?

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L’homéostasie du calcium.

Pitkin, grâce une étude transversale (avec des femmes à différentes étapes de la grossesse) publiée en 1975-1976, a été le premier à montrer qu’il existe une chute du calcium sanguin chez la femme enceinte. En revanche, le taux de

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calcium ionisé reste normal pendant toute la grossesse. De même, le taux de magnésium plasmatique chute, lui aussi, puis remonte au moment de l’accou- chement. Il en est de même pour l’albumine dont le taux redevient normal dès l’accouchement. L’hypothèse de Pitkin est que la chute des taux de calcium et de magnésium est due à l’hypervolémie, elle-même expliquant la chute de l’al- bumine (car 40 % du calcium est fixé sur l’albumine). En revanche, le taux de calcium ionisé ne varie pas : les taux de PTH et de 1,25(OH)2D devraient donc être normaux pendant la grossesse. Grâce à une étude longitudinale portant sur 14 femmes, nous avons observé que, durant le dernier trimestre de la grossesse, la calcémie est dans les limites normales basses (2,1 à 2,2 mmol/L). De plus, chez la femme enceinte, il existe une augmentation de l’excrétion urinaire de cal- cium mais cette hypercalciurie diminue rapidement après l’accouchement.

Les premiers travaux dans les années 1981-1982 concernant le dosage de la 1,25(OH)2D (c’est-à-dire l’hormone circulante), ont montré que la femme enceinte avait un taux très élevé de 1,25(OH)2D circulante situé entre 200 et 300 pmol/L (taux doublé voire triplé par rapport à la normale).

Concentration sérique (pg/mL, µ±écart type) Références

Enceinte Non enceinte

KUMARet al. 87,1 ±9,6a 52,8 ±4,9a STEICHENet al. 63,0 ±11,0 29,0 ±2,0b LUNDet SEINES 84 ±8,0 35,0 ±9,1 BOUILLONet al. 97 ±26 45 ±14 FLEISCHMANNet al. 61,0 ±6,4 29,0 ±2,0b BROWNet al. 87,7 ±11,2 29,4 ±1,9 GERTNERet al. 77,1 ±10,0a 38,5 ±9,6

aÉcart type calculé à partir des données de l’article.

bValeurs obtenues par documentation et utilisées par les auteurs.

Concentrations sériques moyennes en 25OHD, 1,25 (OH)2D et BGP ±écart type durant le dernier trimestre et à l’accouchement

Grossesse Accouchement

Valeurs

contrôles 28 semaines 32 semaines 36 semaines

n = 13 n = 10 n = 10 n = 13

25OHD 55-75 51,5 ±6,7 50,6 ±7,5 46,8 ±7,5 37,4 ±6,4*

(nmol/L)

1,25(OH)2D 62-82 191,3 ±11,7 225,2 ±17,2 199,1 ±21,5 179,9 ±16,8 (pmol/L)

BGP 0,68-1,02 0,37 ±0,09 0,15 ±0,03 0,28 ±0,15 0,27 ±0,07 (nmol/L)

ND = 5 ND = 5 ND = 7 ND = 6

* p < 0,01 en comparaison aux valeurs à 28 semaines ; ND : non détectable.

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On pensait qu’il n’était pas possible qu’une femme puisse vivre avec des concentrations élevées de 1,25(OH)2D : en effet, une concentration plasmatique élevée de 1,25(OH)2D signifie une mobilisation du calcium au niveau de l’os.

Chez 14 femmes enceintes, nous avons suivi longitudinalement la 1,25(OH)2D plasmatique : dès 28 semaines de gestation, le taux est situé entre 200 et 225 pmol/L (les valeurs contrôles sont de 60 à 80 pmol/L). C’est-à-dire prati- quement de 2,5 fois la normale.

Ce taux élevé de 1,25(OH)2D pourrait signifier que ces femmes sont en état d’hyperparathyroïdie.

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En observant la courbe de 25(OH)D plasmatique, les valeurs apparaissent faibles et diminuent avec la grossesse, ce qui témoigne d’un transfert au fœtus.

Ainsi, sans supplémentation en vitamine D pendant la grossesse, les taux plas- matiques observés correspondraient à des niveaux de déficience.

Taux sériques moyens en calcium, phosphore et iPTH ± écart type lors du dernier trimestre et à l’accouchement

Grossesse À

Valeurs l’accou-

contrôles 28 semaines 32 semaines 36 semaines chement

n = 13 n = 10 n = 10 n = 14

Ca (mmol/L) 2,2-2,6 2,23 ± 0,02 2,21 ± 0,23 2,23 ± 0,34 2,17 ± 0,02 P (mmol/L) 0,82-1,42 1,11 ± 0,01 1,09 ± 0,01 1,1 ± 0,01 1,11 ± 0,01 iPTH (pg/mL)

53,84 20-45 42,0 ± 8 45,6 ± 8,94 50,2 ± 5,3 48,0 ± 7,3

44,88 80-220 80,8 ± 19 64 ± 8,8 62,6 ± 8,6 95,4 ± 15,6

1,84 20-65 8,6 ± 1,7 9,7 ± 1,6 11,3 ± 2 18 ± 4,2

Le dosage de la PTH chez ces 14 femmes a été effectué de trois façons dif- férentes. Le dosage de la 1,84, l’hormone entière, montre qu’il n’y a pas d’élé-

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vation de son taux : ainsi il n’existe pas d’état d’hyperparathyroïdie. Après l’ac- couchement, le taux de 1,25(OH)2D chute en quatre jours et revient à la nor- male, ce qui évoque une origine placentaire de la synthèse de 1,25(OH)2D.

Différentes parties du placenta ont été incubées avec de la 25(OH)D et ont confirmé que les cellules déciduales du côté maternel étaient responsables de la synthèse de 1,25(OH)2D.

Ainsi, la femme enceinte est en état d’hypocalcémie sans hyperparathyroïdie mais présente un taux élevé de 1,25(OH)2D, ce qui a pour effet de positiver la balance calcique. Il est admis qu’elle absorbe à peu près 200-250 mg/j de cal- cium par jour, qu’elle transfère à son fœtus. On considère que le fœtus, au moment de sa phase de minéralisation (entre 24 et 28 semaines) reçoit entre 200 et 300 mg de calcium chaque jour (WODDOSOM). Mais une question se pose : la femme extrait-elle le calcium de son squelette ? Les études faites de 1976 à 1995 ne montraient aucun changement concernant les dosages du contenu minéral osseux (BMC) avec l’absorptiométrie monophotonique pendant la grossesse. Le dernier travail de J.KINGà Los Angeles, a porté sur une étude de mesure du contenu minéral osseux total et au niveau de la colonne lombaire avant et après la grossesse (il est, en effet, impossible de faire du DXA pendant la grossesse du fait de l’irradiation par des rayons X). Chez 16 femmes enceintes, le BMC total en grammes ne montre aucune différence avant et juste après l’accouchement. De même, il n’existe également aucune différence du BMC au niveau de la colonne lombaire. Seul au moment de l’allaitement une chute du contenu minéral osseux total se produit : ce n’est donc qu’après l’al- laitement que la femme regagne son capital osseux.

Masse osseuse mesurée pendant la grossesse et en post-partum

Études Techniques Nombre Temps

Résultats

de mesures de cas de mesure

CHRISTIANSEN, SPA 13 4-5, 5-6, Aucun

1976 7-8 et 9- changement

10esmois

LAMKE, Rayons X 14 1erou début du Perte pour os

1977 Spectro- 2etrimestre et trabéculaire

photométrie post-partum mais pas pour

le cortical DRINKWATER, SPA, DPA 6 Préconception et Perte dans le radius

1991 post-partum et col fémoral,

augmentation dans le tibia

SOWERS, DPA 32 Préconception et Aucun changement

1991 post-partum

KENT, SPA 37 14 et Aucun changement

1993 38essemaines

CROSS, SPA 10 Préconception et Aucun changement

1995 1ermois

PRENTICE, DXA 16 Préconception et Aucun changement

1993 post-partum

DXA : absorptiométrie à rayons X double énergie ; SPA : absorptiométrie monophotonique ; DPA : absorptiométrie biphotonique.

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La femme enceinte transfère 20 g de calcium à son fœtus durant le dernier trimestre de la gestation car c’est au cours du dernier trimestre que la minérali- sation du squelette du fœtus s’effectue. Une très bonne corrélation existe entre la calcémie maternelle et la calcémie cordonale.

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Transfert placentaire

Le taux de calcium cordonal est toujours plus élevé que le taux de calcium maternel et il est corrélé à celui de la mère (cf. figure). Il faut retenir que, lors- qu’un nouveau-né possède une calcémie basse à la naissance, la calcémie de la mère doit être vérifiée avant d’affirmer que l’enfant est en hypocalcémie. Le calcium traverse le placenta grâce à un transfert actif : le taux de calcium étant plus élevé chez le fœtus que chez la mère. Mais il faut savoir que le calcium tra- verse également dans l’autre sens : il a été calculé, grâce à du calcium marqué

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stable, que lorsqu’il passe 150 mg/kg/j de calcium (soit 300-350 mg/j) de la mère vers son fœtus, environ 25 mg passent du fœtus à la mère.

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La 25(OH)D passe la barrière placentaire : il existe une très bonne corrélation entre le pool vitaminique de la mère et de son fœtus. Contrairement à la 1,25(OH)2D, le phosphore, lui aussi, passe la barrière placentaire.

Entre 20 et 40 ans la balance du calcium est à l’équilibre. Les apports recommandés en calcium chez l’adulte sont d’environ 1 000 mg/j. Environ 30 % sont absorbés mais les échanges journaliers entre le liquide extra-cellulaire et l’os sont d’environ 500 mg. Ainsi, la sécrétion de PTH doit, d’une part, être per- manente et journalière car il faut que les ostéoclastes soient en permanence sti- mulés et, d’autre part, que les ostéoblastes compensent et minéralisent le squelette. La balance, entre les pertes urinaires et l’absorption intestinale, doit s’équilibrer (balance à zéro) : ainsi ce sont 300 mg qui sont absorbés au niveau de l’intestin, 125 mg qui passent dans le liquide extra-cellulaire et 175 mg qui sont excrétés par la voie urinaire. Cette balance n’existe pas chez l’enfant jus- qu’à 20 ans, sa balance étant positive, ni chez l’adulte après 30 ans, la balance devenant négative, surtout chez la femme. La femme enceinte, en revanche, doit absolument avoir une absorption intestinale augmentée : elle a besoin de 200 à 300 mg de calcium pour compenser le passage transplacentaire et les pertes urinaires. Ainsi, sur le plan physiologique, tout est parfaitement clair : la femme enceinte augmente son taux de 1,25(OH)2D afin d’augmenter son absorption intestinale.

La grossesse de l’adolescente est plus problématique : elle doit, non seule- ment, donner du calcium à son fœtus, mais son squelette est également en période de croissance jusqu’à 20 ans. On ne peut, en effet, accumuler du cal- cium que jusqu’à cet âge. Il faut donc que l’apport calcique de l’adolescente enceinte soit beaucoup plus élevé que les 1 000 mg recommandés habituelle- ment, même si l’absorption intestinale de calcium est augmentée.

Le statut en vitamine D de la mère a-t-il une influence sur son fœtus puis sur le nouveau-né ?

Il existe une corrélation entre le statut vitaminique maternel, le poids de nais- sance et la minéralisation osseuse du fœtus (cf. tableau). Concernant le BMC, mesuré par DXA à la naissance, les résultats montrent que le taux est de 66, 70 et 80 g aux États-Unis et d’environ 55 g en Europe. Le travail de NANGUNG a

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également montré une différence significative, chez des Sud-Coréens, entre les enfants qui naissent en hiver et ceux qui naissent en été.

Plus le statut vitaminique D de la mère est élevé et plus le nouveau-né peut s’adapter dès la naissance à une privation calcique. Aux États-Unis, toutes les femmes ont un statut vitaminique D normal car les margarines et produits lai- tiers sont enrichis en vitamine D. En Europe, les produits laitiers ne le sont pas pour le moment : le statut vitaminique D des femmes en Europe est bas. Ainsi, en France, les apports en vitamine D des femmes sont insuffisants.

Une étude (MAXWELLet al., 1981) a montré que si 25 µg de vitamine D sont administrés au dernier trimestre de la grossesse, en comparaison à un groupe contrôle sans administration, aucun nouveau-né ne présente d’hypocalcémie et la minéralisation osseuse est meilleure. De même, DELVINet SALLE(1985), ont montré que, chez l’enfant à terme, le nombre d’hypocalcémies néo-natales pré- coces est diminué dans le groupe de femmes ayant reçu 1 000 UI/j de vitamine D pendant le dernier trimestre de la grossesse. Aussi il est recom- mandé de donner 10 à 25 µg (400 à 1 000 UI) pendant le dernier trimestre de la grossesse. Il faut plus particulièrement penser à en donner aux végétariennes, aux mères noires (qui synthétisent moins bien la vitamine D), à celles qui ne se mettent pas au soleil (très fréquent chez les femmes enceintes) et aux femmes vivant dans des pays où les produits laitiers ne sont pas enrichis en vitamine D.

Chez la femme allaitante, c’est la prolactine qui est à l’origine de la montée de la sécrétion lactée. Les taux plasmatiques de 1,25(OH)2D, de PTH et de cal- cium sont normaux chez la femme enceinte. L’élément intéressant est que la PTH-RP ou PTH-Related Peptide (sécrétée par des tumeurs bénignes ou malignes) est synthétisée par les glandes mammaires. Le taux de PTH-RP est très élevé dans le plasma et dans le lait. Ainsi, dans le lait, sa concentration est 1 000 fois plus élevée que celle du plasma maternel. Le taux de PTH-RP est corrélé au taux de prolactine. Or les récepteurs de la PTH-RP sont les mêmes que ceux de la PTH : ainsi l’élévation du taux de cette PTH-RP pourrait jouer un rôle dans la mobilisation du calcium osseux de la femme allaitante et expliquer la diminution du BMC total rapporté par KING.

La figure ci-après montre que, pendant l’allaitement, une déminéralisation apparaît au niveau du col fémoral et de plus faible importance au niveau du ©Lavoisier – La photocopie non autorisée est un délit

Influence du statut maternel en vitamine D sur le contenu minéral total (DXA) d’enfants nés à terme

Pays n BMC (g)

KOO(JBMR, 1996) États-Unis 65 66,2 ± 10,2

VANKATAMARAN(AJDC, 1994) États-Unis 28 80,05 ± 6,6 PICAUD(AJCN, 1996) Belgique 30 54,6 ± 6 LAPILLONNE, SALLE France 60 55,5 ± 18 (Acta Paediatr.,1997)

NANGUNG(J. Pediatr., 1998) Corée

Hiver 34 86,7 ± 7,7

Été 37 93,9 ± 7,8

p < 0,0002

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corps total. L’os trabéculaire est toujours la partie la plus touchée. Lors d’une augmentation du taux de PTH, c’est toujours l’os trabéculaire qui est déminéra- lisé et non l’os cortical. Lorsque les femmes arrêtent l’allaitement, tout semble revenir à la normale sauf, peut-être, pour le col fémoral.

Peut-on faire une relation entre l’ostéoporose post-ménopausique et la lac- tation ? Le tableau ci-dessous ne semble pas montrer de relation entre allaite- ment et gravité de l’ostéoporose post-ménopausique.

Relation entre lactation et densité osseuse dans des études croisées de femmes préménopausées ou ménopausées

Nom Lactation Techniques Sites Effet sur

de mesure la masse osseuse

GOLDSMITH, Toujours (n = 362) SPA Radius Aucun

1975 vs nullipare (n = 341)

JOHNELL, Tout le temps SPA Radius Aucun

1984

SOWERS, Toujours (n = 12) SPA Radius Aucun

1985 vs jamais (n = 74)

WARDKAW, Peu de temps (n = 10) SPA Radius Peu

1986 vs longtemps (n = 11) à long terme

KOETTING, 1-2 enfants (n = 10) SPA Radius Aucun

1988 3-4 enfants (n = 8) DPA Hanche Aucun

Nullipare (n = 10) Colonne Aucun

vertébrale

FELDBLUM, Tout le temps SPA, DPA Colonne Peu

1992 vertébrale

Radius Aucun

SPA : absorptiométrie monophotonique ; DPA : Absorptiométrie biphotonique.

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Effet de la lactation sur la variation du contenu minéral osseux maternel chez des femmes britanniques

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L’étude de 1992 montre qu’il existe peut-être une atteinte au niveau de la colonne lombaire mais pas au niveau du radius, ni au niveau du col du fémur.

Actuellement, il ne semble pas qu’il y ait d’atteintes osseuses sauf pour le col du fémur.

Apports quotidiens recommandés en vitamine D (UI/j) chez l’enfant et l’adulte

Âge France CEE États-Unis URSS

1-3 ans 400 400-600 400 400

4-9 ans 400 200-600 400 100

10-12 ans

filles 400 100-400 400 100

garçons 400 100-400 400 100

Adultes 400 100-400 400 100

Grossesse 800 400-600 1 200 500

Allaitement 600 400-600 400 500

1 µg = 40 UI.

Ce sont les laitages qui apportent surtout du calcium et, en particulier, le gruyère avec des teneurs de 1 000 mg de calcium pour 100 g, alors que le lait n’en apporte que 125 mg/100 g et 1 yaourt, 125 mg. Une femme enceinte n’a pas besoin d’une supplémentation calcique élevée : il lui suffit de manger des laitages. Le calcium du lait possède une bonne biodisponibilité : selon les études faites avec des adolescentes, le pic de densité osseuse serait mieux atteint avec des produits laitiers qu’avec la prise de calcium per os (BONJOUR).

Les légumes, le pain et la viande apportent peu de calcium. Seul l’œuf peut être intéressant avec des teneurs de 55 mg/100 g. Les fruits n’apportent pas de cal- cium. Ainsi, consommer des produits laitiers puis boire des eaux riches en cal- cium comme Talians® ou Hépar® qui apportent 400 à 500 mg/L de calcium reste la meilleure solution pour augmenter les apports calciques.

Teneur en calcium des principaux aliments (en mg pour 100 g)

Laitages Légumes Fruits

Lait 125 Pommes de terre 15 Agrumes 40

Yaourt 125 Haricots verts 40 Fruits rouges 40

Fromage blanc 130 Poireau 40 Poire, pomme 7

Camembert 180 Salade 30

Gruyère 1 000 Carotte 50

Pain 20 Viande 10

Œuf 55 Poisson 30

CHAPUYet MEUNIER. ©Lavoisier – La photocopie non autorisée est un délit

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Les sources alimentaires de vitamine D sont très faibles : un peu dans l’œuf et dans les huiles de foie de poisson. Les besoins des enfants et de la femme enceinte sont de 25 µg/j et après 60 ans, les besoins repassent à 25 µg/j.

QUESTIONS

Q1 : Certains nutritionnistes disent que le calcium contenu dans les laitages n’est pas absorbé car il est lié aux acides gras saturés et qu’il est donc trans- formé en savons.

Le calcium présent dans les laitages n’est pas lié aux acides gras saturés, il est lié à la caséine. Pourquoi est-il mieux absorbé dans les produits laitiers ? C’est justement grâce au fait qu’il soit lié à la caséine : le gruyère, quasiment uniquement constitué de caséine, est ainsi très riche en calcium. La caséine, dans l’estomac de l’adulte, est hydrolysée en peptides qui passent la bar- rière intestinale et lient des molécules de calcium. Il a ainsi été démontré pour de nombreuses personnes que le calcium des produits laitiers est plus biodisponible que le calcium seul.

Plus on ingère de calcium et moins l’absorption intestinale est efficace. Il est bien démontré que dans les pays où les femmes reçoivent entre 200 à 300 mg/j de calcium, 80 % de ce calcium est absorbé. Chez les femmes qui en reçoivent 1 200 à 1 500 mg/j, l’absorption n’est plus que de 20 %. L’ab- sorption intestinale du calcium dépend du contenu intestinal. Il existe ainsi une régulation (dont on ne connaît pas le fonctionnement) entre les apports et l’absorption de calcium.

Q2 : Et le calcium des eaux ?

Il est absorbé à condition que ces eaux soient consommées en dehors des repas et en particulier la nuit. Des études récentes ont montré que les eaux minérales ont une bonne biodisponibilité du calcium.

Q3 : En combien de temps les réserves osseuses de la mère se reconstituent- elles après l’allaitement ?

Le pool calcique est rétabli en trois à six mois. À partir du deuxième mois, les teneurs en calcium dans le lait vont chuter. Les femmes qui allaitent ne touchent donc pas leur capital osseux. Les besoins du nourrisson en cal- cium étant très faibles, l’enfant ne sera donc pas carencé par un allaitement prolongé.

Q4 : Est-ce que les différences de position de palmitate ont une signification compte tenu de la différence de minéralisation observée et est-ce qu’il est plus important d’avoir des protéines du lactosérum, de la caséine ou du calcium que du palmitate en position 2 ?

Dans les triglycérides du lait maternel, l’acide palmitique est en position 2 alors que dans les laits de vache il est en position 1 ou 3. Quand sont réali-

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sées des balances de graisses (mesure de la rétention de triglycérides), en position 2, l’acide palmitique est absorbé à 90 %, tandis qu’en position 1 et 3, il ne l’est qu’à 40 % à 50 %. Si des acides gras sont excrétés, l’excré- tion calcique augmente car il y a formation de savons insolubles. Une mau- vaise absorption de l’acide palmitique crée un savon insoluble qui va précipiter le calcium dans la lumière intestinale. C’est vrai chez le prématuré.

Si l’acide palmitique est mis en position 2, la balance calcique du prématuré est bien meilleure. Il serait donc intéressant de mettre du palmitate en posi- tion 2 dans les formules pour nourrissons, mais c’est très cher. Après les deux à trois premiers mois de vie, il n’existe plus de problèmes d’absorption des graisses.

Q5 : Est-ce qu’il existe des périodes critiques pendant lesquelles l’accrétion calcique est plus importante pour le devenir de l’enfant sur le plan calcique ?

Cinq études ont montré que le contenu minéral osseux à 12 ans est quasi- ment normal. Mais en observant précisément, c’est toujours la minéralisation du col du fémur qui est diminuée.

Q6 : Est-ce que l’apport en phosphore modifie l’apport en calcium et qu’en est-il dans l’alimentation du rapport phosphore/calcium ?

Il y a, d’une part, assez de phosphore dans l’alimentation : il n’est donc pas nécessaire d’en donner. D’autre part, les balances métaboliques faites ont montré qu’en changeant le rapport Ca/P, on ne changeait rien à l’absorption du phosphore et pas grand-chose à celle du calcium.

Q7 : N’y a-t-il pas un danger de mettre en valeur le calcium des produits lai- tiers en regards des conséquences que ça peut avoir au niveau cardio-vascu- laire ?

Chez le sujet jeune, donner des produits riches en acides gras saturés a peu d’incidence, semble-t-il. Chez l’adulte et les sujets plus âgés, les produits laitiers devraient être sans matières grasses.

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