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Oncologie : Article pp.243-245 du Vol.3 n°4 (2009)

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Psycho-Oncol. (2009) 3:243-245 DOI 10.1007/s11839-009-0156-7

EXTRAIT DE COMMUNICATION

Spécificités de la prise en charge d ’ un adolescent en fin de vie à domicile

J. Guiot · C. Vaquin

© Springer-Verlag 2009

La prise en charge d’un adolescent en fin de vie à domicile nécessite l’implication du médecin traitant, auquel peuvent s’ajouter différents protagonistes comme un réseau de soins palliatifs.

Le réseau de soins palliatifs vise à coordonner le parcours thérapeutique du patient entre la ville et l’hôpital, afin

« d’améliorer la qualité de sa prise en charge à domicile, grâce à une meilleure continuité, une coordination et une proximité des soins dans leur globalité [4] ». Il intervient dans l’expertise médicale et paramédicale, et réalise une évaluation médicopsychosociale auprès du patient.

Cette organisation est entièrement financée par la Mission régionale de santé (réunissant l’URCAM et l’ARH), via le Fonds d’intervention pour la qualité et la coordination des soins (FIQCS).

En termes de fonctionnement, le réseau de soins palliatifs intervient sur le terrain avec une équipe salariée pluridisci- plinaire, en partenariat étroit avec l’ensemble des profes- sionnels sanitaires et sociaux du territoire, comme les professionnels hospitaliers, les libéraux, les assistantes sociales, les mairies et les maisons de retraite.

Ces suivis à domicile engendrent une intervention spécifique en termes de temps, de soins, d’« investisse- ment » de la part des professionnels de santé libéraux, intervention actuellement non prévue dans la nomenclature.

Dans ce sens, une expérimentation régionale francilienne a été organisée par les tutelles (ARHIF, URCAMIF), les CPAM et les réseaux de soins palliatifs. Elle vise à mettre en place des « rémunérations spécifiques » pour des actes réalisés par les médecins, les infirmiers et les psychologues intervenants auprès du patient concerné.

Les modalités d’inclusion au sein d’un réseau de soins palliatifs sont : la gravité de la maladie, l’accord du patient

et de son médecin traitant, et qu’il réside sur le territoire du réseau de santé. Si ces modalités sont réunies, le malade et son entourage bénéficient des services du réseau.

L’équipe salariée, qui intervient directement auprès du patient, est composée généralement de médecins coordina- teurs, d’infirmiers coordinateurs et de psychologue coordi- nateur ; elle organise des visites régulières à domicile.

Ces visites s’organisent par une première visite dite

« visite d’inclusion », au cours de laquelle le médecin coordinateur présente le rôle et le fonctionnement du réseau.

La visite d’inclusion permet au réseau d’acquérir une vision d’ensemble du patient, de son entourage et des conditions matérielles du domicile. Par la suite, l’équipe salariée réalise des visites régulières pour réévaluer l’état du patient et le soutenir avec sa famille dans cette épreuve.

Une demande d’un soutien psychologique peut être formulée, lors de l’inclusion ou durant le suivi, par le patient, son entourage, par un membre de l’équipe du domicile, de l’équipe hospitalière ou de l’équipe salariée du réseau. Cette demande, après analyse et discussion au sein de l’équipe salariée, peut aboutir, avec l’accord du patient, à une évaluation, par le psychologue coordinateur, de la nature de la demande et de la faisabilité du maintien à domicile dans le cadre de la prévention des conséquences psychopathologiques de l’entourage. Après cette évaluation psychologique, un suivi, par un psychologue libéral à domicile ou en cabinet, peut être proposé au patient et/ou à ses proches.

Dans le cas clinique présenté plus loin, la demande d’intervention du réseau de soins palliatifs est formulée par l’équipe hospitalière pour un soutien psychologique d’une adolescente en fin de vie (Mlle C.) et de sa famille, dans le cadre d’un retour à domicile.

Mlle C., née le 14 septembre 1990 (18 ans), habite chez ses parents en banlieue parisienne. Elle est l’aînée de deux sœurs de 15 et 13 ans.

Mlle C. est suivie dans un service de pédiatrie, dans un hôpital de la banlieue parisienne, pour une rechute de lymphome de Burkitt, traité par deux chimiothérapies à haute dose et greffe de cellules souches périphériques.

J. Guiot, psychologue clinicienne (*) · C. Vaquin, médecin généraliste (*)

Réseau EPSILON, 195, avenue du Général-Leclerc, F-78220 Viroflay, France

e-mail : juliette.guiot@hotmail.fr ; clementinevaquin@noos.fr

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Sa prise en charge est faite par l’équipe hospitalière. Durant tous les traitements curatifs, le médecin traitant semble avoir été très en retrait. L’état de Mlle C. se dégrade rapidement, présentant un syndrome occlusif et une insuffisance rénale terminale.

Le retour à domicile, souhaité par Mlle C., est organisé le 23 septembre avec l’HAD et le réseau de soins palliatifs.

Le médecin traitant de Mlle C. est prévenu par l’équipe hospitalière.

L’HAD organise le passage d’une infirmière, quatre fois par jour, pour l’administration des traitements et la toilette de Mlle C.

Le réseau de soins palliatifs propose à la famille une première visite dès le 23 septembre, mais les parents de Mlle C. préfèrent, pour l’instant, entretenir un lien uniquement téléphonique. Cette mise à distance du réseau est une tentative de mise à distance, par les parents, du pronostic létal. Les parents de Mlle C. tentent ainsi de se protéger de cette situation insupportable.

La visite d’inclusion n’aura finalement lieu que le 30 septembre à la demande des parents. La visite de réévaluation se déroule le lendemain en présence du reste de l’équipe, afin que la famille connaisse tous les intervenants susceptibles de répondre lors de l’astreinte de nuit. La psychologue coordinatrice, présente aux deux visites, constitue l’élément stable pour Mlle C. et sa famille.

Mlle C. mourra quelques heures plus tard, après un transfert en urgence à l’hôpital sur demande du réseau. Le motif de ce transfert est dû à un ensemble de dysfonction- nements résultant de l’intervention tardive du réseau dans ce suivi. En effet, un protocole de sédation a été prescrit, mais après un dysfonctionnement causant un retard de livraison des médicaments, la patiente était très douloureuse. Sa famille, ne réussissant pas à la soulager, a appelé l’astreinte du réseau de soins palliatifs dans la soirée. Ce dernier, en l’absence des médicaments, a pris la décision du transfert.

L’inclusion tardive, par le réseau, d’adolescent en phase terminale, est source de dysfonctionnements, car les protocoles mis en place habituellement nécessitent du temps et de la réflexion. Or, lorsque le signalement est tardif et qu’il concerne ce type de population, d’après notre expérience empirique, la charge et la pression émotion- nelles, très importantes, peuvent entraîner une paralysie intellectuelle. Ce retard d’introduction du réseau dans le parcours de soins de l’adolescent est très fréquent et semble spécifique pour les enfants et les adolescents. En effet, cette situation de fin de vie étant tellement insupportable pour les équipes soignantes, le signalement au réseau est fait très tardivement. Cependant, pour éviter tout dysfonctionne- ment, il est essentiel que le réseau soit introduit, le plus tôt possible, dans le parcours thérapeutique du patient.

Cette question du signalement tardif a aussi eu des conséquences sur le suivi psychologique de Mlle C. et de sa

famille. La demande de suivi psychologique n’a pu être suffisamment analysée par le psychologue coordinateur, et le lien avec le psychologue hospitalier n’a pas été fait. De plus, durant les visites au domicile, Mlle C., non soulagée sur le plan somatique, n’a pas été accessible à un entretien psychologique.

Par ailleurs, la faisabilité de la demande de retour à domicile de Mlle C. n’a pas été suffisamment élaborée sur le plan psychique pour la famille. Les souhaits réels des parents et des sœurs de Mlle C. n’ont pu être entendus, et leurs ressources psychiques nécessaires pour faire face à cette fin de vie à domicile n’ont pas été suffisamment évaluées. Les parents de Mlle C. ont voulu accéder à la demande de leur fille mais, sont extrêmement inquiets par la phase agonique, et ils ne se sont pas sentis capables d’assumer le décès à domicile.

Ce cas clinique interroge sur le fait d’accéder à la demande d’un adolescent et de la traiter. Peut-elle être entendue et avoir la même valeur que celle d’un adulte ?

D’un point de vue juridique, d’après la loi du 4 mars 2002, chapitre II, article 11, L. 1111-5 « Les intéressés ont le droit de recevoir eux-mêmes une information et de participer à la prise de décision les concernant, d’une manière adaptée soit à leur degré de maturité s’agissant des mineurs » […] « Le consentement du mineur ou du majeur sous tutelle doit être systématiquement recherché s’il est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision. Dans le cas où le refus d’un traitement par la personne titulaire de l’autorité parentale ou par le tuteur risque d’entraîner des conséquences graves pour la santé du mineur ou du majeur sous tutelle, le médecin délivre les soins indispensables ».

D’un point de vue empirique, le soignant, et notamment le psychologue, vont tenter de cerner les souhaits du patient et de son entourage afin de les aider à trouver un consensus concernant la demande de retour à domicile. Toutefois, l’accès à cette demande nécessite une évaluation psycho- logique des capacités psychiques de chacun pour affronter cette situation.

Dans le cas de Mlle C., l’expression de son désir n’a pu être exprimée qu’à travers un refus de soins (refus de pose de la sonde urinaire, refus de la toilette) dans les dernières heures avant son décès. Ce désir n’a pu être négocié, la patiente étant trop douloureuse et non communicante.

Ce désir imposé émane aussi de l’ambiance du domicile, qui était une ambiance de mort imminente. La maison avait perdu toute trace de vie, comme si elle se mettait au diapason avec Mlle C. Les visiteurs devaient marcher sur la pointe des pieds, voire ôter leurs chaussures pour ne pas faire de bruit ; l’odeur ambiante sentait le renfermé ; les lumières étaient tamisées, et les sœurs de Mlle C. étaient perpétuellement absentes, sans doute pour fuir la situation.

Les modifications du domicile s’expliquent aussi par l’envahissement de la sphère privée par l’univers médical.

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L’espace privé devient public, il subit une « publicisation » [1]. Le travail du réseau au domicile est donc aussi de tenter de trouver un équilibre entre le privé et le public, afin de préserver la vie au domicile.

Ce réaménagement de l’espace s’observe principalement, dans le cas de Mlle C., par l’échange de chambres entre Mlle C. et sa deuxième sœur pour des raisons essentielle- ment d’espace. Cette dépossession de cet espace intime qu’est la chambre d’une adolescente éclaire aussi l’absence d’une des sœurs. Elle perd le refuge qu’aurait pu être sa chambre.

En miroir de la question de la « publicisation » du domicile se pose celle du respect de la pudeur de l’adolescent. En phase terminale, les malades, et a fortiori les adolescents, épuisés physiquement, se trouvent souvent dans l’incapacité d’imposer le respect de leur pudeur. Les soins de conforts, qui justifient habituellement un accès direct au corps malade, livrent de fait ce corps à la vue et au toucher des soignants. Les procédures de soins vont à l’encontre de la problématique adolescente concernant le corps, le corps malade et sa dimension sexuelle. Le rapport au corps malade est très douloureux sur le plan narcissique et d’autant plus chez l’adolescent où tout est érotisé. Le regard du soignant pendant les soins suscite une certaine méfiance.

Comment regarde-t-il ce corps malade ? Est-ce qu’il le regarde comme un objet de désir ? Pour Mlle C., l’atmo- sphère de la chambre laissait subodorer cette problématique par la recherche d’un éclairage tamisé (rideaux tirés, lumière éteinte), contrastant avec la présence d’un simple drap ajusté par l’entourage, qui recouvrait la partie inférieure de son corps laissant sa poitrine et son crâne nus.

Le soignant est davantage exposé dans la prise en charge à domicile d’un adolescent en fin de vie, au monde des émotions et affects qui circulent. Il existe plus de familiarité avec le patient et ses proches. Toute la difficulté du soignant est de réussir à réaliser son art dans cette proximité. Il doit trouver la bonne distance qui doit être renégociée, à chaque rencontre, avec le patient. Le soignant doit éviter une position désaffectivée, la « cruelle distance » et une

empathie tellement grande qu’elle envahirait même les gestes techniques. Cet équilibre est d’autant plus complexe à trouver dans la prise en charge d’un adolescent, que sa mort est insupportable. Le soignant ne peut pas s’en protéger, car il ne doit pas s’y habituer.

Le réseau peut intervenir, ici, en offrant un lieu de réflexion aux praticiens libéraux et hospitaliers pour leur permettre de trouver cette bonne distance et les soutenir dans le suivi du patient [2,3,5].

Dans le cas de Mlle C., cette bonne distance n’a pu être trouvée au sein de l’équipe salariée. Les parents de Mlle C.

ne pouvaient pas la confier à l’équipe salariée pour l’examen clinique et l’entretien psychologique par manque de confiance. Face à cette famille qui faisait bloc avec le patient, l’équipe salariée a réagi par effet miroir, en tant que groupe. Chaque membre de l’équipe s’est trouvé dans l’impossibilité d’exercer son rôle.

Ce cas clinique a permis d’illustrer les difficultés rencontrées au domicile, lorsque le réseau de soins palliatifs est introduit tardivement dans le parcours thérapeutique d’un adolescent. Une intervention en amont aurait permis d’anticiper et de palier tous ces dysfonctionnements. Il est donc essentiel que le réseau de soins palliatifs intervienne en amont de la phase terminale de la maladie, pour que la mise en place des aides se fasse le plus facilement possible.

Références

1. Cludy L, Ellien F (2006) Accompagnement et suivi à domicile : expériences et réflexions. Revue doncologie, Springer, Paris 2. Dolbeault S, Dauchy S, Brédart A, Consoli SM (2007) La psycho-

oncologie. In: Seigneur E, ladolescent et le jeune adulte confronté au cancer. Éditions John Libbey Eurotext, Paris, pp. 10915 3. Dubois D, Robert P (2005) Les jeunes et les personnes âgées

atteints de cancer : des approches spécifiques. Actualités et dossier en santé publique 51:416

4. Ellien F (2006) Psychologue au domicile : pratiques singulières ou plurielles ? XIIeCongrès SFAP, Montpellier 1517 juin 2006 5. Oppenheim D (2003) Grandir avec un cancer. In: Oppenheim D,

Adolescence et cancer. De Boeck & Larcier, Bruxelles, pp. 3978

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