Universit´e Pierre & Marie Curie Master de math´ematiques 1
Ann´ee 2010-2011 Module MM020
Th´ eorie des Nombres - TD4 Loi de r´ eciprocit´ e quadratique
Exercice 1 : Pour quels nombres premiers pla classe de l’entier 7 modulop est-elle un carr´e ? Solution de l’exercice 1. Tout d’abord, il est clair que 7 est un carr´e modulo 2 et modulo 7.
Soit maintenant un nombre premier impairp6= 7. On ´ecrit la loi de r´eciprocit´e quadratique : p
7
7 p
= (−1)p−12 . On en d´eduit donc que
7 p
= 1 si et seulement si ( p7
= 1 etp≡1 [4]) ou ( p7
=−1 et p≡3 [4]).
Ecrivons la liste des carr´´ es non nuls modulo 7 : 1,2,4 mod 7 sont les carr´es non nuls modulo 7.
Alors la condition pr´ec´edente s’´ecrit ainsi : 7
p
= 1 si et seulement si (p≡1,2,4 [7] et p ≡1 [4]) ou (p≡3,5,6 [7] etp≡3 [4]).
Or le lemme chinois assure que l’on a un isomorphisme d’anneauxφ:Z/7Z×Z/4Z
∼=
−→Z/28Z, d´efini parφ(amod 7, b mod 4) := 8a−7b mod 28 (puisqu’une relation de Bezout s’´ecrit 4.2 + 7.(−1) = 1).
Donc les conditions pr´ec´edentes se traduisent ainsi :
7 p
= 1 si et seulement si p ≡ 1,9,25 [28] ou p≡3,19,27 [28].
Finalement, on a montr´e que pour tout nombre premierp, 7 est un carr´e modulop si et seulement si p≡1,2,3,7,9,19,25,27 [28],
si et seulement si
p= 2 ou p= 7 oup≡1,3,9,19,25,27 [28].
Exercice 2 : Expliciter la fonctionp7→
3 p
.
En d´eduire que la condition “3 est un carr´e modulo p” ne d´epend que de la classe de p modulo 12.
Solution de l’exercice 2. Notons pour simplifier f(p) :=
3 p
. D’abord, il est clair que f(3) = 1 et f(2) = 1.
Soit maintenant un nombre premierp≥5.
La loi de r´eciprocit´e quadratique assure que f(p) = p3
(−1)p−12 . Or les carr´es modulo 3 sont exacte- ment les classes de 0 et de 1. Par cons´equent, on a f(p) = 1 si et seulement si (p≡1 [3] et p≡1 [4]) ou (p≡2 [3] etp≡3 [4]).
Le lemme chinois assure qu’il y a un isomorphismeϕ:Z/3Z×Z/4Z
∼=
−→Z/12Zdonn´e parϕ(amod 3, bmod 4) = 4a−3bmod 12. Donc les conditions pr´ec´edentes sont ´equivalentes aux conditions suivantes :f(p) = 1
si et seulement sip≡1 [12] oup≡11 [12].
Finalement, on a montr´e que : 3
p
= 1 si et seulement si p= 2,3 oup≡1,11 [12]
et
3 p
=−1 si et seulement si p≡5,7 [12].
Exercice 3 : Soitp un nombre premier impair.
a) Montrer que
X
x∈F∗p
x p
= 0.
b) Soit ζp ∈ C une racine primitive p-i`eme de l’unit´e. On pose s := P
x∈F∗p
x p
ζpx. Montrer que s2 =
−1 p
p.
[Indication : on pourra montrer que s2 =P
x,y∈F∗p
y p
ζpx(y+1)]
c) En d´eduire que toute extension quadratique deQest contenue dans une extension cyclotomique (i.e. de la forme Q(ζn), o`u ζn est une racine primitive n-i`eme de l’unit´e).
Solution de l’exercice 3.
a) On noteS :=P
x∈F∗p
x p
. Puisquep >2, il existey∈F∗p tel que
y p
=−1. Alors le morphisme x7→yx est une bijection deF∗p dans lui-mˆeme, donc
S = X
x∈F∗p
x p
= X
x∈F∗p
yx p
= X
x∈F∗p
y p
x p
=− X
x∈F∗p
x p
=−S .
Donc 2S = 0 dansFp, doncS = 0 (carp6= 2).
b) On a
s2= X
x∈F∗p
X
y∈F∗p
xy p
ζpx+y.
Or pour tout x ∈ F∗p, l’application y 7→ xy est une bijection de F∗p dans lui-mˆeme. Donc pour tout x∈F∗p, on a
X
y∈F∗p
xy p
ζpx+y = X
y0∈F∗p
x2y0 p
ζpx+xy0 = X
y0∈F∗p
y0 p
ζpx(1+y0).
Par cons´equent, on en d´eduit que s2 = X
x,y∈F∗p
y p
ζpx(1+y)= X
y∈F∗p
y p
X
x∈F∗p
ζp1+yx
= X
x∈F∗p
−1 p
+ X
y∈F∗p\{−1}
y p
X
x∈F∗p
ζp1+yx
,
o`u la derni`ere ´egalit´e est obtenue en isolant le terme correspondant `a y = −1. Or pour tout y 6=−1,ζp1+y est une racine primitive p-i`eme de l’unit´e, doncP
x∈F∗p
ζp1+y
x
=−1, d’o`u s2 = (p−1)
−1 p
− X
y∈F∗p\{−1}
y p
=p −1
p
− X
y∈F∗p
y p
.
Par la question pr´ec´edente, la derni`ere somme est nulle, donc finalement s2 =
−1 p
p .
c) Cela se fait en plusieurs ´etapes. Remarquons d’abord que Q(√
2) ⊂ Q(ζ8) = Q(i,√
2) et que Q(√
−1) =Q(ζ4).
Soit maintenant un nombre premier impair p. La question b) assure que −1
p
p est un carr´e dans le corps Q(ζp) (c’est le carr´e de s∈ Q(ζp)). Par cons´equent, p est un carr´e dans le corps Q(i, ζp) =Q(ζ2p). Donc finalement, pour toutppremier impair, Q(√
p)⊂Q(ζ2p).
Soit maintenant une extension quadratique quelconque K/Q. On sait qu’il existe un entier sans facteur carr´ed∈Ztel queK=Q(√
d). On d´ecomposeden facteurs premiers : il existe∈ {±1}, s∈ {0,1}etp1, . . . , pr des nombres premiers impairs distincts, tels qued=2sp1. . . pr. Grˆace `a l’´etude pr´ec´edente, on a les inclusions suivantes :
Q(
√
d)⊂Q(√ ,
√ 2,√
p1, . . . ,√
pr)⊂Q(ζ8, ζ2p1, . . . , ζ2pr).
Finalement, on remarque queQ(ζ8, ζ2p1, . . . , ζ2pr) =Q(ζn), o`un= 8p1. . . pr, et on a bien montr´e que
K =Q(
√
d)⊂Q(ζn). Exercice 4 : Soitp un nombre premier impair.
a) Soitn∈Npremier `ap. Montrer qu’il existex, y∈Zpremiers entre eux tels quep|x2+ny2 si et seulement si
−n p
= 1.
b) V´erifier la formule suivante pour toutw, x, y, z, n∈Z:
(x2+ny2)(z2+nw2) = (xz±nyw)2+n(xw∓yz)2.
c) En d´eduire que si un entier N s’´ecrit N = x2 +ny2, et si un nombre premier q|N s’´ecrit q =z2+nw2 (w, x, y, z∈Z), alors l’entier Nq s’´ecrit aussi Nq =a2+nb2 (a, b∈Z).
d) On suppose que n= 1,2,3 et qu’il existe a, b∈Zpremiers entre eux tels quep|a2+nb2. i) Montrer que l’on peut supposer que|a|,|b|< p2 eta2+nb2< p2.
ii) En d´eduire qu’il existe x, y∈Z tels quep=x2+ny2. e) En d´eduire les ´enonc´es suivants :
i) un nombre premier impairpest somme de deux carr´es d’entiers si et seulement sip≡1 [4].
ii) un nombre premier impair p s’´ecrit sous la forme x2 + 2y2 (x, y ∈ Z) si et seulement si p≡1,3 [8].
iii) un nombre premier p s’´ecrit sous la forme x2 + 3y2 (x, y∈ Z) si et seulement si p = 3 ou p≡1 [3].
Solution de l’exercice 4.
a) Il existe x, y ∈ Z premiers entre eux tels que p|x2 +ny2 si et seulement si il existe x, y ∈ Z premiers entre eux tels que x2 ≡ −ny2 [p] si et seulement si il existex, y∈Zpremiers entre eux tels que
x y
2
≡ −n[p] (car p ne divise pas y : dans le cas contraire, p divise aussi x, ce qui contredit le fait que x ety sont premiers entre eux). Cela ´equivaut `a dire que −n est un carr´e modulo p, i.e. `a
−n p
= 1.
b) Il suffit de d´evelopper.
c) Par la question pr´ec´edente, on remarque qu’il suffit de trouvera, b∈Z tels que
x=za+nwb , y=−wa+zb . (1)
En r´esolvant ce syst`eme, on voit qu’il suffit de montrer que quitte `a changer les signes dex, y, z, w, q divisexz−nyw etxw+yz. Or on calcule
(xz−nyw)(xz+nyw) =x2z2−ny2nw2 =x2z2−(N −x2)(q−z2) =qx2+N z2−qN , donc q divise (xz−nyw) ou (xz+nyw).
De mˆeme, on calcule
(xw+yz)(xw−yz) =x2w2−y2z2= (N−ny2)w2−y2(q−nw2) =N w2−qy2,
donc q divisexw+yz ou xw−yz.
Finalement, quitte `a changer les signes de y, z ou w, on peut supposer que q divise `a la fois xz−nyw etxw+yz, et donc les formules (1) d´efinissenta, b∈Z qui conviennent.
Remarquons au passage que si x, ysont premiers entre eux, alorsaetbsont premiers entre eux.
d) i) Posonsa0:=a+rpetb0 :=b+sp, avecr, s∈Z. On constate que l’on a toujoursp|a02+nb02. Par cons´equent, on peut supposer que|a|,|b|< p2, maisaetbpeuvent alors avoir un facteur commun. Quitte `a diviser alorsaetbpar PGCD(a, b) (ce PGCD n’est pas divisible parp), on obtient que p|a2+nb2,|a|,|b|< p2 et PGCD(a, b) = 1.
Enfin, on a a2+nb2< p22
+ 3 p22
≤p2, ce qui conclut cette question.
ii) On raisonne par l’absurde : supposons la propri´et´e fausse en g´en´eral. Il existe alors un nombre premier pminimal tel quepdivise un entierN qui s’´ecrita2+nb2, maisplui-mˆeme ne s’´ecrit pas sous la formex2+ny2. Grˆace `a la question pr´ec´edente, on peut supposer que a2+nb2 =N, avec N =pk,k∈N,|a|,|b|< p2 etN < p2. Soit l6=pun facteur premier de N. N´ecessairement,l < p, etl|a2+nb2, donc par minimalit´e dep, il existez, w ∈Zpremiers entre eux tels quel=z2+nw2. Grˆace `a la question c), il existe c, d∈Zpremiers entre eux tels que Nl =c2+nd2. On recommence ainsi pour tous les facteurs premiers deN distincts de p, et on obtient finalement que le quotient de N par Np est de la forme souhait´ee. Par cons´equent, la question c) assure queps’´ecrit sous la formex2+ny2, avecx, y∈Zpremiers entre eux, ce qui est contradictoire.
D’o`u la conclusion.
e) i) Les questions a) et d) assurent que p est une somme de deux carr´es si et seulement si −1
p
= 1 si et seulement si p≡1 [4].
ii) Les questions a) et d) assurent que p est de cette forme si et seulement si −2
p
= 1 si et seulement si
2 p
= −1
p
si et seulement si (loi de r´eciprocit´e quadratique) (−1)p−12 = (−1)p
2−1
8 si et seulement sip≡1 [8] oup≡3 [8]. Finalement,ps’´ecrit sous la formex2+2y2 si et seulement sip≡1,3 [8].
iii) Les questions a) et d) assurent quepest de cette forme si et seulement sip= 3 ou −3
p
= 1 si et seulement si p = 3 ou
3 p
= −1
p
si et seulement si (en utilisant l’exercice 2) p = 3 ou p ≡1 [12] oup ≡7 [12]. Finalement, p s’´ecrit sous la forme x2+ 3y2 si et seulement si p= 3 ou p≡1,7 [12] si et seulement si p= 3 oup≡1 [3].
Exercice 5 : Une autre preuve de la loi de r´eciprocit´e quadratique.
Soient p, q deux nombres premiers impairs distincts. On d´efinit le groupe G par G := (Z/pZ)∗ × (Z/qZ)∗. On noteU le sous-groupe deG form´e des deux ´el´ements (1,1) et (−1,−1). Enfin, on d´efinit H comme le quotientH :=G/U. On pose alorsπ:=Q
x∈Hx∈H.
a) Montrer qu’un syst`eme de repr´esentants deH dansGest donn´e par les ´el´ements (i, j)∈G, avec i= 1,2, . . . , p−1 et j= 1,2, . . . ,q−12 .
b) En d´eduire que
π =
(p−1)!q−12 ,(q−1)!p−12 (−1)p−12 q−12
mod U .
c) Montrer qu’un syst`eme de repr´esentants de H dansGest donn´e par les ´el´ements (k, k)∈G, o`u k d´ecrit les entiers entre 1 et pq−12 premiers `a pq.
d) En d´eduire que
π=
(p−1)!q−12 q
p
,(q−1)!p−12 p
q
mod U .
e) En d´eduire la loi de r´eciprocit´e quadratique : p
q q p
= (−1)p−12 q−12 .
Solution de l’exercice 5.
a) Il est clair que deux ´el´ements distincts du sous-ensembleE1:={(i, j)∈G:i= 1, . . . , p−1 etj = 1, . . . ,q−12 } de G ont une image distincte dans H : il ne peuvent ˆetre oppos´es l’un de l’autre dansG(regarder la seconde composante). Par cons´equent, le morphisme quotientG→H induit une injection E1 → H. Or E1 et H sont deux ensembles finis de mˆeme cardinal (p−1)(q−1)2 , donc le morphisme quotient induit une bijection E1
∼=
−→ H. Donc E1 est bien un ensemble de repr´esentants de H dansG.
b) On d´eduit de la question pr´ec´edente que
π= Y
(i,j)∈E1
(i, j) mod U . Par cons´equent, un calcul simple assure que
π =
(p−1)!q−12 ,
q−1 2
Y
j=1
j
p−1
mod U . Or la seconde composante de ce couple s’identifie `a
q−1 2
Y
j=1
j
p−1
=
q−1 2
Y
j=1
j2
p−1 2
=
(−1)q−12
q−1 2
Y
j=1
j(−j)
p−1 2
≡(−1)p−12 q−12
q−1
Y
j=1
j
p−1 2
[q], et donc on obtient bien
π =
(p−1)!q−12 ,(−1)p−12 q−12 (q−1)!p−12
mod U .
c) Montrons d’abord que le morphisme quotientG→Hrestreint `a l’ensembleE2(le sous-ensemble deGd´efini dans cette question) est injectif : si deux ´el´ements distincts (k, k),(l, l)∈E2s’envoient sur la mˆeme image dans H, alors (k, k) = (−l,−l) dans G. Donc on en d´eduit que pq divise k+l. Or 0 < k +l < pq, donc ceci n’est pas possible. Par cons´equent, E2 s’injecte dans H via le morphisme quotient. En outre, le cardinal de E2 est ´egal `a pq−12 − q−12 − p−12 puisqu’il y a exactement q−12 multiples de p entre 1 et pq−12 (de mˆeme pour les multiples de q). Donc
#E2 = (p−1)(q−1)2 = #H, d’o`u le r´esultat.
d) On d´eduit de la question pr´ec´edente que
π= Y
1≤k≤pq−12 ,(k,pq)=1
(k, k) mod U .
Or on a Y
1≤k≤pq−12 ,(k,pq)=1
k= 1.2. . .(p−1)(p+ 1). . .(2p−1)(2p+ 1). . .(q−12 p−1)(q−12 p+ 1). . .pq−12
q(2q). . .p−12 q ,
donc
Y
1≤k≤pq−12 ,(k,pq)=1
k≡ (p−1)!q−12 .p−12 ! qp−12 .p−12 !
≡(p−1)!q−12 q
p
[p].
Par sym´etrie, en ´echangeant les rˆoles de p etq, on obtient Y
1≤k≤pq−1
2 ,(k,pq)=1
k≡(q−1)!p−12 p
q
[q].
Donc finalement, on a montr´e que π=
(p−1)!q−12 q
p
,(q−1)!p−12 p
q
mod U . e) En comparant les r´esultats obtenus dans les questions b) et d), on obtient que
(p−1)!q−12 ,(−1)p−12 q−12 (q−1)!p−12
=
(p−1)!q−12 q
p
,(q−1)!p−12 p
q
modU , ce qui implique que
q p
= p
q
(−1)p−12 q−12 , d’o`u le r´esultat.