Universit´e Pierre & Marie Curie Master de math´ematiques 1
Ann´ee 2013-2014 Module 4M020
Th´ eorie des Nombres - TD8 Th´ eorie analytique des nombres
Sauf mention explicite du contraire, les ´equivalents et les limites sont pris en +∞.
Exercice 1 :
a) On d´efinit Γ(s) :=R+∞
0 e−tts dtt.
i) Montrer que Γ est holomorphe sur Re (s)>0.
ii) Montrer que pour tout s∈Ctel que Re (s)>0, on a Γ(s+ 1) =sΓ(s).
iii) Montrer que Γ se prolonge en une fonction m´eromorphe sur C. On admet que celle-ci ne s’annule pas.
iv) Calculer Γ(n), pourn≥1 entier.
v) Montrer que si Re (s)>1, alorsζ(s) = Γ(s)1 R+∞
0 ts et−1
dt t.
b) Soitfune fonctionC∞surR+`a d´ecroissance rapide `a l’infini. On d´efinitL(f, s) := Γ(s)1 R+∞
0 f(t)ts dtt pour Re (s)>0.
i) Montrer queL(f, .) admet un prolongement holomorphe `a Ctout entier.
ii) Montrer que pour tout n∈N, on aL(f,−n) = (−1)nf(n)(0).
c) On d´efinit les nombres de Bernoulli (Bn)n∈N par le d´eveloppement de Taylor de la fonction f0:t7→ ett−1 en 0 : on ´ecrit ce d´eveloppementP
n≥0Bntn!n.
i) Montrer queζ(s) = s−11 L(f0, s−1) pour touts∈Ctel que Re (s)>1.
ii) Montrer queζ a un prolongement m´eromorphe `aC, avec un unique pˆole, qui est simple de r´esidu 1, en s= 1.
iii) Montrer que pour toutn∈N,ζ(−n) = (−1)n Bn+1n+1 (en particulier, ζ(−n)∈Q).
d) On d´efinit la fonctionF(z) := 1z +P+∞
n=1
1
z+n+z−n1 .
i) Montrer que F est une fonction m´eromorphe sur C, avec des pˆoles simples de r´esidu 1 en les entiers. Montrer ´egalement queF est impaire et 1-p´eriodique.
ii) On note G(z) :=F(z)−πcotan(πz). Montrer que la fonction Gest born´ee sur l’ensemble desz∈C tels que|Re (z)| ≤ 12 et Im (z)≥1.
iii) En d´eduire queGest la fonction nulle sur C.
iv) En d´eduire que pour tout k≥ 1, on a ζ(2k) = −12B2k(2iπ)(2k)!2k (en particulier, ζ(2k) est un multiple rationnel deπ2k).
Exercice 2 : Soit Aun groupe ab´elien fini.
a) Montrer que pour tout caract`ereχ de A, on a : 1
#A X
a∈A
χ(a) =
1 siχ= 1 0 sinon . b) Montrer que pour tout ´el´ement a∈A, on a :
1
#A X
χ∈Ab
χ(a) =
1 sia= 1 0 sinon .
c) En d´eduire les relations d’orthogonalit´e suivantes : pour tousχ1, χ2∈A,b
1
#A X
a∈A
χ1(a)χ2(a) =
1 siχ1 =χ2
0 sinon ;
pour tousa1, a2∈A,
1
#A X
χ∈Ab
χ(a1)χ(a2) =
1 sia1 =a2
0 sinon .
Exercice 3 : SoitAun groupe ab´elien fini. On cherche `a montrer qu’il existe une extension galoisienne de corps K/Qtelle que Gal(K/Q)∼=A.
a) Montrer qu’il existe un entier n≥1 tel queA soit un quotient de (Z/nZ)∗. b) Construire une extension galoisienne de Qde groupe (Z/nZ)∗.
c) Conclure.
Exercice 4 : Soitn∈Z. On suppose que pour tout nombre premierpsauf ´eventuellement un nombre fini d’entre eux,nest un carr´e modulop. Montrer que nest un carr´e dansZ.
Exercice 5 : Soitlun nombre premier. On noteK:=Q(ζl) l’extension cyclotomique correspondante.
a) Donner la d´ecomposition en id´eaux premiers de l’id´eallZK.
b) Soit p 6=l un nombre premier. Montrer que l’id´eal pZK se d´ecompose en id´eaux premiers sous la forme
pZK =p1. . .pr
o`u les pi sont des id´eaux premiers deux-`a-deux distincts et r = l−1f , f ´etant ´egal `a l’ordre multiplicatif dep modulo l.
c) Montrer que pour tout diviseur d de l−1, il existe une infinit´e de nombres premiers p6=l tels que l’id´eal pZK se d´ecompose en produit de d id´eaux premiers distincts. Que peut-on dire sur la densit´e de ces nombres premiersp?
Exercice 6 : L’objectif de cet exercice est de montrer la forme faible du th´eor`eme des nombres premiers qui affirme qu’il existe deux constantes A, B >0 telles que pour tout x > 0 suffisamment grand,
A x
logx ≤π(x)≤B x logx,
et d’expliciter les constantes A et B. On rappelle que la fonction Λ :N∗ →R est d´efinie par Λ(n) = log(p) sin=pk,p premier, et Λ(n) = 0 sinon.
a) On pose T(x) :=P
n≥1Λ(n)E(xn). Montrer que T(x) =P
n≤xlog(n).
b) En d´eduire queT(x) =xlog(x)−x+O(logx).
c) Montrer que T(x)−2T(x2)≤π(x) log(x).
d) Montrer que l’on peut prendre pour A tout r´eel<log 2.
e) Montrer que T(x)−2T(x2)≥log(x2) π(x)−π(x2) . f) En d´eduire queπ(x)≤2 log(2)Plog2(x)
k=1
x/2k
log(x/2k)+O(logx).
g) En d´ecomposant la somme pr´ec´edente enk≤ 101 log2(x) etk > 101 log2(x), montrer que l’on peut prendre pour B tout r´eel > 209 log(2).
h) En raffinant ces methodes, on peut pr´eciser ce r´esultat avecA∼0,921 etB ∼1,105. Utiliser ce r´esultat pour en d´eduire le postulat de Bertrand (asymptotique) : pour toutn≥1 suffisamment grand, il existe un nombre premier ptel quen < p≤2n.
Exercice 7 : On souhaite d´emontrer directement le postulat de Bertrand, `a savoir : pour toutn≥1, il existe un nombre premierptel que n < p≤2n.
a) Montrer que 2nn
≥ 42nn.
b) On veut montrer que pour tout r´eelx≥2, on a Q
p≤xp≤4x−1.
i) Montrer qu’il suffit de le montrer pourx=q premier. On va alors le montrer par r´ecurrence surq.
ii) Montrer que siq = 2m+ 1, on a Q
p≤m+1p≤4m etQ
m+1<p≤2m+1p≤ 2m+1m . iii) Montrer que 2m+1m
≤4m. iv) Conclure.
c) Montrer que la valuationp-adique de 2nn
vaut P
k≥1
E(2npk)−2E(pnk)
. d) Montrer que pour tout n,p,k,E(2npk)−2E(pnk) = 0 ou 1.
e) Montrer que la valuationp-adique de 2nn
est inf´erieure ou ´egale `a max{r:pr ≤2n}.
f) Montrer que sin≥3, 2nn
n’est divisible par aucun nombre premierp tel que 23n < p≤n.
g) Montrer que 2nn
≤(2n)
√2n−1Q√
2n<p≤23npQ
n<p≤2np.
h) On suppose que pour un entier n≥2, il n’existe pas de nombre premierp tel que n < p≤2n.
Montrer que 2nn
≤(2n)
√2n−142n3 .
i) En d´eduire qu’un telnest major´e par une constante explicite.
j) Conclure.
Exercice 8 : (Hors programme)
L’objectif de cet exercice est de d´emontrer le th´eor`eme des nombres premiers, dˆu `a Hadamard et de la Vall´ee-Poussin :
π(x)∼ x logx. a) Montrer que ζ(s) ne s’annule pas pour Re (s)>1.
b) Soitt∈R∗. On veut montrer queζ(1 +it)6= 0. On consid`ere la fonction d’une variable complexe f(s) :=ζ(s)3.ζ(s+it)4.ζ(s+ 2it).
i) Montrer que limσ→1,σ>1(σ−1) dsd logf
(σ) est ´egal `a l’ordre d’annulation de la fonction f en s= 1.
ii) Montrer que pour Re (s)>1, on a
−ζ0(s) ζ(s) =X
p
logp ps +X
p
logp ps(ps−1).
Dans la suite, on note φ(s) et ψ(s) les deux fonctions apparaissant dans le membre de droite.
iii) Montrer queφetψsont holomorphes respectivement sur Re (s)>1 et Re (s)> 12. Montrer queφadmet un prolongement m´eromorphe sur Re (s)> 12 et d´ecrire ses pˆoles.
iv) Calculer la d´eriv´ee logarithmique dsd logf(s) de f sur Re (s)>1 et montrer que d
dslogf(s) =−X
p
X
n≥1
(3 + 4p−int+p−2int) logp
pns .
v) Montrer que Re (3 + 4p−int+p−2int)≥0.
vi) En d´eduire quef ne s’annule pas ens= 1.
vii) Conclure queζ(s)6= 0 si Re (s)≥1.
c) On d´efinitθ(x) :=P
p≤xlogp. Montrer queθ(x)∼ximplique le th´eor`eme des nombres premiers.
d) Montrer que la convergence de l’int´egrale R+∞
1
θ(x)−x
x2 dx implique le th´eor`eme des nombres pre- miers.
[On pourra raisonner par l’absurde en supposant que lim supθ(x)x > 1, prendre 1 < λ <
lim supθ(x)x et calculerRλx x
θ(t)−t
t2 dt pour des xarbitrairement grands tels que θ(x)≥λx.]
e) Montrer que pour Re (s)>1,
φ(s) =s Z +∞
1
θ(x)x−s−1dx et
φ(s)− s s−1 =s
Z +∞
1
θ(x)−x xs+1 dx .
f) En posantx=et etg(t) :=θ(et)e−t−1, montrer que pour Re (s)>0, on a φ(s) :=˜ φ(s+ 1)
s+ 1 −1 s =
Z +∞
0
g(t)e−stdt . g) Montrer qu’il suffit de montrer que R+∞
0 g(t)dt existe et est ´egale `a la valeur ˜φ(0) prise par le membre de gauche ens= 0 (on justifiera l’existence de ˜φ(0)).
h) Montrer que pour tout n ∈N, on a 2nn
≥Q
n<p<2np et en d´eduire qu’il existeC > 0 tel que θ(x)≤Cxpour tout x≥2.
i) Pour T >0, on posehT(s) :=RT
0 g(t)e−stdt. On cherche donc `a montrer que limT→+∞hT(0) = φ(0). On note˜ C la fronti`ere du domaine d´efini par l’intersection du disque de centre O et de rayonR avec le demi-plan Re (s)> δ.
i) Montrer que la fonctiong est born´ee surR par une constanteB.
ii) En appliquant le th´eor`eme des r´esidus, montrer que φ(0)˜ −hT(0) = 1
2iπ Z
C
( ˜φ(z)−hT(z))ezT
1 + z2 R2
dz z .
iii) On ´ecritC=C+∪ C−, o`u C+ etC− d´esignent respectivement les intersections de C avec les demi-plans gauche et droit. Montrer que
1 2iπ
Z
C+
( ˜φ(z)−hT(z))ezT
1 + z2 R2
dz z
≤ B R et qu’il existe une constanteB0 >0 ne d´ependant que deR telle que
1 2iπ
Z
C−
( ˜φ(z)−hT(z))ezT
1 + z2 R2
dz z
≤ B
R +B02δ+Re−δT/δ
π .
[Indication : pour la seconde majoration, on pourra notamment remplacer le lacet C− par le demi-cercle −C+.]
iv) Conclure que limT→+∞hT(0) = ˜φ(0).
j) Conclure l’exercice.
Exercice 9 : Soita, b, x1, . . . , xndes r´eels tels quea≤x1 <· · ·< xn≤b. Soientα(x1), . . . , α(xn)∈C.
On poseA(x) :=P
xi≤xα(xi), poura≤x≤b. Soit f : [a, b]→Cune fonction de classe C1. Alors
n
X
i=1
α(xi)f(xi) =A(b)f(b)− Z b
a
A(x)f0(x)dx .
Exercice 10 :
a) Montrer que le th´eor`eme des nombres premiers implique quepn∼nlog(n). De mˆeme, montrer qu’il implique queθ(x) :=P
p≤xlog(p)∼x.
b) Si dn:=pn+1−pn, montrer que P
n≤x dn
logn ∼x.
c) Montrer que lim inf log(n)dn ≤1≤lim suplogdnn.
d) Montrer que l’ensemble des quotients de deux nombres premiers est dense dansR+. e) Montrer les formules suivantes : P
p≤x log(p)
p ∼log(x) et P
p≤x1
p ∼log(log(x)).
f) Montrer que le th´eor`eme des nombres premiers implique que pour toutλ >1, on aπ(λx)−π(x)∼ (λ−1)log(x)x .
En d´eduire que pour tout λ > 1, il existe x(λ) ∈ R+ tel que pour tout x ≥ x(λ), l’intervalle ]x;λx] contienne un nombre premier.