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Rôle physiopathologique de la leucocidine de Panton- Valentine (PVL) dans les infections humaines sévères à Staphylococcus aureus : exemple de la pneumonie staphylococcique nécrosante

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Academic year: 2021

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HAL Id: tel-02650889

https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-02650889

Submitted on 29 May 2020

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Rôle physiopathologique de la leucocidine de

Panton-Valentine (PVL) dans les infections humaines sévères à

Staphylococcus aureus : exemple de la pneumonie

staphylococcique nécrosante

Yves Gillet

To cite this version:

Yves Gillet. Rôle physiopathologique de la leucocidine de Panton- Valentine (PVL) dans les infections humaines sévères à Staphylococcus aureus : exemple de la pneumonie staphylococcique nécrosante. Pédiatrie. Université Claude Bernard - Lyon I, 2013. Français. �NNT : 2013LYO10063�. �tel-02650889�

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N° d’ordre Année 2013

THESE DE L’UNIVERSITE DE LYON

Délivrée par

L’UNIVERSITE CLAUDE BERNARD LYON 1

ECOLE DOCTORALE EVOLUTION ECOSYSTEMES MICROBIOLOGIE

MODELISATION

DIPLOME DE DOCTORAT

(Arrêté du 7 août 2006)

Soutenue publiquement le 11 avril 2013 Par

Yves GILLET

Rôle physiopathologique de la leucocidine de

Panton-Valentine (PVL) dans les infections humaines sévères à

Staphylococcus aureus : exemple de la pneumonie

staphylococcique nécrosante

Directeur de thèse : Professeur François VANDENESCH

JURY :

Professeur Francis LECLERC, Rapporteur

Professeur Pierre TATTEVIN, Rapporteur

Professeur Jerome ETIENNE

Professeur Daniel FLORET

Professeur François VANDENESCH

Professeur Gérard LINA

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1

UNIVERSITE CLAUDE BERNARD - LYON 1

Président de l’Université

Vice-président du Conseil d’Administration

Vice-président du Conseil des Etudes et de la Vie Universitaire Vice-président du Conseil Scientifique

Directeur Général des Services

M. François-Noël GILLY

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Faculté des Sciences et Technologies

Département Biologie

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Polytech Lyon

Ecole Supérieure de Chimie Physique Electronique Institut Universitaire de Technologie de Lyon 1 Institut Universitaire de Formation des Maîtres Institut de Science Financière et d'Assurances

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Directeur : Mme la Professeure I. DANIEL Directeur : M. C. COLLIGNON Directeur : M. B. GUIDERDONI Directeur : M. P. FOURNIER Directeur : M. G. PIGNAULT Directeur : M. C. VITON Directeur : M. A. MOUGNIOTTE

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Remerciements

- Au professeur Pierre TATTEVIN : Un très grand merci d’avoir accepté avec tant d’enthousiasme, malgré le délai bref et la distance, de faire partie de mon jury. J’ai pu apprécier, à travers vos travaux, votre expertise dans le domaine des infections staphylococciques et de la PVL et je suis très honoré de votre présence dans mon jury. -

- Au professeur Francis LECLERC : J’ai pu apprécier à de nombreuses reprises vos qualité d’enseignant et votre immense expérience de la réanimation pédiatrique et des infections sévères de l’enfant. J’ai également eu la chance d’apprécier vos qualités humaines et votre gentillesse au cours de rencontre moins formelles. Je suis très honoré que vous ayez accepté de participer à ce jury.

- Au professeur jerome ETIENNE : Merci infiniment pour votre aide, votre soutien et pour tout ce que vous faites pour entretenir les liens entre cliniciens et chercheurs. Vous faites partie de ces personnes rares qui donnent le sentiment à leurs collaborateurs d’être plus intelligents. S’il devait y avoir une chaire pour la passion et l’enthousiasme, le titulaire serait tout trouvé.

- Au professeur Daniel FLORET : Vous n’êtes pas un homme de discours, aussi, je vous dis simplement merci pour tout ce que vous m’avez appris et apporté depuis le début de mon internat. J’espère être à la hauteur de cet héritage.

- Au professeur Gérard LINA : Déjà tout jeune externe, j’avais pu apprécier ta gentillesse, tes compétences et tes qualités humaines. Tu sais mieux que quiconque allier le haut niveau scientifique et la simplicité. J’espère que nous ferons encore beaucoup de choses ensemble. Merci d’avoir accepté de juger ce travail

- Au professeur François VANDENESCH : Merci pour toutes ces années à travailler ensemble. Tu as su à la fois tempérer parfois mes excès d’enthousiasme mais aussi me pousser à aller toujours plus loin dans l’exploration des arcanes des infections toxiniques. Beaucoup des idées développées dans ce travail sont inspirées de tes travaux et de tes réflexions. Merci enfin de m’avoir aidé et soutenu jusqu’au bout dans les moments de doute.

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A Hélène, ma compagne sans qui rien n’aurait été et ne serait possible. Pas plus de discours que tu ne goutes guère mais simplement tout mon amour…

A Marion, Lise et Yann : Vous êtes ce dont je suis le plus fier, vous êtes ma joie, mon oxygène, mon bonheur tout simplement. J’espère que je n’ai pas été trop pénible pendant la rédaction de cette thèse (comment ça, pas plus que d’habitude…). Je vous aime !

A mes parents qui m’aident et me soutiennent et qui continuent à m’apprendre tant de choses.

A mes amis du CATTP neige et voile® pour tous les bons moments passés à rire autour d’une Pietra, d’un bon repas ou même sans rien de tout cela mais simplement ensemble. Vous n’imaginez sans doute pas à quel point votre soutien discret mais sans faille m’a été précieux pour mener à bien cette thèse.

A tous ceux « du boulot », les équipes infirmières des Urgences et de « l’Uche » pour leur confiance et leur gentillesse, mes collègues qui m’ont laissé le temps nécessaire à ce travail en gérant pendant ce temps les bronchiolites, la grippe et tous les soucis de notre quotidien et enfin la bande du CNR qui m’ont appris les toxines, les Vbéta, les ST avec pleins de numéro et tous les méandres des écoles doctorales. Bref, tous ceux qui font que, malgré tout, je suis si souvent heureux de venir travailler.

A Sylviane, à qui j’ai tant de chose à dire et à souhaiter… Just love, children, fun and rock’n roll

A Etienne, qui m’a soutenu et aidé comme jamais au cours des dernières semaines. Je crois vraiment que je n’y serais pas arrivé sans toi. C’est peut être ça être un bon chef de service mais tu es encore bien plus : un ami précieux. Merci

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SOMMAIRE

Liste des figures et tableaux ... 4

TRAVAIL BIBLIOGRAPHIQUE ... 5

INTRODUCTION ... 6

I. Les pneumonies dues à Staphylococcus aureus ... 8

A. Historique ... 8

1. La pandémie grippale de 1918 ... 8

2. La période « pré-antibiotique » ... 9

3. La grippe « asiatique » de 1957-58 ... 10

4. Les années 50-60 : la « staphylococcie pleuropulmonaire du nourrisson » ... 11

5. L’émergence des pneumonies nosocomiales et des SARM hospitaliers ... 13

6. 2002 : 1ere individualisation de la pneumonie staphylococcique nécrosante et émergence mondiale de la résistance à méticilline communautaire. ... 15

B. Physiopathologie des pneumonies staphylococciques ... 15

1. Mécanismes de défense pulmonaires ... 16

2. Pneumonies par inhalation ... 17

3. Cas particulier du S. aureus : les pneumopathies hématogènes ... 19

4. Facteurs bactériens de pathogénie locale ... 21

II. La leucocidine de Panton-Valentine (Panton-Valentine Leucocidin ou PVL) ... 25

A. Les toxines synergo-hyménotropes (SHT) ... 25

1. Généralités ... 25 2. La gamma-hémolysine... 26 3. LukD et LukE ... 26 4. Une SHT rare : la PVL ... 27 B. Caractéristiques de la PVL ... 28 1. Historique ... 28 2. Activité biologique de la PVL ... 29

3. Comparaison avec les autres toxines synergohymenotropes ... 34

C. Génétique de la PVL ... 35

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2. Structure des gènes lukS-PV et lukF-PV... 36

3. Polymorphisme de la PVL ... 37

4. Régulation des gènes lukS-PV et lukF-PV ... 39

D. Réponse immunitaire vis-à-vis de la PVL ... 42

1. Historique ... 42

2. Etudes animales... 43

3. Données chez l’homme ... 44

E. Aspects cliniques des infections à S. aureus PVL + (pneumonies exclues) ... 46

1. Infections cutanées et des tissus mous ... 46

2. Infections ostéo-articulaires ... 49

III. L’émergence des Staphylocoques dorés résistants à la méticilline dans la communauté et ses liens avec la PVL. ... 52

A. Caractéristiques des SARM communautaires ... 52

1. Epidémiologie ... 52

2. Aspects cliniques ... 53

B. Caractéristiques génétiques des souches de SARM-C ... 55

1. Acquisition des gènes de résistance ... 56

2. Caractéristiques des cassettes SCCmec des SARM-C ... 57

C. Evolution épidémiologique et distribution géographique des souches de SARM-C ... 58

1. Une spécificité géographique de moins en moins marquée ... 58

2. Facteurs associés à l’acquisition de SARM-C ... 60

3. Facteurs de diffusion des SARM-C ... 61

4. Virulence des SARM-C ... 62

TRAVAIL PERSONNEL ... 66

I. Introduction ... 67

II. Caractérisation clinique des pneumonies staphylococciques dues à des souches productrices de PVL : description de l’entité « pneumonie staphylococcique nécrosante » ... 69

A. Première publication : Staphylococcus aureus strains carrying the gene for the Panton-Valentine leukocidin cause a highly-lethal necrotizing pneumonia in young immunocompetent patients ... 69

B. Deuxième publication : Factors predicting mortality in necrotizing community-acquired pneumonia caused by Staphylococcus aureus containing Panton-Valentine leukocidin ... 79

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3

A. Troisième publication : Methicillin resistance is not a predictor of severity in

community-acquired Staphylococcus aureus necrotising pneumonia - results of a prospective

observational study ... 90

IV. Discussion ... 101

A. L’entité « pneumonie staphylococcique nécrosante » ... 101

1. Une pathologie nouvelle ?... 101

2. Une entité spécifique ? ... 102

3. Les liens avec la grippe ... 105

4. Les facteurs de risque de pneumonie nécrosante ... 109

5. Les facteurs pronostiques ... 111

B. Le rôle de la PVL ... 116

1. Etudes chez l’animal ... 117

2. Données chez l’homme ... 122

C. Aspects thérapeutiques ... 125

1. Limites des traitements conventionnels ... 125

2. Alternatives thérapeutiques ... 127

3. Propositions de prise en charge ... 129

D. Limites de notre travail ... 130

V. Conclusions et perspectives ... 132

Références ... 135

Annexe 1 : Rôle de la PVL dans les infections ostéo-articulaires ... 153

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Liste des figures et tableaux

Figures

Figure 1 Pathogénie de l’invasion tissulaire par S aureus………. P 20 Figure 2 Les leucotoxines staphylococciques synergohymenotropes………. P 28 Figure 3 Mécanisme de fixation et d’assemblage de LukS-PV et LukF-PV………... P 31 Figure 4 Fixation des composés S et F sur deux récepteurs distincts……….. P 31 Figure 5 Mécanisme d’action de la PVL à doses infra-lytiques………. P 33 Figure 6 Comparaison de 5 phages portant la PVL……… P 37 Figure 7 Représentation des différents polymorphismes de la PVL………. P 39 Figure 8 Représentation du fonctionnement du système agr……….. P 41 Figure 9 Titres d’anticorps anti PVL avant et après infection à S aureus……… P 45 Figure 10 Inhibition de la formation de pores par les Ig polyvalentes……….. P 47 Figure 11 Abcès cutané primitif à S aureus PVL+……….. P 49 Figure 12 Ostéite tibiale à S aureus PVL+ (cliché +IRM)……… P 52 Figure 13 Electrophorèse et arbre phylogénétique de 113 souches de SARM-C……….. P 56 Figure 14 Acquisition successive des gènes codant la PVL puis du gène mecA……… P 57 Figure 15 Schéma évolutif de différentes lignées de SARM……….. P 58 Figure 16 Distribution géographique des principaux clones de SARM-C………. P 60 Figure 17 Modèle dynamique d’interaction grippe/S aureus……….. P 110 Figure 18 Pourcentage de survie en fonction du taux de leucocytes à l’admission…………. P 114 Figure 19 Représentation des effets de la PVL au niveau alvéolaire……… P 124 Figure 20 Effets des antibiotiques à action antitoxinique sur la production de PVL…………. P 129

Tableaux

x Tableau I Comparaisons des caractéristiques de deux séries d’infections osseuses x Tableau II Comparaison des deux types de SARM retrouvés dans la communauté x Tableau III Fréquence respective des symptômes associés aux pneumonies

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TRAVAIL BIBLIOGRAPHIQUE

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INTRODUCTION

Staphylococcus aureus est un des germes les plus fréquemment rencontré en pathologie humaine, que ce soit lors d’infections communautaires ou au cours d’infections acquises à l’hôpital. Ceci s’explique d’une part grâce un arsenal remarquablement complet de facteurs de virulence lui permettant entre autres d’échapper aux défenses de l’hôte mais également d’envahir les tissus et d’autre part du fait de sa capacité à acquérir des gènes de résistance rendant le traitement de certaines infections staphylococciques particulièrement difficile. Habituellement, on distingue les souches résistantes, principalement rencontrées à l’hôpital des souches responsables d’infections communautaires qui restent le plus souvent sensibles aux antibiotiques. De même, les manifestations cliniques attribuées au S. aureus sont classiquement séparées entre d’un côté les infections invasives due à la pénétration et à la multiplication du germe au niveau du site de l’infection et de l’autre, les infections toxiniques dues, elles, aux effets de toxines sécrétées par certaines souches de S. aureus et exerçant leurs actions à distance du site de l’infection. Ces infections toxiniques sont caractérisées par une symptomatologie spécifique et par leur rareté, seul un petit nombre de souches possédant les gènes codant les toxines responsables. Récemment, il s’est avéré que ces distinctions opposant souches résistantes hospitalières/souches sensibles communautaires et infections invasives/infections toxiniques étaient probablement trop simplistes. En effet, la résistance est maintenant retrouvée de plus en plus fréquemment dans les infections communautaires et certaines infections invasives ont pu être rattachées à la production d’une toxine par ailleurs rarement retrouvée : la leucocidine de Panton-Valentine (Panton-Panton-Valentine Leucocidin ou PVL).

Il s’agit d’une toxine aux propriétés leucotoxiques et nécrosantes, produite par un nombre relativement limité de souches et qui, contrairement à d’autres toxines, semble pouvoir être associées à des pathologies relativement diverses, de gravité très variable mais ayant en commun le caractère nécrotique des lésions.

Dans ce travail, nous nous sommes intéressé au rôle joué par la PVL dans certaines formes de pneumonies staphylococciques semblant particulièrement sévères.

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Après un rappel historique et physiopathologique sur les pneumonies staphylococciques, nous évoquerons les caractéristiques de la PVL et ses liens avec d’autres facteurs de virulence ainsi qu’avec l’émergence de souches de S. aureus résistantes à la méticilline observée dans la communauté depuis une dizaine d’année. Nous rapporterons ensuite les résultats de trois études réalisées dans le cadre du Centre National de Référence des Staphylocoques, sous la direction des Professeurs J. Etienne et F. Vandenesch, auxquelles nous avons collaboré. Ces études, publiées respectivement en 2002, 2007 et 2012, nous ont permis pour la première de déterminer les caractéristiques cliniques des pneumonies staphylococciques, pour la seconde d’identifier un certain nombre de facteurs liés à la sévérité et enfin, pour la troisième, de montrer l’absence de lien entre la résistance à la méticilline et la gravité. Les résultats de ces études seront discutés à la lumière des données de la littérature et nous tenterons d’en tirer des conclusions quant aux spécificités des pneumonies associées à la PVL, en particulier en ce qui concerne les aspects diagnostiques et thérapeutiques.

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I.

Les pneumonies dues à Staphylococcus aureus

A.

Historique

La responsabilité de Staphylococcus aureus en tant qu’agent d’infections pulmonaires n’a été établie que relativement tardivement par rapport à la découverte de la bactérie par Ogston en 1883. En effet, même si certains auteurs, notamment en France, avaient pu mettre en évidence S. aureus au sein de prélèvements issus de pneumonies (Mosny, 1891), ce n’est qu’après la pandémie grippale de 1918 et la description dans ce contexte de pneumonies staphylococciques particulièrement sévères dans certains camps militaires aux Etats-Unis (Chickering & Park, 1919) que l’existence d’infections respiratoires basses d’origine staphylococcique a été définitivement admise. Auparavant, seuls le pneumocoque et plus rarement certains autres streptocoques ainsi que les bacilles « de Pfeiffer » (Haemophilus influenzae) et « de Friedlander » (Klebsiella pneumoniae) étaient retenus comme pouvant être responsables de pneumonies bactériennes. Par la suite, S. aureus a été considéré comme une cause relativement rare de pneumonie mais présentant des caractéristiques propres à l’individualiser (Mac Gregor, 1936). Cependant, contrairement aux pneumonies à pneumocoque dont l’évolution épidémiologique dans les pays développés est assez clairement influencée par les différentes interventions humaines (amélioration de l’hygiène, découverte des antibiotiques, apparition et diffusion des résistances et plus récemment, développement des vaccins conjugués actifs sur les infections invasives et sur le portage) ; les fluctuations de l’épidémiologie des infections pulmonaires à S. aureus semblent à la fois plus importantes et beaucoup moins explicables par des interventions humaines, au moins pour certaines d’entre elles.

1. La pandémie grippale de 1918

Il est admis que la majorité des 40 à 100 millions de décès observés dans le monde au cours de cette pandémie a été due à une surinfection bactérienne respiratoire (Morens et al,

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2008). Parmi les bactéries responsables, Streptococcus pneumoniae était majoritaire, suivi par Streptococcus pyogenes et Haemophilus influenzae, ce dernier étant plutôt retrouvé en association avec d’autres pathogènes respiratoires (Brundage et al, 2006). S. aureus semble avoir été moins fréquemment impliqué, avec une fréquence allant de 3 à 10% mais les comparaisons réalisées entre les différents camps militaires américains ont montré que, malgré de remarquables similitudes d’un camp à l’autre concernant le pourcentage de soldats touchés par la grippe (médiane 22%), le taux de surinfections (médiane : 17% des patients grippés) et le taux de décès par pneumonie (médiane : 33% des cas de pneumonie), il existait d’importantes différences quant aux bactéries responsables ; chaque camp ayant en quelque sorte sa propre épidémiologie (Brundage et al, 2006). Ainsi, à Camp Jackson en Caroline du Sud, près de 50% (153/312) des cultures post mortem de tissus pulmonaires ont révélé la présence de S. aureus, en faisant la cause numéro 1 de décès dans cette communauté (Chickering & Park, 1919). De plus, les infections staphylococciques semblaient présenter des particularités cliniques et surtout anatomopathologiques spécifiques avec un infiltrat pulmonaire très souvent hémorragique et des lésions de nécrose alvéolaire, notamment lorsque le décès était intervenu de façon précoce alors que les décès plus tardifs se présentaient sous la forme d’abcès pulmonaires multiples fréquemment associé à un empyème pleural. Cet aspect hémorragique et nécrotique des pneumonies staphylococciques compliquant une infection grippale a ensuite été confirmé par plusieurs auteurs, y compris en dehors des périodes pandémiques (Wollenman & Finland, 1943).

2. La période « pré-antibiotique »

Après la pandémie de 1918, des séries de pneumonies staphylococciques ont été régulièrement publiées. Lorsqu’il s’agissait d’adultes, le lien avec la grippe saisonnière était le plus souvent présent et la présentation clinique ou anatomopathologique (la plupart des séries rapportaient des résultats d’autopsie) était relativement univoque : La pneumonie survenait précocement, 5 à 7 jours après le début de l’épisode grippal et était caractérisée par l’aspect nécrotique et hémorragique des lésions (Wollenman & Finland, 1943), notamment dans les formes évoluant rapidement vers le décès. Dans le même temps, des cas de pneumonies staphylococciques sans lien avec les épidémies de grippe ont été décrits. Il s’agissait soit de cas sporadiques, soit de petites épidémies qui semblaient toucher

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préférentiellement les enfants. La présence d’un syndrome pseudo-grippal précédant de quelques jours les symptômes de pneumonie a été régulièrement rapportée de même que l’existence fréquente de lésions staphylococciques de la peau et des tissus mous concomitantes de l’infection respiratoire (Reimann et al, 1950). Dans une série de 10 cas pédiatriques fatals publiée en 1936, Mac Gregor établit une distinction anatomopathologique entre d’une part les formes « fulminantes », d’évolution rapide, caractérisées par l’aspect hémorragique des poumons, la présence de zones abcédées de petite taille voire absentes et l’existence d’épanchements pleuraux séro-fibrineux alors que, d’autre part, les décès plus tardifs présentaient des abcès organisés de grande taille, souvent multiples, constamment associés à un volumineux empyème pleural. Les lésions n’étaient habituellement pas hémorragiques dans ces derniers cas et on n’observait pas de zones de nécrose bronchique (Mac Gregor, 1933). A cette époque, la fréquence des pneumonies dues à S. aureus est estimée à 1,6 à 1,8% du total des pneumonies bactériennes de l’adulte alors qu’elle atteint 10% chez l’enfant (Cohen, 1938). Ces derniers seraient en outre plus propices à développer des pleuro-pneumopathies avec empyème pleural et pyo-pneumothorax. Cependant, l’évaluation de la fréquence réelle était rendue difficile par les nombreux cas pour lesquels plusieurs bactéries étaient isolées. Dans le même temps sont rapportées les premières tentatives de traitement médicamenteux considérées comme fructueuses avec l’utilisation des sulfamides en complément du drainage des empyèmes.

3. La grippe « asiatique » de 1957-58

Au cours de cette pandémie, le nombre de décès dans le monde a été sans commune mesure avec celui observé en 1918 (entre 1 et 4 millions contre 40 à 1OO millions en 1918). Les surinfections bactériennes semblent également avoir joué un rôle moins important qu’en 1918, très probablement du fait des possibilités bien supérieures de traitement dues à l’avènement des antibiotiques (Morens et al, 2008). Ainsi, une part des décès par pneumonie a pu être attribuée directement à l’action du virus grippal, sans surinfection bactérienne avérée (Louria et al, 1959). A cette époque, une distinction est établie entre les pneumonies bactériennes « post grippe » qui surviennent dans les jours ou les semaines qui suivent la guérison de l’épisode grippal, dont la clinique et la gravité semblent superposables

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à celles observées dans les pneumonies bactériennes habituelles, et les pneumonies « synchrones », survenant au cours ou au décours immédiat de l’infection virale (Louria et al, 1959). Ces dernières semblent plus sévères et le staphylocoque doré parait à la fois plus fréquent et associé à la sévérité de ces surinfections « synchrones » (Stuart-Harris et al, 1966). Cependant, la fréquence des surinfections staphylococciques comparativement à celles dues aux autres bactéries au cours de cette période a probablement été surestimée en raison de deux facteurs, tous deux liés à l’antibiothérapie. En effet, alors que les pneumocoques et les streptocoques du groupe A étaient constamment sensibles à la pénicilline, la résistance du S. aureus à la pénicilline commençait à poser de réels problèmes. Il est donc probable qu’un certain nombre de surinfections pneumococciques et streptococciques aient été décapités par l’antibiothérapie. De même, les insuffisances de l’antibiothérapie anti-staphylococcique ont probablement entrainé un nombre plus important de décès par infection à staphylocoque, conduisant à un nombre plus élevé de prélèvements autopsiques positifs à S. aureus (Morens et al, 2008).

4. Les années 50-60 : la « staphylococcie pleuropulmonaire du nourrisson »

Dès la fin des années 40, une augmentation de la fréquence des infections respiratoires staphylococciques en pédiatrie a été notée (Mc Letchie et al, 1949). Ces pneumonies survenaient de façon sporadique ou au cours de petites épidémies locales, sans lien évident avec une infection virale et touchaient essentiellement les très jeunes enfants, âgés la plupart du temps de moins de un an. Ces infections respiratoires semblaient particulièrement sévères et, à cette époque, la majorité des décès par pneumonie bactérienne chez le jeune enfant étaient ainsi attribuables au S. aureus. Par exemple, une série canadienne de 47 enfants décédés de pneumonie rapporte 27 cas de S. aureus contre seulement 2 cas de pneumocoque, 2 de streptocoque A et 16 non documentés (Mac Letchie et al, 1949). Contrairement aux descriptions des années 30, l’association avec un foyer infectieux cutané paraissait moins évidente. Par contre, le lien probable avec une colonisation au cours du séjour en maternité est souligné par la plupart des auteurs. Les travaux suivants vont confirmer ces données et aboutir à la description du tableau clinique

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de « staphylococcie pleuro-pulmonaire du nourrisson » (Wallman et al, 1955) caractérisée par :

- Sa survenue chez le très jeune enfant, le plus souvent avant un an, la majorité des cas étant observés avant l’âge de 6 mois.

- Sa présentation clinique associant des signes infectieux, une détresse respiratoire et souvent un ballonnement abdominal important réalisant un tableau d’abdomen « pseudo-chirurgical ».

- Son aspect radiologique de pneumonie ronde, présentant souvent plusieurs foyers volontiers abcédés voire excavés sous forme de bulles réalisant un aspect de « pneumonie bulleuse » considérée comme pathognomonique du S. aureus (Jutras 1962).

- La fréquence importante (66%) des atteintes pleurales sous la forme d’empyèmes (Klein, 1998) plus ou moins associés à la rupture de bulles dans la cavité pleurale, réalisant alors un tableau de pyo-pneumothorax, lui aussi très évocateur de la présence de S. aureus.

- Et enfin sa gravité puisque, malgré l’utilisation d’antibiotiques actifs sur le staphylocoque (tétracyclines, chloramphenicol et érythromycine) et les techniques de drainage pleural, la mortalité atteint 23% dans une série australienne de 1955 (Wallman et al, 1955). Les séquelles sont fréquentes, sous la forme de lésions bulleuses, kystiques (pneumatocèles) pouvant être impressionnantes mais dont le retentissement clinique est assez faible, justifiant l’abstention de tout traitement (Wallman et al, 1955).

Les causes de cette augmentation de fréquence des staphylococcies pleuro-pulmonaires au cours des années 50-60 demeurent mal connues. Pour certains, la cause principale serait l’augmentation de la consommation d’antibiotiques (Anonyme 1960). Le manque d’hygiène et la promiscuité dans les maternités ont également été incriminés puisque, selon un éditorial du Canadian Medical Association Journal, le taux de colonisation par le S. aureus des nouveau-nés atteignait 88% à la sortie de maternité avec un taux d’infection, tous sites confondus, de 17% (Anonyme 1960). De fait, une diminution importante du taux de colonisation et d’infections avait pu être observée suite à l’application de mesures comportant une toilette de chaque bébé avec un savon antiseptique et la détection suivie de

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décontamination des porteurs de S. aureus au sein du personnel (Hill et al, 1959). Cependant, d’autres facteurs liés cette fois à la souche bactérienne ont également été incriminés car la majorité des staphylococcies pleuro-pulmonaires étaient dues à des souches appartenant au type phagique 80-81 qui semblait posséder un potentiel de virulence particulièrement élevé. Pour des raisons que l’on ignore, ces souches sont devenues beaucoup moins fréquentes à partir du milieu des années 60 et la staphylococcie pleuro-pulmonaire du nourrisson a depuis été considérée comme une entité très rare. En 2005, une étude génétique des souches de type phagique 80-81 (Robinson et al, 2005) a montré qu’elles étaient vraisemblablement l’ancêtre d’un clone communautaire de S. aureus résistant à la méticilline (C-SARM) diffusant depuis le début du XXIe siècle dans les régions du Sud-ouest du pacifique (Nouvelle-Zélande, côte Est de l’Australie…) et connu sous l’appellation ST30 (« Sequence Type » déterminé par les techniques de Multi Locus Sequence Typing). Ce clone a acquis récemment la cassette portant le gène mecA de résistance à la méticilline mais était porteur dès les années 50 du gène codant un facteur de virulence assez rarement retrouvé et qui fait l’objet notre travail : la leucocidine de Panton-Valentine (Panton-Valentine Leucocidin : PVL) (Robinson et al, 2005).

A côté des staphylococcies pleuro-pulmonaires pédiatriques, quelques séries de pneumopathies staphylococciques de l’adulte sans lien avec la grippe ont également été publiées dans les années 50-60 : Il s’agissait le plus souvent de sujets âgés, présentant des comorbidités. Comme chez l’enfant, les complications suppuratives étaient fréquentes (abcès pulmonaires, empyèmes…) et l’évolution paraissait particulièrement prolongée (Haussman & Karlish, 1956)

5. L’émergence des pneumonies nosocomiales et des SARM hospitaliers

Au début des années 60, la découverte des pénicillines semi-synthétiques résistantes à l’hydrolyse par la béta-lactamase de S. aureus (méticilline et ses dérivés) a rendu le traitement des infections staphylococciques sévères beaucoup plus facile. Dans le même temps, les souches de type phagique 80/81 sont devenues rares et, par conséquent, les infections respiratoires staphylococciques communautaires ont cessé de constituer un

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problème, tout du moins dans les pays dit développés. En effet, les staphylococcies pleuro-pulmonaires demeuraient fréquentes dans les pays en voie de développement, en lien avec la malnutrition (Canty et al, 1978).

Cependant, dès 1961, des souches de S. aureus résistantes à la méticilline ont été décrites au Royaume-Uni (Brumfitt et al, 1989). Ces premiers cas ont été rapportés chez des patients hospitalisés et des facteurs de risque ont été rapidement identifiés : outre l’hospitalisation, l’immunodépression, la présence de pathologie cardiovasculaire, d’un diabète et surtout l’utilisation d’antibiotiques ont été associés de façon certaine à l’acquisition de souche de S. aureus résistant à la méticilline désigné sous l’acronyme SARM. L’incidence des infections nosocomiales dues à ces SARM, bien que variable d’un pays à l’autre en fonction notamment de la pression de sélection induite par les antibiotiques, a régulièrement augmenté au cours des années 70 à 90 et a touché principalement deux populations : d’une part les patients de réanimation en raison du développement des techniques de ventilation, des accès vasculaires et de l’utilisation très large des antibiotiques et d’autre part, les personnes âgées vivant en institution qui cumulent les facteurs de risque : immunodépression, pathologie cardio-vasculaire, diabète et exposition importante aux antibiotiques. Parmi les pathologies présentées, les infections respiratoires représentaient une part non négligeable puisque S. aureus était considéré comme responsable de 20 à 30% des pneumonies nosocomiales (Touchie et al, 1997).

Au début des années 2000, le S. aureus est donc considéré comme un germe rarement responsable de pneumonies communautaires de l’adulte puisqu’il ne représenterait que 2% des cas selon la British Thoracic Society (Patterson et al, 2012). La staphylococcie pleuro pulmonaire du nourrisson semble appartenir au passé et les infections respiratoires à S. aureus concernent essentiellement le sujet âgé présentant habituellement des pathologies associées. Le dernier « réservoir » d’infection respiratoire à S. aureus est constitué par les patients de réanimation qui présentent habituellement des pneumonies nosocomiales acquises sous ventilation mécanique et dues le plus souvent à des souches multi résistantes aux antibiotiques.

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6. 2002 : 1ere individualisation de la pneumonie staphylococcique nécrosante et émergence mondiale de la résistance à méticilline communautaire.

Le début du XXIe siècle a été marqué par deux « évènements » qui vont s’avérer en partie reliés et qui vont être à l’origine d’un regain d’intérêt important pour les pneumonies communautaires à S. aureus. Il s’agit d’une part de l’émergence mondiale de clones de S. aureus communautaires possédant le gène de résistance à la méticilline et le plus souvent les gènes codant la leucocidine de Panton-Valentine et d’autre part de la description, indépendamment de toute résistance, de formes particulièrement sévères de pneumonies staphylococciques semblant précisément liées à cette toxine. Ce sont ces formes particulières qui ont fait l’objet de notre travail que nous allons maintenant développer.

B.

Physiopathologie des pneumonies staphylococciques

Les pneumonies bactériennes représentent l’une des causes les plus fréquentes d’infections bactériennes profondes de l’enfant. Par définition, elles comportent une inflammation et une condensation alvéolaire (Parikinkas, 2006) mais peuvent également toucher toutes les structures environnantes : bronches et bronchioles, tissus interstitiel et plèvre. Elles sont le plus souvent dues à l’inhalation d’inoculum bactérien important à partir de la sphère ORL mais peuvent également être secondaires à une dissémination hématogène. Dans tous les cas, la survenue d’une pneumonie implique que les nombreux mécanismes de défense de l’arbre respiratoire soit déficients et/ou dépassés.

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1. Mécanismes de défense pulmonaires

Le poumon est un des organes profonds les plus exposés aux agressions par les microorganismes. Il existe donc de nombreux systèmes de défense visant à maintenir son intégrité. Ces mécanismes peuvent être divisés entre les défenses de type mécanique (reflexe de toux, fermeture du larynx lors de la déglutition et surtout clairance muco-ciliaire) et les défenses immunologiques faisant intervenir essentiellement l’immunité non spécifique (phagocytose par les macrophages alvéolaires, production de lysozyme, lactoferrine, interférons mais également sécrétion d’IgA). Les IgG et M ainsi que les polynucléaires neutrophiles et éosinophiles ne sont eux retrouvés que lorsqu’un processus inflammatoire local est engagé (Haddad et al, 2004). De nombreux facteurs sont susceptibles d’altérer ces mécanismes de défense. Les défenses mécaniques stricto sensu (impaction dans le mucus au niveau des voies aériennes supérieures, toux et fermeture laryngée) peuvent être diminuées en cas d’intubation trachéale, d’anesthésie, d’atteinte neuromusculaire ou de troubles de conscience alors que tous les processus irritant la muqueuse respiratoire sont susceptibles de diminuer la clairance muco-ciliaire en modifiant les capacités vibratiles des cils et/ou les propriétés rhéologiques du mucus. Ainsi, le déplacement du mucus vers les voies aériennes supérieures qui se fait habituellement à une vitesse proche de 1 cm/min peut être sérieusement ralenti en cas d’air trop froid ou trop sec (tel que l’on peut l’observer avec une simple obstruction nasale obligeant à une respiration buccale), en cas d’ingestion d’alcool, de tabagisme, d’acidose mais surtout en cas d’infections virales des voies aériennes. Ces infections vont à la fois altérer le fonctionnement des cellules ciliées et entrainer une augmentation de volume et un épaississement du mucus. De même, toutes les anomalies congénitales du mucus (en particulier la mucoviscidose) ou des cellules ciliées vont s’accompagner d’une très forte sensibilité aux infections pulmonaires. Les capacités de phagocytose et d’élimination des bactéries par les macrophages alvéolaire peuvent, elles, être altérées par l’acidose, certains composés organiques, certains gaz (dioxyde d’azote) et également par les infections virales. Les situations de diminution des défenses immunitaires, qu’elles soient acquises ou congénitales, vont également fortement favoriser les infections d’un organe aussi exposé que le poumon.

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2. Pneumonies par inhalation

a) Epidémiologie

Les pneumonies bactériennes sont dans leur majorité secondaires à l’inhalation de bactéries à partir de la flore commensale du pharynx. Les bactéries retrouvées dans les infections communautaires sont donc essentiellement des germes de portage ou des bactéries infectant fréquemment la sphère ORL. Chez l’adulte comme en pédiatrie, la bactérie la plus fréquemment retrouvée est Streptococcus pneumoniae (Patterson et al, 2012 ; Prayle et al, 2011). Les différences sont ensuite plus marquées en fonction de l’âge. Les bactéries intracellulaires telles que Chlamydia pneumoniae et Mycoplasma pneumoniae se rencontrent essentiellement chez l’adolescent et à l’âge adulte (Patterson et al, 2012) alors que, chez le jeune enfant, on retrouve une prédominance encore plus marquée du pneumocoque mais également la présence d’autres bactéries telles que Streptococcus pyogenes et dans une moindre mesure, Haemophilus influenzae (Prayle et al, 2011). La place de S. aureus au sein des pneumonies bactériennes acquises dans la communauté est difficile à déterminer : elle apparait marginale si l’on s’en tient aux chiffres bruts avec une fréquence inférieure à 2% des pneumonies bactériennes de l’adulte (Patterson et al, 2012) et même inférieure à 1,5% chez l’enfant (Prayle et al, 2011) mais ces chiffres sont contredits par certaines études ciblées sur les formes sévères de pneumonies qui montrent une fréquence du S. aureus parfois beaucoup plus importante.

b) Rôle des cofacteurs

Quoi qu’il en soit, la fréquence respective des colonisations bactériennes des voies aériennes supérieures (VAS) et des pneumonies démontre que, si la colonisation est un prérequis indispensable, elle n’est certainement pas suffisante à elle seule pour aboutir à une infection. La plupart des auteurs accordent une place centrale aux infections virales préalables dans le développement des pneumonies bactériennes. L’atteinte virale agit au niveau local en diminuant les défenses par altération des fonctions phagocytaires des macrophages, altération de la clairance muco-ciliaire et modification de la réponse inflammatoire. L’activation des interférons de type I, notamment l’interféron β, induite par l’infection grippale majore la sensibilité aux surinfections par S. aureus chez la souris (Martin et al, 2009 ; Lee et al, 2010), vraisemblablement par diminution de la réponse Th17 (Kudva

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et al, 2011) et diminution de la production d’IL-17, 22 et 23 qui seraient fortement impliquées dans l’élimination bactérienne au niveau des muqueuses (Ishigame et al, 2009). Les infections virales sont également susceptibles de favoriser l’infection staphylococcique via un effet cytopathogène direct sur la muqueuse respiratoire. Les cellules infectées n’assurent alors plus leur rôle de barrière et les zones d’ulcération muqueuse exposent des structures favorisant l’adhérence bactérienne (Carson et al, 1985). Cette « coopération » entre virus respiratoires et bactéries est démontrée par les liens épidémiologiques entre la grippe et les surinfections bactériennes que nous avons déjà largement évoqués (Morens et al, 2008) mais également par des données expérimentales montrant chez la souris une adhésion accrue des pneumocoques aux cellules épithéliales basales exposées en surface après une infection grippale (Plotkowski et al, 1986). Il a également été montré que l’adhésion de S. aureus au niveau de l’épithélium respiratoire se faisait plus facilement au niveau des cellules peu différenciées, située dans les couches profondes et qui sont exposées en surface en cas de destruction des couches différenciées par une infection virale (Mongodin et al, 2000). Plus récemment, le substrat de cette adhésion a été mis en évidence pour le S. aureus par De Bentzmann et al qui ont montré que des souches issues de patients ayant présenté une pneumonie staphylococcique adhéraient aux protéines de la matrice extracellulaire, principalement les collagènes de type I et IV et la laminine. (De Bentzmann et al, 2004). Ces mécanismes d’adhésion du S. aureus sont sous la dépendance de l’expression d’un groupe de facteurs de virulence bactériens regroupés sous l’acronyme MSCRAMMs (Microbial Surface Components Recogning Active Matrix Molecules) (Patti et al, 1994). Parmi ces molécules, l’expression de la collagen binding protein codée par le gène cna semble avoir un rôle important alors que l’expression des gènes d’autres facteurs d’adhésion tels que la laminin binding protein semble moins primordiale, suggérant l’action d’autres facteurs (De Bentzmann et al, 2004). En permettant d’échapper aux défenses mécaniques, l’adhésion favorise la multiplication bactérienne in situ et tous les facteurs susceptibles de léser l’épithélium respiratoire vont permettre de renforcer cette adhésion en démasquant des sites de fixations. D’autres facteurs tels que les « clumping factors » (Clf) A et B, qui sont impliqués dans l’adhésion de S. aureus au fibrinogène, semblent jouer un rôle dans la colonisation muqueuse au niveau pharyngé pour le ClfB (Wertheim et al, 2008) et dans certains modèles d’infections invasives de type sepsis, arthrite ou endocardite infectieuse

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(Josefsson et al, 2001 ; Vernachio et al, 2003). Le rôle des Clfs dans les infections respiratoires profondes n’est cependant pas établi.

3. Cas particulier du S. aureus : les pneumopathies hématogènes

A côté de la voie respiratoire, par inhalation, que nous venons d’évoquer et qui est donc la voie préférentielle de contamination bactérienne du poumon profond, certains germes, dont le S. aureus, possèdent en outre la capacité de pouvoir coloniser le tissu pulmonaire par voie hématogène. Le portage de S. aureus concernant 30 à 50% de la population normale, il est très fréquent que, à partir habituellement d’infections cutanées superficielles, on observe une diffusion hématogène du S. aureus. Cette diffusion est favorisée par les enzymes protéolytiques sécrétées par le staphylocoque et également par la coagulase propre au S. aureus qui permet la formation de thrombus favorisant l’adhésion du germe aux cellules endothéliales puis l’invasion tissulaire et la formation d’abcès (Lowy et al, 1998). De par sa position de «premier filtre » sur le courant sanguin veineux, le poumon est particulièrement exposé à la survenue d’infections « métastatiques » secondaires à un foyer suppuré staphylococcique. La formation d’abcès pulmonaires, souvent multiples, est donc une éventualité relativement fréquente en cas de bactériémie à S. aureus. La figure suivante résume les mécanismes de formation de ces abcès.

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Figure 1 : Pathogénie de l’invasion des tissus par S aureus (de la gauche vers la droite sur la figure).

Les lésions endovasculaires induisent la formation d’un thrombus plaquettes/fibrine (PFT) auquel les bactéries s’attachent par des mécanismes probablement médiés via les MSCRAMMs. Une adhérence directe aux cellules endothéliales est également possible. Après phagocytose, la bactérie sécrète des enzymes protéolytiques qui facilitent l’invasion tissulaire. Elle induit en outre une réaction inflammatoire avec afflux, adhésion et diapédèse de polynucléaires conduisant à une majoration des destructions tissulaires et à la formation d’abcès. D’après Lowy (Lowyet al, 1998)

La physiopathologie des infections pulmonaire à S. aureus peut donc revêtir des aspects tout à fait différents selon que la voie de contamination est l’inhalation de bactéries ou une infection survenant par voie hématogène. Cette dualité rend l’étude des pneumonies à S. aureus particulièrement délicate d’autant que les aspects cliniques et radiologiques de ces infections peuvent être relativement proches et ne sont habituellement pas distingués dans les descriptions des pneumonies staphylococciques (Klein et al, 1998). Cependant, les structures impliquées, bien qu’appartenant au parenchyme pulmonaire, peuvent être remarquablement différentes puisqu’en cas de pneumonie par inhalation, c’est l’épithélium respiratoire qui est ciblé en premier lieu, avec possibilité d’atteinte directe des surfaces d’échange gazeux alors qu’en cas de pneumopathie hématogène, l’atteinte bactérienne concernera d’abord le tissu de soutien interstitiel, les zones d’échange respiratoire n’étant atteintes que par contiguïté.

Quel que soit le mode de contamination, à côté des facteurs « extrinsèques », la physiopathologie des pneumonies staphylococciques est très certainement supportée par

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des éléments liés à la souche bactérienne elle-même. Cette hypothèse est confirmée, au moins en ce qui concerne les infections liées aux souches produisant la PVL, par le nombre d’infections bactériennes beaucoup plus faible que ne le voudrait la fréquence du portage de staphylocoque et des situations dans lesquelles ce portage coexiste avec une infection virale.

4. Facteurs bactériens de pathogénie locale

L’espèce S. aureus possède de nombreux facteurs de virulence lui permettant d’acquérir les éléments nécessaires à sa survie et d’échapper aux défenses de l’hôte. Dans une revue extensive des facteurs de virulence impliqués dans les infections respiratoires, Parker et al distinguent, outre les facteurs d’adhésion déjà cités, les éléments permettant la survie intracellulaire, les systèmes d’acquisition du fer, les facteurs modifiant la réponse immunitaire et les toxines cytolytiques (Parker et al, 2012).

a) Systèmes d’acquisition du fer

L’acquisition de fer à partir de l’environnement est essentielle au métabolisme bactérien et S. aureus est capable de produire des sidérophores fixant le fer ainsi que deux systèmes d’acquisition de l’hème permettant l’extraction de fer à partir de l’hémoglobine. Le système fur (ferric uptake regulator) détecte les situations de carence en fer et régule l’expression de certains facteurs de virulence (Torres et al, 2010). Ainsi, l’expression des exotoxines serait inhibée en présence de fer, au profit des systèmes de transport et des protéines immunomodulatrices (Torres et al, 2010). L’une des implications importantes de l’existence d’une telle régulation est que, en fonction de la présence ou non de fer mais également en fonction de l’espèce concernée, il est possible d’observer des différences importantes dans l’expression de certains facteurs de virulence. Ainsi, S. aureus ayant une affinité plus importante pour l’hémoglobine humaine par rapport à l’hémoglobine murine (Pishchany 2010), les gènes fur pourraient, par compensation, être plus exprimés chez la souris, contribuant à une moindre expression de certains facteurs de virulence dans les modèles murins de pneumonie staphylococcique (Parker et al, 2012).

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b) Facteurs modifiant la réponse immunitaire

x Protéine A (SpA)

La protéine A est une protéine de surface, exprimée en abondance chez tous les S. aureus. Elle possède la capacité de fixer les immunoglobulines G et son rôle en tant que facteur de virulence a été démontré pour des modèles de sepsis et de pneumonie staphylococcique (Bubeck-Wardenburg et al, 2007). Parmi les mécanismes impliqués dans la virulence, SpA se fixerait au niveau du récepteur principal du TNF (TNFR1), entrainant l’activation du TNF et de la cascade inflammatoire (Gomez et al, 2004). Un autre mode d’action de SpA impliquerait la fixation au récepteur EGFR (Epithelial Growth Factor Receptor) exprimé à la surface des cellules épithéliales, cette fixation entrainant également une réponse pro-inflammatoire (Parker et al, 2012).

x Phénol-soluble modulins (PSM)

Il s’agit de petits peptides, détectés initialement chez S. epidermidis possédant la capacité d’induire la production de cytokines et donc une activité pro-inflammatoire. Elles provoqueraient le recrutement, l’activation et la lyse des polynucléaires et joueraient un rôle dans la virulence dans certains modèles d’infection cutanée (Kretschmer et al, 2010). Le rôle de ces PSM dans les infections respiratoires n’est pas démontré in vivo mais elles permettraient au S. aureus de « s’échapper » des endosomes au niveau des cellules épithéliales respiratoires (Parker et al, 2012). Les PSM semblent liées à la résistance à la méticilline, un gène de PSM ayant même été identifié au sein de l’ilot SCCmec qui contient le gène mecA codant la protéine de liaison conférant la résistance à la méticilline (Queck et al, 2009). L’action des PSM pourrait en partie expliquer le succès épidémiologique dans la communauté de certaines souches de SARM telle la souche USA 300 qui produiraient des quantités inhabituellement élevées de PSM (Li et al, 2009).

x Superantigènes (SuperAg)

Le rôle des superantigènes dans la pathogénie de certaines infections sévères à S. aureus est démontré depuis longtemps (Schlievert et al, 1986). Il s’agit d’exoprotéines capables d’activer de façon polyclonale les lymphocytes T en établissant des liaisons non spécifiques entre les cellules présentatrices d’antigène et la chaine V béta du récepteur des cellules T

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(Schlievert et al, 1991). La conséquence clinique la plus sévère de cette activation lymphocytaire est le syndrome de choc toxinique staphylococcique et il est vraisemblable que la libération massive de cytokines observée en cas de choc toxinique puisse avoir un retentissement respiratoire. Néanmoins, même si des chocs toxiniques à point de départ pulmonaire ont été décrits, les liens entre l’activité superantigénique de S. aureus et les infections respiratoires ne sont pas clairement établis (Parker et al, 2012).

c) Toxines cytolytiques

S. aureus produit de nombreux facteurs cytotoxiques pouvant être responsables de lésions des cellules de l’arbre respiratoire. Certains d’entre eux sont d’origine chromosomique (α hémolysine, β et δ toxines) alors que d’autres sont codés par des éléments génétiques mobiles et ne sont donc pas présents chez toutes les souches.

x Hémolysine α

Il s’agit d’une protéine codée par le gène hla et qui induit la formation de pores dans les membranes cellulaires de l’hôte. L’expression du gène hla est activée par le système de régulation agr (acessory gene regulator) dont nous présenterons le fonctionnement de manière plus approfondie dans la partie consacrée à la PVL. Au niveau de l’épithélium respiratoire, l’hémolysine α a été associée à un influx intracellulaire de calcium, une activité pro-inflammatoire via la sécrétion d’IL1β et d’IL-18 et une altération des mouvements ciliaires (Rose et al, 2002). Elle augmente également la perméabilité vasculaire, ainsi que la perméabilité des cellules épithéliales et provoque des lésions des cellules endothéliales (McElroy et al, 1999). Le rôle de l’hémolysine α comme facteur de virulence dans les pneumonies staphylococciques a été démontré dans des modèles murins comparant des souches sauvages et des souches délétées du gène hla , les souches ne produisant pas l’hémolysine α étant associées à une baisse significative de la mortalité (Bubeck Wardenburg et al, 2007). La même équipe a par ailleurs montré une corrélation entre le niveau d’expression du gène hla et la virulence chez la souris et qu’une vaccination induisant des anticorps anti hémolysine α était susceptible de protéger les souris inoculées ultérieurement par des doses létales de S. aureus (Bubeck-Wardenburg et al, 2008). Comme d’autres facteurs de virulence, l’hémolysine α serait exprimée à des niveaux particulièrement élevés par certaines souches de SARM communautaires (Li et al, 2009).

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24 x Toxines β et δ

Le rôle des toxines βet δ de S. aureus dans les infections respiratoires a été beaucoup moins étudié. Il s’agit de toxines ciblant les globules rouges qui pourraient intervenir dans les mécanismes de captation du fer. Elles interagissent également avec les monocytes et les polynucléaires neutrophiles et il a été montré que l’instillation de béta toxine purifiée pouvait inhiber les battements ciliaires (Kim et al, 2000). L’action sur l’épithélium respiratoire serait au moins en partie liée aux interactions avec les polynucléaires car les lésions respiratoires seraient moins marquées chez les souris neutropéniques (Parker et al, 2012).

x La leucocidine de Panton-Valentine (PVL)

Le rôle de la PVL dans les pneumonies staphylococciques humaines fait l’objet de notre travail et sera donc développé dans la deuxième partie. Le rôle de la PVL en tant que facteur de virulence est au centre d’une controverse depuis le début des années 2000 en raison des résultats discordants des modèles animaux. Ainsi, certains modèles ont montré que la PVL était un facteur de virulence important des pneumonies staphylococciques (Labandeira-Rey et al, 2007 ; Diep et al, 2010) alors que pour d’autres, la PVL n’était pas associée à une sévérité particulière (Villaruz et al, 2008 ; Otto et al, 2010). Nous reviendrons également en détails sur les éléments de cette controverse.

Quoi qu’il en soit, l’une des particularités importantes de la PVL par rapport à la plupart des facteurs de virulences évoqués précédemment est qu’il s’agit d’une toxine dont les gènes, portés par un élément génétique mobile et non par le génome bactérien, ne sont présents que chez un pourcentage limité de souches, évalué à 2% en France (Prévost et al, 1995). Cette particularité permet l’étude directement chez l’homme des effets de la PVL par comparaison clinique des pathologies dues à des souches porteuses des gènes codant la PVL avec des infections dues à des souches PVL négatives.

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II.

La leucocidine de Panton-Valentine (Panton-Valentine Leucocidin

ou PVL)

A.

Les toxines synergo-hyménotropes (SHT)

1. Généralités

La PVL appartient au groupe des toxines synergo-hyménotropes (SHT). Il s’agit d’exoprotéines staphylococciques, associées le plus souvent à l’espèce S. aureus, et caractérisées par trois propriétés communes :

- Chaque toxine est formée de deux types de protéines différenciées sur la base de leur vitesse d’élution chromatographique. Il s’agit donc de l’association d’une ou plusieurs protéines de classe S (S pour Slow eluted) avec une ou plusieurs protéines de classe F (F pour Fast eluted). L’association de ces protéines, biologiquement inactives lorsqu’elles sont isolées, agit de façon synergique sur la membrane de certains leucocytes (polynucléaires, monocytes, macrophages…) avec une activité variable en fonction de l’espèce des cibles.

- La structure protéique des composés constituant les différentes toxines est apparentée avec une homologie de séquence peptidique comprise entre 60 et 97% pour une classe donnée (S ou F).

- Le mode d’action biologique de ces leucotoxines est voisin : la protéine de classe S se fixe sur un récepteur membranaire leucocytaire, formant un complexe protéine S / récepteur sur lequel vient se fixer la protéine F ; cette seconde fixation déclenchant l’activation de la toxine. La leucocidine activée provoque la formation de pores membranaires induisant la lyse cellulaire par choc osmotique.

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2. La gamma-hémolysine

La gamma-hémolysine est la SHT la plus fréquemment rencontrée puisqu’elle est produite par plus de 99% des souches cliniques de S. aureus (Prévost et al, 1995). Son locus chromosomique comporte trois gènes codant respectivement deux protéines de classe S (HlgA et HlgC) et une protéine de classe F (HlgB) (Cooney et al, 1993 ; Prévost et al, 1995). Hlg A et Hlg C, composés de classe S, sont structurellement proches de LukS-PV qui est le composé de classe S de la PVL avec respectivement 65% et 72% d’identité. De même, HlgB présente 75% d’identité avec LukF-PV qui est le composé F de la PVL. La combinaison des différents types de protéines aboutit à deux entités distinctes, HlgA + HlgB et HlgC + HlgB ; qui, bien qu’étant toutes deux des gamma-hémolysines, n’ont pas des propriétés biologiques strictement superposables. Ainsi, le couple HlgA + HlgB est actif sur les PNN de nombreuses espèces de mammifères (Prévost et al, 1995) : homme, lapin, bœuf, singe, mouton, chien et possède une activité hémolytique sur les hématies de lapin et d’homme ainsi qu’une activité sur certains lymphocytes T humains. La paire HlgC + HlgB possède les mêmes propriétés leucotoxiques mais n’est hémolytique que pour les hématies de lapins. En fonction du niveau de production respectif de chaque type de gamma-hémolysine, il peut donc exister des différences d’activité marquées d’autant que, pour certaines souches, il semble que la synthèse de gamma-hémolysine puisse être complètement réprimée suite à des altérations du cadre de lecture d’un ou plusieurs gènes hlg.

3. LukD et LukE

De découverte plus récente, le complexe LukD-LukE appartient également au groupe des SHT et présente donc 65 à 80% d’identité avec les protéines de classe S pour LukE et le même score de similitude avec les protéines de classe F pour LukD (Gravet et al, 1998). Les gènes codant ces deux composés sont retrouvés chez près de 90% des souches de S. aureus mais le niveau d’expression de ces gènes est bien moindre puisque le composé LukD-LukE n’a été repéré que chez 28% des souches cliniques (Prévost et al, 1995). Le spectre d’activité in vitro est large, LukD-LukE étant actif sur les lymphocytes T, les PNN, les monocytes, les macrophages et les cellules dendritiques. Le complexe LukD-LukE n’a pas d’activité

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hémolytique et le rôle pathogène de LukD-LukE dans l’arsenal de toxine de S. aureus n’est pas clairement établi en clinique.

4. Une SHT rare : la PVL

Contrairement à la gamma-hémolysine et à LukD-LukE, les gènes codant les deux composants de la PVL ne sont présents que chez un nombre limité de souches de S. aureus. Avant l’émergence, au cours des dix dernières années, des souches de SARM communautaires (C-SARM), qui sont pour la plupart porteuses des gènes lukS-PV et lukF-PV codant les deux composants de la PVL, l’incidence des souches PVL + était estimée à seulement 2% des souches cliniques en France (Finck-Barbancon et al, 1991 ; Prévost et al, 1995). Depuis les années 2000, l’incidence des souches PVL + tend à augmenter parallèlement à l’émergence des C-SARM mais, en dehors de certaines zones urbaines des USA, les staphylocoques susceptibles de produire la PVL restent largement minoritaires. Au total, en fonction de l’équipement génétique de la souche, les capacités spécifiquement leucotoxiques de S. aureus peuvent être supportées par la combinaison de une ou plusieurs toxines possédant de nombreux points communs tant sur le plan structurel que sur celui des propriétés biologiques. La figure suivante résume les différentes combinaisons possibles et leur fréquence estimée à partir de 309 souches cliniques collectées en France (Prévost et al, 1995)

Figure 2 : La famille des leucotoxines staphylococciques : schéma des différentes combinaisons des gènes

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B.

Caractéristiques de la PVL

1. Historique

Au cours d’une étude portant sur les propriétés hémolytiques et leucotoxiques de 22 souches de S. aureus isolées à partir de différentes pathologies humaines, Panton et Valentine ont établi l’existence d’une leucotoxine (ou leucocidine) capable de provoquer une altération des PNN et des macrophages humains alors qu’elle ne produisait pas d’hémolyse (Panton & Valentine, 1932). Cette toxine sera nommée « Panton-Valentine Leucocidin » par Wright en 1936 pour la différencier des toxines possédant d’autres propriétés que la leucotoxicité et notamment des capacités hémolytiques (Wright, 1936). En 1957, Gladstone et Van Heyningen démontrent que la PVL possède une spécificité d’espèce en ce qui concerne ses cibles cellulaires : Les PNN, les monocytes et les macrophages de l’homme et du lapin sont altérés par la PVL alors que les leucocytes de souris, de rats, de cobaye et de mouton ne sont pas sensibles à l’action de la toxine (Gladstone & Van Heyningen, 1957). En 1960, Woodin confirme cette spécificité d’espèce et montre que les leucocidines sont formées de deux composés distincts agissant de façon synergique mais ces travaux ne permettent cependant pas la distinction entre gamma-hémolysine et PVL (Woodin et al, 1960). En 1991, Finck-Barbançon et al séparent les composés S et F de la PVL par chromatographie et montrent que la PVL semble particulièrement associée à certains types d’infections cutanées primitives (Finck-Barbançon et al, 1993). A contrario, la fréquence des gènes codant la gamma-hémolysine chez S. aureus ne permet pas de la rattacher à une quelconque présentation clinique (Prévost et al, 1995). Le clonage des gènes codant LukS-PV et LukF-PV est obtenu par Prévost en 1995, à partir de la souche utilisée par Woodin en 1960 et individualise ainsi clairement la PVL des autres SHT (Prévost et al, 1995)

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2. Activité biologique de la PVL

Les cellules cibles de la PVL chez l’homme sont donc les PNN, les monocytes et les macrophages. Comme pour les autres SHT, l’activation de la PVL passe par la fixation séquentielle des différents composés.

a) Fixation aux cellules cibles

Les récepteurs cellulaires de la PVL sur les PNN n’ont été que très récemment identifiés. Il s’agit du récepteur pour le composé C5a du complément et dans une moindre mesure du récepteur C5L2, tous deux exprimés par les cellules myéloides : PNN et monocyte-macrophages (Spaan et al, 2012). Cependant, l’existence d’un voire de plusieurs récepteurs spécifiques avait été prédite car d’une part, la fixation de LukS-PV est un préalable nécessaire à la fixation secondaire de LukF-PV qui permettra d’obtenir un oligomère actif (Colin et al, 1996) et d’autre part, la liaison de de LukS-PV avec la cellule ne peut être obtenue qu’à partir d’un certain stade de maturation du PNN, au-delà du stade promyélocyte (Morinaga et al, 1988). Il était donc vraisemblable que le récepteur de LukS-PV ne soit présent à la surface des PNN qu’à partir du stade métamyélocytaire. Les capacités de fixation des cellules cibles sont très importantes puisque Gauduchon et al ont pu montrer que plusieurs dizaines de milliers de molécules de LukS-PV pouvaient se lier dans le même temps (Gauduchon et al, 2001). L’affinité de LukS-PV varie en fonction des cellules avec une affinité plus importante pour les monocytes que pour les PNN. Néanmoins, la densité des récepteurs à la surface des cellules est également fonction du type de cellule et cette fois, il semblerait que les PNN possèdent au moins deux fois plus de sites de fixation de LukS-PV que les monocytes. Outre le type de cellule, d’autres facteurs semblent susceptibles d’influencer l’expression du ou des hypothétiques récepteurs. Ainsi, la protéine kinase C aurait un rôle de régulation du nombre ou de l’affinité des récepteurs puisque l’activation préalable de cette enzyme conduit à une diminution significative de la fixation de LukS-PV (Gauduchon et al, 2001).

Selon le modèle le plus couramment admis, commun à toutes les toxines synergohyménotropes, la fixation de LukS-PV au récepteur membranaire est suivie de l’incorporation de LukF-PV puis d’une oligomérisation alternée des composés S et F

Références

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