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B. Caractéristiques de la PVL

2. Activité biologique de la PVL

2. Activité biologique de la PVL

Les cellules cibles de la PVL chez l’homme sont donc les PNN, les monocytes et les macrophages. Comme pour les autres SHT, l’activation de la PVL passe par la fixation séquentielle des différents composés.

a) Fixation aux cellules cibles

Les récepteurs cellulaires de la PVL sur les PNN n’ont été que très récemment identifiés. Il s’agit du récepteur pour le composé C5a du complément et dans une moindre mesure du récepteur C5L2, tous deux exprimés par les cellules myéloides : PNN et monocyte-macrophages (Spaan et al, 2012). Cependant, l’existence d’un voire de plusieurs récepteurs spécifiques avait été prédite car d’une part, la fixation de LukS-PV est un préalable nécessaire à la fixation secondaire de LukF-PV qui permettra d’obtenir un oligomère actif (Colin et al, 1996) et d’autre part, la liaison de de LukS-PV avec la cellule ne peut être obtenue qu’à partir d’un certain stade de maturation du PNN, au-delà du stade promyélocyte (Morinaga et al, 1988). Il était donc vraisemblable que le récepteur de LukS-PV ne soit présent à la surface des PNN qu’à partir du stade métamyélocytaire. Les capacités de fixation des cellules cibles sont très importantes puisque Gauduchon et al ont pu montrer que plusieurs dizaines de milliers de molécules de LukS-PV pouvaient se lier dans le même temps (Gauduchon et al, 2001). L’affinité de LukS-PV varie en fonction des cellules avec une affinité plus importante pour les monocytes que pour les PNN. Néanmoins, la densité des récepteurs à la surface des cellules est également fonction du type de cellule et cette fois, il semblerait que les PNN possèdent au moins deux fois plus de sites de fixation de LukS-PV que les monocytes. Outre le type de cellule, d’autres facteurs semblent susceptibles d’influencer l’expression du ou des hypothétiques récepteurs. Ainsi, la protéine kinase C aurait un rôle de régulation du nombre ou de l’affinité des récepteurs puisque l’activation préalable de cette enzyme conduit à une diminution significative de la fixation de LukS-PV (Gauduchon et al, 2001).

Selon le modèle le plus couramment admis, commun à toutes les toxines synergohyménotropes, la fixation de LukS-PV au récepteur membranaire est suivie de l’incorporation de LukF-PV puis d’une oligomérisation alternée des composés S et F

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aboutissant à la formation d’un complexe moléculaire heptamèrique de type tonneau-β. Ce complexe, constituant la PVL proprement dite, est perpendiculaire au plan de la membrane cellulaire et aboutit à la formation d’un pore hétéro-octamérique responsable des effets toxiques (Miles et al, 2006) (figure 3)

Figure 3 : Mécanisme de fixation séquentielle et d’assemblage des monomères de LukS-PV et LukF-PV pour

former la PVL active. D’après Miles et al (Mileset al, 2006)

Ce modèle de fixation séquentielle faisant intervenir d’abord la fixation de LukS-PV sur un hypothétique récepteur suivi de la fixation de LukF-PV sur le complexe ainsi formé est contredit par certains travaux montrant que le complexe LukS-PV / LukF-PV est inactif si les deux sous-unités ne sont pas reliées chacune à un récepteur membranaire spécifique. Selon ce modèle, il n’existerait non pas un récepteur cellulaire mais au moins deux, reconnaissant chacun spécifiquement les composés S et F de la PVL (Meyer et al, 2009). La formation de l’hétéropolymère actif ferait alors suite à l’interaction des deux sous unités S et F après fixation sur leurs récepteurs propres (figure 4).

Figure 4 : (I) : Représentation schématique de la fixation des composés S et F sur leurs récepteurs respectifs (Rs

et Rs) conduisant à l’ouverture d’un pore et de canaux calcique (C). (II) Selon ce modèle, la fixation du composé F sur le complexe Luk-S/récepteur est inactive. D’après Meyer et al (Meyeret al, 2009)

Récepteur LukS-PV

Leucocidine de Panton-Valentine

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b) Formation de pores membranaires

L’action de la PVL sur les cellules cibles se traduit par des modifications morphologiques avec une turgescence des cellules, une diminution de la réfringence en microscopie en contraste de phase et une ballonisation des noyaux traduisant la mort cellulaire (Gladstone & Van Heyningen, 1957). Ces modifications sont la conséquence de la formation de pores dans la membrane des granulocytes (Finck-Barbançon et al, 1993). Précédant la formation des pores proprement dits, l’activation de la PVL induit l’ouverture de canaux membranaires spécifiques d’ions divalents, provoquant ainsi un influx calcique important et irréversible. La présence de calcium semble donc être un élément fondamental de l’action de la PVL car, en l’absence de calcium, la formation de pores est retardée. Le calcium agirait donc soit directement sur l’activation de la PVL, soit en interagissant positivement dans les mécanismes d’interaction PVL-récepteur membranaire. Après l’ouverture des canaux calciques, les pores membranaires de grande taille se forment, entrainant un influx de sodium et une fuite de potassium ainsi que d’autres constituants intracellulaires. Ces modifications ioniques sont responsables de la mort cellulaire par choc osmotique (Meunier et al, 1995). En 1999, Baba Moussa et al ont montré que l’ouverture des canaux calciques et la formation des pores membranaires étaient deux phénomènes indépendants mais complémentaires pour la toxicité de la PVL. Ainsi, l’ouverture des canaux calciques serait responsable d’une activation des cellules cibles alors que la formation des pores induirait la lyse cellulaire (Baba Moussa et al, 1999). Néanmoins, ce mécanisme de lyse cellulaire directe par action « mécanique » ne se produit que lorsque la concentration de PVL est suffisamment élevée. Ainsi, en étudiant les effets de différentes concentrations de PVL recombinante sur les PNN, Genestier et al ont pu montrer que, si de fortes doses de PVL (200nM) induisaient la nécrose des PNN via les mécanismes décrits précédemment, la PVL à plus faible concentration (5 nM) ne provoquait plus de nécrose mais des phénomènes d’apoptose conduisant également à la mort cellulaire. La voie apoptotique induite par la PVL serait indépendante de la protéine pro-apoptotique Bax mais mettrait en jeu la caspase-9 et la caspase-3. Ces caspases agissent via la mitochondrie et le modèle proposé, résumé par la figure 5, comporterait la formation de pores dans la membrane mitochondriale responsable de la libération de protéines pro-apoptotiques telle que le cytochrome c (Genestier et al, 2005).

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Figure 5 : Mécanisme d’action de la PVL sur les PNN à concentration infra-lytiques. Après internalisation, la PVL

induit la formation de pores dans la membrane mitochondriale provoquant la libération de cytochrome C et l’activation des caspases 9 et 3 D’après Boyle-Vavraet al, (Boyle-Vavraet al, 2007)

Outre ces phénomènes d’apoptose, la PVL, lorsqu’elle est présente à des concentrations sub-lytiques, est capable de moduler l’activation des cellules cibles et notamment la libération de plusieurs médiateurs de l’inflammation. Récemment, il a été montré que l’un des mécanismes de cette réponse inflammatoire dans les infections pulmonaires pourrait être une fixation directe de la PVL sur les récepteurs « Toll-like » de type 2 (TLR2) des macrophages alvéolaires. Cette fixation entrainerait l’activation du facteur NF kappa B et l’activation de signaux pro-inflammatoires. Contrairement à la formation de pores membranaires qui nécessite la PVL complète, la sous-unité Luk-S semble suffisante pour induire ce type de réponse (Zivkovic et al, 2011). Cependant, cette hypothèse est contestée car l’action de la PVL sur les TLR2 n’a jamais pu être observée par d’autres équipes et une contamination par du lipopolysaccharide au cours de l’expérience n’est pas exclue.

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c) Libération de médiateurs de l’inflammation

La fixation de la PVL induit l’activation des cellules cibles via l’ouverture des canaux calciques et la transduction de signaux transmembranaires. La principale conséquence de cette activation induite par la PVL est la libération de quantités importantes de médiateurs de l’inflammation. Cette action pro-inflammatoire a été montrée pour le leucotriène B4, l’interleukine-8 et l’histamine.

x Libération de leucotriène B4

La PVL à concentration sub-lytique active la 5-lipoxygénase qui est nécessaire à la formation du leucotrène-B4 (LTB4) et inhibe la dégradation du LTB4 en composés inactifs (Hensler et al, 1994). Le LTB4 agit in vivo comme un facteur chimiotactique puissant, capable d’attirer de grandes quantités de polynucléaires neutrophiles et éosinophiles vers le foyer inflammatoire. Il agit également en provoquant la dégranulation des polynucléaires qui génère la libération d’enzymes de dégradation tissulaire, la libération d’ions superoxydes et favorise l’adhérence puis la diapédèse du PNN. Cette libération de facteurs toxiques est susceptible d’induire d’importantes lésions tissulaires locales ; ces lésions étant d’autant plus sévères que le chimiotactisme induit un afflux massif de polynucléaire au site de l’inflammation. Dans un second temps, il semblerait que la PVL soit capable, a contrario, d’inhiber la production de LTB4 par les PNN en réponse à un stimulus extérieur, réduisant ainsi les capacités de défense antibactérienne et favorisant donc l’invasion et la multiplication bactérienne (Hensler et al, 1994).

x Libération d’interleukine-8

La PVL est également capable d’induire, toujours à des concentrations sublytiques, la libération d’interleukine-8 (IL-8) (Konig et al, 1995). Les effets de cette cytokine pro-inflammatoire sont proches de ceux observés avec le LTB4 dont elle induit d’ailleurs la production. L’IL-8 est produite par les monocytes, les granulocytes mais également par les cellules endothéliales et épithéliales ; elle est un puissant facteur chimiotactique des PNN. La production d’IL-8 entretient donc le flux des PNN vers le foyer d’inflammation et provoque leur prolifération et leur différentiation. Elle induit également, soit directement, soit par l’intermédiaire du LTB4, la dégranulation des PNN, la production d’enzymes lytiques et d’ions superoxydes. La production d’IL-8 amplifie donc les lésions tissulaires, là encore de façon d’autant plus importante que l’afflux de PNN est massif.