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Article pp.93-98 du Vol.4 n°1 (2006)

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Academic year: 2022

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Algora Formation Ouverte et Réseaux est une association qui développe des activités d’étude, d’audit, de conseil, d’assistance technique et de professionnalisation des acteurs de la formation ouverte et à distance (FOAD). Elle gère, pour le compte de la Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP), le programme FORE et le réseau des APP (ateliers de pédagogie personnalisée).

Propos recueillis par Laurent Petit pour Distances et savoirs

LAURENT PETIT Vous avez participé aux 3 jurys Campus numériques en 2000, 2001 et 2002 au titre de représentant du secteur privé. Pouvez-vous nous en dire davantage sur votre parcours ?

CLAUDE LÉPINEUX De 1987 à 1995, j’ai été consultant chez Cegos sur les questions de management de projets, de pédagogie et les problématiques de démultiplication en formation ; de 1995 à 1999, j’ai été responsable de la formation continue à la Direction des ressources humaines (DRH) des AGF ; de 1999 à 2004, j’ai dirigé Demos Training, filiale e-learning de Demos, aujourd’hui devenue Demos e-learning agency ; depuis 2004, en tant que responsable du développement chez Algora, je suis chargé de développer l’activité de prestations auprès des entreprises privées, des universités (audit sur des campus numériques), de branches professionnelles, d’organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) ou de régions.

Ces prestations représentant aujourd’hui 25 à 30 % de notre budget. Algora peut aussi réaliser des études autofinancées, sur les coûts par exemple1.

Quelle vision du développement des TIC dans l’université vous a donné votre première participation au jury en 2000 ?

C. L.  Les universités ont réagi mais avec un léger retard par rapport au monde de l’entreprise dans la manière de poser les problèmes. Les projets que j’ai eu l’occasion d’examiner étaient le plus souvent des demandes de subventions pour des outils à créer ou à acheter (des plates-formes par exemple). Les prestations étaient le plus souvent absentes, l’entrée par l’infrastructure semblait alors suffisante. Mais il y avait aussi des projets un peu plus avancés qui souhaitaient réaliser des contenus ; d’autres encore en étaient à l’étape ultérieure : des contenus

1. « E-formation : l’heure des comptes ? », A. Coulon, G. Layole, C. Lepineux, Entreprise&Personnel, Algora, février 2006. Téléchargeable sur www.algora.org

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pour une cible précise. D’une manière générale, j’ai été frappé par l’absence de culture de projet et l’absence d’étude de marché. Comme si les universitaires avaient été eux aussi victimes de la bulle Internet et pensaient pouvoir toucher facilement un public potentiel de milliers de personnes dans le monde. Bref, pour résumer, je dirais que la difficulté de présenter des offres pragmatiques de service était patente. Ce qui n’empêche pas qu’étaient déjà visibles de réels savoir-faire portés par des passionnés qui ne se préoccupaient pas trop de questions transversales comme le positionnement des chefs de projet. Nous avions affaire à des militants, des évangélistes utopistes qui travaillaient davantage à l’articulation de leur domaine et de la technologie que sur l’innovation pédagogique. Le monde universitaire est en effet plutôt traditionnel sur cet aspect. La pédagogie participative ou par projets est davantage le fait de lieux contraints, avec en face des clients et non des inscrits. Ou bien l’innovation pédagogique à l’université résulte d’initiatives individuelles mais sans masse critique et avec un manque criant d’institutionnalisation.

Quelles évolutions dans les projets présentés par les universités avez-vous décelées aux 2e et 3e appels, respectivement en 2001 et 2002 ?

C. L.  J’y ai vu par la suite d’excellents projets avec des quasi « business plan » pour certains, tels que l’on peut les imaginer dans les universités américaines ou dans les entreprises. La deuxième année, deux questions se sont posées au jury : quelle formation à la conduite de projet et quelle évaluation ?

A partir de la 2e année, et plus encore lors du 3e appel à projets, on a vu apparaître une culture de la prestation sur des projets gigantesques mais aussi plus modestes (100 à 200 personnes) mais qui marchent, bref des projets plus pragmatiques, davantage intégrés à la réalité du modèle pédagogique dans lequel ils évoluent. Au lieu de vouloir le révolutionner d’emblée, on part du modèle dominant2 et on cherche à mettre en place des prestations pour faire évoluer ce modèle. A mon sens, il faut d’abord compléter l’existant et respecter les acteurs avec leurs caractéristiques culturelles. Or, dans le système français, un professeur n’est pas au service de ses étudiants : c’est une donnée, il faut la respecter. La culture de l’évaluation par les étudiants est beaucoup plus répandue à l’étranger, au Québec par exemple. L’université française n’est pas dans ce modèle, ni l’entreprise privée française d’ailleurs : seul l’échelon du haut évalue celui du bas. Or, le e-learning permet une évaluation immédiate du service : est-ce que les étudiants se sont connectés ou pas ? C’est cinglant pour tout le monde. Ce n’est pas la même chose pour un cours en amphi.

Pour revenir à votre question, je suis parti d’un jugement initial marqué par le scepticisme et je suis arrivé à l’idée qu’il faut accepter de jouer le rôle d’impulseur de projets pour faire que des initiatives se mettent en place. C’est exactement la même chose que pour les capitaux à risques : une manière d’impulser en acceptant la

2. Le modèle d’enseignement simultané caractérisé par le cours magistral, le TP et le TD (NDLR).

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perte. Ces 3 appels à projets ont finalement été une manière de mobiliser sur des questions transversales, d’opérer des regroupements (très nets lors du 3e appel), de pousser à l’institutionnalisation (d’une initiative individuelle à la constitution d’une équipe projet par exemple).

Avec le recul, quel jugement portez-vous sur la stratégie consistant à favoriser la création de consortiums en vue de structurer une offre de FOAD de niveau universitaire, compétitive à l’international ?

C. L.  Les consortiums dont vous parlez avaient plusieurs bases possibles : un territoire (une région le plus souvent), un domaine disciplinaire, un rapprochement privé/public. Ce dernier type de rapprochement me semble une bonne chose à partir du moment où les règles du jeu sont claires, il y a des a priori idéologiques de part et d’autre : comment expliquer sinon la faible part de marché des universités en France dans la formation permanente ? Cependant, il y a des zones de coopération possible et j’y suis très attaché. D’ailleurs, le fait d’être présent dans le jury dès la 1e année en tant que représentant du secteur privé a été pour moi une bonne surprise.

Faire se côtoyer les deux milieux, à la fois sur la partie recherche et la partie enseignement est indispensable. Je suis frappé par ce cloisonnement et, dans les grands organismes (ministères, entreprises), l’ignorance de ce que disent les chercheurs sur ces questions est grande.

Cette opération a indéniablement permis de mailler des gens. Sur le plan international, elle a incité l’université à s’ouvrir, dans le respect des cultures, ce point me semble fondamental. Prenons l’exemple de l’opération Open Course Ware du MIT3. C’est une opération de notoriété judicieusement pensée par des gens qui en ont les moyens ; le nombre de cours disponibles et son évolution est une question très secondaire : quelle est la réalité 3-4 ans après le lancement ? Qui va effectivement aller voir ? Cela illustre bien les différences de culture entre la France et les Etats-Unis. Dans les deux cas, les professeurs sont sensibles à la notoriété.

Mais il y a une dimension marketing beaucoup plus forte aux Etats-Unis, dans des institutions plus prestigieuses, alors qu’en France, il y a un tabou sur ces questions.

Mettre des cours systématiquement à disposition de tous sur les fondamentaux renforcerait l’image de l’université française (dans le but de faire venir des étudiants), l’accès au cours n’étant évidemment pas l’accès au savoir.

Trois années, était-ce suffisant pour pérenniser ces projets ?

C. L.  Je le répète, ces appels à projets ont permis de donner des subventions pour impulser et non pas pour se substituer à : c’est un starter institutionnel, à l’université ou au consortium de prendre ensuite le relais. Trois ans me semblent constituer une bonne fenêtre. Nous avons eu l’occasion de réaliser l’audit de quelques campus dans des universités qui avaient justement des problèmes de financement après l’épuisement des sommes reçues lors de ces appels à projets. La

3. http://ocw.mit.edu

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question est difficile à régler mais on y arrive avec une volonté politique forte et si le projet a du sens. Bref, ces appels à projets ont permis de sortir de l’illusion d’une université en ligne générale. Les projets qui ont réussi ne sont pas forcément ceux qui étaient les meilleurs au départ mais ceux qui ont su évoluer, sur des périmètres pragmatiques et réalistes.

Entre-temps, la donne a changé. Deux phénomènes techniques parallèles ont poussé l’offre depuis 2000 : la baisse du coût d’achat des techniques, l’envolée des connexions privées à haut débit via l’ADSL (25 millions de connectés en France aujourd’hui). L’enjeu d’aujourd’hui n’est pas technique mais peut se formuler ainsi : comment maille-t-on concrètement les prestations de e-learning avec les activités de fond d’une institution (pour l’université, donner des cours et diplômer des jeunes) ? Le capital de l’université, c’est la connaissance, pas l’infrastructure technique : la plate-forme, il faut la vivre comme jetable. Pour cela, il faut se fixer des objectifs très réalistes : dans 3 ans, on aura 25 cours qui marchent pour tels publics, pas 200 pour des publics indifférenciés. La réactivité est très importante, quitte à réduire les prétentions. Il faut également savoir dissocier les contenus et la plate-forme pour garder son indépendance. Il faut se garder de l’illusion de la plate-forme universelle qui va tout faire et de la tentation de la faire soi même.

Quelles grandes tendances peut-on observer actuellement dans le développement de la FOAD dans le secteur privé ?

C. L.  La FOAD dans le secteur privé n’a pas connu le boom annoncé. Dans le village e-learning des éditeurs, ceux qui ont survécu depuis 4-5 ans, sont des professionnels à la fois de la technique, de la pédagogie et du déploiement.

Aujourd’hui, on peut distinguer plusieurs marchés :

– Le marché des plates-formes, segmenté en grosses plates-formes qui s’intègrent dans le Système d’information Ressources humaines (SI RH) d’une part, en plates-formes moyennes ou petites avec des outils auteur et open-source à peu près stabilisés aujourd’hui d’autre part.

– Le marché des contenus éditeurs (à l’étagère) avec de très bons acteurs en France : en bureautique, en management (CrossKnowledge fait appel à des auteurs universitaires dans un processus complètement industrialisé), dans le domaine des langues (Auralog est aujourd’hui le 1e acteur mondial dans son secteur et a des filiales aux Etats-Unis, en Europe et en Chine), dans l’informatique hors bureautique (certifications Microsoft, Cisco…).

– Le marché des producteurs de contenus spécifiques (à la demande) : ce sont des sociétés de production dont le savoir-faire est dans la scénarisation, ils vont jusqu’à l’intégration des contenus dans une plate-forme (Hyperoffice, XPert-team, Demos e-learning agency…). Ces acteurs s’occupent de plus en plus de l’infrastructure, des contenus et de la gestion du contenu (avec une « hotline »). Les entreprises sont sorties du modèle de la plate-forme multi-éditeurs. On constate de plus en plus une dissociation entre des plates-formes avec des contenus éditeurs et

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une plate-forme chapeau sur laquelle se fait l’entrée unique (avec derrière, un espace pour des cours spécifiques à l’entreprise et des liens vers les plates-formes éditeurs).

– Le marché de la formation aux applicatifs métiers sur écran avec simulateurs, liés aux gros intégrateurs et aux gros déploiements informatiques (pour le SI commercial, RH, finances…).

– Le marché du haut de gamme en production : 3D, simulations très sophistiquées sur des contenus scientifiques, simulations de business, simulations de travaux.

– Le marché des éditeurs d’outils (pour produire soi même) : outils de rapid learning par exemple.

– Le marché de la visioconférence : les conditions d’un décollage sont réunies avec la diffusion de l’ADSL, avec le fait qu’elle est valorisante (parler dans le poste) et qu’elle peut se faire sans gros investissement en production et en scénarisation.

– Le marché des outils de travail collaboratif, articulés avec ceux du knowledge management (KM).

Quel peut être la place de l’université française dans ce paysage ?

C. L.  Les deux derniers points sont des pistes pour l’université : la visioconférence n’implique pas de rupture avec le modèle pédagogique dominant ; quant au travail collaboratif, les étudiants sont déjà dans cette culture grâce à MSN.

Il y a des pédagogies de travail collaboratif à développer. L’université peut partir du fait que la formation par les pairs existe déjà chez les étudiants, travailler ensemble pour préparer un concours par exemple. Une piste consisterait à leur donner des outils pour développer leur propre réseau pour apprendre. Ex : la version écrite d’un cours faite par un étudiant, validée par un professeur, mise à disposition de tout le monde. On peut citer aussi les exposés, les mémoires à remettre à plusieurs, etc. Il existe une opportunité pour intégrer la culture synchrone en continuum de la culture de l’université basée sur le cours magistral. Deux publics me sembleraient particulièrement adaptés : les étudiants des premiers cycles, les salariés en reprise d’études en liaison avec la VAE. On pourrait intégrer pour ces publics des logiques collaboratives dans les pratiques existantes. On pourrait également construire des outils et des contenus pour les aider à se positionner en amont de la formation, s’évaluer avec différents niveaux de sophistication allant du QCM à l’auto- évaluation…

L’université a deux cœurs de métiers, la recherche et l’enseignement ; concernant plus spécifiquement ce dernier, la mission de l’université est de former et de diplômer des jeunes, pas de faire de l’enseignement à distance. La FOAD n’est qu’un moyen complémentaire. Il est illusoire de vouloir créer une université mondiale à distance. La question à se poser est : on veut monter un projet pour faire quoi ? Or, la FOAD peut aider à faire plus simple, plus souple, plus flexible.

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