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LES PRATIQUES RH DES GRANDES ENTREPRISES À DESTINATION DES SALARIÉS DE PLUS DE 50 ANS

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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les étu des d e l’emploi cad re - juillet 2006

ENTREPRISES À DESTINATION

DES SALARIÉS DE PLUS DE 50 ANS

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L’Apec a été créée en 1966 et est administrée par les partenaires sociaux (MEDEF, CFE-CGC, CFDT CADRES, UGICA-CFTC, UCI-FO, UGICT-CGT).

Toute reproduction totale ou partielle, par quelque procédé que ce soit, sans l’autorisation expresse et conjointe de l’Apec, est strictement interdite et constituerait une contrefaçon (article L122-4 et L 335-2 du code de la Propriété intellectuelle).

Les terrains quantitatif et qualitatif et l’exploitation ont été réalisés par E2DL - Entreprise Emploi & Développement Local L’analyse et la synthèse ont été réalisées par le Département Etudes et Recherche de l’Apec et par E2DL.

Apec :

Brigitte Bos,Manager du pôle Etudes Maïmouna Fossorier,Responsable d’études

Juin 2006

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SYNTHÈSE ■ MÉTHODOLOGIE ■ ANALYSE DE L’ENQUÊTE QUANTITATIVE ■

Un frémissement ... ?

— p. 11

... annonciateur d’un mouvement de fond ?

— p. 11

Une illusion ?

— p. 11

Une transition annonçant une mutation ?

— p. 12

ANALYSE DE L’ENQUÊTE QUALITATIVE ■

La fin de la génération des préretraités

— p. 13

Les raisons et les leviers du changement

— p. 14

Le cadre des pratiques

— p. 15

Les pratiques initiales : du diagnostic au plan d’actions

— p. 16

La gestion des fins de carrière

— p. 17

La gestion des secondes parties de carrière

— p. 17

La gestion des âges et de la diversité

— p. 18

La gestion du parcours ou de la trajectoire professionnelle

— p. 18

Les questions connexes à la gestion des salariés et des cadres

de plus de 50 ans

— p. 19

Existe-t-il une gestion spécifique et indépendante des cadres

de plus de 50 ans ?

— p. 21

CONCLUSION ■ PERSPECTIVES ET PISTES D’ACTION ■ MONOGRAPHIES D’ENTREPRISES ■ ANNEXE ■

©Apec - Les pratiques RH des grandes entreprises à destination des salariés de plus de 50 ans

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A travers les différentes études qu’elle a menées, l’Apec s’est interrogée sur la place des cadres de plus de 50 ans dans le marché du travail et les politiques RH des entreprises à leur égard.

Dans un contexte de sous emploi massif des seniors, l’Apec s’est interrogée en 20021, sur la perception qu’avaient les entreprises de cette population spécifique. Les résultats de cette analyse faisaient état d’un regard réservé sur la candidature des seniors de la part des entre- prises, quand dans le même temps elles étaient nombreuses à leur reconnaître des atouts et des compétences réels. Il reste que le recrutement de cadres de plus de 50 ans représente moins de 5% du recrutement total de cadres. Les freins à l’embauche sont en grande partie liés à une image dévalorisée des cadres seniors et à une culture de recrutement historique- ment orientée vers des cadres plus jeunes. Notons que les entreprises de moins de 200 sala- riés sont plus enclines à recruter des cadres de plus de 50 ans.

Le vieillissement de la population active et ses conséquences sur le marché de l’emploi, ren- forçaient l’importance d’une prise de conscience rapide de la situation démographique. Les tensions pouvant affecter le marché du travail rendaient nécessaire une meilleure gestion des âges et des compétences. En 2003, l’Apec a donc sondé vingt grandes entreprises afin de pré- ciser le niveau de prise de conscience, d’identifier les politiques et actions mises en œuvre ou envisagées pour les cadres en fin de carrière ou qui s’en approchaient2. Les entreprises interrogées apparaissaient conscientes des enjeux associés au devenir de la population des cadres de plus de 50 ans. Elles relativisaient néanmoins l’impact du « papy-boom », perçu comme un accélérateur de changement plutôt qu’un traumatisme. Les attitudes des entre- prises à l’égard de la problématique posée se distinguaient selon la structure de la pyrami- de des âges : celles qui, déclarant une pyramide équilibrée et affirmant s’être préoccupées depuis plusieurs années de la gestion prévisionnelle des cadres, ne percevaient pas de risque majeur lié au départ des quinquagénaires ; tandis que les autres exprimaient une perception claire des risques encourus. Les responsables interrogés ont souvent évoqué diverses actions menées au sein de leurs entreprises. La plupart de ces actions avait été récemment engagée, témoignant d’une prise de conscience récente (constitution de groupes de réflexion, études démographiques internes, formalisation des savoir-faire…) Le bilan dominant dressé par les entreprises portait sur l’adaptation des méthodes de gestion des cadres (notamment au-delà de 50 ans) de manière à gommer l’impact de l’âge tant dans l’esprit des cadres eux-mêmes que dans les pratiques à leur égard au sein de l’entreprise (gestion de carrière sur le long terme, gestion individualisée des cadres,…) Si des actions concrètes n’étaient pas toujours menées, les responsables interrogés disaient en tout cas militer dans ce sens.

« La gestion des carrières et des parcours professionnels n’a pas encore intégré la question des salariés vieillissants » : tel est le constat établi par l’IGAS dans son rapport de 2004 trai- tant de la question de la prise en compte de l’âge par les entreprises et faisant l’état de leurs pratiques3. Il régnerait dans les branches comme dans les entreprises un fort scepticisme concernant l’arrêt des mesures d’âge car si les préretraites sont désormais reconnues comme une aberration macro-économique, elles apparaissent encore comme une nécessité micro-éco- nomique pour nombre d’entreprises. Ce scepticisme teinté d’inquiétude marque ainsi, para- doxalement, la prégnance et l’urgence du sujet pour la société4en même temps que les dif- ficultés éprouvées à se départir de l’habitude des mesures d’âge prise ces dernières décennies.

1L’emploi des cadres de 50 et plus - Baromètre Apec/Groupe QuinCadres - 2002

2Les cadres de 50 ans et plus : politiques des entreprises - Apec - 2003

3IGAS Rapport annuel 2004 : la gestion des âges et politiques de l’emploi. Novembre 2004

4Le taux d’emploi des 55-64 ans est de 34,2% en 2002 contre 49,4% pour l’ensemble des pays de l’OCDE.

Or, l’objectif fixé par l’Union européenne dans le cadre du conseil de Lisbonne est d’atteindre un taux d’emploi de 50% en 2010.

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Ce sentiment est-il seulement temporaire ou marque-t-il une tendance plus lourde pouvant faire craindre l’impossibilité de gagner le pari sur l’emploi formulé par la loi portant réforme des retraites5 à l’horizon 2008 et réclamé par le Conseil européen de Lisbonne à l’horizon 20106?

Pour confirmer ou infirmer cette crainte, il s’agit d’approfondir notre connaissance et notre analyse du contenu des politiques de ressources humaines développées par les entreprises à destination de leurs salariés de plus de 50 ans, de s’interroger sur la nature de l’inertie résul- tant de l’application des mesures d’âge depuis près de trente ans. Cette inertie se résorbera- t-elle naturellement dans les années à venir du fait de la restriction de l’aide publique aux préretraites et du risque de déficit de compétences ou se perpétuera-t-elle au moyen de la mise en œuvre de nouveaux dispositifs, et notamment individuels, justifiés par les nécessi- tés économiques et les besoins organisationnels ?

C’est dans cette perspective que l’Apec a décidé de réaliser un état des lieux des pratiques des grandes entreprises à destination des salariés, et particulièrement des cadres de plus de cinquante ans afin d’en mesurer les évolutions. Nous chercherons au travers de l’analyse des pratiques à définir la dynamique dans laquelle s’inscrit aujourd’hui la politique de ressources humaines des grandes entreprises concernant la prise en compte de la question de l’âge au travail.

5Loi 2003-775 du 21 août 2003.

6Le Conseil de Lisbonne du 23-24 mars 2000 fixe comme objectif d’arriver à un taux d’emploi de 70% en 2010.

Dans ce but, le Conseil de Stockholm du 23-24 mars 2001 réclame que le taux d’emploi des salariés âgés de 60 à 65 ans soit à cette date de 50 % alors qu’il n’est encore aujourd’hui que de 32%.

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Au regard de l’étude quantitative et qualitative de 2005 sur les pratiques des entreprises à des- tination de leurs salariés et cadres de plus de 50 ans, il apparaît que nous sommes dans une phase de transition annonciatrice de changements de fond concernant le contenu des poli- tiques de gestion des ressources humaines.

Tout d’abord, les responsables des ressources humaines des entreprises sont aujourd’hui plus largement sensibilisés à la question du vieillissement de la population active. Cette sensibili- té, accentuée par la prise en compte des nouvelles règles juridiques incitant à l’allongement de la vie active, ne semble pas encore provoquer un développement généralisé des pratiques à destination des salariés de plus de 50 ans. Le nombre de pratiques effectives apparaît enco- re minoritaire. En effet, 42 % des grandes entreprises déclarent traiter ou avoir traité la pro- blématique de l’emploi des salariés de plus de 50 ans. Cela témoigne d’une réelle prise de conscience des conséquences du vieillissement démographique et de la nécessité de promou- voir l’emploi de leurs salariés de plus de 50 ans.

Cependant, si l’on détaille le contenu des pratiques, seulement 13 % de l’ensemble des entre- prises déclarent avoir une pratique effective à destination des salariés de plus de 50 ans ; les autres entreprises ayant choisi d’intégrer la gestion de cette catégorie au tronc commun ou de n’être encore qu’en phase de diagnostic. La prise de conscience des entreprises ne se tradui- rait donc pas encore dans les pratiques.

La faiblesse du nombre de pratiques à destination des salariés, et particulièrement des cadres de plus de 50 ans résulte sans doute de la difficulté des directions générales à reconnaître encore cette question comme stratégique pour l’entreprise à court, moyen ou long terme.

En détaillant le contenu des réponses de l’enquête quantitative, on peut également observer qu’une proportion significative d’entreprises (13%) semble d’ores et déjà avoir dépassé la pro- blématique des plus de 50 ans pour l’intégrer dans le cadre de la gestion du parcours profes- sionnel ce qui, implicitement, pourrait signifier que les entreprises se dirigeraient aujourd’hui vers une gestion des âges où les salariés de plus de 50 ans auraient leur place comme toute autre catégorie de salariés.

Sur la base de l’analyse de 17 pratiques d’entreprises, sans pour autant avoir pu évaluer avec précision l’amplitude des transactions individuelles ou des licenciements « arrangés » ainsi que le poids des licenciements économiques, les mesures de préretraites généralisées semblent aujourd’hui en forte régression du fait de leur coût devenu dissuasif suite à l’adoption de la loi portant réforme des retraites. Une réserve demeure cependant du fait de la persistance d’ac- cords de préretraite « maison » organisant le départ des salariés de plus de 55 ans en cas de suppression de postes ou de plan de sauvegarde de l’emploi : l’âge restant, au sein de certaines entreprises, le mode de régulation habituel des mutations de l’organisation. La multiplication des accords de branches maintenant la possibilité de mise à la retraite à partir de 60 ans confir- me cette réserve.

Pour les entreprises ayant décidé de ne pas renouveler les plans de préretraite et de s’engager dans une politique active de gestion des âges, il s’agit désormais de gérer différemment les mutations de l’organisation et l’évolution des métiers en prenant en compte le maintien dans l’emploi des salariés âgés de plus de 50 ans. Il en résulte la mise en œuvre de pratiques ciblées ou de plans d’actions présentant une vision stratégique de l’entreprise à plus ou moins long terme.

Les raisons et les leviers de l’engagement d’une pratique à destination des salariés de plus de 50 ans par les entreprises sont de plusieurs ordres. Dans un premier temps, la détermination d’une pratique découle de la structure de la pyramide des âges de l’entreprise comparée à ses besoins en compétences dans un contexte de contrainte juridique rendant plus coûteux le recours aux mesures d’âge. La taille, l’organisation, le secteur d’activité, les métiers concernés et le contexte économique et social de l’entreprise sont alors déterminants en vue de l’orientation et l’adoption de telle ou telle pratique. Mais surtout, les raisons du changement sont d’ordre

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stratégique dans la mesure ou une action à destination des salariés de plus de 50 ans s’intègre dans le cadre d’une décision de la direction générale de l’entreprise souhaitant émettre un signal fort en interne et en externe dans un but de remobilisation ou d’attractivité du projet d’en- treprise. La négociation collective (emploi des seniors, GPEC, formation continu tout au long de la vie, diversité…) est ainsi souvent utilisée comme levier associé à ces processus de chan- gements dans l’entreprise impliquant les salariés de plus de 50 ans. On notera qu’aucun accord spécifique n’aborde la question des femmes cadres en particulier.

Si la période de transition actuelle demeure encore quantitativement assez pauvre en termes d’expériences, elle n’en est pas moins riche en matière de réflexions, d’expérimentations et d’amorces de pratiques qui se révèlent d’ailleurs très diverses dans le contenu.

Du point de vue du contenu des pratiques, plusieurs niveaux de pratiques peuvent être dis- tingués :

Les pratiques initiales

-La phase de diagnosticest destinée à évaluer les enjeux de la problématique de l’âge dans l’entreprise. Ce diagnostic peut s’opérer au moyen de l’analyse de la pyramide des âges en rapport avec la structure des métiers, et aussi au moyen de sondages et de groupes de tra- vail ou encore au travers de l’accomplissement d’études.

-La phase de sensibilisation et de communicationdestinée à préparer le terrain en vue du lance- ment d’une action de plus grande envergure. Cette sensibilisation peut prendre la forme de l’annonce officielle de l’arrêt des mesures d’âge, de l’offre de bilans retraite ou de l’organi- sation de modules d’information à destination des salariés et du management.

La gestion des fins de carrière (à partir de 55 ans)

Elle s’articule principalement autour de la gestion du temps de travail et de la gestion du trans- fert du savoir professionnel.

-L’adaptation du temps de travail en fin de carrière est principalement destinée à permettre une articulation progressive avec l’inactivité ou permettre un départ anticipé. Le temps partiel, le CET (compte épargne temps) ou le congé de fin de carrière sont dans ce but régulière- ment évoqués au même titre que le rachat des annuités.

-Le transfert du savoir professionnelest destiné à valoriser l’expérience et l’expertise du colla- borateur en même temps qu’il peut permettre l’intégration d’un salarié plus jeune. Le tuto- rat est aujourd’hui un outil particulièrement prisé en vue de cette transmission. Des possi- bilités de missions utilisant les compétences des salariés en fin de carrière peuvent également être prévues telles que la mission de conseil ou la conduite de projet.

Parallèlement, l’accompagnement à la retraitefigure en tant que pratique des entreprises à des- tination de leurs salariés en fin de carrière.

La gestion des secondes parties de carrière (à partir de 45 ans)

Elle s’articule principalement autour de la gestion de la motivation, de la mobilité profession- nelle et de l’adaptation du management et des conditions de travail dans la mesure où le seuil de 45 ans peut désormais être considéré comme la mi-carrière et non plus comme le début du glissement vers la retraite.

-La motivation et le repositionnement professionnelse font dans de plus en plus d’entreprises au moyen de la conduite d’un entretien professionnel permettant de définir le projet profes- sionnel du senior et les moyens propres à le matérialiser notamment par la mobilité. A ce titre, les dispositifs de la formation professionnelle et la VAE (validation des acquis de l’ex- périence) peuvent plus particulièrement être utilisés7. Des entreprises pratiquent aussi la mise à disposition interne en vue de valoriser l’expertise du senior.

7La loi relative à la formation professionnelle tout au long de la vie a été promulguée en mai 2004.

Les accords de branche précisent les conditions de mise en oeuvre du DIF, de l’entretien professionnel...

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-L’élaboration de modules de formation et de sensibilisation des managers est aussi réalisée par les entreprises afin de favoriser l’intégration des seniors au sein des équipes.

La gestion de la diversité des âges et du parcours professionnel :

Pour certaines entreprises étudiées, il ne doit pas y avoir de gestion spécifique des salariés de plus de 50 ans mais une gestion de tous les âges ou de la diversité des âges, chaque stade de la vie professionnelle devant faire l’objet d’une attention particulière mais égale notamment dans le cadre de la gestion du parcours professionnel.

-La gestion de la diversité des âgesest aujourd’hui de plus en plus avancée par des entreprises qui ne veulent pas faire de discrimination notamment à destination des seniors. Ces entre- prises s’appliquent à instaurer pour chaque catégorie de salariés une égalité de traitement lors du déploiement de l’ensemble des dispositifs RH (formation, recrutement, mobilité…).

-En appoint des pratiques de diversité des âges, la gestion du parcours professionnelcommence à être déployée par certaines entreprises étudiées. Dans ce cadre, l’entreprise tente de struc- turer son marché du travail interne afin de donner une visibilité quant à ses futurs besoins en compétences (GPEC – gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, revues de personnel…) et quant aux possibilités de mobilité. Enfin, définissant le cadre du parcours professionnel, l’entreprise s’attache à définir les modalités d’une mobilité tant en interne qu’en externe.

Dans un premier temps, les pratiques des entreprises à destination des salariés de plus de 50 ans (fins de carrière et secondes parties de carrière) seront sans doute amenées à se dévelop- per afin de contrecarrer les effets de la diffusion d’une culture des préretraites. Cependant, dans un second temps, celles-ci se fondront dans le cadre de la gestion de la diversité et du par- cours professionnel qui deviendra vraisemblablement le mode de gestion courant des mutations de l’orga- nisation et de ses conséquences sur l’emploi.

La gestion de l’âge par l’entreprise induit actuellement une mutation des politiques RH des entreprises dont les salariés de plus de 50 ans sont les premiers témoins. Cette « modernisa- tion » implique une moindre référence à l’ancienneté au profit de la référence aux compétences et une appréhension de la santé au sens large dans le cadre d’une gestion plus individualisée de la carrière impli- quant un repositionnement du salarié, de la gestion des ressources humaines et du manager de proximité.

Dans l’avenir, il s’agira d’observer les modes de diffusion et d’articulation de l’individualisation de la ges- tion des parcours au sein des entreprises au regard de la promotion de la notion plus «collective» de diver- sité;diversité et individualisation du parcours professionnel étant aujourd’hui deux espaces privilégiés de négociation collective et de développement de la stratégie RH des entreprises.

NB : les 16 monographies du document ont été amendées et validées par les entreprises interrogées.

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La première phase de l’étude a consisté à réaliser un sondage auprès de 200 grandes entreprises, l’objectif étant d’appréhender leur niveau de réflexion et d’engagement d’actions concernant leurs salariés de plus de 50 ans. 171 entreprises ont répondu à l’enquête ; 29 n’ont pas répondu.

Cette enquête téléphonique a été conduite entre le 15 janvier et le 18 mars 2005 auprès de direc- tions des ressources humaines (directeur des ressources humaines, directeur des relations sociales, responsable de la gestion des carrières, gestionnaires de ressources humaines chargés de la veille, du dossier de la gestion des âges, de la gestion des cadres...).

Nous appréhendons en premier lieu les pratiques RH des entreprises à destination de l’ensemble des salariés pour ensuite s’interroger sur la spécificité de la place des cadres au sein de cet ensemble.

Ceci pour deux raisons principales validées lors des premiers appels :

soit les entreprises disent ne pas dissocier les cadres et les non cadres dans leur appréhension de la question de l’âge,

soit elles affirment qu’elles adoptent vis-à-vis des cadres une gestion spécifique au sein de laquel- le le critère de l’âge est exclu et ne peut donc faire l’objet d’une pratique puisque cette gestion est individualisée et fondée sur les compétences.

Les réponses collectées lors de l’étude quantitative ont servi de base à la demande d’entretien appro- fondi auprès des interlocuteurs joints lors de la première phase de l’étude. A ce titre, le contact avec les entreprises ayant une action originale et/ou comportant une forte présence de cadres en pro- portion ou en volume a été privilégié.

Des entretiens semi-directifs ont été conduits dans 20 entreprises, dont 16 ont accepté la publica- tion de leur monographie.

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42 % des grandes entreprises ayant pu être contactées dans le cadre de l’étude déclarent aujourd’hui traiter ou avoir traité la problématique de l’emploi des salariés de plus de 50 ans.

La proportion d’entreprises déclarant s’intéresser aujour- d’hui de manière pratique aux conditions de maintien dans l’emploi des salariés de plus de 50 ans apparaît donc comme significative. Le frémissement espéré aurait ain- si lieu ; les entreprises considérant désormais le prolon-

gement de la vie active au delà de 50 ans comme un enjeu de leur politique des ressources humaines.

On peut se demander si l’on assiste à un frémissement lié à l’inquiétude des entreprises quant à l’annonce du retournement démographique et à la promulgation des mesures visant la restriction des préretraites et l’allon- gement de la vie professionnelle ou, si plus largement, on assiste à la naissance d’un mouvement de fond impli- quant des changements dans la politique de ressources humaines des grandes entreprises.

■ UN FRÉMISSEMENT… ?

Si l’on observe plus en détail les réponses faites par les entreprises, la proportion de 42% initialement repérée est à majorer si on lui ajoute la somme des entreprises ayant déclaré ne pas avoir de pratiques spécifiques à des- tination des salariés de plus de 50 ans dans la mesure où cette question n’avait pas lieu d’être car traitée ini- tialement dans le cadre de la gestion courante des res- sources humaines. La proportion devient alors de 49%.

Par ailleurs, il est à noter que parmi les entreprises déclarant ne pas travailler sur la question des conditions

d’emploi des salariés de plus de 50 ans, cinq d’entre elles affirment que cette question sera ou devra être abor- dée à moyen terme. Si l’on ajoute cette catégorie à l’en- semble des entreprises précédemment retenues, on arri- ve alors à une proportion de plus de 52% d’entreprises déclarant se préoccuper activement, implicitement ou prochainement des conditions d’emploi des salariés de plus de 50 ans.S’il venait à se confirmer, ce frémisse- ment pourrait s’interpréter comme l’amorce d’un mou- vement de fond.

■ … ANNONCIATEUR D’UN MOUVEMENT DE FOND ?

Cependant, cet accès d’optimisme peut sans doute être immédiatement tempéré par un regard sur l’état effec- tif des pratiques des entreprises qui ont entamé une réflexion ou une action concrète (42% des répondants) :

Sur les 40 entreprises ayant été repérées comme réflé- chissant à la question des conditions d’emploi des sala- riés de plus de 50 ans, 11 seulement affirment avoir ou être en train d’accomplir un diagnostic approfondi en vue d’établir et de décliner un plan d’actions. Les 29 autres entreprises affirment, quant à elles, n’être encore qu’au stade de la réflexion. Si les intentions sont bien présentes, rien ne semble donc encore acquis.

De plus, parmi les 32 entreprises déclarant des actions à destination des salariés de plus de 50 ans, 10 entre- prises affirment avoir eu une réflexion ou une action

à destination des salariés de plus de 50 ans mais avoir choisi d’intégrer désormais cette pratique à la gestion courante des ressources humaines.

Dès lors, les entreprises ayant effectivement une pra- tique ou des pratiques à destination des salariés de plus de 50 ans ne seraient que de l’ordre de 22 ; ce qui ne représente qu’une proportion de 13 % de l’ensemble des entreprises interrogées dans le cadre de l’étude.

Cette proportion marque la faiblesse des pratiques concrètes à destination des salariés ou des cadres de plus de 50 ans. Il faudrait donc espérer que le nombre rela- tivement important d’entreprises déclarant avoir une réflexion sur le sujet se concrétise en autant de pratiques ou de plans d’action.

■ UNE ILLUSION ?

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Entre confiance béate, scepticisme et désillusion devons- nous sans doute nuancer l’analyse des résultats de l’étu- de. En effet, plutôt que d’assister à un mouvement de fond d’ores et déjà amorcé ou à une illusion résultant d’inten- tions passagères et de pratiques isolées, l’étude quanti- tative permet de mettre en perspective une situation de transition concernant les pratiques des entreprises à des- tination des salariés et des cadres de plus de 50 ans. Le nombre important d’entreprises en réflexion incite à vali- der cette hypothèse.

La transition semble d’ailleurs annoncer une mutation des politiques des ressources humaines des grandes entre- prises. La question de l’âge pris sous l’angle de la ques- tion de l’emploi des salariés de plus de 50 ans apparaî- trait alors comme un prisme révélant des processus de changements plus généraux au sein de la gestion des res- sources humaines des grandes entreprises en France.

Cette hypothèse se dessine au travers de la disparité des niveaux d’action déclinés actuellement par les entreprises.

Certaines entreprises traitent la problématique de l’em- ploi des salariés de plus de 50 ans de manière ciblée par l’élaboration de pratiques particulières alors que d’autres ont déjà bâti une pratique coordonnée. Mais surtout, on peut observer qu’un nombre significatif d’entreprises (13%) semble d’ores et déjà avoir dépassé la problé-

matique de l’âge pour l’intégrer dans le cadre de la ges- tion du parcours ou de la trajectoire professionnelle.

Cette observation semble d’autant plus pertinente qu’au sein de ce groupe d’entreprises se rejoignent deux caté- gories qui, au premier regard, auraient pu pourtant appa- raître comme opposées. En effet, parmi ce groupe, sont à la fois représentées des entreprises ayant répondu néga- tivement au sujet de l’étude en déclarant ne pas avoir de problématique d’âge du fait de la nature même de leur poli- tique de ressources humaines et des entreprises ayant répondu positivement en déclarant se préoccuper active- ment des conditions d’emploi des salariés de plus de 50 ans en intégrant cette pratique dans le cadre général de leur politique de ressources humaines.

En généralisant à partir de l’étude quantitative, on pour- rait donc émettre l’hypothèse selon laquelle on observe aujourd’hui une transition d’une gestion par l’âge (quan- titative) à la gestion des âges (qualitative) dans le cadre de la gestion du parcours professionnelimpliquant, si ce n’est une mutation des politiques des ressources humaines des entreprises, tout du moins leur évolution. Nous appro- fondirons et vérifierons cette hypothèse lors de la secon- de partie de l’étude consacrée à l’appréciation qualitati- ve du contenu des pratiques d’entreprises ayant engagé une action concrète à destination des salariés de plus de 50 ans.

■ UNE TRANSITION ANNONÇANT UNE MUTATION ?

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Le premier enseignement tiré de l’étude qualitative est la mise en évidence de l’arrêt ou tout du moins de la restriction du recours systématique aux mesures d’âge par les entreprises. Ce principe est posé par l’ensemble des directions des entreprises étudiées lors de l’étude qualitative sauf une.

Dans un certain nombre d’entreprises, l’arrêt des mesures d’âge a fait l’objet d’une communication officielle notam- ment de la direction générale à l’ensemble des salariés ou aux représentants du personnel. Dans d’autres cas, cet arrêt est demeuré encore officieux.

Aussi, la conclusion provisoire de l’étude quantitative semble se confirmer. On observe indéniablement un fré- missement pouvant s’interpréter comme l’amorce d’un mouvement d’ensemble du fait de l’affirmation de la volonté politique des entreprises. Le scepticisme ambiant initialement pressenti au début de l’étude pourrait ain- si être prochainement battu en brèche s’il s’avérait que les autres grandes entreprises suivaient cet exemple. Sur ce point, le nombre croissant d’entreprises déclarant aujourd’hui conduire une réflexion est significatif.

Cependant, malgré ce constat positif, demeurent tou- jours des interrogations concernant les possibilités d’un retour aux mesures d’âge notamment dans le cadre de restructurations consécutives à des fusions ou des adap- tations économiques. De même, des gestionnaires RH soulignent la difficulté de résister aux pressions des salariés et des syndicats qui désirent encore voir appli- quer des mesures d’âge. Enfin, nombre d’entreprises appréhendent la difficulté de conserver une masse de plus en plus importante de salariés de plus de 50 ans pour une période d’activité pouvant les mener au-delà de 60 ans sans possibilité de mise à la retraite avant 65 ans.

Par conséquent, on observe dès à présent la conclusion d’accords collectifs défensifs destinés à garder une maîtrise de la gestion des salariés de plus de 50 ans en limitant les possibilités d’allongement de la vie pro- fessionnelle :

La majorité des branches professionnelles a ainsi conclu des accords permettant aux entreprises de mettre leurs salariés à la retraite avant 65 ans sous condition d’em-

bauche et de promotion de l’employabilité (à ce jour on décompte plus de 35 branches ayant signé un accord de ce type).

Des entreprises ont signé à nouveau des accords Ces- sation Anticipée d’Activité de certains Travailleurs Sala- riés (CATS) permettant à certaines catégories de sala- riés de partir en préretraite.

Certaines entreprises renégocient des accords de pré- retraites «maison» afin de convenir de la sortie prio- ritaire et aménagée des plus anciens dans le cadre des restructurations. Enfin, d’autres entreprises se retour- nent vers des démarches plus individualisées telles que le Compte Epargne Temps (CET) ou le rachat des années d’études afin d’écourter, dans la mesure du possible, la vie professionnelle de leur salarié.

De plus, des observateurs8ont pu relever l’accroissement sensible des ruptures de contrat de travail fondées sur d’autres motifs que l’âge. Les licenciements pour faute (« arrangés » ou non) concernant des salariés de plus de 50 ans et permettant un retrait anticipé de la vie acti- ve tout en évitant le versement de la contribution Dela- lande, apparaissent en singulière augmentation depuis la restriction des possibilités de recours aux préretraites.

Il en serait de même en ce qui concerne les transactions.

Enfin, des inquiétudes sont également nourries relati- vement aux recours abusifs à la branche maladie de la Sécurité Sociale afin de couvrir une cessation anticipée d’activité9.

A partir de ce constat formulé lors de l’étude quantita- tive et approfondi dans le cadre de l’étude qualitative, on peut envisager, à terme, l’extinction progressive de

« la génération des préretraités » du fait de l’arrêt du recours systématique aux mesures d’âge. Cette obser- vation vaut d’autant plus pour les cadres car ceux-ci, ayant régulièrement commencé leur vie active plus tar- divement, vont bénéficier d’un taux de remplacement moins avantageux et n’ont généralement pas été expo- sés à des travaux pénibles pouvant justifier un retrait d’activité anticipé. L’allongement de la vie active semble donc, pour cette catégorie de la population salariée, par- ticulièrement d’actualité surtout lorsqu’elle a atteint la cinquantaine.

■ LA FIN DE LA GÉNÉRATION DES PRÉRETRAITÉS

8« Les formes juridiques de cessation d’activité des salariés âgés de 55 à 64 ans » Rapport présenté au COR. Juin 2005.

Marie-Cécile AMAUGER-LATTES, Isabelle DESBARATS.

9« Les dépenses d’indemnités journalières » rapport IGF 2003-130 Octobre 2003.

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Cependant, ce pari sur l’extinction de la culture des pré- retraites n’est pas encore complètement gagné du fait de l’alliance objective demeurant encore entre les sala- riés (les partenaires sociaux) et les entreprises sur le maintien des mesures d’âge permettant aux premiers de

partir plus précocement à la retraite et aux secondes de garder un volant de gestion afin d’éviter une sur-repré- sentation des salariés âgés et de gérer plus aisément les changements d’organisation.

Selon l’étude des cas d’entreprises, la raison pour laquel- le les entreprises se préoccupent aujourd’hui de manière plus assidue de l’emploi des salariés de plus de 50 ans rési- de principalement dans l’émergence d’une contrainte résul- tant de l’association entre le déséquilibre de la pyramide des âges et la difficulté financière de pouvoir aujourd’hui promouvoir des mesures de départs anticipés10. Ces contraintes démographique et légaleinduisent pour de nombreuses entreprises la présence de plus en plus impor- tante de quinquagénaires qui devront travailler cinq à dix années supplémentaires contrairement aux habitudes prises.

Cependant, au regard de l’étude, ces contraintes ne sem- blent pas suffire pour expliquer l’enclenchement d’une réflexion ou d’une action concernant les modalités de gestion de l’âge par l’entreprise.

En premier lieu, le contexte économique et social de l’entrepriseest toujours déterminant. D’une part, les dif- ficultés économiques et les restructurations impliquent régulièrement des licenciements collectifs favorisant le départ des salariés les plus âgés. D’autre part, les fusions, du fait des sureffectifs, contribuent aux départs antici- pés des quinquagénaires.

En second lieu :

La taille de l’entreprisejoue sur les modalités de mise en œuvre d’une gestion de l’âge. Plus la taille de l’entre- prise est importante, plus elle semble avoir les capaci- tés de mener une action d’envergure dans ce domaine.

Par contre, plus la taille de l’entreprise se restreint, plus son action apparaît comme ciblée du fait d’une gestion plus individualisée et moins systématique des RH.

De la même manière, le mode d’organisation et la plus ou moins grande centralité de la fonction RH de l’en- treprisejoue un rôle sur l’effectivité et les modalités de mise en œuvre d’une gestion de la question de l’âge, dans la mesure où celle-ci peut être décentralisée lorsque l’entreprise fonctionne sous forme de holding ou qu’el- le délègue la direction des ressources humaines aux éta-

blissements. Le morcellement n’apparaît pas comme pro- pice au développement d’une politique traitant de la question de l’âge. Cependant, cette tendance n’est pas inéluctable, le groupe pouvant donner des directives ou signer un accord cadre devant ensuite être déclinés au niveau de ses entités (filiales ou établissements).

Enfin, le secteur d’activité de l’entreprise influe direc- tement, certains métiers étant plus exposés que d’autres au vieillissement prématuré non seulement physiolo- gique (industrie lourde, BTP, propreté…) mais aussi par- fois, technologique (métiers de l’informatique…). De plus, certains métiers exigent un savoir-faire important qui, s’il n’est pas transféré, est perdu pour l’entreprise (l’aéronautique, l’industrie d’art..). Par ailleurs, de plus en plus de secteurs, dans un contexte économique en redéploiement, voient les contours de leur organisation se modifier et leurs métiers se transformer impliquant un repositionnement de nombreux salariés (banque, assurance…). Enfin, la question de l’âge implique pour certains secteurs la question du renouvellement des compétences ainsi que celle de l’attractivité de l’entre- prise et du métier dans un contexte de pénurie de main d’œuvre (BTP). A l’inverse, certains secteurs développant des activités de services à forte valeur ajoutée (consul- ting, SSII…) ou récemment en expansion (centre d’ap- pel…) paraissent peu sensibilisés à la question de l’âge au travail.

Il est donc apparu au fil de l’étude que les raisons inci- tant l’entreprise au changement et la poussant à traiter de la question de l’âge dans le sens de l’intégration des salariés de plus de 50 ans sont à la fois démographiques, sociologiques, juridiques, économiques ou organisation- nelles.

Cependant, le véritable levier du changement est en réa- lité d’ordre stratégique. Parmi les entreprises étudiées, il s’avère que la sensibilité de la direction générale à la question du vieillissement de la population et de l’em- ploi des salariés de plus de 50 ans est prépondérante dans le déclenchement d’une initiative et tout particulièrement

■ LES RAISONS ET LES LEVIERS DU CHANGEMENT

10L’un des interlocuteurs rencontré nous a fait remarqué que la mise en œuvre d’un plan de préretraite maison coûterait 6,5% de la masse salariale.

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d’une politique s’appliquant à gérer les effets de l’âge.

Cette sensibilité peut résulter de la responsabilité socia- le que souhaite prôner le dirigeant mais résulte surtout de la nécessité stratégique de mener une action forte de revalorisation des compétences internes pouvant deve- nir, notamment au moyen d’une action de marketing social, autant de signaux dynamiques à destination du marché (clients, investisseurs, collaborateurs et futurs collaborateurs …). Malgré tout, cette nécessité s’éveille

rarement à partir de l’exposé d’un raisonnement théorique ou d’un enjeu mais généralement quand surviennent des événements concrets tels que la perte d’un savoir-faire opérationnel, la démotivation d’une partie du personnel, une croissance de l’absentéisme, de l’inaptitude et des coûts associés ou des difficultés de recrutement.

Suite au choix de traiter de manière dynamique la ques- tion du vieillissement au travail de leurs salariés, certaines entreprises ont engagé des actions en usant de leur pou- voir de direction. Certaines entreprises ont sollicité le Fonds Social Européen(France 3, Eurocopter, ASF) afin de développer une pratique visant le maintien dans l’em- ploi des salariés seniors. Cependant, ces initiatives uni- latérales sont régulièrement réservées soit à l’accomplis- sement d’une action répondant à un besoin précis identifié soit à des actions de diagnostic, de sensibilisation ou d’ex- périmentation pouvant préfigurer une action plus appro- fondie.

Dans le prolongement d’une entreprise qui a innové en choisissant de soumettre son plan d’encouragement à la mobilité à l’adhésion des partenaires sociaux, c’est la négociation collective qui semble aujourd’hui devenir le cadre privilégié d’initiation du déploiement des pra- tiques.

Dans le contexte précédent la loi portant réforme des retraites de 2003, un nombre important de pratiques pre- nant en compte les conditions d’emploi des salariés vieil- lissants a été initié à partir de la signature d’accords de type CATS/CASA11(ex :Thales) instaurant des mesures d’âge pour certaines catégories de personnel en contrepartie de l’application de mesures de Gestion Prévisionnelle de l’Em- ploi et des Compétences (GPEC) et d’amélioration des conditions de travail. De même, un accord de préretraite

« maison » envisage des pratiques en ce sens. Ces accords ayant, en général, une économie de trois ans arrivent pour bon nombre d’entre eux à expiration en 2005. Leur pro- rogation, qui devra prendre une nouvelle forme répondant notamment à l’économie de la loi portant réforme des retraites, sera discutée prochainement.

A ce titre, les règles ayant changé suite à l’adoption de la loi portant réforme des retraites, on observe une évo-

lution des pratiques de négociation collective réglant la question de l’âge :

Tout d’abord, sont toujours signés ou reconduits des ac- cords CATSprenant de plus en compte la question de la pénibilité au travail.

Par ailleurs, ont été élaborés dans de nombreuses bran- ches professionnelles, des accords permettant à l’en- treprise de mettre à la retraite le salarié avant 65 ans dans la mesure où celui-ci peut liquider sa retraite à taux plein et que des mesures de compensation sont prises quant au remplacement ou à la promotion de l’em- ployabilité.

De même, sont signés des accords défensifs « maison » réglant les départs des plus anciens en cas de suppres- sions d’emploi ou de plan de sauvegarde de l’emploi.

Surtout, en référence à la Loi Fillon, l’accord cadre signé en 2005 au niveau du groupe EADS pourrait servir pro- chainement d’exemple de négociation sur les condi- tions d’emploi des salariés de 50 ansdans la mesure où il est le premier accord d’entreprise à spécifiquement s’attacher à ce sujet. De même, l’accord de branche signé le 15 janvier 2004 au niveau de la branche de détail et de gros à prédominance alimentaire concernant les secondes carrières devra être prochainement décliné au niveau des entreprises concernées (même si nous avons actuellement peu de recul du fait de la discrétion des entreprises de cette branche sur le sujet).

Plus globalement, la problématique de l’allongement de la durée de vie professionnelle semble passer de plus en plus régulièrement par la déclinaison au niveau des entreprises de l’Accord National Interprofessionnel de décembre 2003 repris par la loi du 4 mai 2004 rela- tifs à la formation continue tout au long de la vie.L’ac- cord de branche « anticiper et accompagner le change- ment par la formation professionnelle tout au long de la vie » du 14 octobre 2004 dans le secteur de l’assu- rance, ou l’accord du groupe Véolia intituler « dévelop-

■ LE CADRE DES PRATIQUES

11Cessation Anticipée d’Activité de certains Travailleurs Salariés « CATS », « Cessation Anticipée d’activité des Salariés Agés » (CASA)

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per les compétences et accompagner la progression pro- fessionnelle », illustrent ce mouvement.

Enfin, un cas plus hybride pourrait également faire éco- le. Il s’agit de l’ «Accord Pour Progresser Ensemble»

d’Air France qui préfigure par son contenu, ce que pour- rait être une gestion de l’âge tenant compte des diffé- rentes étapes du parcours professionnel dans une pers- pective de diversité.

La première pratique à destination des salariés de plus de 50 ans déclarée par les entreprises consiste dans le dia- gnostic.

Lors de cette phase, les entreprises ont largement recours à l’analyse de leur pyramide des âgesafin d’en saisir les déséquilibres présents et futurs.

Dans une moindre mesure, les entreprises complètent cette analyse d’un référentiel de métiersdestiné à éva- luer les compétences présentes et futures ainsi que les métiers clés notamment en considération de la straté- gie adoptée. Ce référentiel peut d’ailleurs être ensuite affiné par un exercice prospectif afin d’appréhender les métiers futurs de l’entreprise et d’établir un plan de remplacement.

De même, d’un point de vue plus qualitatif, les entre- prises privilégient l’exercice du sondageauprès des sala- riés afin de connaître leur opinion concernant leur fin ou leur seconde partie de carrière. Le but est à ce sta- de de repérer la connaissance des salariés concernant les nouvelles règles en vigueur en matière de retraite, les sources de motivation ou de démotivation, les volon- tés de mobilité… Dans certaines entreprises, cet exer- cice a été complété d’un entretien individueldestiné à approfondir ces différents points.

Le diagnostic peut aussi s’accomplir aux moyens de la constitution de groupes de travailse réunissant sur le thème générique de l’emploi des seniors ou sur des thèmes plus spécifiques tels que le développement de l’employabilité à tous âges, le changement des repré- sentations liées à l’âge, le transfert des compétences, le développement du travail intergénérationnel, le main- tien de la motivation ou l’aménagement du temps de tra- vail. La composition de ces groupes de travail est variable mais est généralement mixte : gestionnaires des res- sources humaines, managers, salariés.

Enfin, des études approfondies peuvent être accom- plies afin de viser le contenu de problématiques telles que « le sentiment de fin de vie professionnelle » ou « le travail intergénérationnel ».

La seconde phase des pratiques consiste dans la sensibi- lisation des acteurs concernant les changements en cours.

A ce titre, la sensibilisation est déjà amorcée lors du dia- gnostic lorsque les salariés ont été sollicités au sujet de leur fin de carrière ou de leur seconde partie de carriè- re (sondage, entretien).

De même, la sensibilisation peut aussi être amorcée lors de l’annonce officielle de la décision de l’entreprise de ne plus avoir recours dans l’avenir aux mesures d’âge dans le cadre d’une communication écrite ou orale de la direction à l’ensemble des salariés et lors de comités d’entreprises ou d’établissements. Certaines entreprises utilisent aussi les médias afin de faire passer le messa- ge et d’accélérer les processus de changement. La pres- se sert de tribune dans ce sens, plus rarement la télé- vision.

Par ailleurs, des entreprises ont pu offrir à leur salariés de plus de 45 ans ou de plus de 50 ans des bilans retraites individualisésafin que ceux-ci puissent appré- hender le niveau de leur pension future ainsi que le moment de son exigibilité.

Il faut cependant noter que la sensibilisation peut s’adresser au managementdans le but notamment de s’approprier la problématique générale du vieillissement, de développer une vision partagée des caractéristiques socio-démographiques et d’anticiper les flux de départs.

Lorsque ces deux premières phases sont accomplies, les actions opérationnelles peuvent être enclenchées. D’après l’étude des pratiques, selon le choix de l’entreprise de répondre à tel ou tel enjeu, ces actions apparaissent com- me différenciées. Dans certains cas, il faut également noter que la phase de diagnostic peut conduire l’entre- prise à décider de ne pas agir ou de traiter l’âge comme un sujet intégré à la gestion des ressources humaines courante.

■ LES PRATIQUES INITIALES : DU DIAGNOSTIC AU PLAN D’ACTIONS

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Le premier enjeu identifié par l’entreprise peut être celui de la fin de carrière de ses salariés. L’entreprise peut alors élaborer une gestion des fins de carrière comprenant dif- férents niveaux destinés en priorité aux salariés de plus de 55 ans.

Tout d’abord, l’entreprise peut faire le choix de favoriser l’aménagement du temps de travaildu salarié selon deux modalités :

La diminution progressive du temps de travaildu sala- rié qui a pu être prévue par certains accords collectifs.

Cependant, si cette solution peut convenir aux salariés, elle semble avoir moins bonne presse auprès de certaines entreprises interrogées qui redoutent le désinvestisse- ment et le désengagement notamment des cadres. La solution intermédiaire de l’octroi de jours de congés a pu être envisagée par certaines entreprises.

La possibilité de partir à la retraite avant échéance au moyen de la mobilisation du CET (Compte Epargne Temps). Ce moyen est employé par des entreprises (ex : France 3, Eurocopter, Air France) et concerne sur-

tout les cadres. De même, le rachat des années d’étu- deest quelquefois étudié.

Par ailleurs, des entreprises ont développé des actions visant à encourager ou à permettre aux salariés de réali- ser un projet personnel. L’entreprise peut alors proposer un soutien financier ou logistique à l’opération. Les pro- jets humanitaires ou liés au tourisme sont aussi cités (ex : France 3). Cependant, ces projets peuvent aussi porter sur le développement de projetsà portée plus commer- ciale réclamant une prise d’autonomie et/ou d’in- dépendance par rapport au statut salarié et valorisant l’expertise tels que la reprise d’une agence ou le déve- loppement d’une activité de conseils (ex : AXA).

Enfin, l’entreprise peut s’attacher à associer la valorisa- tion du savoir-faire professionnel du salarié avec le trans- fert de ses compétences. Dans ce but, l’outil le plus lar- gement utilisé est le tutorat ou le «mentoring» (ex : Véolia, UCANSS, Eurocopter, CNP Assurances, France 3). De même, le salarié peut devenir formateur occasionnel ou régulier.

L’enjeu du vieillissement pour l’entreprise peut être, non plus de gérer uniquement les deux ou trois années qu’il reste au salarié avant de pouvoir prétendre à la retraite, mais de gérer une période plus large pouvant aller de cinq à quinze ans. La tranche d’âge concernée est géné- ralement celle des 45-55 ans. On parle alors de la ges- tion des secondes parties de carrière12.

La première initiative de l’entreprise est, dans ce cas, de s’assurer de la motivationde l’intéressé qui, initialement, aurait pu prétendre partir prochainement et qui, du fait des nouvelles règles légales et du choix entériné par l’en- treprise, va devoir travailler encore quelques années.

L’outil privilégié, est alors l’entretien individuel qui peut prendre la forme d’un «rendez-vous carrière», d’un

«point carrière» ou d’un «bilan carrière» consistant dans la redynamisation du collaborateur par la remise en perspective de son avenir professionnel pouvant passer notamment par une mobilité.

L’autre expérience phare consiste à permettre au sala- rié de se remobiliser professionnellement, de valoriser son expertise, de développer de nouvelles compétences et de se repositionner sur le marché du travail inter- ne en devenant, pendant une période limitée, consul- tant au sein d’une structure autonome de l’entreprise ( ex : Thales).

En outre, des modules de formation et de sensibilisation des managersont pu être élaborés en vue de favoriser l’in- tégration des salariés seniors au sein des équipes.

Enfin, certaines entreprises développent une réflexion sur l’amélioration des conditions de travailafin de faciliter le maintien dans l’emploi des salariés âgés qui, malgré l’adop- tion de stratégies de compensation, sont plus sujets à rencontrer des difficultés de santé qui peuvent être pro- voquées ou accentuées par le travail. Des adaptions de postes et des aménagements de l’organisation de travail peuvent dès lors être accomplis. Si ces aménagements sont destinés le plus souvent à diminuer les pénibilités phy- siques liées au travail, certaines entreprises engagent

■ LA GESTION DES FINS DE CARRIÈRE

■ LA GESTION DES SECONDES PARTIES DE CARRIÈRE

12Accord national interprofessionnel du 13 octobre 2005 relatif à l’emploi des seniors signé le 9 mars 2006.

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aujourd’hui des études concernant les facteurs de stress et de qualité de vie au travail,particulièrement mis en exergue par les salariés de plus de 50 ans et les cadres, afin d’envisager des mesures correctrices. Plus en amont, des entreprises incorporent des politiques de prévention

santéafin de prévenir les risques de morbidité chez les seniors. En ce sens, plusieurs entreprises ont élaboré des formations dédiées aux salariés de plus de 50 ans afin de prévenir les comportements à risque et de valoriser le capital santé.

Menant encore plus loin la réflexion sur l’appréhension du vieillissement au travail et des modes de gestion qui pou- vaient leur être dédiés, certaines entreprises ont ouvert le spectre des solutions lorsqu’elles sont arrivées au dia- gnostic selon lequel une gestion des fins de carrière et des secondes parties de carrière ne pouvait être que transitoire car répondant à l’urgence d’une situation sans prendre en compte la réalité de l’entreprise. En effet, l’entreprise est, comme toute société, une entité composite. Faire des salariés de plus de 50 ans une caté- gorie spécifique ne peut donc à terme que produire des effets pervers au sein de l’organisation, notamment du fait de leur stigmatisation. Dans cette perspective ont notam- ment été promues des actions devant faciliter le travail intergénérationnel (Air France).

Par ailleurs, devant répondre depuis 2001 à l’introduction de la notion de discrimination en droit du travail13, un nombre croissant d’entreprises a décidé de prôner la notion de diversitécomme vecteur de leur politique à des- tination des salariés de plus de 50 ans. Dans ce but, des chartes de la diversité ont pu être signées pour mieux inté- grer les seniors en effaçant les différences qui peuvent exister entre eux et les autres catégories de la population de l’entreprise. Dans ce contexte, les salariés de plus de 50 ans sont intégrés dans le tronc commun des salariés devant faire l’objet d’une attention toute particulière en termes de suivi RH afin qu’aucune discrimination ne leur soit portée. Les seniors se retrouvent ainsi compris au côté

des « minorités visibles », des travailleurs handicapés ou des femmes dans le cadre d’une politique de diversité se matérialisant, a minima, par l’établissement d’une égali- té de traitement.

La recherche de l’égalité de traitement dans le cadre de la gestion des carrières se manifeste notamment par l’égal accès à la formationdes salariés de plus de 50 ans ou par l’équivalence des promotions et des rémunérations à compétence égale. Dans ce but, des observatoires desti- nés à recueillir les données et ajuster la pratique de l’en- treprise à destination de certaines catégories de popula- tion ont pu être constitués. Ont également pu être promues certaines actions telles que le CV « sans âge » afin de freiner les préjugés et de travailler les représentations lors des recrutementsou des mobilités(AXA).

En conclusion, il n’est sans doute pas anodin de remar- quer la correspondance existant entre la tendance de cer- taines entreprises à travailler la conformité de leurs pro- cessus RH aux exigences de la diversité avec la recherche corollaire de formalisation et l’individualisation de la ges- tion du parcours professionnel du collaborateur sur la base des compétences. Dans ce contexte, la gestion de l’âge se comprend dès l’embauche car l’âge devient avant tout une affaire de parcours. Il n’y a dès lors plus de seg- mentation par l’âge. Les salariés de 50 ans sont traités à parité, ils bénéficient des mêmes modes de gestion RH avec la non-discrimination ou diversité comme garde fou.

A la question : la gestion de l’âge relève-t-elle d’une pro- blématique générale de ressources humaines liée à la ges- tion du parcours professionnel, les interlocuteurs ren- contrés lors de l’étude ont répondu unanimement par l’affirmative.

Pour les interlocuteurs rencontrés, la gestion la plus satis- faisante des salariés de plus de 50 ans au sein des entre-

prises réside sans aucun doute dans la prévention. Les dif- ficultés nécessitant aujourd’hui une gestion des fins de carrière et des secondes parties de carrière proviennent, pour une large part, de l’héritage des précédentes poli- tiques préparant à un retrait précoce d’activité. La ges- tion des fins de carrière et la gestion des secondes par- ties de carrière devraient donc logiquement s’éteindre

■ LA GESTION DES ÂGES ET DE LA DIVERSITÉ

■ LA GESTION DU PARCOURS OU DE LA TRAJECTOIRE PROFESSIONNELLE

13Loi du 16 novembre 2001 contre les discriminations. Article L122-45 du code du travail.

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progressivement pour laisser la place à un traitement de longue haleine : la gestion du parcours professionnel.

S’il fallait une preuve validant cette hypothèse, celle-ci serait sans doute à rechercher dans le contenu de la répon- se formulée par les entreprises qui, lors de l’étude quan- titative, ont affirmé ne pas avoir besoin de mettre en œuvre de pratique à destination des salariés de plus de 50 ans parce qu’elles n’ont jamais pratiqué de mesures d’âge et ont toujours misé sur la formation de leurs col- laborateurs. En ce sens, l’étude qualitative démontre éga- lement qu’un nombre croissant d’entreprises tend à ne plus faire référence à une quelconque pratique à destination des salariés de plus de 50 ans même si elles avaient pu s’y référer précédemment. Ces pratiques, si elles ont enco- re cours, doivent seulement apparaître comme une caté- gorie résiduelle au sein d’une politique RH appréhendant l’ensemble du parcours professionnel devant amener le salarié au-delà de 60 ans.

Dans ce contexte, l’employabilité et la mobilité appa- raissent comme les deux notions cardinalesavancées par les entreprises dans la présentation de leur pratique dont l’un des objectifs est de permettre le maintien dans l’emploi des salariés de plus de 50 ans.

L’employabilité du salarié est promue par les entreprises étudiées au moyen :

de la formation professionnelle qui doit être activée régulièrement afin de permettre le développement des compétences tout au long de la vie active ;

de la validation des acquis de l’expérience (VAE);

d’entretiens professionnels à échéances régulières consistant par exemple dans la tenue d’un point d’orien- tation après 5 ans d’activité professionnelle, puis d’un point de projet professionnel à n’importe quel moment et enfin d’un point carrière après 25 ans d’ancienneté.

De plus en plus d’entreprises pratiquent ce type d’en- tretien qui est généralisé par la loi sur la formation continue tout au long de la vie et qui est aujourd’hui régulièrement approfondi pour les cadres. Ces entretiens doivent notamment servir d’outil privilégié permettant de faire le point sur la situation professionnelle et les potentialités d’évolution dans l’entreprise14. En outre, il doit permettre de cibler les besoins en formation pro- fessionnelle. S’il remplit son rôle, l’entretien permet alors de favoriser le maintien de la motivation et pré- parer à la mobilité.

La mobilitédu salarié, qui ne se décrète pas à 50 ans, est quant à elle, promue au moyen de la structuration d’un véri- table marché de l’emploiinterne à l’entreprise devant per- mettre au salarié d’avoir accès à l’ensemble des offres dis- ponibles. Dans ce but, des cartographies des métiers, des revues de personnel, des passeports professionnels ou des aides à l’orientation professionnelle ont pu ainsi être mis en place. Allant plus loin, AXA a même développé un pro- gramme d’aide à la mobilité consistant dans une commu- nication sur les métiers de demain et les postes disponibles, l’appel au volontariat, le soutien individualisé du candidat, l’accompagnement au développement des compétences par la formation et le droit au retour au poste d’origine.

La question de la rémunération et de la gestion de la masse salariale

A chaque fois que nous avons mis en rapport la question du maintien dans l’emploi des salariés et des cadres de plus de 50 ans avec la question de la gestion de la mas- se salariale et incidemment de la gestion de niveau de rémunération, les interlocuteurs ont quasi systémati- quement réfuté cet élément comme pouvant constituer un enjeu ayant conduit l’entreprise à traiter la question de l’âge.Les enjeux qu’ils retiennent sont la gestion de la motivation, la gestion des compétences, celle de la mobilité et de la santé au travail, jamais le contrôle de la masse salariale ou de la rémunération des salariés et des cadres de plus de 50 ans.

Cependant, lors de la conduite de l’étude, un directeur des ressources humaines d’une SSII nous a clairement affir- mé que dans un secteur très concurrentiel tel que le sien, l’expertise d’un salarié expérimenté se monnayait plus cher mais que les clients n’étaient pas forcément prêts à payer ce prix. Dès lors, l’entreprise « fournit » plus régu- lièrement des jeunes auxquels sont associés un prix de journée plus faible pour la majorité des contrats, réser- vant les anciens pour des missions plus complexes et plus onéreuses mais moins nombreuses. Il en découle une ten- dance à recruter et à employer d’abord des « jeunes ».

D’autre part, un certain nombre d’interlocuteurs nous ont également fait remarquer que l’ancienneté impliquait enco- re dans les esprits une rémunération supérieure et s’ap-

■ LES QUESTIONS CONNEXES À LA GESTION DES SALARIÉS ET DES CADRES DE PLUS DE 50 ANS

14Accord national interprofessionnel du 13 octobre 2005 relatif à l’emploi des seniors et signé le 9 mars 2006.

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parentait à un facteur de motivation, mais que ce dogme serait sans doute battu bientôt en brèche et qu’il faudra, dans l’avenir, commencer à s’habituer à ce que la rému- nération du salarié ne croisse plus forcément proportion- nellement avec l’âge.

A ce titre, du point de vue de la gestion de la masse sala- riale, nous avons pu observer lors de cette enquête, une tendance de fond des entreprises à réinterroger leur grille de classification et de salaire de manière conco- mitante à la mise en œuvre d’un traitement de la ques- tion de l’âge.Pourtant, ces sujets ne sont jamais expli- citement liés entre eux alors même que le but des réformes accomplies en matière de grille salariale a été, selon les entreprises interrogées, de diminuer la part de l’ancien- netédans le calcul de la rémunération et d’augmenter la part faite à la valorisation des compétences et à la contri- bution du salarié. Ainsi, les parts variables collectives et individuelles sont aujourd’hui de plus en plus présentes dans la construction des rémunérations ; ceci pour l’en- semble des catégories professionnelles, mais proportion- nellement de manière plus importante et plus individua- lisée pour les cadres.

Jusqu’à présent, la gestion de la rémunération était sou- vent liée dans son évolution à celle de la question de l’âge dans le cadre des politiques de ressources humaines éta- blies par l’entreprise. Si précédemment l’évolution de la rémunération, comme l’évolution de la carrière, était pour une large part relative à la question de l’âge et de l’an- cienneté, aujourd’hui cette évolution est abordée dans le discours RH, ainsi que dans les accords collectifs par le biais des compétences et du niveau de contribution. Aus- si, ce n’est plus l’âge qui désormais détermine le prix et la place occupée mais la compétence évaluée ; ce qui impliquera de facto des changements dans la perception de l’âge et des modes de gestion RH. On remarque d’ailleurs que la gestion des âges et la politique de rémunération appliquent désormais comme « credo » commun la réfé- rence à la compétence. Sur un plan général, on peut donc conclure que des politiques de gestion des carrières et des rémunérations utilisant l’âge comme référence, on passe à des politiques RH gérant les carrières et les rémunérations sur la base des compétences et des per- formances, ceci de manière encore plus accentuée pour les cadres.

La question du recrutement

Le recrutement des salariés de plus de 50 ans n’est jamais prôné de manière systématique par les entreprises. Par

contre, elles affirment toutes ne pas faire de discrimi- nation à l’embauche et souhaiter rééquilibrer leur pyra- mide des âges.Cependant, nous n’avons pas pu vérifier lors de l’étude la réalité de l’embauche de salariés de plus de 50 ans par les entreprises. A ce sujet, un certain nombre d’interlocuteurs nous ont d’ailleurs affirmé que même si le recrutement des salariés de plus de 50 ans n’était pas proscrit, il n’était en réalité pas effectif et donc très rare.Les entreprises déclarent se concentrer en priorité sur le maintien dans l’emploi des seniors qui seront de plus en plus présents dans les effectifs, en même temps qu’elles évoquent la difficulté de se dépar- tir d’habitude de recrutement privilégiant le candidat mas- culin, jeune et expérimenté.

Nous avons pu observer que les recrutements de salariés de 50 ans concernent les experts et des candidats poten- tiels à l’expatriationqui se trouvent régulièrement par- mi les seniors. Les postes de cadres supérieurs à forte valeur ajoutée sont donc surreprésentés en termes de recrutement de salariés de plus de 50 ans. Pour les autres postes de cadres et dans le cadre de plans de recrute- ment plus quantitatifs, l’entreprise préfère encore s’oc- troyer les services des jeunes générationsqu’il apparaît plus aisé d’intégrer dans la culture de l’entreprise et dont les salaires sont moins élevés. Pour se justifier, des inter- locuteurs ont avancé que lorsque l’entreprise a entrepris de recruter des salariés de plus de 50 ans, les retours d’ex- périence n’ont pas été forcément probants dans la mesu- re où même si le salarié se révélait aussi compétent qu’un autre, passé la satisfaction d’avoir retrouvé du travail, il revendiquait souvent un salaire lui permettant de retrou- ver son ancien « standing ». Les salariés de plus de 50 ans et notamment les cadres poseraient donc des difficultés particulières d’intégration au long cours dans les équipes.

A contrario, un autre interlocuteur s’est montré très satis- fait du recrutement opéré. En interne, des gestionnaires des ressources humaines s’appliquent à changer les men- talités et à prôner l’intérêt d’un recrutement diversifié.

Enfin, nous avons pu repérer des pratiques de recrute- ment de salariés expérimentéssur le modèle d’une pra- tique déjà éprouvée en Grande-Bretagne par B&Q (filiale de Kingfisher). Les expériences ont été menées par deux enseignes de la grande distribution. Elles ont eu recours à la méthode des «habiletés» qui abolit la référence à des critères tels que l’âge, pour mettre l’accent sur les com- pétences requises pour le poste. À l’UCANSS, une dizaine de recrutements a concerné des salariés de plus de 50 ans en considération du contenu du poste de travail proposé et de sa durée de vie évaluée à dix ans.

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