D´eveloppement : M´ethode de Laplace
L´ eo Daures
Le¸cons 229, 236, 239, 253, 265
R´ef´erence : Zuily-Qu´effelec, Analyse pour l’agr´egation.
1 Enonc´ ´ e du th´ eor` eme
L’objectif de ce d´eveloppement est de montrer la proposition suivante :
Proposition 1. SoitI un intervalle deR,ϕ∈ C2(I), etg∈ C(I). On suppose de plus que :
• t7→e−xϕ(t)g(t) est int´egrable pour toutx∈[a,+∞[.
• ϕ0 s’annule en exactement un pointt0, en lequel ϕ00(t0)>0(c’est donc le minimum global de ϕ).
• g(t0)6= 0 Alors,
Z
I
e−xϕ(t)g(t)dt ∼
x→∞
√A
xe−xϕ(t0) avec A=g(t0) s 2π
ϕ00(t0)
Ce r´esultat vient essentiellement de la croissance de l’exponentielle, puisque c’est le facteur e−ϕ(t)x qui d´ecide o`u placer le poids dans l’int´egrale : l`a o`u e−ϕ(t)x est tr`es grand e−ϕ(t)xg(t) le sera aussi, et l`a o`u e−ϕ(t)xest tr`es petit,e−ϕ(t)xg(t) l’est aussi, peu importe la valeur degtant qu’elle est non nulle. Moralement, l’exponentielle vient donc accrocher le minimum deϕent0 et y placer tout le poids au fur et `a mesure que xgrandit. Siϕ(t0)>0, c’est ent0quee−ϕ(t0)d´ecroˆıt le moins vite, et siϕ(t0)<0, c’est ent0quee−ϕ(t)x croˆıt le plus vite ! Pas ´etonnant d`es lors que l’int´egrale ressemble asymptotiquement `a son int´egrande prise ent0 ...
On remarquera qu’en effectuant le changement de variable xu = t dans Γ(x+ 1) = R∞
0 e−ttxdt et en prenantϕ(u) =u−ln(u) etg= 1 on d´eduit simplement de ce r´esultat la :
Proposition 2(formule de Stirling).
n! ∼
x→∞
n e
n√ 2nπ
2 D´ emonstration
Montrons l’´equivalent annonc´e
D´emonstration. Une m´ethode classique pour obtenir des r´esultats sur une int´egrale d´ependant d’un param`etre est de sortir, par tous les moyens possibles, le param`etre de l’int´egrande. Attelons nous donc `a cette tˆache : commencons par ´ecrireϕ`a l’aide d’une formule de Taylor:
ϕ(t) =ϕ(t0) + 0 + (t−t0)2ψ(t)
avecψ(t) = Z 1
0
(1−u)ϕ00(ut+ (1−u)t0)du
1
On obtient donc
Z
I
e−xϕ(t)g(t)dt=e−xϕ(t0) Z
I
e−x(t−t0)2ψ(t)g(t)dt
Par cette op´eration tr`es simple, on n’a effectu´e qu’un petit pas dans la d´emonstration, mais on a d´ej`a isol´e le facteur pr´epond´erant de l’´equivalent : e−xϕ(t0).
Il faut encore s’occuper de l’int´egrale restante. A la vue du facteur` e−x(t−t0)2ψ(t), on est pris d’une irr´esistible envie de se ramener `a une int´egrale de Gauss. Il faudrait donc effectuer le changement de variable u= (t−t0)p
ψ(t). Seul probl`eme : on ne sait pas s’il s’agit vraiment d’un changement de variable, c’est-`a-dire siρ:t7→(t−t0)p
ψ(t) est unC1-diff´eomorphisme, ni mˆeme s’il est d´efnini !
• Montrons qu’on peut d´efinirρ. En effet, on observe queψ(t0) = 12ϕ00(t0)>0. Donc dans un intervalle J = [t0−δ, t0+δ]⊂I, on est certains queψ≥0, ce qui permet de d´efinir ρsurJ.
• Montrons maintenant que ρest bienC1. En ´ecrivantψ(t) = ϕ(t)−ϕ(t(t−t 0)
0)2 , on voit queψest au moins C1 surJ\{t0}. DoncρestC1surJ\{t0}. En fait, elle est mˆemeC1surJ tout entier. En effet, surJ\{t0}, on a d’une partρ0(t) = 1
2√
ψ(t)((t−t0)ψ0(t)−2ψ(t)), et d’autre part, en d´erivant le d´eveloppement de Taylor deϕ,ϕ0(t) = (t−t0)2ψ0(t)+2(t−t0)ψ(t), d’o`u, surJ\{t0},ρ0(t) = ϕ0(t)
2(t−t0)√
ψ(t) −−−→
t→t0
q1 2ϕ00(t0), et on peut donc prolonger continuement ρ0 sur toutJ.
• Enfin, pour en faire un changement de variable, on veut queρsoit une bijection. ρ0(t0) = q1
2ϕ00(t0)>0, donc sur un intervalleJ0 = [t0−δ0, t0+δ0]⊂J, on aρ0(t)>0 etρstrictement croissante donc injective.
On dispose maintenant du changement de variable d´esir´e sur l’intervalleJ0. Le reste de l’intervalle d’int´egration ne nous int´eresse pas, d´ebarassons nous-en avec une fonction plateauθ qui vaut 1 sur [t0−δ20, t0+δ20] et 0 en dehors deJ0. Elle permet d’´ecrire :
Z
I
e−xϕ(t)g(t)dt=e−xϕ(t0) Z
J0
θ(t)e−x(t−t0)2ψ(t)g(t)dt
| {z }
=:F1(x)
+ Z
I
(1−θ(t))e−xϕ(t)g(t)dt
| {z }
=:F2(x)
Nous nous occuperons deF2 en temps voulu. Pour l’instant, observonsF1 et profitons de pouvoir enfin effectuer le changement de variable auquel on pr´eparait le terrain depuis si longtemps ! Avecu=ρ(t), on a maintenant :
F1(x) = Z
J0
θ(t)e−x(t−t0)2ψ(t)g(t)dt= Z
ρ(J0)
e−xu2h(u)du
avech(u) =g(ρ−1(u))θ(ρ−1(u))(ρ−1)0(u). Un deuxi`eme changement de variablev=xudonne une expression encore plus proche d’une int´egrale de Gauss :
F1(x) = 1
√x Z
xρ(J0)
e−v2h( v
√x)dv
Il n’y a plus qu’`a appliquer un th´eor`eme de convergence domin´ee pour conclure sur le sort deF1. h´etant continue `a support compact (carθ est `a support compact), elle admet un maximum, permettant de fournir la majoration int´egrable|1xρ(J0)(v)e−v2h(√vx)| ≤ ||h||∞×e−v2, d’o`u
Z
xρ(J0)
e−v2h( v
√x)dv−−−−→
x→∞ h(0) Z
R
e−v2dv=√ πh(0)
L’observation approfondie de l’expression deh(u), ´epaul´ee par la formule de la d´eriv´ee de l’inverse (ρ−1)0= 1/ρ0◦ρ−1permet de voir queh(0) =g(t0)q 2
ϕ00(t0), et de s’assurer par l`a queh(0)6= 0 par hypoth`ese. On a donc un ´equivalent deF1:
F1(x) ∼
x→∞g(t0) s 2π
xϕ00(t0)
2
Il ne reste plus qu’`a voir queF2 est n´egligeable devante−xϕ(t0)F1(x). Ainsi on aura R
e−xϕ(t)g(t)dt∼ e−xϕ(t0)F1(x), ce qui prouvera l’´equivalent du th´eor`eme.
PourquoiF2est elle n´egligeable ? Commen¸cons par observerϕ: l’hypoth`ese de stricte positivit´e deϕ00(t0) et l’impossibilit´e pour ϕ0 de s’annuler autre part qu’en t0 impliquent que ϕ est strictement d´ecroissante avant t0 et strictement croissante apr`es t0. On peut donc trouver une constante m > ϕ(t0) telle que
∀t ∈ I\[t0− δ20, t0 + δ20], ϕ(t) ≥ m > ϕ(t0). Un dessin vaut mille mots, et toutes ces explications se comprennent mieux en observant un petit graphe.
m ϕ(t)
t0 t0+δ20 t0−δ20
On voit que δ0 avait ´et´e pr´ecis´ement d´efini tel que c’est exclusivement sur [t0− δ20, t0+δ20] que ϕ est proche de son minimum ! Alors,
|F2(x)| ≤ Z
I\[t0−δ20,t0+δ20]
(1−θ(t))e−xϕ(t)|g(t)|dt
≤e−xm Z
I\[t0−δ20,t0+δ20]
|g(t)|dt
=Ce−xm =
x→∞oe−xϕ(t0)
√x
Cela montre donc finalement queF1(x)e−xϕ(t0)est asymptotiquement le seul terme qui compte, et que Z
I
e−xϕ(t)g(t)dt ∼
x→∞F1(x)e−xϕ(t0) ∼
x→∞g(t0) s 2π
xϕ00(t0)e−xϕ(t0)
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