44 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 2 - février 2016
ÉDITORIAL
Le cholangiocarcinome :
de l’abandon à la compréhension…
Cholangiocarcinoma: once ignored to better understood
Longtemps classé parmi les tumeurs rares du foie dont on connaissait simplement le pronostic effroyable, le cholangiocarcinome était la tumeur orpheline du foie. Jusqu’au début de ce siècle, on savait qu’elle était rare, souvent volumineuse à la découverte, faiblement chimiosensible
et non transplantable du fait de son extension ganglionnaire très fréquente.
Beaucoup d’auteurs mélangeaient dans cette entité les cholangiocarcinomes intra- et extrahépatiques, en y incluant même parfois les cancers de la vésicule biliaire. Qu’elle soit due à des modifications de nomenclature ou à un véritable accroissement du nombre de cas, l’augmentation globale de l’incidence du cholangiocarcinome, en particulier dans les pays occidentaux, a eu comme conséquence un regain d’intérêt franc et massif des anatomopathologistes, des hépatologues, des chirurgiens et des oncologues pour cette tumeur.
Le cholangiocarcinome, qui apparaît vraiment maintenant
comme l’autre tumeur primitive du foie après le carcinome hépatocellulaire, n’est plus le parent pauvre de l’oncologie hépatique.
Depuis le début des années 2000, de nombreux travaux ont montré que, plus que dans le carcinome hépatocellulaire, il était nécessaire de bien distinguer des formes très différentes au sein de cette entité nosologique particulière. Si, globalement, le carcinome hépatocellulaire ne diffère que par son degré de différenciation, le cholangiocarcinome est, lui, beaucoup plus hétérogène, aussi bien dans ses caractéristiques anatomopathologiques que dans sa présentation clinique et, donc, sa prise en charge et son pronostic. Le cholangiocarcinome n’est pas simplement intra- ou extrahépatique, il est, par exemple, intrahépatique périphérique ou périhilaire, à envahissement endobiliaire ou péribiliaire, sur un foie sain ou sur une cirrhose. C’est l’analyse, en réunion de concertation pluridisciplinaire, de ces différents paramètres, parfois sans la possibilité d’un prélèvement histologique, qui permettra de proposer la meilleure solution thérapeutique en termes de durée et de qualité de vie.
Le rôle de ce dossier spécial de la Lettre du Cancérologue est de faire le point sur la complexité et l’intérêt de cette pathologie que l’on connaît mieux et que l’on traite donc plus précisément. Par souci de clarté, j’ai exclu le cancer de la vésicule biliaire de ce numéro, mais j’ai réuni les spécialistes français du cholangiocarcinome. Dans ces pages, on découvrira l’importance de l’analyse histologique et immunophénotypique de cette tumeur en fonction de sa localisation dans le foie, les bonnes et les mauvaises indications de la chirurgie, les nouvelles pistes en oncologie et le rôle potentiel de la transplantation hépatique dans les petits cholangiocarcinomes sur cirrhose ou après radiochimiothérapie dans les cholangiocarcinomes périhilaires.
Au total, un numéro riche sur une pathologie complexe et passionnante pour laquelle beaucoup de progrès sont encore à faire, mais maintenant sur des entités nosologiques plus précises.
Dr Éric Vibert
Centre hépato-biliaire, Inserm U1993, AP-HP, hôpital Paul-Brousse, Villejuif.
É. Vibert déclare être membre du Board Bayer Healthcare et consultant pour Nanobiotix.
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