J Radiol 2010;90:233-5
© Éditions Françaises de Radiologie, Paris, 2010
Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés lettre génito-urinaire
À propos d’une tumeur vaginale rare : cause de métrorragies récidivantes
F Mikou (1), H Boufettal (1) M Khair (1), M El Kerroumi (1) M Ghazli (1), N Matar (1) MI Kably (2) et N Chikhaoui (2)
es tumeurs vasculaires du vagin sont exceptionnelles. Elles peuvent entraî- ner des manifestations diverses dont les métrorragies récidivantes pouvant en- gendrer une anémie profonde. Le diagnos- tic doit être posé pour pouvoir établir une stratégie thérapeutique efficace.
À partir de l’histoire clinique d’une pa- tiente de 40 ans prise en charge à la mater- nité Lalla Mériem au CHU Ibn Rochd pour un hémangiome de la paroi latérale du vagin à l’origine de métrorragies réci- divantes, il nous a paru intéressant de dis- cuter le diagnostic et la prise en charge de cette tumeur rare du vagin.
Observation
Madame K. S., âgée de 40 ans, mère de 5 enfants vivants, ayant accouché par voie
basse, consulte pour une sensation de boule vaginale avec métrorragies mini- mes. L’examen clinique retrouve un sai- gnement d’origine vaginal sans anomalie cervicale et individualise une masse au ni- veau du tiers moyen de la paroi latérale du vagin, rénitente. Par ailleurs, le col est d’aspect normal, l’utérus est de taille normale, pas de masse latéro-utérine.
L’échographie pelvienne avec Doppler a montré une masse cervico-vaginale de 50/
44 mm, bien limitée et homogène, hyper- vascularisée avec des vaisseaux artériels et veineux (fig. 1).
L’IRM pelvienne en séquence T1 a mon- tré une lésion arrondie de 34 mm, rehaus- sée après injection de Gadolinium, siège dans la région vaginale et cervicale latéra- lisée à gauche (fig. 2). L’artériographie pelvienne met en évidence une hypervas- cularisation pelvienne portée sur l’artère utérine gauche et par les artères vaginales hypertrophiées des deux côtés mais pré- dominant à gauche, avec retour veineux important et des veines dilatées en rap- port avec le processus tissulaire hyper- vascularisé (fig. 3). À noter que la patiente a été hospitalisée en urgence devant un
tableau de métrorragies abondantes ayant nécessité une transfusion sanguine pour une anémie à 4 g/dl. Une prise en charge avec succès par une embolisation sélective avec des particules résorbables a été prati- quée. Un contrôle clinique un mois après a montré la disparition des métrorragies et de la masse vaginale. Une biopsie tu- morale a été réalisée après l’embolisation et a objectivé un hémangiome de la paroi vaginale. L’échographie pelvienne avec Key words: Tumor. Vagina. Vascular. Angiography. Embolization.
Surgery.
Mots-clés : Tumeur. Vagin. Vasculaire. Artériographie.
Embolisation. Chirurgie.
L
(1) Service de Gynécologie-obstétrique « B », Maternité Lalla Mériem, Centre Hospitalier Universitaire Ibn Ro- chd, Casablanca. (2) Service de Radiologie des urgences, Centre Hospitalier Universitaire Ibn Rochd, Casablanca.
Correspondance : H Boufettal(3) 53, rue Allal Ben Ab- dellah, 20000, Centre ville, Casablanca, Maroc.
E-mail : mohcineb@yahoo.fr
Fig. 2 : IRM pelvienne en coupe sagittale pondérée en T1 après injection de contraste montrant une lésion siégeant en latérovaginale gauche.
a b c
Fig. 1 : Échographie Doppler montrant la tumeur vaginale.
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Doppler et l’angiographie faites immé- diatement et 3 mois après l’embolisation ont confirmé la disparition du processus tumoral (fig. 4 et 5).
Discussion Épidémiologie
Si les tumeurs vasculaires sont nombreu- ses et de nouveaux types tumoraux sont régulièrement décrits, les tumeurs vascu- laires de la paroi du vagin (TVV) sont ex- ceptionnelles (1), Nous avons recensé trois cas publiés à ce jour dans la littératu- re (1-3) dont un cas diagnostiqué et traité pendant la grossesse (2). L’âge décrit dans la littérature varie entre 12 à 52 ans (1-3).
Dans notre observation l’âge est de 40 ans.
Clinique
De tailles et de localisations variables, les TVV entraînent des manifestations clini- ques diverses. Un saignement abondant résistant au traitement médical ainsi que la palpation d’une masse vaginale ou une gêne pendant les rapports sexuels sont les signes d’appel décrits (1-3). Tous les cas publiés ont nécessité une transfusion (1- 3). Les métrorragies dues à ces tumeurs peuvent entraîner des troubles de l’hé- mostase et des coagulopathies (1-3). Tou- tefois, leur découverte peut être fortuite (2).
Paraclinique
Le diagnostic précis est essentiel à une prise en charge adaptée. L’examen clini- que permet de suspecter une tumeur va-
ginale rénitente avec un diagnostic le plus probable de kyste vaginal du fait de sa fréquence. L’échographie avec Dop- pler, peu coûteuse et non invasive, tient une place prédominante dans le diagnos- tic de TVV, elle montre une masse bien délimitée et homogène, hypervasculari- sée avec des vaisseaux artériels et veineux (1-3), tel est le cas dans notre observation.
Le Doppler couleur joue un rôle fonda- mental pour ne pas confondre les images d’allure liquidienne détectées en mode B avec des lésions kystiques et permet d’identifier précocement une anomalie vasculaire passée inaperçue en mode B. C’est pourquoi l’usage systématique du mode Doppler couleur durant l’exa- men de patientes présentant des métror- ragies inexpliquées devrait être discuté.
La vélocité artérielle est élevée et les ré- sistances basses (1-6). L’IRM est un excel- lent examen non invasif pour diagnosti- quer et déterminer l’étendue de la TVV (1-3). En pondération T2, les lésions sont homogènes et en hypersignal (1-3). L’an- giographie est l’examen de référence pour le traitement. Elle permet de guider une embolisation thérapeutique (1-3). De nombreux travaux scientifiques ont dé- montré la valeur de l’angio-IRM pour réaliser le diagnostic positif de malfor- mations vasculaires utérines et d’effec- tuer une angio-architecture permettant de réaliser l’angiographie à titre théra- peutique. Elle permet donc de confirmer le diagnostic et constitue la première éta- pe du traitement endovasculaire. Histolo- giquement, toutes les tumeurs décrites étaient des tumeurs vasculaires bénignes, représentées par les hémangiomes, les lymphangiomes, et l’angiomatose (1-3).
Un cas de malformation artérioveineuse a été décris (7, 8).
Traitement
L’embolisation artérielle offre une possi- bilité curative conservatrice (1, 3, 9). Cette procédure permet de conserver une possi- bilité de grossesse ultérieure et doit donc être considérée comme la première op- tion thérapeutique selon Ghai et al. chez la femme jeune (10). Les saignements sont contrôlés dans 96 % des cas par em- bolisation (1, 3, 10). L’inconvénient de cette technique est le risque de récidive par une circulation collatérale. Dans no- tre cas, le suivi à six mois de l’embolisa- tion n’a pas montré de récidive. L’emboli- sation peut être répétée avec succès en cas de récidive (9). La prudence s’impose car les cas de grossesses rapportés après em- bolisation sélective de MAV utérine sont rares (9).
Conclusion
Les TVV sont exceptionnelles. Elles peuvent être prises pour des kystes vagi- naux. Elles peuvent aussi être à l’origine de métrorragies abondantes. Leur dia- gnostic repose sur l’échographie, qui est souvent pratiquée en première inten- tion, grâce à l’utilisation du Doppler couleur. Elles peuvent efficacement être traitées par les techniques de radiologie interventionnelle. L’embolisation sélective a l’avantage de préserver la capacité re- productive et de pouvoir être répétée en cas de récidive.
Fig. 3 : Artériographie pelvienne mon- trant une hypervascularisation portant sur l’artère utérine gauche.
Fig. 4 : Angiographie post-embolisation sélective faite immédiatement après embolisation.
Fig. 5 : Angiographie post-embolisation sélective 3 mois après.
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