HAL Id: jpa-00205376
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Durées de fluorescence des sels d’uranyle solides et de
leurs solutions,
R. Delorme, F. Perrin
To cite this version:
R. Delorme, F. Perrin. Durées de fluorescence des sels d’uranyle solides et de leurs solutions,. J. Phys.
Radium, 1929, 10 (5), pp.177-186. �10.1051/jphysrad:01929001005017700�. �jpa-00205376�
LE
JOURNAL
DE
PHYSIQUE
ET
LE RADIUM
DURÉES
DEFLUORESCENCE
DES SELS D’URANYLE SOLIDES ET DE LEURSSOLUTIONS,
par MM. R. DELORME et F. PERRIN.
Sommaire. 2014 Les sels d’uranyle, ainsi que certaines de leurs solutions, excités parla lumière bleue, présentent une fluorescence verte durable que l’on peut observer par la méthode classique du phosphoroscope de Becquerel. La durée d’émission de cette
fluores-cence a été étudiée en adjoignant à un tel phosphoroscope un dispositif photométrique
précis, qui permet de vérifier que la luminescence, après un éclairement instantané,
décroît exponentiellement
I =
I0 e2014t103C4
et de déterminer (à la température ordinaire et à celle de l’air liquide) la grandeur 03C4 qui
représente la vie moyenne des molécules dans l’état excité. Ces mesures ont été faites :
1° pour les sels solides anciennement étudiés par Becquerel de façon peu précise. 2° pour les solutions dans l’acide sulfurique et l’acide métaphosphorique dont la
fluo-rescence a une durée du même ordre que celle des cristaux, comme l’a découvert l’un de
nous.
L’ensemble des résultats confirme l’hypothèse que la luminescence des sels d’uranyle est une fluorescence simple de longue durée, due à des transformations d’activation et de désactivation spontanée entre l’état normal et un état d’activation électronique presque
métastable du groupe UO2.
8ÀaiB
VI.
-Toxs
X. MAI 1929 .1~· 5.
1.
Dispositif
expérimental. -
Pour mesurer les durées d’émission des selsd’uranyle, j’ai
employé
lephosphoromètre
représenté
dans le schéma de lafig.1. L’intensité
de la lumière sortant du
phosphoroscope
doit êtrecomparée
à celle d’un étalon de mêmeFig. i.
couleur et d’intensité
proportionnelle
à celle de la lumière excitatrice(qui peut
n’être pastout à fait
constante).
Ces conditions sont réalisées de lafaçon
suivante :Le faisceau lumineux donné par l’arc S est rendu
parallèle.
Uneglace
sans tain I, inclinée à ~ii° le divise en deuxparties,
cequi
assure uneproportionnalité
rigoureuse
entrel’intensité totale de la lumière d’excitation
qui pénètre
dans lephosphoroscope
et celle de la lumièrequi
excite l’écran decomparaison
E.Le faisceau réfléchi
converge
en E sur la face antérieure d’un écranconstitué,
soit parde la
poudre
de sulfated’uranyle
serrée entre deux lamelles de verre, soit par une lame deLli JOURNAL DE PHYSIQUE ET LI; RADIUM. - SÉRIE VI. - T. X. - N° 5 - MAI 1929. i2.
verre d’urane. Cet
écran,
observé par sa facepostérieure,
constitue l’étalon de lumière.L’intensité du faisceau
qui
en émanepeut
être réduite dans unrapport
connu au moyend’une roue à secteurs d’ouverture
réglable, animée,
par unpetit
moteurélectrique,
d’unerotation
rapide.
Le faisceau transmis converge sur le
phosphoroscope
P. Ce dernier est unphospho-roscope à
disques
dutype
E.Becquerel.
Les deuxdisques,
de 1 i cm dediamètre,
portent
chacun 16 entailles en forme de secteurs de
.~,~°
disposées symétriquement
à lapériphérie.
Ils sont enfermés dans des carterspercés
de fenêtres de même ouverture limitées verticale-ment par des arcs de cercle. Ils sont montésrigidement
sur un axe commun defaçon
que la bissectrice d’une entaille de l’un desdisques
soitparallèle
à la bissectrice d’un secteurplein
situé entre deux entailles consécutives de l’autredisque.
Toutes les entailles d’un desdisques
sont ainsidisposées
en chicane parrapport
aux entailles de l’autredisque.
La dis-tance interne entre les deux carters est d’environ 5 cm, cequi permet
d’introduire entreeux un
petit
vase de Dewar enquartz transparent
nonargenté
pour les mesures dans l’airliquide
(’).
Lesystème axe-disques
est entraîné par unjet
d’aircomprimé frappant
unepetite
roue à aubes montée sur l’axe. Enfin l’axeporte
à l’une de ses extrémités une vissans fin sur
laquelle s’engrène
une rouetangente qui
établit un contactélectrique
tous lescinq
cents tours. Ces contactss’inscrivent,
ainsi que les battements d’un chronomètre don-nant lecinquième
deseconde,
sur une bande depapier
enfumée animée d’une vitesse uniforme. La vitesse de rotation desdisques
est ainsi continuellementenregistrée
Ellepeut
atteindre deux cents tours par seconde.Le faisceau de fluorescence émis par la substance étudiée U
émerge
duphosphoro-scope,
est;rendu
parallèle
et tombe en C sur un cube deLummer,
perpendiculairement
aufaisceau de
comparaison.
Enfin,
grâce
à unsystème
delentilles,
on superpose sur unpetit
orifice 0
l’image
de l’étalon E’ et de la substance U étudiée.L’oeil,
placé
en0,
perçoit
les deuxplages
du cube de Lummer. L’éclairement est uniforme sur chacune desplages.
La substance étudiée U eôt
prise,
dans le cas dessolides,
sous la forme depoudre
serrée entre deux lamelles dequartz,
commel’étalon ;
dans le cas dessolutions,
elleremplit
un
petit
tube enquartz
fondutransparent;
tubes et lamelles sont fixésrigidement
au bâtigénéral.
La lumière excitatrice est filtrée par un écran bleu
(cuivre ammoniacal),
et lafluores-cence est observée à travers un écran
complémentaire jaune
(chromate
depotassium),
cequi
élimine toute lumière diffusée.2. Mesures. - On donne au secteur variable de la roue R une ouverture
angulaire
connue et on la fait tourner à une vitesse suffisante pour que le faisceau
qui
la traversedonne une sensation visuelle continue
(une quinzaine
de tours parseconde).
Laplage
decomparaison
du cube de Lummer a ainsi une brillance constanteI,
proportionnelle
àl’angle
d’ouverture du secteur variable. On lance alorsprogressivement
lephosphoroscope.
L’intensité sur la deuxième
plage
du cubecroît,
àpartir
dezéro,
avec la vitesse de rotationdes
disques.
Unmanipulateur électrique
permet
de noter surl’enregistreur
à noir de fumée l’instant où les deuxplages
passent
par la même intensité. La vitesse continuant à croîtrelégèrement,
laplage correspondant
à la substance étudiée devientplus
lumineuse que laplage
decomparaison.
On refait la détermination en sens inverse en faisant décroître lente-ment lavitesse,
et notant à nouveau surl’enregistreur
l’instant où les deuxplages
passent
par
l’égalité.
La vitesse de rotation
correspondant
à l’intensité I estprise égale
à la moyenne des deux vitessesmarquées
surl’enregistreur.
On recommence
cinq
ou six fois une telleopération
en donnant au secteur variableune série d’ouvertures différentes. On obtient
ainsi,
pour la substanceétudiée,
la variation de l’intensité lumineuse moyenne du faisceauqui émerge
duphosphoroscope
en fonction de la vitesse de rotation desdisques
(caractérisée
par le nombre N de tours parseconde,
ou par la
période
de rotationT).
,179
3.
Interprétation
des résultats. - Ilpourrait
sembler que letemps qui
s’écouleentre un éclairement et une observation consécutive étant inversement
proportionnel
à lavitesse,
il suffise de construire la courbe I en fonction de T pour avoir la loi de décroissanceexponentielle.
En réalité la courbe ainsi obtenue n’est quegrossièrement exponentielle
danssa
partie
médiane et conduit pour T à des valeurs tout à fait erronées(1).
Il faut en effet d’unepart
tenircompte
de l’ouvertureprogressive
des fenêtres d’éclairement etd’observa-tion,
et d’autrepart
totaliser les émissions dues aux excitations successives.L’interprétation
correcte desrésultats exige
ainsi le calcul suivant :Appelons
(fl’angle
d’ouverture desentailles,
s’il y a h entailles surchaque disque,
nous2
poserons q, = ; 1t; ’p
estl’angle
des bissectrices de deux entailles successivesprises
sur un 1)disque
et sur l’autre. Pour une vitesseangulaire
permanente
donnée w nous pouvons poser,en introduisant les
temps
à laplacé
desangles :
Prenons comme
origine
destemps
l’instantoù,
par le passage d’uneentaille,
la fenêtrepar où
pénètre
le faisceau excitateur commence à s’ouvrir et étudions la variation de l’in-tensité de la lumière d’excitationpendant
le passage de cette entaille. Si le faisceau excita-teur couvre entièrement et uniformément la fenêtre d’entrée duphosphoroscope,
cequi
est;pratiquement
réalisé,
l’intensitéf (c~t)
qui
tombe sur la substance àchaque
ins tant test,
pendant
letemps
0 àpartir
del’origine
destemps,
proportionnelle
àl’angle
c~t dont atourné le
disque,
et de l’instant 0 à l’instant 2 {)proportionnelle
àl’angle (~6 -
t)w.
Nous admettrons que conformément à la théorie des fluorescences
simples,
lalumines-cence des sels
d’uranyle,
due à une excitationinstantanée,
décroîtexponentiellement
àpartir
de l’instant de cetteexcitation,
et que des excitations successivesagissent
indépen-damment les unes des
autres,
les émissionscorrespondantes
s’ajoutant
simplement.
Ceshypothèses
seront àposteriori
vérifiées par la concordance de la loithéorique
obtenueavec la loi
expérimentale
de variation de la luminosité en fonction de la vitesse de rotation.L’intensité de la fluorescence élémentaire due à l’excitation reçu à
l’instantt,
pendant
une durée infinimentpetite
dt,
est d’unepart
proportionnelle
à l’intensité totalef (c~t)
dt de cette excitationinstantanée,
et d’autrepart
décroîtexponentiellement
àpartir
de l’ins-tant t où elle s’estproduite.
A un instant ultérieurt’,
elle sera doncproportionnelle
àOn voit alors assez facilement que l’intensité de fluorescence due à toutes les
excita-tions élémentaires étendues à toutes les entailles successives
qui
ontpassé
devant lafenêtre d’entrée
est,
à un instant où la fenêtre d’observation commence exactement às’ou-vrir,
donnée,
à un facteur constantprès,
parl’expression :
qui
seréduit,
tous calculsfaits,
àA
partir
de cetinstant,
tandis que l’intensité de fluorescence continue à décroitreexponentiellement,
l’intensité vraiequi
sort duphosphoroscope
estproportionnelle à
l’angle
d’ouverture de la fenêtre d’observation.Un raisonnement tout à fait
analogue
auprécédent
montre que la somme desinten-(2) Les vies moyennes données par E. Becquerel, qui se servait de cette courne avec
une petite
sités élémentaires émises
pendant
le passage d’une des entailles devant la fenêtre d’obser-vation est de la formeEnfin,
pour avoir l’intensité moyenne observéeIl
il faut diviser ~9par 2
0.
*
En transformant
l’expression
de 1 et introduisant lesangles 11
et 4) on trouve’
On voit que si u tend vers
0,
c’est-à-dire si la vitesse de rotation desdisques
devientinfinie,
I tend vers un maximumce
qui
est conforme àl’expérience.
En mettant en évidence cette intensitémaximum,
onpeut
écrire :Cette formule est
générale
pour unphosphoroscope
dont lesdisques
portent’
desentailles
identiques
d’angle ~
disposées symétriquement
en chicane à lapériphérie (3).
Dans le cas desdisques employés
ici :nous avons d’autre
part w
_ ~ ~/T,
T étant lapériode
de rotation desdisques,
et a =1fTt
en
désignant
par T la durée moyenne d’émission. Si l’onporte
ces valeurs dans la formuleprécédente,
on a :On
peut
construired’après
cette formule la courbethéorique
donnantlog
(I,,II)
en fonction delog
(7yi6ï).
Si la loi de décroissance élémentaire de la luminescence est bienexponentielle,
la courbeexpérimentale
donnantlog
(a/1)
(A
étant une intensité lumineusearbitraire)
en fonction delog
( Tl16)
doit se superposer à laprécédente
par une translationdont la
composante
suivant l’axe des abscisses donneralog
T.En
fait,
lasuperposition
atoujours
été bonne dans toute lapartie
médiane de la courbeexpérimentale,
cequi
justifie,
aposteriori,
leshypothèses
faites au cours du calcul et vérifienotamment la loi de décroissance
exponentielle
admise(1).
(3) Par un calcul analogue, dans lequel il tenait compte des excitations par les entailles successives,
mais non de l’ouverture progressive des fenêtres, Wiedemann avait obtenu une formule un peu différente qui lui avait permis de corriger d’une façon déjà importante les nombres de E. Becquerel
[ Wiedemann
Ann., t. 3d~ (9888), p. 446].
(4) Nichols, cherchant à vérifier une idée théorique, avait cru pouvoir déduire d’une étude expérimen-tale de la luminescence des sels d’uranyle ur0153 autre loi de décroissance : la courbe représentant, en fonc-tion du temps, la racine carrée de l’intensité émise après une excitation, aurait été constituée par une suite de plusieurs segments de droite formant des angles brusques. Mais S.-J. Wawilow et W.-L. Lewschin ont montré que les mesures de Nichols étaient bien mieux interprétées par une loi simple de décroissance
181
La coïncidence est souvent moins bonne aux très faibles et aux très
grandes
vitesses. Je vois à cela deux causes secondaires :l’enregistreur
nepermet
pas, dans cesconditions,
des mesures très
précises.
D’autrepart,
l’égalité
d’éclairementest,
dans ce cas, moins facile àapprécier :
aux faiblesvitesses,
la luminosité est peuvisible;
aux trèsgrandes
vitesses,
il est difficile d’éviter une
petite
différence de teinte entre lesplages
alors très brillantes. Lafigure 2
représente
une de nos déterminations.1
,
Fig. 2. - Détermination de la
vie moyenne du chlorure d’uranyle à la température ordinaire.
2013201320132013 Axes et courbe théoriques.
.2013..,-..~2013.2013 Axes de la courbe expérimentale, dont les points seuls sont indiqués.
Unité de temps pour la courbe expérimentale : Ût = 2,5 X 40-~ s.
La superposition des courbes donne : log Ut -
log = 0,21, r = 1,54 X 10--4.
4. Valeurs de la vie moyenne pour les sels solides. Influence de la
tempé-rature. - Les
premiers
résultats obtenus par cette méthode ont faitl’objet
d’une noteaux
Compotes
rendus de l’Académie(5).
Ils sont
reproduits
dans le Tableau 1 avec des mesuresnouvelles,
etquelques
déter-minations faites à latempérature
de l’airliquide.
L’erreur
probable
est de 5 p. 100.Ces valeurs sont très différentes de celles données par E.
Becquerel qui,
comme nousl’avons
dit,
appliquait
à ses mesures une méthode de calcul tout à fait insuffisante. Les valeurs déduites de ces mêmes mesures par Wiedemann serapprochent
desnôtres,
mais sont certainement moinsprécises.
Nos valeurs
sont,
aucontraire,
dansl’ensemble,
en très bon accord avec cellesobte-nues par W.-L. Lewschin et S.-J.
Wavilow,
au moyen de leurphosphoromètre
à miroirtournant
(6).
(Ces physiciens
ont d’ailleurs montré que le& mesures de Nichols convenable-mentinterprétées
conduisaient à des valeurs voisines desleurs).
(b) F. PBRRIN et R. DELORME, C. R., t. 186 (février 1928), p. 428.
TABLEAU 1.
Les déterminations faites à la
température
de l’airliquide (-180°
C)
montrent que les durées moyennes d’émission sont un peuplus grandes qu’à
latempérature
ordinaire,
mais
cependant
du même ordre degrandeur,
tandis que pour lesphosphorescences
la durée d’émissionaugmente
indéfinimentquand
on abaisse latempérature.
La luminescence des selsd’uranyle
secomporte
donc à cepoint
de vue comme une fluorescenc4.L’augmen-tation,
peuimportante,
relativement,
de la durée d’émission estprobablement
corrélative d’uneaugmentation
du rendementlumineux ;
elle est en effet laplus
forte pour le chlorured’uranyle
(9)
dont la fluorescenceaugmente
leplus
par abaissement detempérature.
Enfin ul faut remarquer que pour l’ensemble des sels étudiés la durée moyenne d’émis-sion n’est pas en relation directe avec lepouvoir
.fluorescent. Parexemple,
lesulfate,
plus
fluorescent que le
nitrate,
a une durée d’émissionplus
de moitié moindre. Onpeut
cepen-dant affirmer que tous lescomposés
peu fluorescents ont des durées d’émission relati-vementpetites.
5. étude des solutions de sulfate
d’uranyle
dans l’acidesulfurique.
- Les solutions des selsd’uranyle
sont,
engénéral, beaucoup
moins fluorescentes que les selscristallisés,
et leurs luminescencesfaibles,
invisibles dans lesphosphoroscopes mécaniques,
étaient considérées comme considérablementplus
brèves et même d’une nature différente de celles des solides(fluorescence
instantanée et nonplus
phosphorescence brève).
Parmices
solutions,
lesplus
fluorescentes sont celles du sulfated’uranyle
en milieuacide ;
et si l’on dissout ce sel dans l’acidesulfurique
concentré pur, on obtient une solution dont lafluorescence est très brillante et
comparable
à celle des sels solides. En étudiant cettesolution,
dont la viscosité est seulementvingt
fois celle del’eau,
au moyen d’unphospho-roscope ordinaire de E.
Becquerel,
l’un de nous(1°)
constata aisément que sa lumines-cence avait une durée du même ordre degrandeur
que pour les selscristallisés,
et seule-ment environquatre
foisplus
brève que celle des cristaux de nitrated’uranyle
(1i).
(7) Le chlorure d’uranyle a été préparé en dissolvant L’03 dans HCI et évaporant dans le vide la solu-tion obtenue. UOs était obtenu en chauffant le nitrate au bain d’huile à 250o C jusqu’à ce qu’il ne se dégage plus de vapeurs nitreuses. Le chlorure, très déliquescent, était enfermé dès sa sortie de la cloche à vide entre les lamelles de quartz que je collais à la cire.
(8) Ce sel a été obligeamment prêté par AI. A. Urbain.
(9) Comme l’avait déià remarqué qualitativement J. Becquerel [C. R., te (1911), p. 5ii]. (10) FRANCIS PERRiN, C. R., t. 182 (1926), p. 929.
(Il) La possibilité d’observer cette luminescence au [moyen du phosphoroscope ordinaire de Becquerel
(4 entailles par disque, 100 tours par seconde) a été contestée par S.-J. Wawilow et iv.-L. Lewschin.
L’ex-périence est pourtant facile et la luminescence observée aux grandes vitesses de rotation, très brillante. Il suffit d’ailleurs de remarquer que la durée moyenne d’émission de ces solutions est seulement moitié de celle du verre d’urane, dont l’observation au moyen du phosphoroscope de Becquerel est classiquement tout à fait aisée, sans qu’il soit nécessaire de donner aux disques une grande vitesse de rotation; en les faisant tourner simplement deux fois plus vite, ce qui est facile, on observe de même très brillamment l’émission de la solution sulfurique de sulfate.
183 La fluorescence de ces solutions est très sensible à des traces
d’impureté,
notamment acideshalogénés
ou substancesorganiques ;
pour éviter cesimpuretés,
leplus simple
estd’oxyder
la solution en la faisant bouilliraprès
addition d’un peu d’acidenitrique
fumant,
ou, cequi
revient aumême,
depréparer
la solutionsulfurique
desulfate,
en dissolvant dans l’acidesulfurique
concentré(66° B)
dunitrate
d’uranyle
et en chassant l’acidenitrique
libéré par ébullition. Nos solutions ont été1-réparées
par cette dernière méthode,.Le
pouvoir
fluorescent des solutionssulfuriques
de sulfated’uranyle
dépend
en outre de la concentration et surtout de latempérature;
et ces facteursmodifient
dans le mêmesens la durée moyenne d’émission T. On
peut
d’ailleurs s’attendre à une variationpropor-tionnelle de ces
deux
grandeurs,
conformément à la relationthéorique
où p
désigne
le rendement lumineux(en
nombre dequanta)
de lafluorescence,
et To. ladurée moyenne maximum
d’émission,
correspondant
au cas d’un rendementégal
à l’unité(2),
pourle
corps considéré.A la
température
ordinaire(17°),
laplus grande
durée d’émission s’obtient pour les solutions étendues dans l’acidesulfurique
pur, pourlesquelles
les mesures m’ont donnéQuand
la concentrationaugmente,
quand
latempérature
s’élève ouquand
on additionne d’eau lasolution,
la durée moyenne d’émissiondiminue;
les résultats des mesures sont rassemblés dans le tableau suivant :TABLEAU II.
Enfin pour une solution contenant 30 pour 100
d’eau,
j’ai
trouvé r =0,55.
i0-~ s. Cesvaleurs,
déjà publiées C 3),
et celles de w.-L. Lewschin et S.-J. Wawilow(1 ~)
sont dans l’ensemble en bon accord(sauf
dans le cas des solutions trèsconcentrées,
d’ailleursassez facilement
altérables,
pourlesquelles
la valeur donnée ici est presquedouble).
Cesauteurs ont d’autre
part
vérifié defaçon
satisfaisante laproportionnalité
prévue
dupouvoir
fluorescent et de la durée moyenne
d’émission, quand
laconcentration,
latempérature
onla teneur en eau varient.
Nous avons fait cette vérification dans le cas de la diminution de fluorescence par
addition à la solution d’une très
petite quantité
d’acidechlorhydrique.
La sensibilité des solutionssulfuriques
de sulfated’uranyle
aux inhibiteurs de fluorescence est tellequ’il
suffit d’un trente-millième d’acidechlorhydrique
pour
réduire de moitié la durée moyensd’émission et le
pouvoir
fluorescent 4~. Defaçon
précise,
les mesures ont donné pour deuxe2) F. PERRipr, C. R., t. i82 (1926), p. 219 et J. Phys., t. 7 (1926), p. 390.
(13) F. PERRIN et R. DBLORME, [oc. cit. (1’) lac. cie.
solutions ne différant que par la
présence
dans l’une d’elles d’un trente-millième d’acidechlorhydrique
(en
grammes de HCI par centimètrecube) :
Le
rapport
despouvoirs
fluorescents a été déduit des mesuresphosphorométriques
elles-mêmes;
pour deux tellessolutions, ayant
la même concentration en sulfated’uranyle
et
placées
dans le mêmerécipient,
cerapport
est en effetégal
aurapport
des intensités maximumI,n,
donné par la différence descomposantes
suivant l’axe des ordonnées destranslations
qui
permettent
d’amener en coïncidence les deux courbesexpérimentales
et la courbethéorique
sur legraphique logarithmique.
6. Etude des solutions de
métaphosphate d’uranyle.
Influence de la viscosité.- La viscosité est visiblement un facteur
qui agit
defaçon
importante
sur lepouvoir
fluorescent et la durée d’émission des solutions de sel
d’uranyle :
Toutes choseségales
d’ailleurs,
le rendement de fluorescence et la durée moyenne d’émissionaugmentent
avecla viscosité. Mais il est difficile de faire varier la viscosité seule et sans modifier
quel-que autre facteur d’action
(température,
concentration...)
(i~).
Nous avonsespéré y réussir
le mieux en étudiant les solutions de
métaphosphate d’uranyle
dans l’acidemétaphospho-rique plus
ou moins étendud’eau,
dont les viscosités s’étendent sur ungrand
intervalledepuis
la viscosité de l’eaujusqu’à
des viscositéspratiquement
infinies(état
vitreux trèsdur).
Malheureusement,
lamanipulation
de ces solutionsexige qu’on
les chauffe assezfréquemment,
cequi produit
une transformationpartielle
de l’acide méta en acideortho-phosphorique,
et cette modificationchimique
peut
influencer aussi la fluorescence. Les viscosités ont étémesurées,
assezgrossièrement
d’ailleurs,
encomparant
destemps
d’écoulement(à 18°)
à travers une série de tubes calibrés.Le tableau III donne les durées moyennes d’émission en fonction de la viscosité pour
une série de solutions de
métaphosphate d’uranyle
dans l’acidemétaphosphorique
pur oumélangé
d’eau :TABLEAU III.
7.
Interprétation
des résultats. - Onsait que la différence essentielle entre
fluorescence et
phosphorescence
ne réside pas dans uneplus
ou moinsgrande
persistance
d’émission,
car à cepoint
de vue une suite à peuprès
continue d’intermédiaires relie lesfluorescences les
plus
brèves auxphosphorescences
lesplus longues.
Une fluorescence est essentiellement associée à un
simple
passage des moléculesayant
absorbé la lumière
incidente,
par un état excité àpartir duquel
l’émission seproduit
spon-tanément par suite d’une instabilité
interne;
et si cet état n’est pas directement atteint aumoment de
l’absorption,
les transformations intermédiaires doivent seproduire
presque instantanément et
n’emprunter
aucuneénergie
au milieu(amortissement rapide
d’un mouvement d’oscillationproduit
en mêmetemps
que l’excitationélectronique).
La185
durée moyenne d’une fluorescence ainsi définie est donc
simplement
la vie moyenne r des molécules dans un état excitésusceptible
de transformationspontanée
parémission ;
elleest par suite au
plus
égale
à l’inverse 1"0 du coefficient deprobabilité
de cette émissionspontanée.
D’unefaçon
précise
on a, pdésignant
le rendementlumineux,
.Y
---et c---ette relation
permet
de caractériserexpérimentalement
une vraie fluorescence.Si,
aucontraire,
les molécules excitéespassent,
entrel’absorption
etl’émission,
parun état intermédiaire stable ou
métastable,
et nepeuvent
plus
alors atteindre l’état d’émission sans recevoir du milieu un certain incrémentd’énergie,
la luminescence est unephosphorescence,
caractérisée parl’augmentation
indéfinie de la durée d’émission auxbasses
températures.
,Enfin,
dupoint
de vueondulatoire,
la durée d’une fluorescencereprésente
ladurée
même de l’émissionélémentaire,
la constante d’amortissement des trainsd’ondes,
tandis que la durée d’unephosphorescence
n’a,
à cepoint
de vue, aucunesignification
fondamen-tale.D’après
cescritériums,
la luminescence des selsd’uranyle
est une fluorescencevéri-table,
malgré
sapersistance plus
de dix mille foisplus grande
que celles des fluorescencesusuelles
(T =
U,4.1U-g
s pour les solutions defluorescéine) (16).
La durée moyenne de cetteluminescence doit être
égale
à la viemoÿenne
du radical dans un état d’activationélectronique susceptible
d’émissionspontanée,
et cettedurée,
ouplis
exactement sonquotient
par le rendement lumineuxcorrespondant,
détermine l’inverse du coefficient deprobabilité
de cette émissionspontanée.
Dupoint
de vueondulatoire,
la durée moyenned’émission observée
représente
lapériode
d’amortissement des trains d’ondesémis,
qui
s’étendraient par suite dans ce cas sur une centaine de kilomètres de
longueur.
Un amortissement aussi faible aurait été tout à fait
inexplicable
par la théorieélectro-magnétique classique qui prévoyait
une constante detemps
d’amortissement de l’ordre de(pour
une émission dans lespectre
visible due à un électronoscillant).
Ils’inter-prète
au contraire aisément enmécanique
ondulatoire. La vie moyenne maximum 1"0 dans l’état excité est en effet déterminée par la conditione
représentant
lepouvoir
émissif,
d’après
la théorieclassique
(1ï),
d’un oscillateur defréquence v
etd’amplitude q
(n,
indice dumilieu;
c, vitesse de lalumière ; e,
charge
de l’électron en U. E.S.).
Mais cetteamplitude,
au lieu d’être reliée àl’énergie
disponible
W -- h v par la formulevalable pour une
particule
oscillante de masse m, en estindépendante.
Ses
composantes
suivant les axes doivent être calculées par les formules§1
et~2
représentant
les fonctions deSchrôdinger
correspondant
à l’état normal et à l’état excité considéré. Or on sait quel’amplitude
ainsi associée à deux étatsquantiques peut
êtrenulle,
la transition entre ces états étant alors « interdite » par émission(état
excitémétastable).
Mais ellepeut
aussiêtre,
dans certains cas, trèspetite
sans êtrenulle,
quelle
que soit d’ailleurs la
grandeur
del’énergie disponible ;
l’émission sera alorspossible,
maisse
produira
en untemps
trèslong,
avec un amortissement très faible.(16) F. PURRIN, J. Phys., t. 7 (1926), p. 390.
(17) Une théorie purement quantique de l’émission, développée par Dirac, conduit au même résultat que l’application faite ici du principe de correspondance.
Pour
qu’il
en soitainsi,
il faut que les fonctionsqui
figurent
dans lesintégrales
précé-dentes soient presque
orthogonales.
Et parsuite,
dans ce cas, une très faibleperturbation
des fonctions fondamentalesIf,
résultant d’une,petite
modification des conditionsexté-.rieures,
pourra modifierbeaucoup
la valeur relative del’amplitude
q, donc de la vie moyenne Autrement ditlorsqu’un
état excité est presquemétastable,
la duréed’émis-sion,
beaucoup
plus
longue
que celleprévue
par la théorieclassique,
doit être sensible à delégères
modifications des conditionsextérieures,
de structure moléculaire parexemple.
Ceci
permet
decomprendre
que les divers selsd’uranyle
aient des durées d’émissionassez
différentes,
indépendamment
des rendementslumineux,
car legroupement
(U
O2)
doit subir depetites perturbations,
variables suivant la molécule danslaquelle
il se trouveengagé,
etqui
peuvent
influer notablement sur les conditions dequasi-orthogonalité,
nécessaires pourexpliquer
lesgrandes
durées d’émission.Ainsi la durée relativement très
grande
de la luminescence des selsd’uranyle
n’a rien d’inadmissible pour une fluorescencevéritable;
c’est laplus longue
actuellementconnue, mais des durées presque aussi
grandes
ont été observées même dans le domaine trèssimple
des résonancesoptiques :
parexemple,
la deuxième raie de résonance du zinccorrespond
à une vie moyenne de 10-5 s,près
decinq
mille foisplus grande
que la duréeprévue
pour safréquence
parl’électromagnétislne classique
(18).
8. Conclusions. - 1. La décroissance
exponentielle
de la luminescence des selsd’uranyle
solides,
ou ensolution,
après
uneexcitation,
a été vérifiée.2. La durée moyenne d’émission = a été
déterminée,
avec uneprécision
de 4 à 5 pour 100pour un certain nombre de sels cristallisés. Les valeurs
obtenues,
très différentes des valeurs peuprécises
de E.Becquerel,
sont en bon accord aveccelles,
récentes,
de W.-L.Lewschin et S.-J. Wawilow. Elles
varient,
pour les sels lesplus
fluorescents,
due 2 à7.i0~ s, sans relation directe avec le
pouvoir
fluorescent. °3. Les durées moyennes d’émission des sels solides très fluorescents
(sulfate,
nitrate)
augmentent,
mais relativement assez peu,quand
on abaisse latempérature
à - 1801.4. Les solutions diluées de sulfate
d’uranyle
dans l’acidesulfurique
pur(viscosité 0,2)
présentent
une belle fluorescence dont la durée moyenne d’émission est du même ordre degrandeur
que celle des sels cristallisés(F. Perrin).
La valeur trouvée pour cette durée moyenne d’émission est= 1,4.
10-4 s(à
i7°);
elle diminuequand
latempérature
s’élève,
quand
la concentrationaugmente,
ouquand
onajoute
de l’eau. Elle diminueégalement
quand
on introduit dans la solution des traces de certains corps : un trente-millième d’acidechlorhydrique
réduit à la fois de moitié la durée moyenne d’émission et lepouvoir
fluores-cent.
5. Bien que des
solutions,
même très fluides,puissent
avoir des durées d’émissioncomparables
à celles descomposés
solides, la viscositéagit cependant
defaçon
importante
sur les durées
d’émission,
(mais
seulement pour autantqu’elle
influe sur lepouvoir
fluores-cent).
Par
exemple,
dans le cas des solutions demétaphosphate d’uranyle
dans l’acideméta-phosphorique plus
ou moinsdilué,
zaugmente
depuis
la valeur0,9.10
-4s pour une solution de viscosité seulement double de celle de l’eau
jusqu’à
7. iO-4 s pour une solution vitreuse très dure.6. L’ensemble de ces
résultats,
joint
à cequ’on
saitdéjà
sur la luminescence des selsd’uranyle,
vient fortement àl’appui
del’hypothèse
que cette luminescence est unefluores-cence
simple
(c’est-à-dire
une activationélectronique
suivie d’une désactivationspontanée),
dont la
durée,
environ cent mille foisplus grande
que pour les fluorescences des matièrescolorantes,
estremarquablement
longue.
Ce travail a été fait au laboratoire
de
Chimiephysique
de M. le Professeur Jean Perrin.(ls) P. SOLEILLET, C. R , t. 187 (1928), p. i23.