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Dépôt Institutionnel de l’Université libre de Bruxelles / Université libre de Bruxelles Institutional Repository

Thèse de doctorat/ PhD Thesis Citation APA:

De Waele, J.-M. (1996). Analyse comparée du processus d'émergence des partis et des systèmes politiques en Europe centrale après 1989: la République tchèque, la Slovaquie et la Pologne (Unpublished doctoral dissertation). Université libre de Bruxelles, Faculté des sciences sociales, politiques et économiques, Bruxelles.

Disponible à / Available at permalink : https://dipot.ulb.ac.be/dspace/bitstream/2013/212287/4/46235698-2015-4b9d-a902-8dae489d7230.txt

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SECTION DES SCIENCES POLITIQUES

SECTION DES SCIENCES POLITIQUES

1 9 DEC. 1396

Anne VAN HOUTVIN ’

Analyse comparée du processus d’émergence des partis et des systèmes politiques en Europe centrale après 1989 :

la République tchèque, la Slovaquie et la Pologne

Dissertation présentée en voie d’obtenir le titre de Docteur en sciences politiques

Par Jean-Michel DE WAELE

Sous la direction de Monsieur le Professeur Mano TELO

VOLUME ÏV

ANNEE ACADEMIQUE 1996-1997

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SECTION DES SCEENCES POLITIQUES

Analyse comparée du processus d’émergence des partis et des systèmes politiques en Europe centrale après 1989 :

la République tchèque, la Slovaquie et la Pologne

Dissertation présentée en vue d’obtenir le titre de Docteur en sciences politiques

Par Jean-Michel DE WAELE

Sous la direction de Monsieur le Professeur Mario TELO

VOLUME IV

U?

ANNEE ACADEMIQUE 1996-1997

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CONCLUSIONS GENERALES

A l’issue de notre recherche, quels sont les éléments communs et divergents dans le développement historique des Etats que nous avons analysés ? Quelles sont les caractéristiques des systèmes partisans qui se sont développés en République tchèque, en Pologne et en Slovaquie ? Quelles sont les convergences des partis pohtiques qui se stabilisent dans ces trois pays d’Europe centrale ? Observe-t-on l’établissement de familles politiques similaires à celles d’Europe occidentale ? Sur quels clivages se structurent et se consohdent les partis et les systèmes politiques des nouvelles démocraties d’Europe centrale ? Dans quelle mesure la nature transition influe sur les évolutions et sur l’agenda de la vie politique ?

CHAPITRE I. LES DIMENSIONS HISTORIQUES ET L’IMPORTANCE DE LA TRANSITION

1.1. L’entre-deux-guerres : entre réussite et échec

La Pologne et la Tchécoslovaquie issues de la chute d’empires devront faire face aux difficiles défis de l’unification de provinces aux traditions historiques, sociales et politiques différentes. En quelques lustres, elles réussiront à unifier les systèmes légaux, monétaires et administratifs. De même, les progrès économiques, culturels et sociaux réalisés entre 1918 et 1940 par ces Etats seront importants. L’alphabétisation, l’industrialisation, les voies de communication connaissent des progrès importants même si la Slovaquie et une grande partie de la Pologne connaissent un retard de développement caractéristique de la périphérie du contment européen. La situation de la Bohême-Moravie est semblable à celle prévalant dans les Etats européens les plus développés. Sa structuration sociale correspond aussi aux normes

« occidentales » dans ime région déjà largement urbanisée avec une bourgeoisie importante et une classe ouvrière en expansion. Dans la partie slovaque, l’urbanisation est encore faible. La classe ouvrière y est très minoritaire face à la paysannerie, principal groupe social. La bourgeoisie locale est réduite, tout comme en Pologne où le rôle et les valeurs de l’aristocratie restent prégnants. La classe ouvrière est cantonnée dans certains îlots industriels et urbains.

Face à une bourgeoisie polonaise aux dimensions politique et économique réduites, on trouve la paysaimerie dont la structuration est inégalitaire. La masse des agriculteurs se

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partagent de minuscules lopins de terre. D’autre part, quelques aristocrates régnent sur d’immenses propriétés.

L’impact de la religion est comparable en Pologne et dans la partie slovaque de la Tchécoslovaquie ; dans les deux cas, l’Eglise a été le vecteur et le défenseur de l’identité nationale. Par contre, en Bohême-Moravie, l’institution catholique est historiquement discréditée et faible:

Quels sont les éléments des situations pohtiques de l’entre-deux-guerres que mis en évidence ?

La Pologne vit dans une situation d’instabilité politique récurrente. Ce qui conduira au coup d’Etat de Pilsudski. Ce dernier met fin au régime démocratique. La Tchécoslovaquie sera le seul Etat d’Europe centrale à maintenir un régime démocratique et ce jusqu’en 1938. Dans les deux cas, le régime parlementaire a succombé mais les causes de leur échec sont différentes.

En Pologne, elles sont principalement d’ordre interne. En Tchécoslovaquie, en revanche, elles sont surtout d’ordre externe.

La situation des partis pohtiques est également différente. Dans le cas tchécoslovaque, les organisations partisanes sont structurées et implantées au sein de la population. Les divers groupes sociaux et les grandes tendances idéologiques sont représentés au parlement. Notons aussi l’existence d’un parti communiste puissant. Les traditions démocratiques tchécoslovaques se traduisent de la sorte par des partis pohtiques organisés et représentatifs des différents intérêts sociaux.

Souhgnons qu’en Slovaquie, les agrariens et les nationahstes occupent une place dominante : un mouvement autonomiste slovaque se développera. D sera largement soutenu et relayé par le clergé cathohque, seule éhte pohtique disponible. La rencontre historique entre l’Eghse et le mouvement national slovaque s’était produite un siècle plus tôt. Les partis pohtiques y sont beaucoup plus faiblement structuré qu’en Bohême-Moravie et s’articulent plus souvent autour de personnahtés charismatiques.

La caractéristique principale du paysage pohtique polonais jusqu’en 1926 est le morceUement. La Diète a parfois été composée de trente « partis ». Tous les grands courants idéologiques ont subi des divisions importantes. Une des raisons principales de cette division tient aux traditions différentes en cours dans les provinces restées longtemps sous l’influence austro-hongroise, prussienne et russe. Les scrutins sont marqués par une faible participation.

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Les partis polonais se caractérisent par lenr faiblesse structurelle et organisationnelle.

Néanmoins, en dehors des formations représentant les minorités nationales, et en simplifiant, trois grandes tendances peuvent être relevées. Une mouvance de gauche avec les socialistes et les communistes, im centre composé de petites formations démocrates chrétiennes et de partis agrariens et une droite nationale, cathohque et souvent antisémite.

La Pologne et la Tchécoslovaquie sont les premières victimes de l’agression nazie, qui aura des conséquences capitales. La Tchécoslovaquie est dépecée et im état Slovaque

« indépendant » voit pour la première fois le joiu'. Il collaborera avec l’Allemagne et apphquera les principes du « cléricalo-fascisme ».

La Pologne sera dévastée par l’occupation nazie tant au point de vue matériel qu’humain. La communauté juive est exterminée et les élites polonaises ont aussi subi une saignée lors du massacre de Katyn.

A la libération, les deux Etats connaissent des mutations au niveau des fi'ontières et des minorités nationales. La Pologne glisse vers l’Ouest et la Tchécoslovaquie perd la Ruthénie subcarpatique. Avec l’accord des alliés, le gouvernement tchécoslovaque expulse sa minorité allemande.

1.2. L’intégration dans le camp socialiste : subsistance des diversités

L’implantation du régime communiste suit aussi des chemins divergents '. En Tchécoslovaquie, lors de la première élection d’après guerre, le parti communiste arrive en tête en Bohême-Moravie mais ne réalise que de faibles scores en Slovaquie. Le coup de Prague de 1948 met fin à la démocratie parlementaire. Deux décennies durant, la Tchécoslovaquie devient un « élève modèle ».

En Pologne, par contre, l’implantation du régime de « démocratie populaire » sera longtemps problématique compte tenu de la représentativité insignifiante du parti communiste.

La situation polonaise sera toujours spécifique dans le « canç socialiste » même durant la période stalinienne. L’agriculture, par exemple, demeurera pour une large part privée et l’Eglise cathohque jouera, dès 1956, im rôle de « contre-pouvoir ». Le régime sera traversé de crises graves qui affectent des couches diversifiées de la population. Le « plurahsme limité »,

’ D. Mason, Révolution in East Central Europe, the rise and fall of communism and the cold war, Westview Press, Boulder, 1992, 215 pages. Voir le premier chapitre ; « The establishment and decay of communism in East Central Europe », pp. 11-40.

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l’influence de l’Eglise, l’organisation de mouvements d’opposition permettent d’évoquer l’existence d’une forte société civile, ce qui est diSérent du cas tchécoslovaque.

Les mouvements de contestation seront réprimés dans le sang en Pologne, mais ils mènent à des changements de personnel pohtique et influent sur la pohtique économique du pays. Le parti ouvrier imifié polonais (PZPR) se singularise par sa grande hétérogénéité idéologique. De 1956 à 1989, la situation polonaise est de la sorte marquée par une instabUité pohtique et économique quasi permanente. En revanche, la situation en Tchécoslovaquie se fige dans le cadre de la « normahsation » après l’écrasement du printemps de Prague. Les purges qui lui font suite vident le parti communiste de Tchécoslovaquie de tout élément

«réformateur». Ce fait sera déterminant dans la transition démocratique, tout comme la répression massive à l’encontre des intellectuels lors de la « normahsation ».

Le contexte diffère quelque peu à Bratislava. La répression des inteUectuels y est moindre. De plus, la défense des intérêts nationaux prend le pas sur les revendications d’ordre démocratique. De plus, dans le cas slovaque, l’industriahsation et la modernisation économique vécues sous le régime commimiste ont créé des relations moins confhctueUes entre le régime et la société. Les sentiments anticommunistes y seront moins virulents.

1.3. La différence dans les oppositions

La résistance au régime communiste sera de nature différente dans les cas étudiés ^. En Pologne, à partir de 1976, l’opposition agrège des intellectuels de gauche ou proches de l’éghse et la classe ouvrière. Cette conjonction aboutira, sous l’effet d’une grave crise économique, à la formation du mouvement Sohdarité, fort de dix millions de membres. A la suite des grèves d’août 1980, un syndicat indépendant est, pour la première fois dans une démocratie populaire, légahsé. L’opposition polonaise, ouvrière et intehectueUe, bénéficie d’un soutien massif de la population et profite de l’infi-astructure de l’Eghse. L’institution cathohque augmente son pouvoir à chaque crise en se posant comme l’interlocuteur privilégié du régime et de l’opposition.

Un deuxième factem est l’élasticité qui existe entre les mUieux du pouvoir et ceux de l’opposition. Pendant plusieurs décennies, il a été possible en Pologne d’être un intellectuel proche de l’épiscopat tout en étant député à la Diète. De même, le nombre de croyants

^ M. McFaul, Post-communist poUtics. Démocratie prospects in Russia and Eastem Europe, Center for strategie and international studies, Washington, 1993, 131 pages, p. 88.

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membres du parti ouvrier unifié polonais est substantiel. Enfin, en 1980 et en 1981, il était possible d’appartenir simultanément à Solidarité et au PZPR.

La nature et la composition de l’opposition tchécoslovaque sont très différentes. Elle reste confinée à un petit groupe d’intellectuels tchèques réunis autour de la Charte 77. Elle ne bénéfice d’aucun appui important ; en particulier dans la classe ouvrière. Jusqu’au dégel gorbatchévien, la société tchécoslovaque se divise en trois groupes distincts qui ont peu de relations entre eux ; les membres du parti, les dissidents et, entre ceux-ci, « la zone grise » constituée par la majorité des citoyens.

Dans le contexte d’Europe centrale et orientale, il est capital de souligner que la dissidence tchèque se base sur les principes « moraux » et « éthiques » et sur la « pohtique apolitique » dans son combat. En outre, contrairement à la situation polonaise, elle n’a pu compter sur le renfort de l’Eglise cathohque.

Trois différences doivent encore être notées.

Premièrement, la Tchécoslovaquie ne connaît pas de crise économique majeure. En Pologne, la crise débute au milieu des années septante et se poursuit sans discontinuité jusqu’à la transition. La population enregistre une chute drastique de son niveau de vie et le pays connaît une hyperinflation récurrente. L’épuisement et la fatigue de la société polonaise sont patents.

Deuxièmement, en Pologne, les pourparlers de la « table ronde » et le compromis qui en résulte ont été négociés à froid. Certes, la relance des grèves en 1988 a fait prendre conscience aux élites politiques du pouvoir et de l’opposition de l’urgence de sortir de l’impasse pohtique et économique dans laquelle se trouve le pays depuis le coup d’Etat de 1981, mais les débats s’ouvrent sans pression populaire et sans manifestation. L’opposition n’est pas dans une phase ascendante.

En Tchécoslovaquie par contre, on observe le réveil progressif de la société civile dans les années quatre-vingt. Les négociations avec le régime communiste se sont opérées sous la pression de centaines de milüers de manifestants qui trouvent en V. Havel un leader charismatique. Le rapport de forces est clairement favorable à l’opposition.

Enfin, la différence entre l’impact des facteurs internes et externes dans le processus menant à la chute des régimes communiste.^ est forte. Le cas tchécoslovaque s’inscrit dans

« l’effet domino » et dans la « contagion démocratique ». Dans la situation polonaise, les facteurs d’ordre interne prédominent. Néanmoins, aucun de ces processus, aussi différenciés, n’aurait été possible sans l’arrivée au pouvoir en Union soviétique de M. Gorbatchev et la mise en œuvre de réformes pohtiques et économiques.

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développement politique, économique, social et culturel qui permettent de dégager des conclusions dans le cadre d’ime étude comparative multifactorielle. Malgré l’appartenance à la même structure étatique durant septante ans, la Bohême-Moravie et la Slovaquie ont connu des dififérences qui en font des cas bel et bien distincts. Pour des problématiques comme le rôle de l’Eglise catholique, le poids de la paysannerie ou le manque de tradition démocratique, le cas slovaque s’apparente plus à la situation polonaise qu’à celle de Bohême-Moravie.

De nombreux exemples, de nature diverse, prouvent l’importance des facteurs historiques durant les régimes de « démocratie populaire » et pendant les premières années de la transition. Les différences aux niveaux économiques, des traditions démocratiques, des stmcturations sociales, de l’importance du mouvement ouvrier et/ou communiste, du poids de l’Eglise, des représentations nationales, des relations interethniques, de la mémoire collective ou de la « culture politique » ^ forment des éléments incontournables.

Pour comprendre les situations contemporaines, c’est-à-dire pour notre sujet, l’organisation des clivages politiques actuels, il faut prendre en compte des facteurs provenant du régime précédant mais aussi issus du temps long . Comme l’expliquait F. Braudel dans sa Grammaire des civilisations, « un passé proche et un passé plus ou moins lointain se mêlent dans la multiplicité du temps présent : alors qu 'une histoire proche court vers nous à pas précipités, une histoire lointaine nous accompagne à pas lents » ^.

Souhgnons que si l’analyse historique est nécessaire, elle n’est pas sufiBsante pour autant car elle recherche prioritairement les continuités. Souvent la démarche consiste à isoler a posteriori des conditions historiques semblables qui exphqueraient en soi le présent. Certes,

^ L’ouvrage de G. Almond et S. Verba reste incontournable sur le sujet. Il fonde la réflexion sur la culture politique. Pour les auteurs, la notion de « culture politique » fait référence « aux orientations et aux attitudes spécifiquement politiques concernant le système politiques et ses divers aspects. (...) Lorsque nous parlons de culture politique d’une société, nous nous référons au système politique tel qu’il est intériorisé dans la connaissance, dans les sentiments et dans les évaluations de la population ».

G. Almond, S. Verba, Civic culture, Princeton University Press, Princeton, 1963, 562 pages, pp. 13-14.

Nous reprenons à notre compte les principales critiques établies par B. Badie à l’encontre de l’ouvrage pionnier d’Almond et Verba. Celui-ci reste marqué par le déterminisme historique d’un modèle unique de modernisation, par une vision développementaliste et par Toccidentalo-centrisme.

B. Badie, Culture et politique, Economica, Paris, 1993 (3° édition), 169 pages, pp. 45-46 et 53-61.

Pour l’Europe centrale l’ouvrage édité par A. Brown reste riche par son pluralisme d’approches. Voir particulièrement H. Gordon skuxing, « Czechoslovak political culture : pluralism in an International context », pp. 115-133 et D. Paul, « Czechoslovakia’s political culture reconsidered », pp. 134-148.

A. Brown(ed.), Political culture and communist studies, St Antony’s/Macmillan, Oxford, 1984, 211 pages.

Braudel établit la relation suivante : « Ces événements d’hier expliquent et n’expliquent pas, à eux sels, l’univers actuel. En fait, à des degrés divers, l’actualité prolonge d’autres expériences beaucoup plus éloignées dans le temps ».

F. Braudel, Grammaire des civilisations. Champs Flammarion, Paris, 1987, 625 pages, p. 26.

’ Ibid., p. 27.

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le poids de l’histoire pèse sur les évolutions politiques, économiques et sociales mais il n’empêche nullement ni les changements brusques, ni les ruptiues, ni les discontinuités.

1.4. Types de transition et timings différenciés

L’hypothèse émise par T. Lynn Karl et Ph. Schmitter selon laquelle les modes de transition déterminent dans une mesure appréciable « quels types de démocratie verront le jour et quelles en seront les conséquences à long terme pour les différents groupes sociaux » ^ se vérifie en grande partie dans notre recherche.

En efifet, pour ce qui concerne les partis pohtiques, nous défendons la thèse de l’influence « forte » du type de transition sur l’émergence des organisations partisanes, sur la structuration des paysages pohtiques et sur la rapidité de la consohdation démocratique.

Jusqu’à présent, la science pohtique a porté peu d’attention à l’impact des modes de transition sur le système partisan. Or notre recherche met en évidence les rapports étroits entre ces deux éléments.

La chute des régimes communistes permet un approfondissement des théories de la transition eu égard aux spécificités de cette nouvelle « vague ». Les typologies des modes de transition, proposées avant 1989, sont marquées des conditions de l’Amérique latine et de l’Europe méridionale et accordent un rôle central à l’armée, acteur « absent » de la scène pohtique en Europe centrale. De plus, ces typologies inscrivent les transitions dans la durée et déterminent plusieurs étapes. Le modèle « hbérahsation, démocratisation, consohdation » est peu opérant dans les pays d’Europe centrale et orientale. Comme le note K Von Beyme ni la phase de hbérahsation ni ceUe de démocratisation ne sont repérables en RDA, en Tchécoslovaquie ou en Roumanie ^.

Nous isolons trois grands types de transition en Europe centrale et orientale.

La « transition négociée » concerne les situations polonaise, hongroise et bulgare. Les éhtes pohtiques du régime et de l’opposition se sont accordées sur une procédure et un agenda pohtique à court ou à moyen termes. Il existe im pacte réel ou symbohque entre éhtes * *.

® T LYNN Karl, P. Schmitter, « Les modes de transition en Amérique latine, en Europe du sud et de l’Est », Revue internationale des sciences sociales, n° 128, mai 1991, pp. 267-302.

’’ K. VON Beyme, « Démocratie transition in Central Eastern Europe », in M. Telo (sous la direction de).

Démocratie et construction européenne, éditions de l’Université de Bruxelles, Bruxelles, 1995, 368 pages, p. 227.

* D. Freidheim, « Bringing society back into démocratie transition theory aliter 1989 : pact making and régime collapse », East European Politics and Societies, vol. 7, n° 3, Fall 1993, pp. 482-512.

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En ces circonstances, la démocratisation est, au moins dans sa phase initiale, pilotée en commun par les élites issues des deux groupes qui investissent leur légitumté politique dans le processus. La transition négociée correspond au modèle espagnol, étudié par les élites ^, qui le mettront en œuvre en Europe centrale.

La « transition par implosion » se rapporte aux cas tchécoslovaque et est-allemand. Le régime en place se liquéfie et disparaît en quelques semaines sous la pression populaire. Mise à part la rapidité de l’effondrement total du régime, deux autres facteurs communs caractérisent les transitions par implosion : la faiblesse et/ou la quasi-inexistence d’éUtes réformatrices du côté gouvernemental et l’absence de réelle négociation, en raison des déséquihbres dans le rapport de forces. Les éütes de l’opposition imposent leurs exigences poHtiques à celles du régime. Les « tables rondes » mise sur pied ne visent qu’à programmer le démantèlement du régime et à éviter l’emploi de la violence par certains secteurs du régime ou de l’opposition.

Prévenir tout bain de sang est un des seuls intérêts commun .s partagés entre tenants du régime en débquescence et représentants de l’opposition. Ces derniers bénéficient d’ime grande autonomie par rapport au mouvement populaire qui est peu structuré et dont la mobiüsation est de courte durée.

La « transition violente » correspond au cas roumain. 11 s’agit d’un coup d’Etat organisé par un secteur du régime. La résistance des tenants du pouvoir provoque des affrontements armés. La population ne joue qu’un rôle secondaire dans le processus, qui restera longtemps entaché par sa provenance interne au régime.

Notre étude de cas a démontré que la transition polonaise négociée s’est révélée plus problématique et plus lente que la transition par implosion. La négociation des accords de la

« table ronde » n’a pas abouti à une démocratisation « pleine et entière » mais à une solution de compromis ; les élections « semi-démocratiques ». Il ne s’agit pas d’ime erreur de stratégie pobtique des dirigeants de Sobdarité mais de la traduction d’un rapport de forces sociales et pobtiques dans le pays à un moment donné et dans un contexte donné. Les discussions ont commencé quand les deux acteurs principaux ont pris conscience qu’ils n’étaient, ni l’un, ni l’autre, assez forts pour remporter une victoire « complète » sur l’autre.

En s’intégrant dans un processus de négociation et de « co-pilotage » des réformes, l’appareil de l’ancien régime est parvenu à influencer l’ensemble du processus. Les débats l’intègrent pleinement dans le jeu pobtique et ce malgré sa retentissante défaite électorale.

’ « Dictatures. Leçons de l’après-communisme », Le monde des débats, mars 1993, p. 18.

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La chronologie des événements en Europe centrale et orientale a débouché sur un paradoxe. Les accords de la « table ronde» ont fait de la Pologne un pays précurseur dans les réformes. Ds ont abouti à une situation inédite : la nomination d’un premier ministre non communiste dans un régime de « démocratie populaire ». Mais cette avancée spectaculaire est apparue niinimale à la lumière des effets de la chute du mur de Berlin dans les autres pays d’Europe centrale et orientale. Et la Pologne est le dernier Etat ex-socialiste à avoir organisé, en 1991, des élections législatives totalement bbres et démocratiques.

En Tchécoslovaquie, l’effondrement brusque du régime a pour conséquence que le parti communiste subit les événements sans pouvoir les influencer ou les retarder. La transition démocratique est gérée par les élites de l’opposition qui ne sont pas tenues pas un accord avec le « camp d’en face » . Les élites de l’ancien régime ne peuvent obtenir de garanties sur les poursuites judiciaires à leur égard, sur la nature de la loi électorale ou sur une période

« transitoire ».

De plus, leur participation au gouvernement d’Union nationale ne leur permet pas de peser sur le cheminement en cours en raison de leur crise interne profonde et de la courte vie de cette expérience. Les premières élections démocratiques en Tchécoslovaquie sont organisées dès début juin 1990 et les secondes en juin 1992, soit quelques mois après la tenue des premières élections législatives polonaises.

Néanmoins le type de transition ne sufSt pas, seul, à expliquer les différences fondamentales entre la Tchécoslovaquie et la Pologne. Un facteur supplémentaire de la transition doit être pris en compte pour la compréhension de cette différentiation : le timing.

En effet, la Pologne et la Tchécoslovaquie forment, dans le continuum des transitions en Europe centrale, deux cas opposés. La Tchécoslovaquie est l’exemple de la transition la plus rapide. Il s’écoule à peine quelques semaines entre les premières manifestations de masse et la chute du régime communiste. Entre cet effondrement et la légitimation démocratique des nouveaux responsables, l’espace temps est très court.

Inversement, en Pologne, la transition s’inscrit dans la durée. Outre les éléments de

« pluralisme limité » que comportait le régime, les réformes économiques avaient précédé les réformes politiques. Solidarité existait avant la chute des régimes de « démocratie populaire ».

Les racines du processus de transition sont donc profondes. Alors qu’en Tchécoslovaquie, il s’écoule sept mois entre les premières manifestations et les élections démocratiques, en Pologne, il faudra près de trois ans entre l’ouverture des négociations de la « table ronde » et les premières élections législatives démocratiques. Pendant la période durant laquelle l’ancien

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régime politique a disparu et le nouveau n’a pas encore émergé, la Pologne a vécu ime élection législative « semi-démocratique » et im scrutin présidentiel. Cela compliquera la transition démocratique, notamment en raison de nombreuses divisions internes dans chaque camp.

Comme le note A. Agh : « La Pologne fut, dans une large mesure, handicapée par des compromis établis précédemment. Ceux-ci ont gelé la structure politique pour une année comme l’illustre, par exemple, le partage du pouvoir entre un président communiste et un gouvernement issu de Solidarité » .

Le timing différent s’explique également par l’évolution des facteurs externes. Les accords de la « table ronde » ont fait de la Pologne un Etat précurseur à l’Est. Leur prudence se justifiait notamment par l’incertitude des réactions soviétiques. Par contre, en se mobilisant en fin de processus, les Tchécoslovaques n’ont pas été fi'einés par l’incertitude externe.

Les « élections fondatrices » " n’ont pas qu’une dimension strictement référendaire . Elles concourent aussi à une première cristallisation des paysages politiques .

Dans cette optique, notre analyse comparée prouve que le timing des élections s’est avéré un élément capital. L’organisation d’un scrutin avant la chute complète de l’ancien régime comphque la stabüisation démocratique. Le paysage pohtique se façonne dans im contexte de polarisation entre partis « communiste » et « anti-communiste ». La comparaison des élections semi-démocratiques polonaises et démocratiques tchécoslovaques de juin 1990 plaide en ce sens *'*.

A. Agh, « The hungarian party System and party theory in the transition of Central Europe », Journal of lheoritical politics, vol. 6, n° 2, avril 1994, p. 225.

'' V. Bogdanor, « Founding élection and régime change». Electoral studies, n° 4, 1990, pp. 288-294 ; Z. Pelczynski, s. Kowalski, « Poland », Electoral studies, n° 4, 1990, pp. 346-354 ; G. Wightman, « Czechoslovakia », Electoral studies, n° 4, 1990, pp. 319-326 et S. Whtte, « Democratizing Eastern Europe : the élections of 1990 », Electoral studies, n° 4, 1990, pp. 277-287.

M. Waller estime à ce propos : « Il doit être noté que le caractère de la première élection diffère fondamentalement de la seconde, de la manière la plus évidente en Pologne, où la première élection n ’a été que partiellement libre. La première élection fut le moment cardinal où tous les mouvements et partis, y compris les partis communistes eux-mêmes, se préoccupent de la question du transfert du pouvoir et se positionnent par rapport aux politiques à mener ».

M. Waller, « New wine in old new bottles : party inheritances and party identities in the East European transition », Draft paper for présentation at the conférence of the centre for mediterranean studies, The ermergence of new party Systems and transitions to democracy : interegional comparisons between Eastern and Southern Europe, University of Bristol 17-19 september 1993, 33 pages, p. 11.

A. Turner, « Postauthoritarian élections : testing expectations about « first » élections », Comparative political studies, vol. 26, 1993, pp. 330-349.

En ce nous rejoignons P. Mc Faul selon lequel « le timing et la séquence des élections tchèque et slovaque ont aussi promu la formation de partis et l'établissement de parlements stables au niveau des républiques. Les partis n 'ont joué aucun rôle en Pologne dans les deux premières élections. (...) Il a fallu attendre la troisième élection pour qu 'ils jouent un rôle réel ».

M. McFaul, op. cit, p. 88.

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Le type de transition ne sufiBt pas en soi à saisir toutes les dififérences observées entre les cas tchécoslovaque et polonais. En interrelation étroite avec celui-ci, le timing de la transition est un facteur non négligeable, qui est pourtant très rarement apprécié.

Ces deux facteurs combinés sont décisifs pour le processus d’émergence des partis politiques : ils créent des conditions « génétiques » différentes à leur naissance en Pologne et en Tchécoslovaquie.

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CHAPITRE II. DE L’EMERGENCE A LA STABILISATION DES PARTIS POLITIQUES : UNE PERIODISATION

Notre approche comparée nous a permis d’isoler un processus commun d’émergence des partis politiques. En effet, certaines étapes semblables ont été traversées pour ce qui concerne les partis mais aussi les systèmes de partis. En dépit de la durée et des intensités variables de ces étapes tout comme des spécificités attenantes à des développements particubers, nous pouvons présenter un modèle général d’émergence et de stabibsation des formations partisanes.

II. 1. Première étape : rétablissement d’un front anti-communiste

Cette première phase couvre la période qui s’étend de la crise pobtique qui engendre la chute du régime jusqu’à la tenue des premières élections législatives. Ebe se caractérise par la construction d’un large front qui agrège la majeure partie de l’opposition démocratique au système communiste.

Nonobstant la diversité historique et sociologique existante entre Sobdarité, le Forum civique et le Pubbc contre la violence, ces trois organisations sont étabbes avant la chute du régime à laquebe ebes concoment, à des degrés divers, mais de façon détermmante.

Outre leur fonction « historique » dans le changement de régime, toutes trois ont joué un rôle pobtique et idéologique central dans la construction de nouvebes institutions et d’un nouveau régime pobtique. Ebes lui fourniront les premières ébtes pobtiques qu’ebes mèneront aux premières élections démocratiques. En ce sens, on retrouve une fonction classique des partis pobtiques : cebe de relève pobtique.

Ces fronts larges ont aussi en commun de réunir des tendances idéologiques très diverses mais aussi des militants de générations différentes, avec des expériences pobtiques différenciées et des objectifs pobtiques contradictoires. L’anti-communisme forme le plus petit commun dénommateur. Néamnoins, chacun de ces mouvements hétérocbtes possède à sa tête l’ébte dissidente, engagée dans des formes variables et depuis des époques plus ou moms récentes pour le respect des droits de l’homme. Ce combat, parfois sobtaire, légitime le mouvement et l’assure d’im large soutien populaire.

Malgré leurs traditions différentes, ces mouvements ont des traits structurels et idéologiques comparables : un rejet de la structuration, de la hiérarchisation et de la discipbne interne. Tous trois refusent la transformation en parti pobtique au profit de mouvements de

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citoyens, présentés comme « post-partisans » dans lesquels l’organisation interne est lâche et locale. La vérité, l’éthique et la « pohtique apohtique » sont au cœur de leur discours et de leur pratique.

n importe de noter l’absence de programme pohtique ou économique précis dans les trois cas. Cela est dû à leur hétérogénéité mais aussi à la précipitation des événements.

Ces « organisations civiques » se présentent vmies contre les tenants de l’ancien régime aux premières consultations électorales « démocratiques » ou « semi-démocratiques ». Elles y remportent des succès considérables, ce qui les amène à engager ou à poursuivre les réformes pohtiques et économiques .

Face à ces fronts, d’autres tendances communes sont à l’œuvre.

Premièrement, on observe un processus de distanciation des partis satelhtes envers le régime auquel üs ont participé durant plusieurs décennies. Ces partis, à l’influence différenciée, se réforment plus ou moins profondément.

Deuxièmement, ü y a aussi une réorganisation interne des partis communistes suite aux changements dans leur personnel dirigeant, à l’effondrement de leurs effectifs et à la confiscation de leurs biens financiers ou immobiliers.

Troisièmement, mentionnons les tentatives de renaissance de « partis historiques », interdits sous le régime communiste. Certains rejoindront les fronts anti-communistes ; d’autres se présenteront seuls.

Enfin, durant cette première étape quelques partis pohtiques tenteront de passer outre au choix dual — parti communiste ou organisation civique — en prenant part aux élections.

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11.2. La deuxième étape : Véclatement de l’organisation parapluie

Sohdarité, le Forum civique et le Pubhc contre la violence vivent très vite un processus de fragmentation et de dispersion. Les causes similaires à l’origine de ce morceUement sont leur hétérogénéité pohtique constitutive, leur rejet de l’organisation et de la structuration, l’ampleur des victoires électorales et la disparition de « l’ennemi », qui justifiait l’unité .

Avec ce processus de fragmentation, la Pologne et la Tchécoslovaquie vivent une situation de multiphcation des organisations partisanes, plus ou moins crédibles et sérieuses.

” Dans le cas polonais, il s’agissait de poursuivre les réformes économiques et d’entamer les réformes politiques. Dans le cas tchécoslovaque, il fallait entamer les réformes économiques et politiques.

M. CoTTA, « Building party Systems after the dictatorship. The East european cases in a comparative perspective », in G. Pridham, T. Vanhanen (ed.), Democratization in Eastem Europe, domestic and internationalperspectives, Routledge, Londres, 1994, 247 pages, p. 118.

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Car, comme l’a aussi montré Wesolowski << seuls quelques-uns d’entre eux ont des liens — plutôt faibles au demeurant — avec des secteurs importants de la population » . A. Agh parlera de « baby parties » ou de « proto-parties ». Pour sa part, S. Gebethner emploie l’expression de « quasi partis ». Pendant cette phase, les systèmes politiques vivent une situation de fluidité extrême , typique des périodes de transition .

La chronologie et la longueur de cette seconde étape varient. L’élection présidentielle polonaise divise la mouvance de Solidarité en deux camps antagonistes lors de la « guerre au sommet », qui marque le début d’un long cheminement de reclassement politique. La groupuscularisation de Solidarité n’empêchera ni plusieurs partis et plusieurs dirigeants de se revendiquer de sa tradition et de ses luttes, ni même le mythe historique de l’organisation de perdurer.

L’héritage complexe et contradictoire se trouve de la sorte dispersé en près de vingt petites formations antagonistes. La disparition du fi:ont anti-communiste en Pologne s’établit par fractionnement progressif ce qui retarde l’émergence d’un paysage poHtique « stabilisé ».

En revanche, en Tchécoslovaquie, les deux organisations civiques se divisent rapidement en deux branches distinctes : l’ime « idéaliste », qui défend l’héritage de la

« révolution de velours » et de la dissidence, et l’autre « réahste », qui demande l’inscription à l’agenda pohtique de nouvelles priorités ; la réforme économique à Prague portée par l’ODS, et la question nationale à Bratislava, soutenue par le HZDS .

L’héritage de la mouvance civique ne se disperse pas mais est clairement assumé par un mouvement en Bohême-Moravie et un mouvement en Slovaquie. Aux élections de 1992, ces

” W. Wesolowski, « Social bonds in post-communist societies », in M. Alestalo, E. Allardt, A. Rychard, W. Wesolowski (ed.), The transformation of Europe. Social conditions and conséquences, ms publishers, Varsovie, 1994, 361 pages, p. 42.

« Dans les nouveaux systèmes de partis consolidés, de tels phénomènes de traversées de frontières doivent être plus fréquents. La distinction des niveaux de l’unité et du système est moins clairement définie. D’abord parce que les identités (organisationnelles, idéologiques) des sections du parti ne sont pas encore fortement définies. En deuxième lieu, parce que les caractéristiques de l’espace politique sont toujours fluides. Des lors, des problèmes internes aux partis deviennent facilement des problèmes du système de partis et vice-versa. Nous devrions donc avoir plus de cas de conflits intra-partisans, qui entraînent des scissions, des fiisions, de situations, où il n’est pas clair si un groupe politique est réellement un parti ou simplement une faction » M. CoTTA, « The making of the new party Systems after the dictatorship. Coalitions, alliances, fusions and splits during the transition and post-transitions stages », Draft paper for présentation at the conférence of the centre for mediterranean studies, The ermergence ofnewparty Systems and transitions to democracy : interegionalcomparisonsbetweenEastemandSouthernEurope, University of Bristol, 17-19 septembre 1993, 41 pages, p. 4.

G. Hermet note à propos de l’Espagne : «Au total, les journalistes qui, au début de 1977, affirment recenser près de 200 partis, embryons de partis, association et groupes politiques en gestation exagèrent à peine, étant entendu que la plupart ne comprennent guère que leurs fondateurs ».

G. Hermet, L 'Espagne au xx^ siècle,puf, Paris, 1992, 280 pages, p. 247.

L’analyse doit être quelque peu nuancée. Certains députés du Forum civique ne choisissent ni le camp

« idéaliste » ni le camp « réaliste » mais décident de renforcer le parti social-démocrate tchèque. Néanmoins, ceux-ci forment, comme nous l’avons noté, une petite minorité.

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deux représentants « idéalistes » sont éliminés de la représentation parlementaire au profit des

« réalistes » de chaque république. La rapide division de la mouvance civique au sein de quelques organisations clairement identifiables d’un point de vue politique accélère et facilite la formation d’un paysage politique tchèque et slovaque stabilisé.

Ainsi, si le processus d’éclatement diffère, il reste que la tendance à la disparition par division ou fragmentation conduit à la disparition des larges regroupements anti-communistes, n s’agissait d’une condition nécessaire à la structuration des paysages pohtiques et à l’apparition de courants pohtiques basés sur des clivages pohtiques différents que ceux issus de la lutte contre le régime communiste .

Dans notre étude, l’élection semi-démocratique a joué un rôle non néghgeable, mais eUe n’influence pas la tendance générale et commune. Les premières élections, qui comportaient une forte composante référendaire, voient la constitution de larges fronts anti­

communistes. As remportent des larges succès électoraux face aux partis issus du régime communiste et aux organisations qui refusent l’adhésion à l’un des deux blocs. Quelques mois après la tenue de ces scmtins fondateurs, les mouvances civiques se divisent ou se dispersent.

De nouveaux groupes parlementaires sont créés qui ouvrent la voie à une troisième étape : la parlementarisation.

11.3. La troisième étape : la parlementarisation

La division et la fragmentation des fronts civiques entraînent l’étabhssement de groupes parlementaires différenciés. Ceux-ci jouent un rôle central dans la formation des partis pohtiques. En effet, la grande majorité des partis naissent de mutations pohtiques au sein du parlement. Il s’agit donc de partis créés « à partir du sommet » et « d’origine électorale », pour reprendre la terminologie de Duverger.

La mise sur pied de groupes parlementaires différenciés obhge à se positionner sur des questions multiples, ce qui contribue à la formulation de programmes et d’une identité pohtiques plus cohérents et hsihles. La parlementarisation accroît la différence entre les partis ayant une représentation et ceux qui en sont dépourvus. Cette étape renforce les premiers au détriment des seconds. Rares seront les formations absentes du parlement durant cette étape qui parviendront à s’imposer comme parti. Mais certains partis possédant un groupe

Ces « mouvements de libération nationale » importants pouvaient mobiliser la population pour des priorités nationales mais non pour des intérêts partisans particuliers », note A. Agh.

A. Agh, op. cit., p. 227.

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parlementaire seront amenés à la disparition. La volatilité électorale est toujours importante, ce qui caractérise les périodes de transition .

n est impossible de fixer précisément des limites à cette phase, dont la chronologie et la rapidité dififèrent. Notons néanmoins qu’elle commence avec la division et dispersion des mouvements civiques. Les élections de juin 1992 se révéleront déterminantes dans ce processus en Tchécoslovaquie. Eu Pologne, le développement se révélera plus lent sans pour autant contredire les tendances générales à la parlementarisation des organisations partisanes.

Même dans la Diète morcelée de 1991, im processus de parlementarisation s’est progressivement accompli.

Les consultations parlementaires ont ime fonction de sélection entre organisations partisanes. A. Agh le rappelle aussi : « Après les élections générales, une division majeure s'est produite dans la vie politique entre les partis parlementaires réels et les autres acteurs politiques » .

Compte tenu des faiblesses financières et organisationnelles des partis, les rétributions de nature diverse, notamment la visibilité, aux partis présents dans les enceintes parlementaires (financement, accès aux médias, etc.) se révéleront déterminantes.

U.4. La quatrième étape : la consolidation

Dans leur processus d’émergence, les partis politiques vivent une quatrième et dernière étape : la consohdation. A ce stade, nous observons une diminution des partis pohtiques représentés au parlement, l’aflfermissement des structures internes, l’imposition d’une discipline parlementaire, la fin des multiples scissions au sein des groupes d’élus et la non-apparition de nouvelles formations parlementaires. Les élections de 1996 en RépubUque tchèque et de 1993 en Pologne sont particulièrement révélatrices de cette évolution.

La Pologne a réussi à combler son retard initial en la matière. En revanche, la consohdation des organisations partisanes et du système de partis slovaques se révèle plus problématique. Les difficultés inhérentes à l’indépendance nouvehement acquise et la

G. Pridham le rappelle : « La volatilité électorale est en général élevée dans la transition démocratique parce que les piliers de soutiens partisans commencent à se cristalliser. Cela se produit rarement avant la seconde élection nationale et ce problème peut durer longtemps ».

G. Pridham, « Political parties and their strategies in the transition from authoritarian rule : the comparative perspective », in G. Wightman (ed.), Party formation in East-Central Europe : post-communist politics in Czechoslovakia, Hungary, Roland and Bulgaria, Edward Elgar, Aldershot, 1994, 270 pages, p. 12.

A. Agh, op. cit., p. 229.

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prégnance de la question nationale, renforcée par l’existence d’une forte minorité hongroise, retardent ce processus.

La consolidation du système partisan est ime étape cruciale de l'afiFermissement de l’ensemble du système démocratique.

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CHAPITRE III. DE LA NATURE DES CLIVAGES EN EUROPE CENTRALE

Une des questions essentielles pour l’étude de partis politiques en Europe centrale consiste à établir les clivages qui organisent les paysages politiques . Quelques auteurs ont proposé des typologies sur la question mais, pour la plupart, elles datent du début du processus d’émergence des formations politiques. L’ampleur des évolutions rend, aujourd’hui, ces analyses inopérantes d’autant que les partis et les systèmes partisans se sont stabilisés. Avant de proposer notre analyse, nous présenterons brièvement d’autres recherches contemporaines qui participent au débat sur la problématique.

Parmi ses nombreux travaux H. Kitschelt a avancé ime synthèse globale sur la question . A ses yeux, les anciens Etats communistes voient le développement de trois cUvages fondamentaux . Le premier s’articulerait autour de la citoyenneté. Il opposerait les

« cosmopohtes » aux « particularistes ». Le second concernerait la problématique du contrôle démocratique : im des versants serait occupé par les « autoritaires » et l’autre par les

« übertaires ». Enfin un troisième clivage, de nature économique, opposerait les partisans de

« l’allocation par le marché » aux tenants d’une « redistribution pohtique des ressources ».

G. Evans et S. Whitefield défendent aussi de telles propositions. Ils ajoutent qu’en certaines circonstances, les questions d’identité nationale peuvent dominer l’ensemble des autres problèmes pohtiques ou les autres clivages.

La grande force de cette approche et de cette proposition est de pouvoir englober tous les développements politiques de l’ensemble des Etats post-communistes, de la Répubhque tchèque à la Moldavie en passant par la Biélorussie. Mais leur haut degré de générahté empêche une compréhension approfondie des évolutions pohtiques.

Notamment, elles ne prennent pas en compte les rythmes différents de démocratisation qui existent entre les anciens pays de la CEI et les pays d’Europe centrale.

Enfin, au niveau méthodologique, les études empiriques sont souvent très réduites et réductrices. Elles se fondent sur des interviews de cadres intermédiaires des principaux partis

J.M. De Waele, « A few remarks on the compatibility of political cleavages between Western Europe and the Central and Balkan Europe », in G. Markus, L, Cuba (ed.), Intégration and disintegration in contemporary Europe, European studies 1, Institute for political sciences of the hungarian academy of sciences,

1995, Budapest, 184 pages, pp. 156-161.

H. Kttschelt, « The formation of party Systems in East Central Europe », Politics and Society, vol. 20, 1, 1992, pp. 7-50.

H. Kitschelt, « The formation of party cleavages in post-communist democracies : theoritical propositions », Party politics, vol. 1, Octobre 1994, n° 4, pp. 447-472.

G. Evans, S. Whitefield, « Identifyng the bases of party compétition in East Europe », British journal of political sciences, vol. 23, n° 4, 1993, pp. 521-548.

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politiques des pays considérés. Ceux-ci sont soumis à un questionnaire identique dont les résultats sont quantifiés. Sans nier l’intérêt de cette approche, elle ignore plusieurs problématiques. Peut-on faire une typologie globalisante à partir de telles données ? N’oubüe- t-on pas la différence entre les cadres du parti, les membres et les électeurs ? La quantification ne se base-t-elle pas sur un nombre trop restreint de cas ? etc.

Notre typologie des cbvages et des organisations partisanes diffère de celle de Kitschelt. Nous le rejoignons dans la recherche des déterminants historiques qui influent sur la structuration des clivages pobtiques. D insiste sur le rôle joué par l’héritage pré-communiste — niveau de développement économique et existence éventuelle de traditions démocratiques —, sur le type de régime de « démocratie populaire », sur le mode de transition et sur les institutions que les nouveaux régimes mettent en place .

Les travaux de G. Markus sur le cas hongrois ont permis de souligner l’importance prépondérante du « clivage culturel » entre « traditionaüstes » et « occidentahstes » Ce clivage exprime « la priorité à l’ajustement socio-culturel aux sociétés d’Europe occidentale contre la priorité à la continuité de l’identité nationale, à la protection d’une culture spécifique » . Nos travaux sur des cas comparables corroborent la présence de ce cHvage culturel. Il a des intensités variables selon les spécificités des histoires nationales. G. Markus ajoute l’existence d’un clivage opposant débolchévisateurs aux rebolchévisateurs , et d’un clivage qui met en confiontation les gagnants et les perdants de la transition économique.

Celui-ci correspondrait à « l’expression du sous-développement du clivage capital-travail » .

H. Kitschelt, Patterns of compétition in East Central Européen party Systems, paper prepared for the annual meeting of the american political science association, 1995, Chicago, 31 août-3 septembre 1995.

L’auteur explique cette prépondérance : « La mobilisation politique, la formation de partis et les campagnes électorales n 'ont pas été basées sur des intérêts même pas sur des choix rationnels, mais bien plus sur des attitudes émotionnelles et socio-psychologiques et des orientations de valeur générales et vagues. Les réactions émotionnelles à la nationalité, l’éthnicité ou au communisme ont prévalu, les loyautés partisanes à base culturelle et idéologique ont prédominé ».

G. Markus, « La Hongrie entre occidentalisation capitaliste et restauration nationaliste. Quelle place pour la social-démocratie ? », in M. Telo(sous la direction de). De la nation à l'Europe. Paradoxes et dilemmes de la social-démocratie, Bruylant, Bruxelles, 1993,422 pages, p. 406.

Voir aussi G. Markus, « Parties, campaigns and cleavages in post communist Hungary : is the weakness of social démocratie forces systemic ?, in G. Szoboszai(ed.), Flying blind emerging democracies in East Central Europe, yearbook, Hungarian political science association, Budapest, 1992, 335 pages, pp. 275-314.

Voir son tableau « Les deux camps de la politique culturelle ». G. Markus, « La Hongrie... », op. cit.,p. 409 et G. Markus, « The Central European enlargment of the EC and the question of political comparability », contribution au Colloque international Dialogues européens : cinq après la chute du mur de Berlin, l’Union européenne et la grande Europe, Institut d’études européennes, Bruxelles, 24-25 février 1995, 12 pages, p. 6.

G. Markus, « The Europeanization of party politics in Hungary : the way out of legitimacy crisis (1989/1993) », Transitions, vol. XXXV, 1994, n° 2, p. 14.

Celui-ci exprime la « rupture avec le soutien à la règle des structures du pouvoir impérial (supranational) et domestique totalitaire (parti unique) ».

lbid.,p. 14.

G. Markus, « The dynamics of political cleavages in post-communist societies and their interaction with the European construction », in M. Telo(sousla direction de). Démocratie et construction européenne, éditions de l’Université de Bruxelles, Bruxelles, 1995, 368 pages, pp. 217-225.

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