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Concept de soi et choix scolaires et professionnels chez les élèves en dififculté d'apprentissage : le poids des attentes sociales et institutionnelles

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Academic year: 2021

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Concept de soi et choix scolaires et professionnels chez

les élèves en dififculté d'apprentissage : le poids des

attentes sociales et institutionnelles

Mémoire

Claudia Gosselin

Maîtrise en sciences de l'orientation - recherche et intervention - avec mémoire

Maître ès arts (M.A.)

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Concept de soi et choix scolaires et professionnels chez

les élèves en difficulté d’apprentissage : le poids des

attentes sociales et institutionnelles

Mémoire

Claudia Gosselin

Sous la direction de :

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Résumé

Il a été démontré que l’expression d’attentes envers l’élève en difficulté d’apprentissage joue un rôle important dans la perception de soi et la prise de décision de l’élève (Wigfield et Eccles, 2000, 2002). L’objectif de cette recherche est de comprendre comment la perception des attentes sociales et institutionnelles peut intervenir dans le développement du concept de soi et lors des choix scolaires et professionnels des élèves en difficulté d’apprentissage (DA). Lors d’entrevues individuelles, nous avons recueilli les discours de 15 participants âgés entre 18 et 26 ans. Rapporter la perception et le vécu de jeunes adultes à la suite de leur formation primaire et secondaire a permis de dresser un portrait descriptif et évolutif de la réalité des élèves DA et de proposer des pistes d’intervention dans le domaine de l’orientation. L’analyse a notamment révélé la sensibilité de l’élève DA aux attentes des agents de socialisation et, plus particulièrement, à celles de ses pairs. Diminuer la comparaison entre les pairs à l’école parait nécessaire à l’épanouissement de ces élèves, autant en classe spéciale qu’en classe ordinaire. En outre, les résultats révèlent que les encouragements et la reconnaissance des efforts par des adultes significatifs reflétent des attentes positives envers l’élève DA et peuvent contribuer à l’émergence d’expériences de succès. Par le fait même, ces succès favorisent un concept de soi positif et ils facilitent la prise de décision concernant les choix scolaires et professionnels. Les résultats rappellent l’importance de l’implication de chaque agent de socialisation dans l’expérience scolaire de l’élève DA.

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Table des matières

RÉSUMÉ _____________________________________________________________________________________________ III TABLE DES MATIÈRES ______________________________________________________________________________ IV LISTE DES FIGURES ET TABLEAUX _______________________________________________________________ VI REMERCIEMENTS ______________________________________________________________________________ VIII INTRODUCTION ____________________________________________________________________________________ 1 CHAPITRE 1 : LE CONTEXTE ____________________________________________________________________ 4 1.1 UN APERÇU HISTORIQUE DES MESURES D’ADAPTATION AU QUÉBEC ________________________ 4

1.1.1 La Commission d’enquête sur l’éducation et l’arrivée des premières mesures

« spéciales » ________________________________________________________________________________ 4 1.1.2 Le Rapport COPEX, une influence américaine vers l’inclusion __________________________ 5 1.1.3 Ce que prescrit la Loi sur l’instruction publique __________________________________________ 6 1.1.4 La politique de l’adaptation scolaire : une école adaptée à tous ses élèves ______________ 8 1.2 ÊTRE UN ÉLÈVE HDAA AUJOURD’HUI ______________________________________________________ 10

1.2.1 Des mesures et services adaptés diversifiés ______________________________________________ 10 1.2.2 L’identification et l’évaluation de l’élève HDAA _________________________________________ 12 1.2.3 Des définitions changeantes ______________________________________________________________ 13 CHAPITRE 2 : LA PROBLÉMATIQUE _________________________________________________________ 16 2.1UNE PROPORTION ELEVEE D’ELEVES HDAA _________________________________________________ 16 2.2LES ATTENTES ET LEURS ENJEUX MULTIPLES _________________________________________________ 17

2.2.1 Le débat social et scientifique sur l’intégration __________________________________________ 17 2.2.2 Le risque d’être ostracisé _________________________________________________________________ 19 2.2.3 Les relations sociales influentes __________________________________________________________ 20 2.3LES EFFETS IMMEDIATS ET DURABLES ________________________________________________________ 23

2.3.1 La faible estime de soi _____________________________________________________________________ 23 2.3.2 La sous-scolarisation et l’insertion socioprofessionnelle difficile _______________________ 24 2.3.4 Les élèves d’exception : la résilience _____________________________________________________ 25 CHAPITRE 3 : LE CADRE THÉORIQUE ______________________________________________________ 27 3.1LE MODELE DE « L'EXPECTANCY-VALUE » _____________________________________________________ 27 3.1.1 La présentation du modèle ________________________________________________________________ 27 3.1.2 Les quatre composantes de la valeur de la tâche _________________________________________ 29 3.1.3 Le concept de soi dans le modèle « expectancy-value » __________________________________ 31

3.1.3.1 Une description du concept de soi _________________________________________________________________________ 32 3.3LES OBJECTIFS ET QUESTIONS DE RECHERCHE ________________________________________________ 33

CHAPITRE 4 : LA MÉTHODOLOGIE ______________________________________________________________ 34 4.1L’APPROCHE QUALITATIVE ET PHÉNOMÉNOLOGIQUE ________________________________________ 34 4.2.LA MÉTHODE __________________________________________________________________________________ 35 4.3LA POPULATION CIBLÉE _______________________________________________________________________ 37

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4.3.2 Les critères d’inclusion et d’exclusion ____________________________________________________ 38 4.4LE RECRUTEMENT _____________________________________________________________________________ 40 4.5L’ANALYSE DE CONTENU ______________________________________________________________________ 40

CHAPITRE 5 : LES RÉSULTATS ________________________________________________________________ 43 5.1LE PORTRAIT DES PARTICIPANTS ______________________________________________________________ 43 5.2 THÈME 1 : LES ATTENTES SOCIALES ET INSTITUTIONNELLES _____________________________________ 46

5.2.1 Les pairs ___________________________________________________________________________________ 47 5.2.2 Les enseignants ____________________________________________________________________________ 49 5.2.3 Les parents ________________________________________________________________________________ 52 5.2.4 Les professionnels et autres acteurs sociaux _____________________________________________ 54 5.2.5 L’institution ________________________________________________________________________________ 56

5.2.5.1 La classe spéciale ___________________________________________________________________________________________ 58

5.2.6 Les attentes de succès _____________________________________________________________________ 61 5.3 THÈME 2 : LE CONCEPT DE SOI __________________________________________________________________ 62

5.3.1 Le sentiment de valeur ____________________________________________________________________ 63 5.3.2 Les attentes de succès nourries envers soi-même _________________________________________ 64 5.3.3 Les concepts de soi spécifiques ___________________________________________________________ 66 5.3.4 L’élève DA à la vie adulte _________________________________________________________________ 67 5.4THÈME 3 : LES CHOIX SCOLAIRES ET PROFESSIONNELS _______________________________________ 69

5.4.1 La prise de décision _______________________________________________________________________ 69 5.4.2 Les participants résilients _________________________________________________________________ 70 5.4.3 Les participants non-résilients ____________________________________________________________ 71 5.5LES COMPORTEMENTS DE PERSÉVÉRANCE ____________________________________________________ 73

CHAPITRE 6 : LA DISCUSSION ________________________________________________________________ 76 6.1LA SYNTHÈSE __________________________________________________________________________________ 76

6.1.1 Comment les participants ont-ils vécu les attentes sociales et institutionnelles durant leur formation primaire et secondaire ? __________________________________________________ 76

6.1.1.1 Les attentes sociales : de faibles attentes de succès par les adultes et une préoccupation éminente du jugement des pairs _________________________________________________________________________________________ 76 6.1.1.1 Les attentes institutionnelles: une intégration contestable et une sous-scolarisation imposée ____________ 78 6.1.1.3 Les services offerts : deux discours contradictoires _______________________________________________________ 79

6.1.2 Comment les attentes sociales et institutionnelles interviennent-elles dans le

développement du concept de soi des participants? ______________________________________ 80 6.1.3 Considérant le poids des attentes sociales et institutionnelles dans leur concept de soi,

comment les participants ont-ils déterminé leurs choix scolaires et professionnels ? ___ 82 6.2LES IMPLICATIONS SOCIALES ET THÉORIQUES ________________________________________________ 84 6.3LES LIMITES ____________________________________________________________________________________ 85 6.4DES PISTES D’INTERVENTION EN ORIENTATION ______________________________________________ 86

CONCLUSION ______________________________________________________________________________________ 89 BIBLIOGRAPHIE __________________________________________________________________________________ 92 ANNEXE 1 : AFFICHE DE RECRUTEMENT ______________________________________________________ 101 ANNEXE 2 : TEXTE DE RECRUTEMENT ________________________________________________________ 102 ANNEXE 3 : FORMULAIRE DE CONSENTEMENT ______________________________________________ 103 ANNEXE 4 : QUESTIONNAIRE PRÉENTREVUE _________________________________________________ 106 ANNEXE 5 : GUIDE D’ENTREVUE ________________________________________________________________ 108 ANNEXE 6 : THÈMES ET CODIFICATION _______________________________________________________ 109

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Liste des figures et tableaux

Figure 1 : Les catégories d’élèves HDAA ... 14

Figure 2 : Le modèle « expectancy value »……….. 28

Tableau 1 : Profils non-résilients ... 44

Tableau 2 : Profils résilients ... 45

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Tout le monde est un génie, mais si vous jugez un poisson sur sa capacité à grimper à un arbre, il passera sa vie à croire qu’il est stupide. – Albert Einstein

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Remerciements

Je tiens à remercier l’aide et le soutien de plusieurs personnes pour la réalisation de ce mémoire de maîtrise, qui pour moi, représente un grand accomplissement. Tout comme le soulignent les résultats du mémoire, j’ai eu la chance d’obtenir l’encouragement et la reconnaissance de mes efforts par plusieurs membres de ma famille, par mes collègues et mes amis. Cela m’a permis de continuer avec passion ce projet et de réaliser l’importance des personnes significatives pour le terminer avec fierté.

J’aimerais remercier France Picard, ma directrice de recherche. Merci pour ta compréhension, ta confiance, ton soutien et tes précieux conseils qui ont facilité grandement la réalisation de ce mémoire. Je souhaite aussi adresser mes remerciements aux 15 personnes qui ont accepté généreusement de partager leur expérience avec moi et qui ont contribué à une meilleure compréhension de leur réalité.

De plus, j’exprime toute ma reconnaissance à une personne qui a été un modèle pour moi et un soutien constant depuis mon entrée à l’école primaire jusqu’à la remise de ce mémoire, Simone Michaud. Merci à mes parents d’avoir cru en moi et d’avoir assuré un soutien financier, sans quoi le projet n’aurait pas pu être possible. Enfin, merci à Jasmine Pageau de m’avoir poussé à me surpasser et d’avoir été une source de motivation du début à la fin. Bonne lecture!

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Introduction

La présence d’élèves en difficulté d’apprentissage dans les établissements scolaires québécois ne représente pas un phénomène nouveau. Toutefois, depuis les années 2000, on remarque une augmentation de près de 10 % du nombre d’élèves handicapés, en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage (EHDAA) (MEESR, 2015b et MEES, 2017). Bien que des mesures aient été proposées pour favoriser leur intégration, des résultats préoccupants sont constatés concernant le taux élevé d’abandon scolaire chez ces élèves et leur entrée précoce sur le marché du travail (Goupil, 2014, Poncelet et Lafontaine, 2011). Il parait pertinent de développer une meilleure compréhension de cette réalité pour apporter de nouvelles pratiques éducatives et professionnelles en milieu scolaire auprès d’eux.

Ce mémoire porte sur la perception et le vécu des élèves du secondaire, d’étudiants universitaires et de jeunes adultes, en emploi ou sans emploi, qui ont éprouvé des difficultés d’apprentissage durant leur formation primaire et secondaire. Plusieurs recherches ont mis en évidence les facteurs individuels des élèves en difficulté d’apprentissage (DA) pour comprendre l’inadaptation scolaire. Dans ce mémoire, nous tentons de comprendre la dynamique entre la perception de ces élèves et les facteurs environnants de leur expérience scolaire, pouvant intervenir dans leur choix de s’engager dans des projets d’études ou de carrière par la suite. Ce sont plus précisément les « attentes sociales et institutionnelles » manifestées à l’égard des élèves DA qui sont étudiées. Nous définissons ces attentes comme étant l’ensemble des comportements qui reflète les croyances ou les idées que les agents de socialisation (pairs, parents, enseignants, professionnels, institution scolaire, etc.) peuvent véhiculer à l’égard de l’élève DA.

Il a été démontré par plusieurs chercheurs que ces attentes peuvent s’avérer à la fois des facteurs de protection, mais aussi des facteurs de risque pour l’apprentissage de l’élève (Forgette-Giroux, et al., 1995; Goupil, 2014; Rosenthal et Jacobson, 1968). Le modèle

« expectancy-value » de Wigfield et Eccles (2000, 2002) rapporte aussi cette influence. Il

précise que c’est entre autres par l’interprétation que l’élève se fait des attentes des autres personnes envers lui, qu’il formera son concept de soi et par conséquent, influencera ses

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comportements et ses choix. Recueillir la perception des élèves permet de mieux comprendre le rôle des agents de socialisation dans l’expérience scolaire de l’élève DA. Le modèle « expectancy-value », qui illustre globalement le phénomène, est utilisé comme cadre théorique dans ce mémoire pour guider l’analyse des discours recueillis. Considérer ce modèle nous permet aussi d’intégrer le concept de soi de l’élève, puis les choix scolaires et professionnels qui en résultent.

En somme, cette recherchevise à décrire la réalité des élèves DA en considérant les attentes sociales et institutionnelles auxquelles ils ont été confrontés durant leur formation primaire et secondaire. Elle vise aussi à comprendre comment la perception de ces attentes peut intervenir dans le développement du concept de soi et lors des choix scolaires et professionnels. C’est par la manière dont ils ont témoigné de leur vécu, des attentes parfois stéréotypées à leur égard (Desombre et al., 2008), que nous avons mené l’analyse.

Le présent mémoire aborde trois principales questions :

• Comment les élèves DA ont-ils vécu les attentes sociales et institutionnelles durant leur formation primaire et secondaire ?

• Comment les attentes sociales et institutionnelles interviennent-elles dans le développement du concept de soi des élèves DA ?

• Considérant le poids des attentes sociales et institutionnelles dans le concept de soi des élèves DA, comment ont-ils déterminé leurs choix scolaires et professionnels ? Dans un premier temps, au chapitre 1, nous présentons le contexte historique et actuel des mesures d’adaptation offertes aux élèves HDAA depuis la première réforme en éducation (Parent, 1963-1966). Les définitions de l’élève DA sont aussi présentées (MELS, 2007). Le deuxième chapitre aborde la problématique sous plusieurs angles. Nous précisons d’abord la proportion élevée des élèves HDAA dans les écoles puis nous explorons les enjeux multiples des attentes sociales et institutionnelles. Le modèle « expectancy value » est défini et expliqué au chapitre 3. Ce cadre théorique inclut une définition du concept de soi et l’explication de ses mécanismes, selon quelques auteurs. Ensuite, le chapitre 4 aborde la méthodologie utilisée. On y retrouve la méthode de collecte de données, la population

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nos données. Ce chapitre est suivi de celui sur la présentation des résultats. Un portait des participants est d’abord exposé, puis les résultats révélés par les discours sont abordés par thèmes. Les résultats sont aussi présentés selon un profil de résilience ou de non-résilience, ce qui permet de distinguer deux types d’expérience et de finalité chez les participants. Finalement, le chapitre 6 met en lumière les faits saillants des résultats en relation avec le modèle « expectancy value » et les études antérieures pour répondre aux questions de recherche. Nous abordons ensuite les implications sociales et théoriques du mémoire ainsi que ses limites. Nous terminons en proposant des pistes d’intervention pour les professionnels de l’orientation, qui visent à faciliter l’intervention auprès des élèves DA.

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CHAPITRE 1 : Le contexte

1.1 Un aperçu historique des mesures d’adaptation au Québec

Ce n’est qu’à partir des années 1960-1970 que les premières mesures d’adaptation pour les élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage (EHDAA) ont été enchâssées dans un cadre légal (Goupil, 2014). En dressant un portrait historique des politiques et lois en matière d’adaptation scolaire, nous tenons compte de ce qui a été fait et de ce qui est maintenant en place dans les écoles pour venir en aide aux élèves en difficulté d’apprentissage.

1.1.1 La Commission d’enquête sur l’éducation et l’arrivée des premières mesures « spéciales »

Avant les années 1960, peu de services étaient offerts systématiquement aux élèves en difficulté (Goupil, 2014). C’est à la suite de la Commission royale d’enquête sur l’éducation, mieux connue sous le nom de la Commission Parent (Parent, 1960-1966), que le système scolaire s’est vu changé, voire restructuré par la création des polyvalentes, des cégeps et le développement des universités. L’arrivée de ces établissements et d’un ministère de l’Éducation a permis la mise en place d’un système éducatif plus démocratique reconnaissant le droit à l’instruction et à l’égalité des chances pour tous les élèves dont ceux en difficulté, ou dit « exceptionnels » (Parent, 1963-1966).

La Commission Parent soutient l’idée qu’il est nécessaire de répondre aux besoins des élèves en difficulté tout en considérant leur condition particulière. Notamment, le ministère de l’Éducation a mis en place des écoles et des classes spécialisées dans le but d’offrir des mesures d’aide adaptées à ces élèves. Ceux-ci y étaient regroupés généralement par difficulté. On considérait alors l’importance de limiter la comparaison avec les autres élèves de classes ordinaires pour réduire le sentiment d’échec. Depuis, ce sont les commissions scolaires qui ont la responsabilité d’assurer l’organisation de ces services dans les écoles sous leur juridiction.

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1.1.2 Le Rapport COPEX, une influence américaine vers l’inclusion

Au cours des années 1970-1975, aux États-Unis, divers groupes de parents ainsi que de communautés ethniques ont contesté le classement des élèves en classe spéciale (Roy, 2014). Ils doutaient surtout du processus d’évaluation des élèves, qui favorisait la discrimination envers les minorités ethniques et les groupes issus de milieux défavorisés, largement représentés dans les classes spéciales, à cette époque. Craignant que leur enfant n’ait plus les mêmes chances d’avenir, les parents revendiquaient leur intégration en classe ordinaire (Goupil, 2014). Cette période marque le début des débats sur l’intégration et plus tard, sur celui de l’inclusion. Alors que l’intégration fait référene à l’adaptation de l’élève « différent » aux pratiques et structures déjà en place dans l’école, l’inclusion repose sur l’idée d’équité. Elle vise à normaliser la différence et à inclure tous les élèves quelles que soit l’étendue des diférences (Rousseau et ses collaborateurs, 2014).

En réponse à ces événements et à de nombreux débats scientifiques sur l’intégration des élèves en difficulté en classe spéciale (Madden et Slavin, 1983 ; Wang et Baker 1985-1986 ; Wolfensberger, 1972), les États-Unis ont émis la loi The Education for All

Handicapped Children Act (94-142) en 1975. Cette loi donne droit aux élèves à une

scolarité dans le cadre le plus normal possible. Cela implique, entre autres, le droit des élèves avec des besoins particuliers d’être scolarisés dans un environnement non restrictif, d’avoir une évaluation non discriminatoire et un plan d’intervention personnalisé (Goupil, 2014). Cette loi ne revendique pas l’abolition des classes spéciales, mais plutôt d’y avoir recours seulement si la classe ordinaire ne peut pas être adaptée aux besoins de l’élève.

Au Québec, les répercussions de ce mouvement américain influencent les mesures d’intégration dans les écoles. Avec la parution du Rapport COPEX (ME, 1976), le gouvernement vise l’intégration progressive des élèves en difficulté dans les classes ordinaires pour favoriser cette même approche (Roy, 2014). Le Rapport COPEX soutient l’idée qu’il est important d’assurer des mesures spéciales lorsqu’il n’est pas possible de répondre aux besoins de l’élève en classe ordinaire. Pour faciliter l’évaluation et l’organisation des mesures spéciales, ce rapport propose un système éducatif structuré: le système en cascade. Il est constitué de huit niveaux d’intervention selon le degré de

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difficulté ou de handicap de l’élève, allant de services en classe ordinaire avec un enseignement régulier, à l’enseignement à l’intérieur d’un centre d’accueil ou d’un centre hospitalier. Le ministère de l’Éducation s’est d’ailleurs inspiré de ces recommandations pour regrouper les élèves HDAA dans les écoles (MELS, 2007b), à savoir ceux qui sont :

§ intégrés à une classe ordinaire avec soutien à l’enseignement et à l’élève ;

§ intégrés à une classe ordinaire avec participation à une classe-ressource ou avec soutien à l’élève ;

§ en classe spéciale homogène, qui regroupe des élèves présentant un seul type de difficulté ;

§ en classe hétérogène, qui regroupe des élèves présentant plusieurs types de difficulté ;

§ à l’école spéciale où plus de 50 % des élèves sont considérés comme des élèves en difficulté ou handicapés ;

§ scolarisés en centre d’accueil ;

§ scolarisés en centre hospitalier et ceux scolarisés à domicile pour une raison autre qu’une incapacité physique temporaire de se rendre à l’école.

Le Rapport COPEX recommande la collaboration entre enseignant et intervenant pour évaluer le service approprié à l’élève, favorisant ainsi l’amélioration le plus rapidement possible, et évitant la détérioration vers des mesures davantage spécialisées.

1.1.3 Ce que prescrit la Loi sur l’instruction publique

La Loi sur l’instruction publique de 1988 (Gouvernement du Québec, 2017) reconnait les droits des élèves et les responsabilités des enseignants, de l’école, des commissions scolaires, ainsi que du ministère de l’Éducation. Elle reconnaît en outre le droit à tous les

élèves d’avoir recours aux services d’enseignement à chacun des niveaux scolaires (Art 1.). Elle donne aussi droit, à chaque personne, aux autres services éducatifs complémentaires et particuliers (Art 1.). Les services éducatifs complémentaires concernent les services de soutien, de vie scolaire, d’aide à l’élève et ceux de promotion et

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professionnelle, prévention et traitement de l’intimidation et de la violence, animation spirituelle et engagement communautaire, éducation à la sexualité, actions qui favorisent la saine alimentation et un mode de vie physiquement actif (ME, 2002). Le régime pédagogique québécois (2017b) précise qu’il peut s’agir de services de psychologie, de psychoéducation, d’éducation spécialisée, d’orthopédagogie, d’orthophonie, etc.

Concernant la responsabilité de l’enseignant, la loi stipule que ce dernier a le droit « de prendre les modalités d’intervention pédagogique qui correspondent aux besoins et aux objectifs fixés pour chaque groupe et pour chaque élève (…) » (Art. 19). Ainsi, l’enseignant a le droit « de choisir les instruments d’évaluation des élèves qui lui sont confiés afin de mesurer et d’évaluer constamment et périodiquement les besoins et l’atteinte des objectifs par rapport à chacun des élèves (…) en se basant sur les progrès réalisés. » L’enseignant a l’obligation « de contribuer à la formation intellectuelle et au développement intégral de la personnalité de chaque élève qui lui est confié » ainsi que « d’agir d’une manière juste et impartiale dans ses relations avec ses élèves » (Art. 22). Pour ce qui est du devoir de l’école, le directeur a l’obligation de participer à la création d’un plan d’intervention pour l’élève HDAA, en collaboration avec les parents, l’élève et le personnel de l’école :

Le directeur de l’école, avec l’aide des parents d’un élève handicapé ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage, du personnel qui dispense des services à cet élève et de l’élève lui-même, à moins qu’il en soit incapable, établit un plan d’intervention adapté aux besoins de l’élève. Ce plan doit respecter la politique de la commission scolaire sur l’organisation des services éducatifs aux élèves handicapés et aux élèves en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage et tenir compte de l’évaluation des capacités et des besoins de l’élève faite par la commission scolaire (...). Le directeur voit à la réalisation et à l’évaluation périodique du plan d’intervention et en informe régulièrement les parents. (Art. 96.14)

La commission scolaire doit « (...) adapter les services éducatifs à l’élève handicapé ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage selon ses besoins, d’après l’évaluation qu’elle doit faire de ses capacités (...) » (Art. 234). Cela concerne entre autres le classement de

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l’élève en classe spéciale ou en classe ordinaire. La commission scolaire se doit d’assurer une intégration en classe ordinaire si l’évaluation le permet :

La commission scolaire adopte, après consultation du comité consultatif des services aux élèves handicapés et aux élèves en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage, une politique relative à l’organisation des services éducatifs à ces élèves qui assure l’intégration harmonieuse dans une classe ou un groupe ordinaire et aux autres activités de l’école de chacun de ces élèves lorsque l’évaluation de ses capacités et de ses besoins démontre que cette intégration est de nature à faciliter ses apprentissages et son insertion sociale et qu’elle ne constitue pas une contrainte excessive ou ne porte pas atteinte de façon importante aux droits des autres élèves. (Art. 235)

L’article 235 de la Loi demande aux commissions scolaires de mettre sur pied « les modalités d’évaluation des élèves (...), lesquelles doivent prévoir la participation des parents de l’élève et de l’élève lui-même, à moins qu’il en soit incapable; les modalités d’intégration de ces élèves dans les classes ou groupes ordinaires et aux autres activités de l’école ainsi que les services d’appui à cette intégration (...) ; les modalités d’élaboration et d’évaluation des plans d’intervention destinés à ces élèves. » Le rôle de la commission scolaire dans l’élaboration des services aux élèves HDAA est considérable compte tenu du fait que le gouvernement leur octroie une grande partie des responsabilités de gestion. Retenons que la Loi sur l’instruction publique établit des responsabilités pour chacun des acteurs mentionnés, et ce, à chaque niveau scolaire, soit au préscolaire, au primaire et au secondaire. Ces balises permettent aux commissions scolaires, aux écoles et aux enseignants d’assurer un service de qualité et adapté aux élèves (ME, 2006). Comme chaque école et commission scolaire possèdent une liberté dans l’élaboration et la mise en place des services et mesures d’aides aux élèves HDAA, l’offre de service peut varier considérablement d’une école à l’autre.

1.1.4 La politique de l’adaptation scolaire : une école adaptée à tous ses élèves

L’essor du mouvement vers l’intégration et la reconnaissance des droits des élèves et des responsabilités des établissements scolaires a encouragé des pratiques facilitant la réussite de tous les élèves. De 1990 à 1999, on remarque que la situation des élèves en difficulté

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Davantage d’élèves sont intégrés en classe ordinaire et y vivent des succès. C’est en moyenne 80 % des élèves considérés à risque avec une difficulté d’apprentissage légère qui étaient intégrés en classe ordinaire à cette époque (1990-1998) (ME, 1999). Une augmentation de 10 % à 13 % en sept ans a été remarquée pour les autres catégories d’élèves, soit ceux en difficulté grave d’apprentissage, en difficulté comportementale et en difficulté intellectuelle légère. Par ailleurs, à la suite de ces constats, plusieurs professionnels, enseignants et personnels de l’école ont reconnu des lacunes dans les services (ME, 1996). On reprochait le dépistage tardif des élèves, un manque de justesse dans l’évaluation diagnostique, ainsi que des plans d’intervention et des classements qui répondent à des normes administratives plutôt qu’aux besoins réels des élèves. Ces impressions ont également été appuyées par le Conseil supérieur de l’éducation (1999) qui reconnait que le soutien offert aux enseignants était limité concernant la préparation, la planification et l’évaluation de leurs interventions. En réponse à ces préoccupations, le Ministère de l’Éducation (1999) a révisé ses actions auprès des élèves en difficulté. En 1999, le gouvernement québécois lance la politique de l’adaptation scolaire intitulée

Une école adaptée pour tous ses élèves. Cette politique vise à favoriser la réussite

éducative pour tous les élèves et plus particulièrement, à aider l’élève HDAA à réussir sur les plans de l’instruction, de la socialisation et de la qualification. Elle reconnait que la réussite éducative peut se dessiner différemment d’un élève à l’autre, selon ses capacités et ses besoins. Cette réussite rend compte des progrès observés selon les objectifs fixés au plan d’intervention de l’élève.

Pour répondre à son principal objectif, la politique souligne qu’il est important de se concentrer sur la prévention, par la mise en place de conditions propices aux apprentissages, et qu’il est nécessaire d’intervenir rapidement dès les premières manifestations des difficultés (ME, 1999). En ce sens, des voies d’action ont été proposées dont celle de « reconnaître l’importance de la prévention ainsi que d’une intervention rapide et s’engager à y consacrer des efforts supplémentaires » (p.18). L’intervention préventive demeure importante pour les élèves HDAA, mais aussi pour ceux en situation de vulnérabilité où leur réussite scolaire peut être compromise. Ne pas être identifié

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comme « élève en difficulté d’apprentissage » ne signifie pas que l’élève est sans risque de développer des difficultés. C’est d’ailleurs dans l’optique d’apporter une attention particulière à chaque élève en situation de vulnérabilité que le ministère a introduit la notion « d’élève à risque », incluant les élèves en difficulté et handicapés (ME, 1999). La politique de l’adaptation scolaire propose aussi de mettre « l’organisation des services éducatifs au service des élèves handicapés ou en difficulté en la fondant sur l’évaluation individuelle de leurs capacités et de leurs besoins, en assurant qu’elle se fasse dans le milieu le plus naturel pour eux, le plus près possible de leur lieu de résidence et en privilégiant l’intégration à la classe ordinaire » (p.23). En somme, considérant le droit à tous les élèves d’avoir accès aux services éducatifs complémentaires et particuliers (Loi

sur l’instruction publique, Art.1) et à une scolarisation dans un cadre le plus normal

possible (ME, 1976), la politique souligne à nouveau que l’intégration en classe ordinaire doit être la première option envisagée. Rappelons qu’elle n’exclut pas les mesures spécialisées lorsqu’elles sont jugées nécessaires pour l’élève.

1.2 Être un élève HDAA aujourd’hui

1.2.1 Des mesures et services adaptés diversifiés

Comme il est de la responsabilité des commissions scolaires de déterminer les différents regroupements de classes dans leurs écoles, selon les besoins des élèves, les services en place varient souvent d’un établissement à l’autre (MELS, 2007). Les classes spéciales représentent bien souvent plus de 20 % de l’ensemble des classes au secondaire (formation générale des jeunes) dont la plupart sont hétérogènes ; elles incluent des élèves de différentes difficultés ou avec des handicaps variés (MELS, 2009). Les élèves qui fréquentent la formation générale des adultes et la formation professionnelle ne bénéficient pas de classes spéciales. Pour ces voies de formation, l’identification des élèves HDAA et l’élaboration de plan d’intervention n’est pas une obligation (MEESR, 2015). Ils peuvent toutefois avoir recours à des services adaptés en classe, si le besoin se présente.

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Plusieurs commissions scolaires offrent aussi des cheminements particuliers de formation au niveau secondaire pour les élèves HDAA. Le cheminement particulier de formation temporaire (CPFT) se destine à l’élève qui vit des difficultés scolaires légères. On tentera de l’aider à récupérer son retard pour intégrer un cheminement ordinaire et obtenir un diplôme d’études secondaires. Le cheminement particulier de formation continue (CPFC) s’adresse àl’élève qui vit des difficultés scolaires trop importantes pour que l’intégration en classe ordinaire soit envisagée (Giroux et Pageau, 2006).

D’autres mesures sont privilégiées à la formation générale des jeunes, inspirées en partie par le système en cascade, par exemple, le « soutien en classe ordinaire » qui permet de soutenir à la fois l’élève et l’enseignant. En 2010-2011, plus de la majorité des élèves HDAA était intégrée à une classe ordinaire avec ce type de soutien qui consiste à intégrer une personne ressource en classe ordinaire (Goupil, 2014). Cette personne est souvent un orthopédagogue, un travailleur social ou un éducateur spécialisé, dépendamment de la nature de la difficulté. Ce soutien peut s’accompagner d’un service spécialisé en dehors de la classe par les intervenants ou autres professionnels de l’école. Ce service est déterminé lors de l’élaboration du plan d’intervention de l’élève. Ce dernier peut aussi participer à une « classe ressource ». L’élève y recevra un service éducatif à l’extérieur de la classe ordinaire dans un groupe restreint pour un temps déterminé, chaque semaine (Goupil, 2014). Cette participation à une classe spéciale dite « ressource » peut permettre à l’élève de travailler sur ses difficultés et de rattraper le rythme de ses pairs en classe ordinaire. L’enseignant est aussi amené à ajuster sa pratique en fonction des besoins et difficultés de ses élèves (adapter les méthodes, le contenu, les stratégies, les horaires, l’espace en classe, etc.). On adopte ainsi une approche pédagogique individualisée ou plutôt, une approche fondée sur la différenciation pédagogique (Roy, 2014). Cette différenciation pédagogique vise à répondre aux besoins uniques de chaque élève et à respecter la diversité de l’ensemble de la classe.

Plus récemment, le Ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur (MEES, 2017) a publié une politique de la réussite éducative, dans le but de guider les services offerts aux élèves. Pour la première fois, Le ministère utilise le concept d’inclusion. Les actions de la

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politique visent entre autres à « réviser le modèle de financement des élèves HDAA », à « établir un seuil minimal de services spécialisés intégrés dans les écoles et les centres pour assurer une réponse équitable aux besoins des élèves », ainsi qu’à « favoriser la contribution des établissements d’enseignement privés aux efforts pour l’intégration des élèves HDAA ». La politique reconnaît aussi l’implication de tous les acteurs de l’école, de la communauté, et plus particulièrement des parents dans la réussite scolaire de leur enfant :

L’engagement des parents dans le parcours scolaire de leur enfant exerce un rôle déterminant sur son développement, sa réussite et sa relation famille-milieux éducatifs. L’encouragement, l’encadrement, l’expression d’attentes élevées, une attitude positive envers l’éducation et à l’égard du personnel scolaire ainsi que l’implication dans la vie de l’école sont autant de dimensions du rôle parental qui ont une influence sur la motivation, le rendement scolaire et les aspirations de leur enfant (p.16).

1.2.2 L’identification et l’évaluation de l’élève HDAA

L’appellation « élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage » (MELS, 2007) inclut différents types de difficultés. Bien entendu, ce ne sont pas tous les élèves qui éprouvent des difficultés scolaires qui en font partie. Également, ce ne sontpas que les élèves handicapés qui sont concernés. Une évaluation doit être réalisée et, si tel est le cas, un diagnostic doit être posé pour déterminer la nature et l’ampleur de la difficulté. L’évaluation des besoins et des capacités de l’élève se fait d’abord par l’observation de l’enseignant et par des résultats mesurables. Le recours à d’autres intervenants de l’école ou à des professionnels externes peut être considéré dans le cas d’un trouble plus grave. Par cette évaluation, les mesures et services offerts à l’élève seront déterminés sans égard à l’appartenance à une catégorie de difficulté, mais tenant compte de ses capacités et de ses limites. L’évaluation doit se faire de manière préventive et éviter la catégorisation (ME, 1999). En fait, les services se fondent sur le principe que chaque élève est unique et se développe différemment dans son environnement. De cette manière, deux élèves qui reçoivent un diagnostic de trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDA/H) dans une même classe ne se verront pas offrir automatiquement les mêmes services.

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Chaque plan d’intervention est distinct et comporte différents objectifs, malgré la nature de la difficulté.

À la suite de cette évaluation, l’élève aura droit à un plan d’intervention personnalisé et il pourra bénéficier de ressources adaptées à sa situation (Jeanson, 2016). Ce plan d’intervention, tel que nous avons vu précédemment, doit répondre aux besoins de l’élève en difficulté et être établi en collaboration avec le personnel de l’école, l’élève et les parents. Selon Goupil (2014), il contient les buts et les objectifs de l’intervention, ainsi que les moyens de les atteindre, les responsables engagés et les échéanciers. Il n’a donc pas seulement la fonction de décrire les services et les ressources auxquels l’élève a droit, mais il guide également les interventions vers la réussite éducative. Avec l’aide de l’équipe-école et des parents, l’élève sera accompagné pour une durée déterminée vers l’atteinte des objectifs de son plan d’intervention. Selon Tremblay (2017), 20,8 % des élèves HDAA qui obtiennent un plan d’intervention pendant les études primaires n’en ont plus à l’arrivée au secondaire. L’auteur mentionne aussi que ce sont ces élèves qui ne possèdent plus de plan d’intervention au secondaire qui obtiennent de meilleurs résultats en ce qui a trait à la diplomation et à la qualification.

1.2.3 Des définitions changeantes

La définition des élèves HDAA a été modifiée depuis 1999. D’abord, dans l’optique de ne pas ostraciser les élèves en difficulté, le Ministère de l’Éducation avait choisi d’utiliser le terme « élèves à risque » incluant ceux avec des difficultés d’apprentissage, de comportement ou de déficience intellectuelle légère (ME, 1999). Les élèves « handicapés » étaient regroupés dans une catégorie distincte. En 2006, le Ministère de l’Éducation inclus à nouveau le terme « élève en difficulté », les intégrant à l’appellation plus large d’élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage. Cette appellation inclut maintenant les élèves en difficulté et les élèves handicapés (voir figure 1, tirée de Goupil, 2014). Par ailleurs, les élèves à risque sont exclus de la définition HDAA et sont ceux qui « présentent des facteurs de vulnérabilité susceptibles d’influencer leur apprentissage ou leur comportement et pouvant ainsi être à risque d’échec scolaire ou de socialisation, si une intervention rapide n’est pas effectuée » (MELS, 2007).

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Élèves en difficulté Élèves handicapés

Difficulté d’apprentissage Déficience intellectuelle moyenne à profonde

Trouble grave de comportement* Déficience motrice Déficience intellectuelle légère Déficience langagière

Déficience visuelle Déficience auditive

Trouble envahissant du développement Trouble psychopathologique

*Les élèves qui présentent des troubles graves de comportements ne sont pas considérés comme des élèves handicapés. Le ministère reconnait qu’ils nécessitent des services plus spécialisés et leur attribue un code de difficulté, tout comme les élèves handicapés.

Figure 1. Les catégories d’élèves HDAA du Ministère de l’éducation, des Loisirs et

des Sports (2007), tirée de Goupil, G. (2014). Les élèves en difficulté d’adaptation et

d’apprentissage (4e édition). Québec : Gaétan Morin Éditeur.

Entre 1999 et 2006, alors qu’on identifiait les élèves en difficulté d’apprentissage selon leur retard pédagogique (dépendamment de leur potentiel et de leur groupe d’appartenance), depuis 2006, ils sont considérés en difficulté d’apprentissage lorsqu’ils n’atteignent pas les exigences minimales de la langue d’enseignement et des mathématiques de leur cycle. Plus précisément, le Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (2007) reconnaît l’élève en difficulté d’apprentissage lorsque :

l’analyse de sa situation démontre que les mesures de remédiation mises en place, par l’enseignante ou l’enseignant ou par les autres intervenantes ou intervenants, durant une période significative, n’ont pas permis à l’élève de progresser suffisamment dans ses apprentissages pour lui permettre d’atteindre les exigences minimales de réussite du cycle en langue d’enseignement et en mathématique conformément au Programme de formation de l’école québécoise.

De plus, il paraît important de faire la distinction entre difficulté et trouble d’apprentissage. Contrairement aux troubles d’apprentissage, les difficultés d’apprentissage peuvent être temporaires et dues à des difficultés circonstancielles sur lesquelles il est souvent possible d’intervenir (Goupil, 2014). Des facteurs sociaux,

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aux troubles d’apprentissage, ils possèdent un caractère plus permanent. De nature neurologique et génétique, il est possible d’intervenir sur les troubles dans le but d’améliorer la situation de l’élève, mais il est moins probable de les corriger. Dans le cadre de ce mémoire, il sera sujet d’élèves en difficulté d’apprentissage, sans égard aux limitations physiques ou intellectuelles qui peuvent parfois l’accompagner.

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CHAPITRE 2 : La problématique

2.1 Une proportion élevée d’élèves HDAA

Malgré une baisse générale du nombre d’élèves dans les établissements d’enseignement de près de 10 %, le nombre d’élèves handicapés, en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage ne cesse d’augmenter depuis les dernières années. En 2010, les élèves HDAA représentaient 16,8 % (MEESR, 2015) de l’ensemble des élèves du réseau public, alors qu’en 2016 ils représentaient 21,6 % (Gouvernement du Québec, 2017c). C’est une augmentation de près de 5 % depuis la mise en œuvre de la politique de l’adaptation scolaire en 1999-2000. Selon une étude plus récente, la proportion d’élèves HDAA peut varier de 15 à 44 % dans les commissions scolaires du Québec (Dionne et al., 2018).

L’étude de Jeanson (2016) précise que c’est près d’un élève sur cinq qui présente une difficulté d’adaptation ou d’apprentissage (DAA). Une majorité de ces élèves DAA manifesteraient des difficultés d’adaptation telle qu’un trouble de comportement ou un trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité. Les élèves en difficulté d’apprentissage (DA) représenteraient une plus petite proportion des élèves DAA (moins de deux sur cinq). Cela peut expliquer le fait qu’un élève peut présenter plusieurs troubles à la fois. Si un élève éprouve des difficultés diverses, ou que plus d’un trouble est diagnostiqué, un seul code sera considéré. Ce code représente le trouble « majeur » chez l’élève, donc celui jugé le plus sévère (Jeanson, 2016). Si l’élève DA se voit aussi reconnaître un trouble de comportement grave, c’est cette dernière condition qui apparaîtra dans le dossier de l’élève, considérant que ce trouble peut être à l’origine des difficultés d’apprentissage.

Ces dernières années, on remarque aussi une augmentation du nombre d’élèves HDAA en classe ordinaire et une diminution en classe spéciale. Ils sont passés de 64 % (2010) à 71 % (2014) en classe ordinaire et de 36 % (2010) à 29 % (2014) en classe spéciale (MEESR, 2015). Parmi ces élèves, ce sont ceux identifiés « en difficulté », soit les élèves

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DAA, qui représentent la majorité de ceux intégrés en classe ordinaire, en comparaison avec les élèves handicapés.

2.2 Les attentes et leurs enjeux multiples

2.2.1 Le débat social et scientifique sur l’intégration

Bien qu’on remarque une augmentation considérable du nombre d’élève DA en classe ordinaire, le débat social sur l’intégration des élèves reste d’actualité. Des parents vont jusqu’à recourir aux tribunaux pour revendiquer le droit de leur enfant d’avoir accès à la classe ordinaire ou au contraire, d’avoir droit aux mesures spéciales lorsque celles-ci ne sont pas jugées nécessaires pour leur enfant. Bien que peu d’études ont démontré la supériorité des classes spéciales, en comparaison aux classes ordinaires (Langevin, Dionne et Rocque, 2004 ; Vienneau, 2004 ; Wang et Baker, 1985-1986), les chercheurs n’arrivent pas tous à la conclusion que l’intégration est la voie à privilégier.

Selon Goupil (2014), beaucoup d’élèves en classe spéciale ne parviennent pas à en sortir une fois entrés. C’est aussi ce que constatent Giroux et Pageau (2006). Les élèves en difficulté inscrits en classe ordinaire dès leur entrée au secondaire réussissent à rester plus longtemps dans ce type de classe, comparativement à ceux qui ont débuté dans des classes à cheminement particulier de formations temporaires (classes spéciales CPFT). Les chercheurs ont relevé une plus grande proportion d’élèves en difficulté ayant commencé en classe ordinaire et terminé leurs études secondaires en cinq ans. Ils seraient aussi moins nombreux à avoir abandonné l’école, en comparaison avec ceux qui ont commencé en CPFT.

En appui à l’inclusion scolaire, Desbiens, Levasseur et Roy (2014) ont démontré que l’intégration aurait des effets positifs sur le développement de l’enfant en raison d’un meilleur climat en classe ordinaire. Selon Bélanger (2003), l’intégration des élèves DA favoriserait les habiletés sociales, la résolution de problèmes concrets et l’estime de soi positive. Pour l’ensemble de la classe, l’intégration aurait des avantages tels que de

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sensibiliser les autres élèves à la situation des élèves DA ainsi que de favoriser le développement d’attitudes positive envers eux.

Alors que Vienneau (2010) reconnaît peu d’effets négatifs de l’intégration sur l’apprentissage et le rendement des élèves, d’autres auteurs remettent en doute les effets positifs de cette méthode. Certains ont démontré que le concept de soi scolaire se développerait plus positivement si l’élève se comparait à des élèves moins performants de son environnement (Roy et al., 2015). Cette idée, mieux connue sous le nom de Big Fish

Little Pond Effect (BFLPE), renvoie au fait que les élèves étant moins performants en

classe ordinaire, en se comparant à leurs pairs, voient leur concept de soi davantage affecté que s’ils étaient inscrits en classe spéciale. En d’autres mots, les élèves plus performants en classe spéciale auront plus de chances d’avoir un concept de soi positif, s’ils se démarquent de leur groupe. Cette théorie nous laisse croire que l’intégration en classe ordinaire ne serait pas la solution pour favoriser un concept de soi scolaire positif chez ces élèves.

Une étude plus récente a aussi montré que la perception de soi de l’élève serait davantage affectée s’il se compare à l’intérieur de son groupe de référence (Joët et al., 2007). L’effet serait toutefois plus élevé si c’est dans une classe où le niveau de performance est élevé, et que la personne a généralement des performances scolaires identiques. En fait, le Big fish

little Pond Effect aurait plus d’impact chez les élèves performants qui se compare entre

eux que chez les élèves DA, par exemple.

D’autres études ont démontré que les effets d’établissement sur l’apprentissage de l’élève étaient plutôt faibles, mais bien présents (entre 8 à 9 % de la variance qui touche la performance scolaire) (Duru-Bellat, 2003). On parle ici de l’influence de l’école, de la classe et des services offerts sur la progression de l’élève. Selon Schmidt (2006), favoriser l’intégration des élèves en difficulté en classe ordinaire passe entre autres par les attitudes, habiletés et connaissances des administrateurs de l’école. Les décisions institutionnelles sont importantes puisqu’elles déterminent en partie les chances de réussite de l’élève.

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2.2.2 Le risque d’être ostracisé

Les chercheurs en psychologie sociale se sont intéressés à l’effet des attentes chez des groupes de personnes susceptibles de rencontrer des situations de rejet (Antoine et al., 2010; Gardou, 2006). C’est le cas des élèves DA qui, en raison de leur catégorisation, peuvent être soumis à des conduites discriminatoires. L’intégration en classe spéciale en est un exemple. L’élève aura tendance à favoriser son propre groupe d’appartenance, créant une coupure entre les deux catégories, ce qui peut mener à la dévalorisation de l’autre. S’ils sont influencés faussement, on parlera alors de croyances stéréotypées entre les deux groupes. Pour le groupe d’élèves qui représente une minorité, soit ceux jugés moins performants en classe, leur catégorisation peut renforcer des croyances et influencer les attentes et les conduites discriminantes envers eux. Pour Antoine et ses collègues (2010), il est indéniable que de catégoriser les élèves DA aura des effets sur soi, dont « leur concept de soi et leur identité sociale ainsi que sur leurs perceptions, croyances, attentes, attitudes et comportements » (p.252).

Malgré le fait que, dans le système d’éducation québécois, on vise d’abord l’approche individualisée chez les élèves en difficulté, l’approche médicale en éducation semble bien présente. L’approche médicale ou dite catégorielle repose sur « la notion de déficit » (Gouvernement du Québec, 2017c, p.18). Les chercheurs reconnaissent le risque potentiel de réduire l’identité de l’élève à la catégorie qui lui est assignée. Pour Gardou (2006), cette approche peut avoir des conséquences sur le parcours scolaire de l’élève concerné :

Un étiquetage, fondé sur des critères médicaux, les rassemble sous une désignation commune et les voue à un même sort. Leur personnalité se trouve étudiée au profit d’une identité collective, réduite à quelques traits saillants ou caricaturaux, le plus souvent à leur quotient d’intelligence. Leurs capacités originales sont occultées, au profit de comparaisons ou de classifications hasardeuses. Et tout se passe comme si leur destin scolaire était préalablement dessiné. (Gardou, 2006, p.92)

Dans des entrevues effectuées auprès d’élèves du primaire, Albinger (1995) s’est intéressé au sentiment des élèves par rapport à la catégorisation de leur difficulté scolaire. Ces résultats ont montré qu’ils ont tendance à mentir lorsqu’ils doivent expliquer à leurs pairs

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qu’ils fréquentent des classes ressources. Ils auraient aussi reçu à plusieurs reprises des commentaires humiliants des autres élèves, renforçant leur faible estime de soi. Baum et ses collaborateurs (2017) ont aussi étudié les circonstances qui influencent le vécu scolaire, social et émotionnel des élèves en difficultés scolaires. Ils ont constaté que ces élèves étaient plus conscients de leur différence avec leurs pairs; le fait d’aller chercher du soutien à l’extérieur de la classe ordinaire était une source de honte. Ces élèves préféraient se cacher ou mentir sur leur difficulté lorsqu’ils étaient en classe ordinaire.

2.2.3 Les relations sociales influentes

Les attentes des parents et des enseignants sont celles qui influencent le plus le concept de soi scolaire des élèves (Forgette-Giroux, et al., 1995). Comme il a été mentionné précédemment, les parents jouent un rôle important dans la réussite scolaire de leurs enfants, de sorte que leurs attentes et leurs attitudes peuvent favoriser ou nuire aux résultats scolaires, aux aspirations et à l’autonomie de l’élève (Massé et al., 2013). Slavin (2013) reconnaît aussi qu’une valorisation divergente des comportements à la maison et à l’école peut nuire aux difficultés scolaires. Plusieurs constats démontrent une contradiction dans la cohésion entre ce qui est prescrit à l’école et ce qui est appliqué à la maison. Jeanson (2016) a relevé que, selon les enseignants, il y avait une faible participation des parents dans l’éducation prônée par l’école. Les parents peuvent refuser de transmettre de l’information, de faire évaluer leur enfant, de participer au plan d’intervention ou d’appliquer les mesures recommandées, tel que de donner de la médication, accompagner l’enfant dans le redoublement ou d’acquiescer à son intégration à une classe spéciale (p.108).

D’autres auteurs reconnaissent le poids des attentes et de la relation maître-élève sur l’estime de soi, sur le sentiment de valeur et les comportements de l’élève (Good et Brophy, 2008 ; Pellerin, 1989 ; Rousseau et Potvin, 1993; Slavin, 2015). À travers les regards, les attitudes et les interventions adressées à l’élève par les enseignants, qu’elles soient positives ou négatives, ces attentes agiront sur la formation de son concept de soi. Elles contribueront à atténuer les difficultés, ou au contraire à leur nuire (Goupil 2014).

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Rousseau et Potvin (1993) ont démontré que les attitudes des enseignants variaient d’un élève à l’autre. Leurs attitudes seraient surtout négatives lorsque l’élève est jugé « indifférent » ou « rejeté » (peu d’interaction avec l’enseignant) ou qui présente de l’hostilité. Selon Good et Brophy (2008), l’élève avec des difficultés d’apprentissage est aussi plus souvent critiqué et/ou stigmatisé en raison de sa condition. Ce stigmate vient de son entourage, de ses pairs ou du personnel de l’école. Par exemple, en classe, l’enseignant leur laisserait moins de temps pour répondre aux questions, leur donnerait moins d’attention, leur donnerait moins d’encouragement à la suite d’une réussite, les réprimanderait davantage pour les erreurs commises, etc. Il est possible que l’élève intègre ces messages par l’enseignant et se comporte en ce sens. L’élève qui échoue plusieurs fois un exercice demandé par son enseignant et qui est finalement mis à l’écart pour le prochain exercice risquera d’interpréter une vision négative de la part de cet enseignant envers lui. À l’exercice suivant, il se comportera en fonction de cette faible perception de compétence. Les attentes négatives de l’enseignant seront ainsi renforcées et les comportements persisteront envers l’élève. Ceci réfère aux attentes de prophétie autoréalisatrices, où la perception erronée de l’enseignant envers un élève provoque un comportement et par conséquent, vient appuyer sa fausse croyance (Jussim et al., 1996). Ce type d’attente chez les enseignants a tendance à « s’autoentretenir » et à « s’autorenforcer » (Good et Brophy, 2008). Les attentes de prophétie autoréalisatrice ont plus d’effets si elles concernent un groupe de personnes « vulnérables » ou un groupe stigmatisé d’élèves, tel que ceux en difficulté d’apprentissage puisqu’ils sont davantage exposés à des croyances erronées (Jussim et al., 1996).

Les études sur l’Effet Pygmalion reflètent ce phénomène. Dans leur célèbre étude, Rosenthal et Jacobson (1968) ont montré que les attentes négatives ou positives des enseignants peuvent modifier le rendement scolaire. Ils ont constaté que l’école peut véhiculer des stéréotypes négatifs chez les élèves et avoir une incidence sur leur comportement. Ils ont comparé deux groupes d’élève du primaire, sélectionnés au hasard. Les enseignants étaient informés au départ de faux résultats élevés de certains élèves à un test d’intelligence en début d’année. Ces mêmes élèves ont obtenu des résultats supérieurs au groupe contrôle lorsqu’ils ont passé le test à nouveau en fin d’année, même si au départ

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ils ne se distinguaient pas de l’autre groupe. Bien que leurs résultats aient été remis en question alors que plusieurs biais méthodologiques ont été soulignés (test d’intelligence inadapté pour l’âge des élèves, faible validité écologique, etc.) (Desombre et al., 2011), d’autres recherches plus récentes ont appuyé leurs résultats (Crespo, 1988 ; Kuklinski et Weinstein, 2001 ; Morency, 1990; Smith et al., 1998; Trouilloud et al., 2002). Morency (1990) est aussi arrivé à la conclusion que les enseignants offraient des conditions d’apprentissage inégales aux élèves en fonction de leurs attentes. Pour Joët et ses collaborateurs (2007), le jugement des enseignants a un effet d’abord sur la perception de compétence de l’élève et, par conséquent, sur son rendement scolaire.

Selon Jussim (1996), les enseignants entretiennent des perceptions et des attentes qui sont souvent proches de la réalité, plutôt qu’erronées. Ces attentes dites réalistes sont celles qui peuvent prédire la performance selon des données réelles du cheminement de l’élève, telles que son bulletin ou ses résultats d’examens passés. Jussim n’exclut toutefois par l’existence d’attentes moins réalistes et leurs effets sur les élèves, tels que les attentes de prophéties autoréalisatrices ou biaisées. Les attentes biaisées sont celles où les enseignants jugent des capacités des élèves par la catégorie à laquelle ils appartiennent. Ce type d’attente fait entre autres référence aux stéréotypes scolaires qui mènent parfois à une surestimation des différences réelles entre les groupes et les catégories (Chalabaeve, 2006). Les élèves souvent exposés aux stéréotypes risquent de les internaliser et de s’identifier à ces caractéristiques. Ils peuvent en venir à les considérer vrais et à développer un sentiment d’infériorité. Certains chercheurs parlent de « menace du stéréotype » pour illustrer cet effet. Notre manière de percevoir l’autre influence nos comportements et la manière dont on interprète les leurs. Par exemple, « puisque cet élève est peu doué à l’école, je m’attends à ce qu’il obtienne un faible résultat dans ce cours ». L’élève sera d’autant plus affecté par la « menace du stéréotype » s’il s’identifie fortement à cette matière ou au domaine de référence. Cette pression évaluative de la part d’autrui peut créer de l’anxiété et, par conséquent, influencer négativement ses comportements et sa performance, ce qui légitimera le stéréotype de départ (Chalabaeve, 2006). Ainsi, les attentes sociales peuvent être tantôt réalistes, tantôt biaisées, ce qui dans les deux cas, aura un effet sur la conception de soi de l’élève.

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2.3 Les effets immédiats et durables 2.3.1 La faible estime de soi

Plusieurs chercheurs ont souligné des effets négatifs des difficultés d’apprentissage chez les élèves relativement à leur faible estime de soi, à leur niveau élevé d’anxiété, à leur faible motivation scolaire, à leur choix vocationnel limité, etc. (Archambault et Chouinard, 2009; Baum et al., 2017; Elbaum et Vaughn, 2003 ; Nelson et Harwood, 2011; Slavin, 2015). Viau (1994, 2009) est d’avis que de vivre plusieurs échecs à l’école peut s’avérer dommageable pour l’estime de soi et la motivation de l’élève. Une faible motivation scolaire entraine à son tour des comportements pernicieux, selon Archambault et Chouinard (2009) : « cet état d’esprit accroît leurs chances de subir des échecs, renforce l’autoévaluation négative et provoque une détérioration graduelle de l’estime de soi. Il en résulte une augmentation de leurs difficultés scolaires et une altération encore plus grande de leurs systèmes métacognitifs et affectifs » (p.121). Le sentiment d’échec engendre des comportements d’évitement, une baisse de l’estime de soi et une vision négative de leurs capacités.

Même si l’élève n’a aucune limitation intellectuelle, mais qu’il a une faible perception de ses compétences, il peut avoir tendance à discréditer ses réussites, à s’autocritiquer, à ne pas reconnaitre ses efforts et à avoir un niveau plus élevé d’anxiété. Cette illusion d’incompétence affecte les résultats scolaires et confirme à nouveau le concept de soi négatif de l’élève (Bouffard et al., 2005). Il peut ainsi paraître difficile de déterminer si une faible perception de compétence est d’abord la cause ou l’effet des difficultés d’apprentissage.

Klassen et ses collaborateurs (2008) ont conduit des entrevues avec 101 étudiants de 1er

cycle universitaire (undergraduates), aux prises avec des difficultés d’apprentissage, et 107 étudiants sans difficulté, pour comprendre leur motivation. Ils ont noté que les étudiants en difficulté d’apprentissage montraient un niveau plus élevé de procrastination, une plus faible capacité d’autorégulation et un sentiment d’efficacité personnel plus faible que les

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élèves sans difficulté. Slavin (2013) a aussi relevé un concept de soi scolaire plus négatif chez les élèves DA.

Ces problèmes internalisés durant les années scolaires pourraient aussi se perpétuer à l’âge adulte (Klassen et al., 2013). Selon Nelson (2011), les adultes ayant vécu des difficultés d’apprentissage auraient un concept de soi plus négatif en comparaison à ceux qui n’ont pas vécu de telles difficultés, et ce particulièrement en ce qui concerne le concept de soi scolaire.

2.3.2 La sous-scolarisation et l’insertion socioprofessionnelle difficile

L’expérience scolaire, telle que vécue par l’élève DA, aurait une incidence sur ses choix et son insertion socioprofessionnelle. Les élèves DA seraient deux fois moins susceptibles de poursuivre des études postsecondaires (Wagner et al., 2005). Des chercheurs ont noté une tendance chez ces élèves à avoir une plus faible connaissance du marché du travail (Chen et Chan, 2014). Ils auraient aussi des aspirations professionnelles moins claires et une moins grande maturité vocationnelle (Rojewski, 1996,).

Selon Poncelet et Lafontaine (2011), à la suite des expériences scolaires négatives, il s’ensuit souvent l’abandon scolaire et l’entrée précoce sur le marché du travail. Les répercussions d’échecs scolaires sur l’estime de soi et la faible motivation entraînent des risques plus élevés d’abandon. En 2011 et 2012, les élèves HDAA représentaient plus du tiers (46 %) des élèves décrocheurs du réseau public (MEESR, 2015). C’est 48,3 % des élèves HDAA en 2014-2015 qui ont obtenu une qualification ou un diplôme au maximum sept ans après leur entrée au secondaire (Gouvernement du Québec, 2017c).

Selon Parent et Paquin (1994), l’abandon scolaire s’expliquerait par une perception négative de la scolarisation. En effet, les élèves attribueraient les causes de leur abandon au système scolaire, à l’école, aux enseignants et à leurs attentes non comblées. Selon Rousseau et ses collaborateurs (2009), les jeunes qui ont pris la décision de terminer leurs études secondaires dans un centre de formation des adultes auraient un plus faible degré

Figure

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