AIDES POUR UNE PEDAGOGIE DU PROBLEME
C. de BUEGER- VAN der BORGHT Laboratoire de Pédagogie des Sciences Université Catholique de Louvain (Belgique) G. CALANDE
Institut Ste Anne et Ecole Normale - Gosselies (Belgique)
Avec la collaboration de :S. DARD, Laboratoire de Pédagogie des Sciences
J.
NUTTIN, Institut Notre-Dame - Bruxelles (Belgique)L.VANHAMME, Institut Don Bosco - Bruxelles (Belgique)
MOTS·CLES : IMMUNOLOGIE - DOCUMENTS ECRITS - VIDEOGRAMMES -SITUATIONS PROBLEMES.
RESUME : Etude des fonctions de diverses aides didactiques utilisées dans une démarche de résolution de situations problèmes.
Analyse basée sur une expérience d'enseignement de l'immunologie effectuée dans l'enseignement secondaire.
SUMMARY : Study of didactic aids usedina problem-solving proceeding. Analysis based on a secondary schoolleaming experiment in immunology.
Dans cette communication, nous vous proposons d'examiner la fonction de diverses aides didactiques qui ont été utilisées dans une pédagogie du problème.
Nous considèrerons ici comme aide didactique des outils matériels (tels que manuels, diapositives, vidéogrammes ..,) utilisés par l'enseignant pour la transposition didactique, ayant une fonction corrélative aux intentions de chaque phase de la démarche pédagogique mise en oeuvre.
Nous baserons notre analyse sur une expérience d'enseignement de l'immunologie effectuée dans cinq établissements d'enseignement secondaire belge par les auteurs et collaborateurs de cet exposé.
Lors de l'élaboration de cette séquence nous voulions: - rendre les élèves acteurs de leur apprentissage;
- partir des intérêts et des conceptions qu'élèves et enseignants avaient de l'immunologie; - développer chez les élèves des capacités de base (1) telles:
- poser des questions à propos d'un thème donné; - mettre au point une stratégie pour y répondre; - utiliser une documentation;
- communiquer par écrit et oralement le résultat d'une investigation; - faire acquérir des concepts spécifiquesà l'immunologie.
C'est pourquoi nous avons développé une démarche(cf. schéma nO 1) dans laquelle élèves et enseignants ont été amenés à élaborer en commun le plan du cours (exploration). Les élèves se sont partagés le travail (organisation) pour traiter, en petits groupes, l'un ou l'autre point de ce plan. Chaque groupe a présenté une synthèse orale et écrite du module travaillé (investigation). Tout au long des activités, l'enseignant avait de nombreuses tâches parmi lesquelles celle de faire percevoir les liens entre les différentes parties de ce plan. Le déroulement de la séquence s'est clôturé par une phase de structuration au cours de laquelle l'enseignant a explicité les articulations des différents modules entre eux.
Nous voudrions maintenant présenter les aides didactiques utilisées pour faire percevoir leur fonction: sensibilisation, apport de connaissances, structuration.
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1. AIDES DE SENSIBILISATION / Elargissement Evaluation Demandes de l'enseignant
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-1.1. Recueillir des demandes d'élèvesPour cette séquence d'enseignement en immunologie, nous voulions partir des demandes et des centres d'intérêt des élèves, c'est pourquoi nous leur avons posé deux questions:
- Si je te dis défense de l'organisme tu penses à ... ?
- Si, au cours on devait étudier la protection du corps humain, vis-à-vis des agents extérieurs, tu aurais envie de parler de ...
Les réponses des élèves à ces questions nous ont permis
- de préciser des centres d'intérêt des élèves: les maladies en général et le SIDA en particulier. C'est ainsi qu'est née l'idée de débuter notre démarche par une exploitation d'informations sur le SIDA;
- de recueillir un certain nombre de conceptions (2) se rapportant à des concepts spécifiques à l'immunologie (exemple: antigènes=contre les gènes, anticorps=mauvais pour le corps) et au cours de biologie (cours où l'on parle de son vécu, de la santé ou de celle des autres, de la vie en général);
- d'entrevoir la précision (ou le manque de précision) du vocabulaire scientifique utilisé pour répondre aux questions.
1.2. Pré-test: récolter des savoirs "déjà là" chez les élèves
Dans cette phase, nous voulions compléter nos informations sur les conceptions que les élèves avaient de l'immunologie afin de pouvoir mieux ancrer l'apprentissage dans leurs savoirs. Nous avons construit un questionnaire l concernant des concepts qui nous semblaient indispensablesà faire acquérir dans un cours d'immunologie.
Cequestionnaire a été proposé aux élèves au début de la séquence d'enseignement et a suivi ceux-ci tout au long de la démarche. Nous n'avons pas procédé, comme cela se fait couramment, à une "correction" en classe avant de
poursuivre le cours, mais nous y avons fait allusion quand l'occasion se présentait, c'est-à-dire quand les élèves étaient impliqués dans une recherche ayant trait à l'une ou l'autre de ces questions. D'autre part, certains d'entre nous ont utilisé ce questionnaire en guise de post test, les uns immédiatement après la séquence d'enseignement, les autres à l'improviste dans un laps de temps relativement long après la séquence.
1.3. Consacrer du temps au questionnement des élèves
Pour rendre l'élève acteur de son propre apprentissage, il nous semblait important de le faire participer à l'élaboration du plan du cours. Mener cette tâcheàbien consistait, selon nous,àproposer à l'élève des moyens différenciés pour "entrer" dans le contenu du thème par le biais du S IDA, maladie qui suscite beaucoup de remous et de questions dans la société aujourd'hui:
- un vidéogramme (3) qui présentait divers aspects du SIDA : psychologique, social, épidémiologique, scientifique. Un belge atteint du SIDA y est interviewé de même que certains membres de son entourage. Ce vidéogramme présente également les démélés que le malade interrogé rencontre lorsqu'il annonceàson dentiste qu'il est séropositif. Avant d'aborder des préjugés et questions scientifiques, le document nous emmène en Afrique et situe ainsi la maladie au niveau mondial
- une page bande dessinée (4) abordant le problème du SIDA dans le couple - un texte (5) traitant de la peur du SIDA.
Les élèves avaient la consigne d'exprimer individuellement, par écrit, toutes les questions, interrogations qu'ils avaient (explications de phénomènes, vocabulaire,...). Les questions ont été notées au tableau et discutées dans le groupe classe (élèves et enseignant). Elles avaient trait à des précisions de vocabulaire, des clarifications de points particuliers (symptômes, transmission du SIDA, ...) questions éthiques (doit-on informer?), maladies différentes du SIDA (comment se propagent les virus? .. ).
A partir de la liste des questions, élèves et enseignants ont élaboré ensemble le plan du cours. Partir du questionnement des élèves ne signifie pas le récupérer pour l'intégrer dans un plan pré-établi par l'enseignant, mais bien construire le plan en commun. L'essentiel du travail consistait ici à rassembler les
lExemples de questions posées:
Durant le cours consacré à l'immunologie, nous serons amenésà parler de certains termes scientifiques. Parmi ces termes, expliquez succinctement ceux que vous connaissez:
antigène, anticorps, lymphocyte, thymus, phagocytose, histamine, diapédèse, immunoglobuline, vaccin, sérum, rétrovirus, toxine, réponse immunitaire, anatoxine
interrogations des élèves, à les trier et à les organiser pour dégager les grandes lignes de la séquence d'apprentissage, l'itinéraire de la recherche.
Ce travail est exigeant pour l'enseignant. Celui-ci doit accepter d'abandonner, le cas échéant, le plan du cours initialement prévu pour le réorganiser en fonction des apports des élèves. Certains élèves poseront des questions auxquelles l'enseignant n'avait pas pensé, d'autres voudront travailler prioritairement l'un ou l'autre thème...
Cela n'implique pas que renseignant soit"àla merci" des interventions des élèves mais qu'il les respecte et les enrichisse. Son bagage scientifique reste un garant dans l'organisation réfléchie des pré-requis indispensablesà la compréhension d'un concept (ex: la compréhension du terme "séropositif' induit des passages obligés par des notions telles: composition du sang, réaction immunitaire, anticorps, que les élèves ne peuvent découvrir). Il est néanmoins important, selon nous, que l'enseignant explique aux élèves les raisons de son intervention dans la démarche ..
L'expérience montre que ce type d'activité est assez difficile à réaliser par les élèves: un des enseignants a même du expliquer par des exemples de questions ce qu'était "poser des questions" ...
La récolte des questions a permis de mettre en évidence une difficulté de compréhension du vocabulaire scientifique utilisé dans les aides didactiques proposées.
Les trois exemples que nous venons de proposer ont certaines caractéristiques communes. Ces aides didactiques
- ne donnent pas d'information mais suggèrent (le vidéogramme par exemple montrait les problèmes que rencontrrait une personne atteinte du SIDA, ...)
- posent des questions sans y répondre (le pré-test par exemple n'a pas été "corrigé" en classe). Deplus, elles sont complémentaires: leur fonction est d'aider l'élèveàpréciser petitàpetit, ses conceptions se rapportant à l'immunologie,à donner un sens à son apprentissage. C'est pourquoi nous les avons appelées "aidesà la sensibilisation".
Très souvent dans la démarche pédagogique, une fois la phase de sensibilisation passée, on n'y revient plus, une des originalités de notre démarche est de relier cette sensibilisationà la phase de construction de connaissances.
2. AIDES D'APPORT DE CONNAISSANCES
Leplan du cours établi, renseignant aurait pu exposer les savoirs s'y rapportant. Nous n'aurions pas rencontré une de nos intentions, celle de développer chez les élèves la capacité à utiliser une documentation.
Elèves et enseignants ont donc partagé le travail d'investigation en modules répartis entre des groupes d'élèves. La tâche des différents groupes consistaità construire une synthèse écrite de plus ou moins quatre pages sur lemodul~choisi et à présenter celle-ciàl'ensemble de la classe. Ce travail exigeait un apport de connaissances fourni par une cinquantaine de documents, provenant de sources différentes (articles de presse, périodiques scientifiques, manuels scolaires, vidéogrammes, ...).
La tâche que nous demandions aux élèves était analogueàcelle qu'effectue l'enseignant lorsqu'il prépare son cours. Mais les élèves ne possèdent pas les connaissances et les capacités de l'enseignant.il nous a donc semblé indispensable de doubler les aides d'apport de connaissances d'un système de res sources : des fiches signalétiques, aides aux choix des documents et un répertoire d'opérationsà effectuer lors de l'utilisation de documents.
Pour aider les élèvesàchoisir les documents, nous avons élaboré une fiche "signalétique" par document proposé. Cette fiche reprenait:
- la référence bibliographique;
- le destinataire (professeur, élève, grand public);
- le type d'approche (sciences fondamentales, sciences appliquées); - des critères de clarté (structuration du texte, nombre de mots nouveaux); - les thèmes des illustrations;
- les concepts abordés.
Pour aider les élèves à utiliser les documents, nous avons construit un répertoire reprenant un ensemble d'opérations à effectuer lors d'une utilisation du document, (pour rédiger une synthèse, par exemple, le répertoire leur proposait de regrouper les idées, articuler les thèmes entre eux, argumenter les idées; introduire une réflexion personnelle, ...).
Pour aider les élèves à mener leur tâche à son terme, l'enseignant devaitêtre àla fois
- la mémoire collective de tous les groupes, c'est-à-dire celui qui veille au respect du travail de chaque groupe, crée les articulations entre les différents modules de travail et les fait percevoir, - celui qui peut,àla demande, proposer des explications;
- le garant de la rentabilité du travail des groupes.
Les caractéristiques des aides didactiques que nous avons utilisées dans le cadre de cette séquence sont différentes de celles des aides de sensibilisation: au lieu de poser des questions, elles donnent des réponses. Même si le langage courant est utilisé, le langage "technique" est développé. Cest pourquoi nous les avons appelées aides d'apport de connaissances.
3. AIDES A LA STRUCTURATION
A la suite de leurs travaux de recherche, les élèves ont présenté oralement leurs synthèses. L'enseignant avait pour tâche, si ce n'était fait par les élèves, de mettre l'accent sur les articulations entre les différents modules, d'attirer l'attention sur les éléments-clefs du cours d'immunologie
Dans cette phase, et pour clôturer l'étape d'apprentissage proprement dite,nous avons utilisé deux aides"à la structuration", c'est-à-dire des documents reprenant l'ensemble des concepts développés dans un
langage scientifique, montrant la cohérence, l'enchaînement des différentes idées rassemblées (6).
Il s'agissait d'un vidéogramme (7) passant en revue les différentes étapes de l'infection d'un homme par un virus ou une bactérie;
d'une page d'un manuel scolaire (8) illustrant les défenses de l'organisme.
4. CONCLUSIONS
Dans cette séance dont le thème était "bilans et états, quels sens pour aides didactiques?" nous avons voulu expliciter le sens que nous attribuionsàces termes.
Nous avons donc décrit une expérience d'enseignement partant d'une situation problème: le questionnement des élèves face à l'immunologie.
Notre but était d'analyser la fonction des différentes ressources introduitesàdes moments-clefs pour montrer concrètement que le choix et l'utilisation des aides didactiques dépendent des intentions sous-jacentes à la démarche pédagogique mise en oeuvre.
5. BIBLIOGRAPHIE
(1) MEIRIEU(Ph.), 1988 -Apprendre oui, mais comment? Paris, ESF, 180p.
(2) GIORDAN (A.), de VECCHI, 1987 - Les origines du savoir. Neuchâtel, Delachaux & Niestlé,
214 p.
(3) DUBIE(J.),RTBF 1987 -"Autant savoir: le SIDA"
(4) Mutualité française et Académie de Grenoble -Mer/ot contre MSTISIDA
(5) BAYOT ( D., Dr.) 1985 -SIDA, la nouvelle peur - Bruxelles, BYBLOS
(6) LEBEL(p.),1979 - Audio-visuel et pédagogie. Paris, ESF
(7) Le corps humain ::"l'agresseur agressé". Médiathèque de Belgique
(8) DION(M.), FONTANEL (M.), GIRARD (L.),MARTIN(J.),NOAS (P. et R.), TEYSSIER