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Promouvoir le dépistage volontaire du VIH chez les travailleuses du sexe au Bénin : développement, mise en oeuvre et évaluation d'une intervention

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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PROMOUVOIR LE DÉPISTAGE VOLONTAIRE DU VIH CHEZ LES TRAVAILLEUSES DU SEXE AU BÉNIN : DÉVELOPPEMENT, MISE EN

ŒUVRE ET ÉVALUATION D’UNE INTERVENTION

Thèse

Georges Batona

Doctorat en santé communautaire

Philosophiae doctor (Ph.D.)

Québec, Canada

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PROMOUVOIR LE DÉPISTAGE VOLONTAIRE DU VIH CHEZ LES TRAVAILLEUSES DU SEXE AU BÉNIN: DÉVELOPPEMENT, MISE EN

ŒUVRE ET ÉVALUATION D’UNE INTERVENTION

Thèse

Georges Batona

Sous la direction de :

Marie-Pierre Gagnon, directrice de recherche

Michel Alary, codirecteur de recherche

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iii

Résumé

Ce projet de recherche, basé sur le cadre de planification de « l’intervention mapping » consistait à développer, implanter et évaluer une intervention encourageant les femmes travailleuses du sexe (TS) à se faire dépister régulièrement (chaque trois mois) pour le VIH dans les centres de santé adaptés. Les travaux de recherche ont été structurés en trois volets.

Le premier volet visait à identifier les déterminants associés à l’intention des femmes TS de se faire dépister au cours des trois prochains mois en s’appuyant sur la théorie du comportement planifié. Les analyses de modélisation par système d’équation structurelle ont démontré que 55 % de la variance de l’intention est expliquée par le modèle théorique et les principaux prédicteurs par ordre décroissant d’importance étaient : la perception du contrôle (β = 0.26; P < 0.001); la norme descriptive (β = 0.24; P < 0.001); les croyances comportementales (β = 0.22; P < 0.001); l’habitude (β = 0.20; P < 0.001); l’attitude (β = 0.12; P = 0.01); la perception du risque (β = 0.07; P = 0.03) et les croyances normatives (β = -0.07; P = 0.03).

Le deuxième volet portait sur l'élaboration et la mise œuvre d'une intervention à partir des résultats issus du premier volet. L’intervention comportait des activités visant à la fois des changements individuels et environnementaux à travers diverses méthodes comme le counseling motivationnel, l’éducation par les pairs, la communication persuasive, le renforcement de capacités, la réorganisation des services cliniques, les rencontres de concertation et des stratégies adaptées au contexte du milieu et aux besoins des TS.

Le troisième volet, qui consistait à évaluer l’implantation et les effets de l’intervention ciblée, a démontré son efficacité à augmenter la proportion des femmes TS qui adoptent le dépistage trimestriel du VIH. Les résultats mettent en évidence une relation positive et significative entre l’exposition à l’intervention ciblée et l’adoption du comportement souhaité. Lorsque l’exposition aux activités

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iv

de l’intervention augmente d’une unité, la cote d’adoption du dépistage chez les femmes TS augmente de 13% (rapport de cote: 1,13 ; intervalle de confiance à 95% [1,10 ; 1,14] ; p < 0,001). Une relation de type dose-réponse est mise en évidence, montrant que plus les femmes TS sont exposées aux activités de promotion plus elles adoptent le dépistage du VIH.

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v

Abstract

This research project based on the intervention mapping framework aimed to develop, implement and evaluate an intervention that encourages female sex workers (FSW) to get regularly tested for HIV (every three months) in adapted health services (AS). The research was structured in three phases.

The first phase was to identify the factors associated with the intention of FSW to get tested for HIV within the next three months based on the theory of planned behavior (TPB). Structural equation modeling showed that 55% of the variance in intention is explained by the theoretical model, and that the main predictors sorted in descending order of importance are as follow: perceived behavioral control (β = 0.26; P <0.001); descriptive norms (β = 0.24; P <0.001); behavioral beliefs (β = 0.22; P <0.001); the habit (β = 0.20; P <0.001); attitude (β = 0.12; P = 0.01); perceived risk (β = 0.07; P = 0.03) and the normative beliefs (β = 20.07; P = 0.03).

The second phase focused on the development and implementation of an intervention based on the results from the first phase. The intervention included activities targeting changes at both the individual and environmental levels, through various methods such as motivational counseling, peer education, persuasive communication, capacity building, the reorganization of clinical services, consultation meetings, and strategies adapted to the context of the environment and needs of FSW.

The third phase, which aimed to assess the implementation and the effects of the targeted intervention, showed its efficacy in increasing the proportion of FSW who adopt HIV testing every three months. The results point out to a positive and significant relationship between exposure to intervention and the adoption of the desired behavior. When exposure to the activities of the intervention increases by one unit, the odds of adoption of HIV testing among FSW increases by 13% (odds ratio: 1.13; 95 % confidence interval [1.10; 1.14]; p <0.001). A dose-response

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vi

relationship is highlighted, showing that the more FSW are exposed to promotion activities, the more likely they adopt HIV testing.

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vii

Table des matières

Résumé ... iii

Abstract ... v

Table des matières ... vii

Liste des tableaux ... x

Liste des figures ... xi

Liste des annexes ... xi

Liste des sigles et abréviations ... xii

Avant-propos ... xvii

Introduction ... 1

CHAPITRE 1: CONTEXTE ET PROBLÉMATIQUE DE L’ÉTUDE ... 4

1.1 Contexte de l’étude... 4

1.2 Problématique ... 5

1.3 L’épidémie du VIH dans le monde et en Afrique ... 5

1.3.1 Portrait épidémiologique du VIH au sein de la population générale au Bénin ... 8

1.3.2 Évolution de la prévalence du VIH chez les travailleuses du sexe et leurs partenaires ... 8

1.3.3 Dynamique de transmission du VIH au Bénin ... 10

1.3.4 La vulnérabilité des femmes TS face au VIH/Sida au Bénin ... 11

1.3.5 Conseil et dépistage volontaire du VIH et connaissance du statut sérologique ... 15

1.3.6 Services adaptés (SA) et interventions promouvant le dépistage volontaire chez les TS au Bénin ... 18

CHAPITRE 2: RECENSION DES ÉCRITS ... 20

2.1 Conseil et dépistage volontaire du VIH : précisions définitionnelles, ... 20

2.2 Évolution de l’offre des services du conseil et dépistage volontaire du VIH ... 22

2.3 Efficacité du CDV du VIH en matière de réduction des comportements à risque et intérêt dans la riposte globale ... 24

(8)

viii

2.4.1 Les facteurs individuels ou personnels ... 28

2.4.2 Facteurs interpersonnels ... 29

2.4.3 Les facteurs structurels ... 30

2.4.4 Forces des études portant sur les facteurs influençant le CDV chez les populations clés ... 33

2.4.5 Limites des études portant sur les facteurs influençant le CDV chez les populations clés ... 34

CHAPITRE 3: BUT ET OBJECTIFS DE LA RECHERCHE ET CADRE DE PLANIFICATION ... 36

3.1 BUT ET OBJECTIFS... 36

3.2 CADRE DE PLANIFICATION : « L’INTERVENTION MAPPING » ... 37

CHAPITRE 4 : VOLET1. IDENTIFICATION DES DÉTERMINANTS ... 43

4.1 Fondements théoriques ... 43

4.2 Aspects méthodologiques ... 45

4.2.1 Développement du questionnaire ... 45

4.2.2 Population et échantillon ... 46

4.2.3 Procédure de collecte des données sur le terrain ... 46

4.3 Article 1: Understanding the Intention to Undergo Regular HIV Testing Among Female Sex Workers in Benin: A Key Issue for Entry Into HIV Care ... 48

4.4 Résultats complémentaires du premier volet... 65

4.4.1 Les croyances saillantes et modales du comportement à l’étude ... 65

4.4.2 Qualités psychométriques de l’instrument de mesure des construits théoriques ... 65

CHAPITRE 5. DÉVELOPPEMENT ET MISE EN ŒUVRE DE L’INTERVENTION ... 76

5.1 Article 2 : Développement et implantation d’une intervention ciblée encourageant le dépistage régulier du VIH chez les travailleuses du sexe au Bénin : Application du protocole « d’intervention mapping » ... 76

5.3 Résultats complémentaires du deuxième volet ... 95

5.3.1 Description du programme d’intervention et des structures impliquées ... 95

CHAPITRE 6. ÉVALUATION DE L’INTERVENTION ... 107

6.1 Évaluation de l’implantation ... 107

6.1.1 Questions d’évaluations d’implantation ... 108

6.1.2 Méthode ... 108

(9)

ix

6.1.4 Résultats ... 110

6.2 Évaluation des effets : Article 3. Augmentation de l’adoption du dépistage régulier du VIH chez les femmes travailleuses du sexe (TS) au Bénin : Effet d’une intervention basée sur des données probantes et des cadres théoriques ... 121

CHAPITRE 7: DISCUSSION GÉNÉRALE ... 150

7.1Compréhension des déterminants ... 150

7.2 Développement et mise en œuvre de l'intervention... 153

7.2.1 Utilité de l'« Intervention Mapping » dans la planification ... 154

7.2.2 Travail en partenariat entre milieu universitaire et acteurs du milieu d’intervention ... 158

7.2.3 Choix des méthodes et les techniques pratiques ... 159

7.2.4 La nature multi-composante de l’intervention ... 161

7.3 Évaluation de l’implantation et des effets de l'intervention ... 163

7.3.1 Évaluation d’implantation ... 163

7.3.2 Effets de l'intervention ... 168

7.4 Forces et limites de l'étude ... 170

8- CONCLUSION ... 178

8.1 Contribution du projet à l’avancement des connaissances ... 178

8.2 Retombées pratiques du projet et perspectives futures... 180

RÉFÉRENCES ... 184

(10)

x

Liste des tableaux

Table 4.1 : Sociodemographic characteristics and description of psychosocial variables related to the intention of being tested for HIV in the next three months among female sex workers in Benin (n = 447) ... 67 Table 4.2: Behavioural characteristics of female sex workers in Benin related to HIV testing history, perceived risk of being infected by HIV, and the intention of being tested for HIV (n=447) ... 68 Table 4.3: Parameters for variables predicting intention to be HIV tested in the next three months among female sex workers in Benin (Standardized Regression Weights) ... 69 Table 4.4: Modifying effect of HIV testing history on theoretical variables of the model predicting the intention to be HIV tested in the next three months among female sex workers in Benin ... 72 Table 4.5: Modifying effect of parental status on theoretical variables of the model predicting the intention to be HIV tested in the next three months among female sex workers in Benin ... 73 Tableau 4.6 : Synthèse des croyances modales issues de l’enquête qualitative auprès des femmes travailleuses du sexe ... 74 Tableau 4.7 : Synthèse des qualités psychométriques (consistance interne et stabilité temporelle) du questionnaire mesurant les construits théoriques ... 75 Tableau 5.1 : Matrice des objectifs du programme d’intervention ciblée ... 99 Tableau 5.2: Théories, méthodes et principales applications pratiques sélectionnées en fonction des déterminants... 101 Tableau 5.3 : Contenu de l’intervention visant à encourager le dépistage régulier du VIH chez les femmes travailleuses du sexe ... 103 Tableau 5.4 : Structures et acteurs impliqués par ville. ... 105 Tableau 6.1: Couverture de l’exposition aux activités ciblées de promotion du conseil et dépistage volontaire du VIH pendant l’intervention et couverture de contacts avec des séances standard sur le conseil et dépistage volontaire avant intervention par ville ... 144 Tableau 6.2 : Statistiques descriptives sur l’exposition des femmes aux activités de promotion du conseil et dépistage volontaire du VIH et sur contact lors des séances standards sur le conseil et dépistage volontaire avant intervention par trimestre et pour l’ensemble des trois villes ... 145 Tableau 6.3 : Statistiques descriptives sur l’exposition aux activités spécifiques de

promotion du conseil et dépistage volontaire du VIH pendant le 6 premiers mois de l’intervention et sur les contacts aux séances standards sur le conseil et dépistage

volontaire du VIH pendant le semestre précédant l’intervention ... 146 Tableau 6.4 : Proportions de femmes travailleuses du sexe adoptant le conseil et dépistage volontaire régulier du VIH (chaque trimestre) avant (T1 et T2) et après le début de

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Liste des figures

Figure 3.1 : Modèle de planification « d’Intervention Mapping » adapté de Godin, Gagnon, Alary, Levy, & Otis, 2007) ... 42 Figure 4.1: Theoretical framework: extended version of Theory of Planned Behaviour. Constructs inside the circle were added to Theory of Planned Behaviour (adapted from Ajzen, 1991). ... 70 Figure 4.2: Final theoretical framework including significant variables predicting

intention to be HIV tested in the next three months among female sex workers in Benin. ... 71 Figure 5.1 : Modèle logique du programme d’intervention encourageant le dépistage régulier du VIH chez les travailleuses du sexe... 106 Figure 6.1 : Proportion de femmes travailleuses du sexe dépistées pour le VIH par

trimestre et par ville ... 148 Figure 6.2 : Dépistage du VIH en fonction de l'exposition aux activités spécifiques de promotion pendant l'intervention ciblée ... 149

Liste des annexes

Annexe A : Guide d’entrevue pour documenter les croyances saillantes personnelles . 203 Annexe B: Questionnaire travailleuses du sexe : Enquête quantitative sur le travail du sexe, la marginalisation et la santé : approches de recherche visant l’équité en santé en contexte prostitutionnel béninois ... 205 Annexe C : Guide d’intervention de la pair-éducatrice travailleuse du sexe pour

promouvoir le dépistage régulier du VIH auprès de ses collègues travailleuses du sexe 238 Annexe D : Guide d’intervention des animateurs pour promouvoir le dépistage régulier du VIH chez les femmes travailleuses du sexe ... 242 Annexe E : Guide d’intervention de l’agent de santé pour promouvoir le dépistage

régulier du VIH chez les femmes travailleuses du sexe lors des consultations au service adapté ... 246 Annexe F : Guide d’entrevue pendant l’implantation des activités/services de promotion du dépistage auprès des femmes travailleuses du sexe au Bénin ... 250

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xii

Liste des sigles et abréviations

ARV : Antirétroviraux

ASMA : Association pour la santé et la médecine africaine ASSOPIL : Association pour la promotion des initiatives locales CDV : Conseil et dépistage volontaire

CDVC : Conseil et dépistage volontaire confidentiel DIST : Dispensaire des infections sexuellement transmises ESF : Espoir sans frontière

FSP : Force de sécurité publique HBM : Health Belief model

HSH : Hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes IM : Intervention mapping

ITSS : Infections transmises sexuellement et par le sang JA : Jeunesse Ambition

OMS : Organisation mondiale de la santé ONG : Organisation non gouvernementale

ONUSIDA : Programme conjoint des Nations Unies sur le VIH/Sida OSV- Jordan : Organisation pour les services et la vie – Jordan PE : Pair éducatrice

PNLS : Programme national de lutte contre le Sida

PTME : Prévention de la transmission du VIH de la mère à l’enfant PVVIH : Personnes vivant avec le VIH

S&E : Suivi et évaluation SA : Service adapté

SED : Santé, éducation et développement Sida : Syndrome d’immunodéficience acquise SOVIM : Solidarité pour une vie meilleure TCP : Théorie du comportement planifié TS : Travailleuse du sexe

UDI : Utilisateur de drogues injectables

UNICEF : Fonds des Nations Unies pour l’Enfance VIH : Virus de l’immunodéficience humaine

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xiii

En hommage à ma mère Thérèse, ce travail est une couronne en ta mémoire, toujours vivante;

À mon père Joseph, ce travail concrétise tes conseils et tes valeurs fondées sur une triple aspiration : « Aimer, créer, servir»;

À la prunelle de mes yeux, ma petite Céleste Typhanie, puisse ce travail être un exemple et une inspiration dans ta vie. Les sacrifices consentis pendant les années de séparation ne seront pas vains;

À l’Éternel mon Dieu : « Ta parole est une lampe à mes pieds, et une lumière sur mon sentier » Ps.119 vs. 105.

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Remerciements

Au moment de terminer cette stimulante et laborieuse aventure doctorale, je voudrais remercier toutes les personnes qui, de près ou de loin, m’ont à la fois inspiré, encouragé, soutenu, guidé et encadré durant ce parcours parsemé de défis et de moments réconfortants.

D’abord, j’adresse un merci spécial à ma directrice de recherche, Professeure Marie-Pierre Gagnon, qui a accepté avec enthousiasme de superviser mes travaux de recherche, au moment où, j’étais triste et angoissé de voir partir en congé de maladie ma directrice initiale et mentor, Professeure Françoise Côté, qui m’avait fortement encouragé à m’inscrire au programme de doctorat en santé communautaire. Marie-Pierre, en acceptant de m’encadrer alors que tu avais déjà plusieurs étudiants sous ta supervision, tu m’as offert un beau cadeau, celui d’avoir le privilège de bénéficier d’un encadrement des plus exceptionnels. Sous ta supervision, grâce à ton ouverture d’esprit, ta disponibilité et ta rigueur méthodologique, j’ai bénéficié des conseils avisés et apaisants chaque fois que j’en avais besoin dans mon cheminement. Dans mes moments de doutes et d’inquiétudes, tu as toujours su trouver le ton et les mots appropriés pour "booster" ma motivation et recadrer avec justesse l’orientation de mes recherches. Le soutien pour ma formation sur l’intervention mapping à l’Université de Maastricht en Hollande, l’appui inconditionnel à mes démarches de diffusion des résultats de témoignent à la fois de ta générosité et de ton attention bienveillante qui m’ont permis d’accomplir une thèse. Je te serai toujours reconnaissant.

À mon mentor, co-directeur de recherche, Professeur Michel Alary, que je côtoie depuis 17 ans comme collaborateur professionnel dans de nombreux projets et comme étudiant. Sans toi je ne serais pas ici et ce projet serait resté un rêve. Le mot merci est insignifiant pour te témoigner toute la gratitude qui déborde dans mon cœur. Depuis que j’ai rencontré ton chemin en octobre 1999 au Bénin, par la plus merveilleuse des providences, tel un ange sur mon chemin, tu as illuminé

(15)

xv

mon parcours professionnel. Tu m’as accordé ta confiance en me donnant l’opportunité inespérée de travailler dans tes projets et de parfaire ma formation au deuxième et troisième cycle. Tu as éveillé et ravivé en moi la passion de la recherche et de l’engagement dans les programmes d’intervention auprès des populations vulnérables. Michel, tu as insufflé en moi tout au long de ces années et particulièrement dans ce parcours au doctorat la rigueur de la recherche. Avec ton appui financier, j’ai bénéficié des conditions matérielles nécessaires et d’un environnement stimulant pour mener à bien mes travaux de recherche aussi bien sur le terrain qu’au centre de recherche du CHU de Québec, le tout sous ton encadrement et ton soutien sans faille. Michel, je ne te remercierai jamais assez. Puisse le Seigneur te rendre, à toi et aux tiens, le centuple de tout ce que tu fais pour moi et les miens.

Une profonde gratitude à la professeure Françoise Côté, artisane de l’ombre de cette thèse, pour avoir cru en moi et soutenu mon projet d’étude au doctorat. Puissent mes prières être exaucées pour une meilleure santé.

Je tiens à remercier l’équipe du projet Équité en santé au Bénin, ainsi que les membres de l’équipe de recherche du centre de recherche du CHU de Québec, Hôpital du Saint- Sacrement, pour leur présence constante tout au long de mon parcours. Je veux nommer affectueusement Christian Lafrance, Johanne Leroux, Celine Valin, Souleymane Diabaté, Katia Giguère, Ginette Desbiens, Denis Guillette, Myrto Mondor, Caty Blanchette, Éric Demers, etc.

À mes amis (es) et connaissances du Québec et du Canada, Annie Claude-Labbé, Vincent Morel, Annie Savard, Patrice Lemay, Michelyne Belleau, toute « la bande » de Saint-Germain de Kamouraska.

Je ne saurais passer sous silence tout le personnel administratif et les professeurs du programme de doctorat santé communautaire avec une mention spéciale aux professeurs : Sophie Dupéré, Laurence Guillaumie, Nicolas Vonarx, Christopher Fletcher, Élisabeth Martin la directrice du programme.

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xvi

Je tiens à remercier toute ma famille, notamment mes frères et sœurs, Sylvain, Jeanne, Michel, Jean Felix, Tiken, Laure. Votre amour fraternel constitue une énergie vitale qui m’a accompagné dans mon parcours doctoral. Vos conseils si précieux et vos prières m’ont été d’un grand réconfort.

Pour finir, je voudrais remercier les femmes TS qui ont consacré de leur temps pour participer aux enquêtes qualitatives et quantitatives. Sans elles, ces travaux

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xvii

Avant-propos

Cette thèse de doctorat porte sur le développement, la mise en œuvre et l’évaluation d’une intervention ciblée encourageant l’adoption du dépistage volontaire et régulier du VIH chez les femmes travailleuses du sexe au Bénin. Les travaux de recherche faisant l’objet de cette thèse ont été réalisés par l’auteur de cette thèse sous la supervision des professeurs Marie-Pierre Gagnon, Ph.D., et Michel Alary, MD., MSc., Ph.D., respectivement directrice et codirecteur de recherche.

La thèse est structurée en huit chapitres incluant trois articles scientifiques à titre de premier auteur. Toutes les premières versions des trois articles ont été écrites par le premier auteur. La rédaction de ces articles a été supervisée par les professeurs Gagnon et Alary.

Le premier article s’intitule « Understanding the intention to undergo regular HIV testing among Female Sex Workers in Benin: A key issue for entry into HIV Care ». Cet article a été publié dans la revue Journal of Acquired Immunodeficiency Syndrome (JAIDS). Le troisième et le quatrième auteur de cet article ont apporté leurs contributions respectivement dans les analyses statistiques et la révision du manuscrit dans la forme et le fond.

Le second article intitulé « Développement et implantation d’une intervention

ciblée encourageant le dépistage régulier du VIH chez les travailleuses du sexe au Bénin : Application du protocole d’intervention mapping » a été publié dans la revue Global Health Promotion. Les différents auteurs qui sont des collaborateurs de la mise en œuvre du projet au Bénin ont contribué à la révision de cet article. Enfin, le troisième article a pour titre : « Augmentation de l’adoption du dépistage régulier du VIH chez les femmes travailleuses du sexe au Bénin : Effet d’une intervention basée sur les théories et des données probantes ». Le manuscrit sera soumis pour publication dans une revue spécialisée en évaluation de programmes dans le domaine de la santé.

(18)

xviii

Les travaux de recherche doctorale ont été réalisés dans le cadre du projet « Équité en santé sexuelle et reproductive » mis en œuvre au Bénin et financé par les Instituts de recherche en santé du Canada. Les résultats de nos travaux de recherche ont été distingués par le réseau de recherche en santé des populations du Québec (RRSPQ - Axe santé mondiale) d’abord en mars 2014 et mars 2017 par l’obtention de deux bourses de dissémination des résultats de recherche à l’étranger, puis par l’obtention d’une bourse de diffusion des résultats lors de la conférence canadienne en santé mondiale en novembre 2015.

Nos résultats de recherche ont fait également l’objet de communications scientifiques lors de la conférence mondiale sur la promotion de la santé au Brésil en mai 2016, et à l’occasion des journées scientifiques du RRSPQ et des journées scientifiques des étudiants de l’axe Santé des populations et pratiques optimales en santé du centre de recherche du CHU de Québec-Université Laval, ainsi que des journées scientifiques de la Faculté des sciences infirmières de l’Université Laval.

(19)

1

Introduction

L’épidémie du syndrome d’immunodéficience acquise (Sida) est la plus

importante et la plus dévastatrice de l’ère contemporaine à laquelle la communauté scientifique et le monde entier aient été confrontés. Depuis le début de l’épidémie, environ 78 millions de personnes [71 millions – 87 millions] ont été infectées par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) et 39 millions de personnes [35 millions – 43 millions] sont décédées de maladies liées au Sida [1].

Après plus de trois décennies de lutte contre cette pandémie, des progrès importants ont été accomplis. Ceux-ci se traduisent, entre autres, par la chute de 35% du nombre annuel de nouvelles infections depuis 2000 dans le monde et la baisse continue des décès liés au Sida du fait que davantage de personnes ont accès à la thérapie antirétrovirale et vivent ainsi plus longtemps et en meilleure santé [2, 3]. Les approches de prévention combinée qui impliquent la combinaison d’interventions comportementales, biomédicales comme la prophylaxie préexposition (Pre-exposure Prophylaxis : PrEP) et le traitement comme moyen de prévention (Treatment as Prevention : TasP), ainsi que les interventions structurelles ont démontré leur efficacité potentielle dans la réduction de la transmission du VIH. Elles sont fortement recommandées dans la lutte contre l’épidémie, particulièrement auprès des sous-populations fortement exposées au risque d’infection [4-6]. Ces approches s’imposent désormais comme incontournables et suscitent beaucoup d’espoir pour mettre fin à l’épidémie du VIH.

Toutefois, malgré les progrès indéniables et les espoirs suscités par les nouvelles approches de lutte contre le VIH/Sida, des défis et des lacunes réels persistent dans les programmes nationaux [7, 8]. Ces lacunes limitent l’impact de la riposte face à l’épidémie, en particulier dans certaines régions du monde comme l’Afrique subsaharienne plus gravement touchée. Certaines populations, comme les femmes travailleuses du sexe (TS), constituent un sous-groupe confronté à un risque accru d’infection par le VIH lié à des facteurs biologiques,

(20)

2

comportementaux et structurels. Les femmes TS sont infectées de manière disproportionnée par rapport à la population générale. Elles sont globalement 13,5 fois plus infectées par le VIH que les autres femmes [9] et sont confrontées dans le même temps à un accès limité aux services de prévention et de soins [7, 8].

Dans l’optique d’accélérer la riposte face aux défis persistants, le Programme conjoint des Nations Unies sur le Sida (ONUSIDA) a fixé des objectifs assortis de cibles à atteindre, dans une vision de quasi-élimination du Sida d’ici 2030 [10]. Ces objectifs comprennent la réduction des nouvelles infections à VIH de 75%, la réalisation de zéro discrimination et l’atteinte de l’objectif clinique et de santé

publique « 90-90-90 ». Cet objectif vise à s’assurer que d’ici 2020, 90 % des

personnes connaissent leur statut sérologique, 90 % des personnes séropositives aient accès aux traitements, et 90 % des personnes traitées aient une charge virale supprimée de façon durable. Cet objectif met en exergue la nécessité de promouvoir davantage le conseil et le dépistage volontaire (CDV) du VIH.

Ce projet de recherche s’inscrit dans la vision d’accélération de la riposte préconisée par l’ONUSIDA, qui suggère de concentrer les efforts et les ressources sur des programmes de qualité, éclairés par des données probantes, dans les zones

géographiques et parmi les populations qui en ont le plus besoin [10]. Ce projet

s’insère dans le champ de la promotion de la santé et vise à soutenir les efforts de lutte contre le Sida par la promotion des comportements favorables à la santé en

s’appuyant sur des données probantes et en combinant diverses méthodes visant

les individus et leur environnement. Il s’aligne ainsi sur la définition de Green et Kreuter (1999) [11] qui souligne que la promotion de la santé implique toute combinaison d’actions éducative, politique, ou organisationnelle appuyant les comportements et les conditions de vie conduisant à la santé des individus, des groupes ou des collectivités.

Les travaux de recherche dans le cadre de cette thèse de doctorat en santé communautaire ont été réalisés en trois principaux volets.

(21)

3

Le volet 1 se rapporte à la compréhension des déterminants associés à l’intention des femmes TS d’effectuer le dépistage régulier du VIH dans les services adaptés

(SA1) en s’appuyant sur la théorie du comportement planifié. Les résultats de ce

premier volet ont servi de base conceptuelle de l’intervention et font l’objet du premier article de thèse. Le volet 2 concerne le développement et l’implantation de l’intervention encourageant le CDV régulier du VIH chez les femmes TS. Les résultats de ce deuxième volet sont présentés dans le deuxième article. Enfin, le volet 3 concerne l’évaluation d’implantation et des effets de l’intervention de promotion du CDV régulier du VIH chez les femmes TS. L’évaluation d’implantation repose sur une approche exploratoire et descriptive des éléments spécifiques selon le cadre logique du programme d’intervention. Un devis avant-après avec plusieurs mesures répétées a été utilisé pour l’évaluation des effets dont les résultats font l’objet du troisième article.

Cette thèse par article est structurée en 8 chapitres. Le premier chapitre présente le contexte et la problématique de l’étude. Le second chapitre présente une recension des écrits sur l’évolution du CDV du VIH, son importance dans les programmes de prévention et son intérêt dans la réduction des comportements à risque. Il synthétise également les connaissances sur les facteurs (facilitants et barrières) qui influencent son adoption. Le chapitre 3 précise le but et les objectifs de l’étude et décrit le cadre de planification sur lequel repose ce projet de recherche. Les chapitres 4 à 6 présentent les résultats des trois volets de la recherche sous forme d’articles scientifiques. Une discussion générale des résultats saillants ainsi que des principales forces et limites de nos recherches est présentée au chapitre 7. Enfin, une conclusion générale, présentée au chapitre 8, synthétise les principales contributions à l’avancement des connaissances et les perspectives de recherche futures.

1 Les services adaptés désignent des structures de santé appuyées par le Programme national de lutte contre le Sida du Bénin et qui sont dédiées aux femmes travailleuses du sexe pour leur offrir gratuitement des services de prévention et de soins, en ce qui a trait au VIH/Sida et aux autres infections transmises sexuellement et par le sang.

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4

CHAPITRE 1: CONTEXTE ET PROBLÉMATIQUE DE

L’ÉTUDE

1.1 Contexte de l’étude

Le présent projet de recherche doctorale s’insère dans un programme plus large de recherche-action intitulé Projet Équité en santé sexuelle et reproductive : « Travail du sexe, marginalisation et santé : approches de recherche visant l'équité en santé en contexte prostitutionnel béninois ». Financé par les Instituts de recherche en santé du Canada, ce programme a impliqué la collaboration entre des chercheurs d’universités canadiennes (Université Laval, Université du Québec à Rimouski-Campus de Lévis, Université du Manitoba) et des structures béninoises dont l’université d’Abomey-Calavi, le Programme national de lutte contre le sida du Bénin et des organismes communautaires intervenant au Bénin en prévention du VIH auprès des femmes TS.

Le Bénin est un pays d’Afrique de l’Ouest situé sur le Golfe de Guinée, délimité au sud par l’océan Atlantique, à l’ouest par le Togo, au nord par le Burkina Faso et le Niger et à l’est par le Nigéria. Il couvre une superficie de 114 763 Km² avec une population estimée à 9 983 884 habitants selon le recensement général de la population et de l’habitation (RGPH4) de mai 2013 [12]. La population du Bénin est essentiellement jeune : 46,4 % ont moins de 15 ans et 44,64 % ont un âge compris entre 15 et 49 ans. Les femmes représentent un peu plus de la moitié (51,2 %) de la population. Cette population est inégalement répartie dans 12 départements administratifs : Alibori, Atlantique, Attacora, Borgou, Collines, Couffo, Donga, Littoral, Mono, Ouémé, Plateaux, Zou) [12]. Quatre départements (Atlantique, Littoral, Ouémé et Borgou) abritent les plus grandes villes du pays, à savoir Cotonou (capitale économique dont le centre-ville constitue le département du Littoral et les grandes banlieues sont situées dans l’Atlantique), Porto-Novo (capitale politique située dans l’Ouémé) et Parakou (plus grande ville du nord située le Borgou). Ces villes qui constituent des pôles d’attraction des TS ont été ciblées par notre projet.

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5 1.2 Problématique

Cette section décrit d’abord de manière succincte le portrait de la situation épidémiologique du VIH au plan global et en Afrique, incluant les défis et lacunes caractérisant la riposte à l’épidémie du VIH. Elle aborde ensuite la situation épidémiologique du VIH au Bénin dans la population générale et chez les TS, ainsi que la dynamique de propagation de l’épidémie. Elle décrit enfin l’ampleur des facteurs et conditions associés à la vulnérabilité des femmes TS en matière de VIH et dresse le portrait de la situation en matière de conseil et dépistage volontaire (CDV) du VIH.

1.3 L’épidémie du VIH dans le monde et en Afrique

Selon l’ONUSIDA, en juin 2015, le nombre de personnes vivant avec le VIH dans le monde était estimé à 36,9 millions. Parmi eux, 15,8 millions de personnes vivant avec le VIH avaient accès à la thérapie antirétrovirale, contre 13,6 millions en juin 2014. La riposte mondiale au VIH aurait permis d’éviter 30 millions de nouvelles infections à VIH et près de 8 millions (7,8 millions) de décès liés au Sida depuis l’année 2000 [3].

Bien que la courbe de l’épidémie mondiale ait été infléchie, celle-ci est encore

loin d’être brisée, car de nombreux défis et problèmes persistent. En effet, en dépit

du recul des nouvelles infections à VIH, un nombre élevé de nouvelles infections à VIH et de décès liés au Sida surviennent encore chaque année, indiquant que l’épidémie n’est pas encore vaincue. En 2014, environ 2 millions de personnes [1,9–2,2 millions] ont été nouvellement infectées par le VIH et 1,2 million de personnes [980 000–1,6 million] sont décédées de causes liées au Sida dans le monde [2].

L’Afrique subsaharienne reste sévèrement touchée par l’épidémie et concentrait 66 % de l’ensemble des nouvelles infections par le VIH en 2014, malgré une diminution des nouvelles infections de 41 % entre 2000 et 2014. Cette région compte 25,8 millions [24,0 millions – 28,7 millions] de personnes vivant avec le VIH (PVVIH). Les femmes représentent plus de la moitié du nombre total des

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personnes vivant avec le VIH en Afrique subsaharienne [2]. Bien que le nombre de personnes ayant accès à une thérapie antirétrovirale ait augmenté considérablement (de 100 000 en 2002 à 10,7 millions de personnes en 2014), dans cette région du monde, la couverture en traitement antirétroviral demeure insuffisante par rapport aux besoins [2].

Le dépistage du VIH constitue une des composantes essentielles de la riposte au VIH. Pourtant, la connaissance du statut sérologique demeure encore globalement insuffisante, malgré les progrès accomplis dans l’amélioration des techniques de dépistage et l’offre des services en la matière. En effet, parmi les 36,9 millions de personnes vivant avec le VIH dans le monde, il est estimé que 17,1 millions de personnes, soit 46 %, ne savent pas qu’elles ont le virus. La grande majorité se trouve en Afrique subsaharienne qui renferme 70 % des personnes vivant avec le VIH dans le monde [3]. L’ignorance du statut sérologique par une grande proportion des personnes vivant avec le VIH représente une lacune importante de la riposte face au Sida. Cette ignorance contribuerait au maintien du risque de propagation du virus en ce sens que les personnes qui ne savent pas qu’elles sont infectées risquent davantage de propager le virus à leur insu, alors que celles qui connaissent leur statut sérologique seraient plus enclines à prendre les mesures pour mieux se protéger. Celles qui obtiennent un résultat positif au test de dépistage prendront plus probablement des mesures pour prévenir la propagation ultérieure du virus et pourront accéder plus rapidement aux traitements [13-16]. La connaissance du statut sérologique est d’autant plus importante pour les personnes infectées, mais aussi pour la santé publique, car la thérapie antirétrovirale sert non seulement à prévenir les maladies et les décès liés au Sida chez individus ; elle permet également de réduire sensiblement le risque de transmission du VIH, en réduisant la contagiosité de plus de 90 % au travers de la suppression de la charge virale plasmatique [17]. En revanche, l’ignorance du statut sérologique contribue au retard dans l’accès précoce aux traitements et en limite l’efficacité. L’insuffisance de l’accès ou le dépistage tardif constitue une lacune de la riposte globale et particulièrement en Afrique. À titre d’illustration, dans les pays à revenu faible et intermédiaire, l’ONUSIDA rapporte qu’une

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personne sur quatre qui entame une thérapie antirétrovirale a un nombre de lymphocytes CD4 inférieur à 100, symbolisant le diagnostic tardif associé à un risque élevé de maladie et de décès liés au VIH [8].

Les groupes de populations comme les femmes TS, les hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes (HSH), les utilisateurs de drogues injectables (UDI), désignés sous le terme de populations clés, sont touchés de manière disproportionnée par l’épidémie du VIH et affichent des niveaux de prévalence souvent beaucoup plus élevés que celles des populations générales. Ces populations doivent être rejointes de manière prioritaire par des programmes et des services de CDV du VIH adaptés et efficaces, respectant les lignes directrices de l’OMS et de l’ONUSIDA en la matière [18].

Les femmes TS, reconnues comme particulièrement vulnérables et marginalisées, sont insuffisamment couvertes par les programmes de lutte, car elles doivent souvent surmonter divers obstacles personnels ou structurels pour accéder aux services de prévention, de soins et aux traitements [7]. La stigmatisation et la discrimination persistante dans de nombreuses régions du monde, particulièrement en Afrique, et des lois punitives et répressives ainsi que l’absence de lois protectrices contribuent à dissuader les TS ou d’autres personnes très exposées de recourir aux services essentiels en matière de VIH. Selon l’ONUSIDA, les efforts visant à réduire la transmission du VIH liée au commerce du sexe restent globalement insuffisants [8].

En Afrique de l’Ouest l’épidémie est concentrée parmi les populations clés, notamment les femmes TS qui seraient directement impliquées dans 75 à 90 % des cas de transmission du VIH dans la population générale à travers les clients et autres partenaires sexuels masculins qui constituent les populations passerelles [19-21].

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1.3.1 Portrait épidémiologique du VIH au sein de la population générale au Bénin

Le Bénin figure parmi les pays présentant une épidémie de VIH qualifiée de mixte, avec une prévalence modérée dans la population générale, mais fortement concentrée dans certains groupes de population comme les femmes TS et leurs partenaires sexuels.

En 2012, la dernière enquête démographique et de santé [22] estime à 1,2 % le taux de prévalence du VIH chez la population adulte de (15-49 ans). Les femmes sont plus infectées que les hommes (1,4 % contre 1 %) et la prévalence au sein de la population adulte est plus élevée en milieu urbain (1,7 %) qu’en milieu rural (0,9 %) [22, 23]. À Cotonou (capitale économique et ville la plus peuplée du pays), la prévalence chez les femmes et les hommes âgés de 15-49 ans était respectivement de 2,8 % et de 0,5 %. La prévalence du VIH chez les adultes à Cotonou était plus élevée que dans les autres villes (2,8 % versus 2,0 %). Globalement, chez les jeunes de 15-24 ans, la prévalence était de 1,0 % pour les femmes et de 0,3 % pour les hommes. Cette prévalence chez les jeunes était particulièrement plus élevée à Cotonou que dans les autres villes (1,5 % versus 0,6 %) [22].

Depuis 2000, une tendance à la stabilisation de l’épidémie avec ce niveau modéré de prévalence au sein de la population générale est observée. Cependant, cette situation cache une réalité plus alarmante qui se traduit par l’existence des poches de concentration de l’infection à VIH chez certaines populations clés plus exposées aux risques d’infection, notamment les TS et leurs partenaires sexuels.

1.3.2 Évolution de la prévalence du VIH chez les travailleuses du sexe et leurs partenaires

L’analyse de l’évolution de l’épidémie chez les TS [24] à partir des données de Cotonou où les premières études de séroprévalence du VIH ont été conduites, suggère qu’une augmentation en flèche de la prévalence de l’infection à VIH au sein de ce groupe à risque se serait produite. En effet, de 1986 à 1990, la prévalence est passée de 3,3 % à 31,0 % [21] pour atteindre 53,3 % en 1993 [25].

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Une baisse de la prévalence du VIH s’était amorcée à la faveur des interventions du projet canadien d’appui à la lutte contre le Sida au Bénin, financé par l’ACDI pendant trois phases consécutives (1, 2 et 3) et qui ciblaient avant tout les TS, mais encore plus intensivement dans sa dernière phase (2001 à 2006). La prévalence a chuté de 53,3 % en 1993 à 40,7 % en 1999 [25] puis à 33,3 % en 2005 [26], alors qu’en 1998 et 2006, les prévalences au sein des femmes de la population générale de Cotonou étaient estimées respectivement à 3,4 % [27] et à 2,8 % [23]. Ces tendances soulignent que depuis les années 90, la prévalence du VIH au sein des TS était à chaque fois plus de 10 fois celle des femmes de la population générale [21]. Chez les clients des TS, la première mesure de prévalence du VIH rapporté était estimée à 8,4 % en 1998 à Cotonou [8, 39]. Entre 1998 et 2006, la prévalence chez les clients des TS de Cotonou était alors de 3 à 10 fois plus élevée que celle des hommes de la population générale [24]. En 2008, selon l’enquête de surveillance de seconde génération, la prévalence de l’infection par le VIH était estimée respectivement chez les TS et leurs clients à 26,5 % et 3,9 % [28]. Cette prévalence du VIH chez les TS variait selon les départements de 13 % (l’Atacora) à 40 % (Donga). Le type de milieu n’influence pas la prévalence du VIH chez les TS : 26,8 % en milieu urbain et 24,6 % en milieu rural. En 2012, la prévalence du VIH chez les TS était estimée à 20 % [29]. En 2015, elle a été estimée à 15,7 % [30]

Ainsi, malgré la tendance à la stabilisation de l’épidémie au sein de la population générale, l’épidémie très concentrée au sein des TS et leurs partenaires sexuels masculins constitue une préoccupation majeure.

Par ailleurs, le nombre de personnes vivant avec le VIH est estimé à 62 000 et 3 300 nouvelles infections surviendraient annuellement. La plus grande proportion des nouvelles infections survient dans le contexte du commerce du sexe impliquant les TS et leurs clients [31, 32].

Bien que le niveau de prévalence du VIH chez les femmes TS au Bénin demeure encore plus élevé par rapport à celle de la population générale, il importe de

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reconnaître que celle-ci a diminuée au fil des années, comme en témoignent les données mentionnées plus haut. Plusieurs travaux scientifiques [33-35] réalisés au Bénin ont permis d’établir le lien entre les interventions réalisées auprès des femmes TS et la diminution de la prévalence du VIH auprès des femmes TS ainsi que la stabilisation de l’épidémie dans l’ensemble de la population générale. En effet, ces évidences suggèrent que les interventions auprès des TS ont entrainé une diminution de la prévalence du VIH auprès des femmes TS et une stabilisation de l’épidémie du VIH dans la population générale. À titre d’exemple, les travaux de Béhanzin et al. [33] suggèrent un lien direct entre la diminution de la prévalence du VIH chez les femmes TS et la diminution de la prévalence du VIH chez les jeunes hommes à Cotonou qui serait attribuable en grande partie aux interventions implantées chez les TS. Chez les femmes TS la prévalence serait passée de 53,3 % en 1993 à 30,4 % en 2008 [34], parallèlement chez les jeunes hommes de Cotonou âgés de 15 à 29 ans, la prévalence du VIH serait passée de 3 % à 0,5 % pendant la même période [33]. Par ailleurs, la modélisation mathématique [35] suggère qu’entre 1993 et 2008 les interventions successives ciblant les TS au Bénin dans le cadre du projet Canadien auraient prévenu des proportions estimées à 50 %, 37 % et 24 % de nouvelles infections par le VIH respectivement chez les femmes TS, les clients et l’ensemble de la population générale excluant les femmes TS. Ces évidences soulignent non seulement l’impact positif des interventions ciblant les femmes TS dans le contrôle et la réduction de l’épidémie, mais également la nécessité de les maintenir en les portant à l’échelle nationale, tout en assurant une couverture optimale.

1.3.3 Dynamique de transmission du VIH au Bénin

La plupart des études de prévalence indiquent que l’épidémie du VIH au Bénin est concentrée au sein des femmes TS et leurs clients qui affichent des prévalences toujours beaucoup plus élevées que celles des femmes et des hommes de la population générale [21, 23, 25-27, 36, 37]. Ainsi, comme nombre des pays d’Afrique de l’Ouest avec le profil d’épidémie concentrée, le commerce du sexe au Bénin constitue un puissant « vecteur » dans l’épidémie du VIH [20, 21, 25,

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36]. Les femmes TS représentent le principal groupe noyau (« core group ») dans la dynamique de l’épidémie, et leurs clients jouent le rôle de groupe relais comme pont de transmission de l’infection du « core group » vers la population générale à moindre risque [19-21, 25, 26, 28, 36, 38-46]. La fraction de l’infection à VIH dans la population masculine de Cotonou attribuable aux rapports sexuels avec des TS était estimée à 76 %, et chez les clients des TS, cette fraction était estimée à 91 % [20, 41]. Ces données suggèrent l’ampleur des interactions sexuelles propices à la diffusion de l’infection à VIH entre le milieu prostitutionnel et la population générale, d’où la nécessité des interventions ciblant l’environnement prostitutionnel pour briser la dynamique de transmission du VIH et des autres infections transmises sexuellement et par le sang (ITSS).

1.3.4 La vulnérabilité des femmes TS face au VIH/Sida au Bénin

Les femmes TS en général sont reconnues comme un groupe vulnérable et à haut risque face au VIH/Sida. Cette vulnérabilité résulte d’un ensemble de facteurs liés au comportement individuel, mais aussi aux facteurs environnementaux échappant au contrôle individuel et qui réduisent leur aptitude à éviter le risque de VIH [47] . Parmi ces facteurs figurent l’absence ou l’insuffisance des connaissances et du savoir-faire nécessaires pour se protéger et protéger les autres, de même que le manque ou l’insuffisance d’accès aux services de prévention et de soins de qualité, ainsi qu’aux structures d’aide et de soutien. Les facteurs structurels et socioculturels, tels que les violations des droits humains et les normes sociales dévalorisant les TS, stigmatisent et inhibent leur volonté à faire usage des services de prévention, de soins et d’appui en matière de VIH. Au Bénin, comme dans plusieurs contextes africains, la vulnérabilité des TS revêt plusieurs dimensions interdépendantes pouvant être regroupées en plusieurs niveaux ou contextes en s’inspirant du modèle de vulnérabilité de Gendron (2002) [48] : le niveau individuel, le contexte du travail, le niveau sociétal et le contexte global du phénomène de la prostitution. Ces facteurs participent seuls ou de manière associée à la création ou à l’intensification de la vulnérabilité individuelle et collective des femmes TS face au VIH [47, 49-51].

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1.3.4.1 Vulnérabilité liée au comportement individuel

Les femmes TS s’engagent dans les rapports sexuels à risque avec des partenaires sexuels masculins (clients ou partenaires réguliers non-payants) qui entretiennent simultanément d’autres relations avec d’autres femmes TS dans le milieu [52-55]. Les femmes TS qui pratiquent la prostitution de manière clandestine et ne veulent pas se reconnaitre comme TS ont tendance à entretenir des rapports sans protection avec des partenaires occasionnels payants ou non-payants, pour montrer qu’elles se démarquent des TS affichées ou professionnelles. D’autres femmes TS expriment une certaine résignation en acceptant l’image dévalorisante que leur renvoie la société. Cette résignation contraint les femmes TS dans un cercle vicieux de la négativité en raison du regard accusateur qui leur donne l’impression que leur existence est inutile. Ce contexte de résignation peut avoir des conséquences néfastes sur leur vision de la prévention en y accordant peu d’importance.

1.3.4.2 Vulnérabilité liée au contexte du travail de sexe

Les femmes TS se retrouvent souvent dans des rapports de dépendance, où les rapports de pouvoir, la violence, la répression policière, l’insécurité, l’exposition à la drogue font partie de l’environnement prostitutionnel. Dans certains sites, la cohésion et l’entente entre TS sont très problématiques en raison de la concurrence. Cette situation peu propice au développement de leur autonomie collective accroît leur vulnérabilité. La mobilité est une des caractéristiques de la prostitution. Un rapport régional met en évidence le rôle prépondérant de la mobilité comme facteur d’accroissement de la vulnérabilité des femmes TS et de la diffusion du VIH en Afrique de l’Ouest [56]. Les femmes TS changent de lieu de travail et/ou de domicile pour des raisons de rentabilité et de sécurité dans leur travail [57-60]. Lorsque la clientèle masculine chute dans un site et par ricochet les recettes, pour couvrir leurs besoins élémentaires de survie, les femmes TS changent de lieu de travail et/ou de domicile afin de paraître nouvelles dans l’espoir de s’attirer davantage de clients. Ces déplacements peuvent être internes (dans une même ville) ou externe (autre ville ou pays frontalier). La mobilité,

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quels que soient ses motifs, accroit non seulement leur vulnérabilité, mais aussi rend problématique le travail de mobilisation communautaire et de suivi médical dans le cadre des programmes de prévention et de promotion en raison de leur instabilité.

1.3.4.3 Vulnérabilité liée au contexte sociétal

Les femmes TS sont étiquetées par la société par la distinction nette d’avec les autres femmes de la population générale. De fait, les femmes TS sont considérées par la société dite formelle comme un groupe à part à qui l’on attribue d’emblée des préjugés négatifs. Ce contexte traduit le rejet social du phénomène et l’exclusion sociale à laquelle les femmes TS sont souvent confrontées [55, 61]. Le fait d’être considérées comme des personnes qui transgressent les normes sociales et en qui on ne peut faire confiance pousse les femmes TS à exercer la prostitution loin de leur milieu d’origine et de leur entourage familial. Elles sont souvent en rupture avec le réseau de soutien familial. Elles se sentent exclues de la société dite formelle et ne jouissent pas de ce fait des protections sociales formalisées. Une revue systématique de l’OMS souligne que les milieux du commerce de sexe sont confrontés à des niveaux plus élevés d'isolement social que d’autres [60]. L’isolement expose les femmes TS aux bandits et aux abus et violences diverses. Les femmes TS osent rarement porter plainte lorsqu’elles sont victimes de violence dans le contexte du commerce de sexe, car cela les expose davantage à la stigmatisation. La prostitution est perçue comme un avilissement, une dégradation de la dignité humaine ; les femmes TS sont souvent humiliées et méprisées dans la sphère publique quand elles sollicitent des services (Centre de santé, marché) et souvent considérées comme fautives au regard de l’opinion. La stigmatisation et la discrimination ont été documentées comme sources d’obstacles du recours aux services de santé pour les femmes TS [62]. Par ailleurs, les inégalités de genre se traduisant par des normes sociales valorisant une masculinité dominante (sexualité réprimée de la femme et celle exacerbée de l’homme) participent à une accentuation de la vulnérabilité des femmes TS. Ces normes de masculinité se

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manifestent par des attitudes et des comportements sexistes et violents de certains clients à l’égard des femmes en général et des TS en particulier.

1.3.4.4 Vulnérabilité liée au contexte global et légal de la prostitution

Au Bénin, la prostitution, entendue comme activité par laquelle une personne consent à des rapports sexuels contre de l’argent, des biens, des services ou des faveurs spéciales, est principalement féminine [55]. Elle n’est pas légalisée, néanmoins, elle est pratiquée soit de manière affichée ou clandestine et demeure assez répandue, surtout dans les grandes villes. En général, les femmes TS sont assujetties aux règles parfois arbitraires que fixent les « tenanciers » des sites et proxénètes qui alimentent la prostitution et en tirent davantage profit que les femmes TS [55, 61]. La plupart du temps, les lieux où la prostitution est pratiquée se caractérisent par : la précarité, l’insalubrité, la promiscuité et l’insécurité. Les femmes TS sont souvent dans des rapports de soumission avec divers acteurs interagissant dans le milieu de prostitution [55, 61, 63].

La violence et la répression ainsi que le harcèlement de la part des hommes gravitant autour des milieux de prostitution sont des phénomènes récurrents qui ont une influence sur les comportements des femmes TS. Les descentes intempestives des forces de l’ordre sur les sites prostitutionnels des grandes villes du Bénin engendrent souvent une dispersion des femmes TS en les confinant dans la peur et la clandestinité tout en renforçant leur mobilité [54, 64]. La répression policière légitime en quelque sorte le sentiment de culpabilité qui pèse sur les femmes TS et renforce le mépris ou les préjugés négatifs de la société à leur égard [48, 65]. Certaines pratiques en milieux de prostitution soumettent les femmes TS à une pression financière constante. Elles sont parfois obligées de payer régulièrement un montant à des tierces personnes pour avoir le droit d’exercer le travail ou pour bénéficier de la sécurité sur un site donné. Le non-respect ou le refus de se plier à ces règles les exposent à des représailles pouvant aller jusqu’à la violence sexuelle et physique. Ces conditions engendrent une pression financière qui pousse les femmes TS à avoir le plus de clients possible, parfois sans protection, pour maximiser leur gain afin de répondre aux exigences du contexte

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de travail et subvenir aussi à leurs besoins élémentaires (loyer, nourriture, habillement, personne à charge, etc.). Pour faire face à cette pression, certaines femmes TS s’adonnent aux drogues, ce qui réduit leur capacité à négocier des rapports protégés avec les clients. Dans une perspective d’intervention, il importe de prendre conscience de cette vulnérabilité multidimensionnelle pour adapter les actions aux besoins et réalités spécifiques des TS.

1.3.5 Conseil et dépistage volontaire du VIH et connaissance du statut sérologique

Le CDV du VIH est une composante centrale de tout programme de lutte contre le VIH. Il constitue un outil préventif qui vise la réduction des comportements à risque et une porte d’entrée pour le traitement et les soins appropriés. Cependant, l’adoption du CDV représente aussi un des défis importants des programmes de lutte contre le VIH [66].

Au fil des années, la disponibilité des structures offrant le CDV du VIH s’est accrue. De même, les modalités d’offre des services CDV du VIH se sont diversifiées, favorisant substantiellement l’accès des populations aux services de prévention. Au Bénin comme dans nombre des pays d’Afrique subsaharienne, bien que le nombre de personnes recourant au CDV ait augmenté, la connaissance du statut sérologique reste globalement insuffisante. Par exemple, en 2009, le pourcentage médian des femmes TS au Bénin ayant fait un test de dépistage du VIH au cours des 12 derniers mois était estimé à 38 % [67].

Malgré une intensification considérable du dépistage du VIH en Afrique subsaharienne ces dix dernières années, diverses enquêtes réalisées auprès des ménages entre 2007 et 2011 dans cette région ont révélé que 36 % de la population n’avaient jamais subi de test de dépistage du VIH [8]. Plusieurs pays reconnaissent la nécessité d’accroître la connaissance du statut sérologique et d’encourager le diagnostic précoce de l’infection. L’intensification de la thérapie antirétrovirale constitue aussi une des stratégies pour réduire la circulation du virus au sein d’un environnement ou d’une population et permet de diminuer le

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connaissance préalable du statut sérologique, donc de recourir au CDV du VIH. C’est pourquoi le CDV du VIH est recommandé au moins une fois par an, chez les personnes séronégatives dans les régions et au sein des populations à forte prévalence [18, 67]. Au Bénin, selon les directives du Programme national de lutte contre le Sida (PNLS), les femmes TS sont encouragées à se faire dépister trimestriellement dans les services de santé adaptés (SA). Dans la plupart des SA destinés aux femmes TS, l’offre du CDV est disponible en théorie, mais dans la pratique, l’accès au dépistage varie selon la fonctionnalité des SA et la disponibilité des intrants et des prestataires de soins. Les TS sont parfois référées vers d’autres structures connexes, notamment les unités de consultation prénatale (maternité) ou les unités de laboratoire au sein de centres de santé soutenus par le PNLS dans le cadre de la Prévention de la transmission mère-enfant (PTME). Ces contextes peuvent contribuer à limiter l’accès au dépistage des TS. Ils traduisent aussi en partie la sous-utilisation des services de CDV du VIH dans les établissements de santé formels et le faible pourcentage de dépistage à l’initiative des individus chez les populations clés [8]. Par ailleurs, les programmes de conseil et de dépistage sont parfois inadaptés au contexte local et des écarts considérables subsistent entre les besoins de CDV du VIH et les pratiques existantes [68]. Au Bénin, les femmes enceintes adoptent davantage le CDV du VIH dans le cadre de la prévention de la transmission mère-enfant du VIH, alors que les autres groupes de la population ont moins recours au CDV. En 2010, la majorité des personnes ayant effectué le CDV du VIH étaient des femmes visitant les services de consultations prénatales. La même année chez les TS, moins de la moitié (48 %) avait fait le dépistage du VIH et reçu les résultats du test [69]. Néanmoins en 2012, une proportion encourageante de TS (87%) rapportait avoir déjà effectué un test de dépistage du VIH au Bénin au cours de leur vie selon l’enquête de surveillance de deuxième génération [29]. Toutefois, dans le contexte de la prévention du VIH auprès des femmes TS, continuellement exposées aux risques d’infection du VIH et des autres ITSS, le dépistage régulier demeure le meilleur moyen pour connaître précocement son statut sérologique. Une enquête qualitative réalisée chez les TS au Bénin [70] rapporte l’irrégularité des TS à se faire dépister

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et à se rendre dans les SA. Cette irrégularité serait soutenue par divers facteurs individuels, comme la peur de recevoir un résultat positif, la perception d’une inutilité du test en l’absence de signe de maladie. Des obstacles structurels liés à l'accès aux soins de santé et une certaine crainte de la stigmatisation entraveraient aussi la réalisation du dépistage. La méconnaissance des centres de dépistage ou des services offerts (gratuité), l’éloignement des centres et le coût élevé du transport, la rupture des réactifs et l’inaccessibilité de certains traitements liés aux ruptures des intrants étaient des obstacles récurrents au non-recours rapporté par ces TS.

Ainsi, malgré l’élargissement de l’offre des services de CDV du VIH au plan national, le recours des femmes TS aux centres adaptés et l’adoption du CDV demeurent sous optimaux [69, 71]. Pour développer des interventions efficaces de promotion du CDV du VIH reposant sur les données factuelles, une identification préalable des facteurs associés au CDV chez les TS est essentielle [72]. À notre connaissance, aucune recherche portant sur la compréhension des déterminants et facteurs sous-jacents du CDV du VIH, tant chez les TS que dans la population générale, n’a été réalisée au Bénin.

Le CDV régulier du VIH est plus que jamais un centre d’intérêt chez les populations les plus touchées comme les TS. Le dépistage du VIH et le traitement précoce entraineraient des bénéfices cliniques indéniables pour les individus et des avantages potentiellement énormes pour la santé publique dans le ralentissement de la propagation de l’infection. Le dépistage du VIH suivi du traitement précoce aux ARV des personnes séropositives réduirait le risque de transmission du VIH chez les couples de l’ordre de 96 %, [17] ce qui serait mieux que le port consistant du condom dont le niveau de protection est estimé à environ 80 % [73]. Dans le même registre, les résultats de modélisation mathématique se basant sur le cas de la population adulte de l’Afrique du Sud, un pays en contexte d’épidémie généralisée, soulignent le potentiel de l’utilisation systématique du dépistage et traitement précoce aux ARV comme stratégie complémentaire aux interventions

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comportementales en vue de favoriser l’élimination de la transmission hétérosexuelle du VIH [74].

1.3.6 Services adaptés (SA) et interventions promouvant le dépistage volontaire chez les TS au Bénin

Selon les recommandations de l’OMS et l’ONUSIDA [75, 76], pour permettre l’accès équitable aux soins de santé pour les TS, les interventions de prévention de la transmission du VIH doivent être adaptées à leurs besoins spécifiques: Ces interventions doivent : i) permettre l’accès à la consultation et au dépistage aux femmes qui ne sont pas au courant de leur statut VIH; ii) permettre le dépistage approprié et les soins pour les autres ITSS; iii) permettre des soins globaux appropriés, incluant les traitements antirétroviraux pour les femmes infectées par le VIH; iv) permettre la transmission d’informations à propos des risques d’infection liés au contexte du milieu de vie et de travail, les possibilités et moyens de prévention et de traitement.

C’est dans cette perspective qu’au Bénin, les femmes TS sont orientées et suivies dans des structures dénommées SA. Ces services ou unités spécialement identifiés et situés dans les centres de santé publique ou privée (ONG) sont appuyés par le PNLS. Les SA ont pour mission d’offrir le suivi médical régulier et le traitement gratuit des ITSS incluant le CDV du VIH. Pour favoriser la fréquentation et l’utilisation de ces SA par les TS, des organismes communautaires (ONG et associations) reconnus sont appuyés financièrement et techniquement pour intervenir en milieu prostitutionnel. Ces organismes communautaires ont pour rôle d’assurer la mobilisation et la référence des femmes TS vers les SA, à travers la sensibilisation sur les moyens préventifs et l’éducation par les pairs TS. Les messages éducatifs encouragent aussi les TS à effectuer le dépistage du VIH pour connaître leur statut sérologique périodiquement (tous les trois mois).

La notion de répétition du test de dépistage chez les TS revêt une importance capitale en raison du contexte d'exposition continue au risque d’infection au VIH lié à leur métier (rapport sexuel avec de multiples partenaires, possible rupture ou

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non-utilisation de préservatif) [77]. À titre d’illustration, en 2012, près de la moitié des TS (48,7 %,) déclaraient avoir été victime au moins une fois de bris de condom au moment de l’acte sexuel. Parmi celles-ci, 18,7 % déclaraient que le condom qu’elles avaient utilisé au dernier rapport sexuel s’est enlevé ou déchiré [29].

Malgré l’extension des SA et des activités de mobilisation communautaire à l’échelle nationale sous l’égide du PNLS, la fonctionnalité de ces SA et leur fréquentation constituent un des principaux défis [71, 78]. Le nombre de femmes TS bénéficiant d’un test VIH et qui est orienté avec succès vers ces SA par les ONG demeure faible par rapport au nombre de femmes TS que l’on dénombre sur les sites [71, 78]. Ces constats suggèrent une couverture sous-optimale de ces femmes TS par les interventions. Par ailleurs, des interrogations subsistent quant à la qualité de l’interaction au moment de l’offre des services par les prestataires au niveau de certains SA. Ce contexte justifie la pertinence de notre projet qui s’inscrit dans une perspective de favoriser l’équité en matière d’accès aux services de prévention et de soins pour les femmes TS.

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Figure

Figure 3.1 : Modèle de planification « d’Intervention Mapping »  adapté de Godin,  Gagnon, Alary, Levy, &amp; Otis, 2007)
Table 4.1 : Sociodemographic characteristics and description of psychosocial  variables related to the intention of being tested for HIV in the next three months
Table 4.2: Behavioural characteristics of female sex workers in Benin related to  HIV testing history, perceived risk of being infected by HIV, and the intention of
Figure 4.1: Theoretical framework: extended version of Theory of Planned Behaviour. Constructs  inside the circle were added to Theory of Planned Behaviour  (adapted from Ajzen, 1991)
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