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Partie 1 - Le Vieillissement cognitif normal, attention et contrôle cognitif

2. Les ressources et mécanismes impliqués dans les anomalies cognitives observées chez les

2.1. Vieillissement et fonctions exécutives

2.1.2. Vieillissement et fonction de coordination

La capacité de pouvoir coordonner deux activités de manière simultanée est primordiale dans le fonctionnement de la mémoire de travail (MT) et du centre exécutif. Afin de mieux comprendre son fonctionnement, de nombreuses études se sont intéressées à l‟influence de l‟âge sur la fonction de coordination.

L‟étude de l‟effet du vieillissement sur la capacité de coordination en situation dite de double tâche a abouti jusqu‟ici à des résultats divergents. Certaines études observent des performances amoindries chez les personnes âgées (Carpenter, Miyake et Just, 1994 ; Craik et Jennings, 1992 ; McDowd et Shaw, 2000 ; Mayr et Kliegl, 1993 ; Salthouse, 1994), alors que d‟autres constatent une stabilité de la performance (Baddeley et Della Sala, 1996 ; Somberg et

Salthouse, 1982) ou une diminution spécifique de la performance à certaines tâches (Ribaupierre et Ludwig, 2003). Les méta-analyses réalisées effectuées suggèrent néanmoins que le vieillissement est associé à un déficit spécifique de la capacité de coordination (Bopp et Verhaeghen, 2005 ; Riby, 2004 ; Verhaeghen et Cerella, 2002 ; Verhaeghen, Marcoen et Goossens, 1993 ; Verhaeghen, Steitz, Sliwinski et Cerella, 2003). La méta-analyse de Verhaeghen et collaborateurs (2003) a révélé que l‟étape supplémentaire exigée par la gestion simultanée de deux tâches prenait plus de temps chez les adultes âgés que chez les adultes jeunes après la prise en compte du ralentissement estimé sur des tâches simples. Dans une autre méta-analyse, Riby, Perfect et Stollery, (2004) ont aussi trouvé un effet de l‟âge sur la capacité de coordination en situation de tâche duelle tout en constatant que le domaine de tâche semblait médiatiser le coût lié à la coordination (Salthouse et al., 1995).

Les tâches de MT qui exigent simultanément le maintien et le traitement d'informations, montrent aussi des différences importantes liées à l‟âge ; cependant ces différences semblent dépendre du domaine (verbal, spatial) de la tâche (Salthouse et al., 1995 ; Hale, Rose, Myerson, Strube, Sommers, Tye-Murray et Spehar, 2011). En comparant les performances obtenues par des adultes jeunes et âgés sur des tâches de mémorisation simple d‟une part, et de maintien et traitement d‟information d‟autre part, plusieurs études ont observé un effet de l‟âge sur la capacité de coordination verbale (Babcock et Salthouse, 1990 ; pour des résultats contradictoires voir Belleville, Rouleau et Caza, 1998 ; Hale et al., 2011). Belleville et ses collègues (1998) supposent que la divergence des résultats observée est liée - au moins en partie – aux différentes méthodologies employées dans les études (voir aussi Salthouse, Fristoe et al., 1995). Les différences de niveau de performance de base entre personnes jeunes et âgées pourraient en effet jouer en la défaveur des personnes âgées en situation complexe et être ainsi la cause de l‟effet observé. Pour contrôler ce biais, les auteurs manipulent les conditions de passation en ajustant la difficulté de l‟épreuve en fonction du niveau de base des individus recueilli sur des tâches d‟empan simple (Belleville et al., 1998). Dans cette situation, aucune différence n‟est observée entre personnes jeunes et âgées. Pour Belleville et collaborateurs (1998), cette étude montre que les individus âgés présentent des empans généralement moins importants que les adultes jeunes, quand dans les tâches de coordination un traitement supplémentaire est nécessaire. Cet écart pourrait être à l‟origine d‟une adaptabilité moins efficiente des individus âgés en cas d‟accroissement des contraintes contextuelles. Les résultats de Belleville et al. (1998) laissent supposer que la fonction de coordination relative à la manipulation et au traitement d‟information verbale ne semble pas être affectée par le vieillissement quand un ajustement de la tâche est effectué en fonction du

niveau de base des individus. En revanche, en ce qui concerne la capacité à pouvoir coordonner le stockage et le traitement d‟informations visuo-spatiales, de nombreuses études ont observé que les personnes âgées présentaient plus de difficultés que les jeunes adultes sur les tâches de MT à contenu spatial que sur celles à contenu verbal (Bopp et Verhaeghen, 2007 ; Hale et al., 2011 ; Jenkins, Myerson, Hale et Fry, 1999 ; Jenkins, Myerson, Joerdin et Hale, 2000 ; Myerson, Hale, Rhee et Jenkins, 1999 ; Verhaeghen et Cerella, 2002). Cependant Jenkins et collaborateurs (2000) supposent que ce résultat serait le résultat d‟une plus grande sensibilité au vieillissement du domaine visuo-spatial que verbal. Dans ce sens, un nombre important d‟études a montré un déclin de l‟aptitude spatiale avec le vieillissement (voir Van der Linden et Hupet, 1994), ce qui laisse supposer que « l‟âge aurait un effet différentiel dans l‟une ou l‟autre de ces dimensions » (traduit de Bopp et Verhaeghen ; 2007).

Les études s‟étant intéressées à l‟effet du vieillissement sur la fonction de coordination sont donc relativement contradictoires. Plusieurs facteurs semblent être à l‟origine de la divergence des résultats observés dont en particulier les dimensions sur lesquelles porte la tâche. En effet, les études de Belleville et collaborateurs (1998) et Hale et al. (2011) laissent supposer que l‟aptitude à pouvoir coordonner la manipulation et le traitement d‟informations verbales ne semble pas être affectée par le vieillissement quand le niveau de base des individus ou le ralentissement est contrôlé. En revanche, la capacité de coordination dans le domaine visuo-spatial semble davantage sensible au vieillissement (Hale et al., 2011). Ces observations conduisent à penser que le vieillissement a un impact spécifique sur la capacité de coordination selon le domaine d‟étude, rejetant par la même occasion l‟hypothèse d‟une capacité générale de coordination (Ribaupierre et Ludwig, 2003). La méta-analyse de Bopp et Verhaeghen (2005) portant sur des tâches duelles indique néanmoins un effet de l‟âge sur la capacité à pouvoir coordonner des tâches. D‟autres facteurs semblent influencer l‟observation d‟un effet de l‟âge et pourraient expliquer la diversité des résultats : la méthode de calcul des coûts employée et la complexité de la tâche. D‟une part, selon Somberg et Salthouse (1982), le coût cognitif mesuré varie si le niveau de performance des individus âgés dans les conditions de base est pris en compte. Des coûts supérieurs sont mesurés si le calcul repose sur une différence plutôt que sur un ratio ou des scores résiduels par exemple (Ribaupierre et Ludwig, 2003). D‟autre part, la différence de niveau de difficulté des paradigmes semble pouvoir expliquer une part de la diversité des résultats observés (McDowd et Craik, 1988). Quand un traitement contrôlé ou des composantes motrices plus exigeantes sont nécessaires pour la réalisation de la tâche, le déficit qui est observé est plus important qu‟en situation de traitement plus automatisé.