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1.2 Problématique

1.2.2 Vers l‟exploration de nouvelles pratiques éducatives en IPE

& Saada-Robert, 2002), nous y reviendrons plus loin. Le constat découlant de ces travaux en littéracie soulignent l‟hypothèse qui est au centre de notre recherche, à savoir que l‟enfant, lorsqu‟il est non seulement exposé dès son plus jeune âge à un environnement littéracique avant son entrée à l‟école, mais surtout lorsqu‟il est engagé dans des activités dirigées de lecture interactive où il est considéré comme un partenaire actif, pourrait avoir plus de facilités dans l‟apprentissage de la lecture/écriture à l‟école. Les pratiques que nous présentons ici résultent, en effet, de ce constat que plus l‟enfant participe activement à l‟élaboration du récit, répond aux questions de l‟adulte, etc., meilleure sera son aisance avec le monde de l‟écrit, tant au niveau du développement lexical oral, qu‟au niveau de l‟acquisition de la langue écrite. Nous avons analysé aussi comment les acteurs de la situation de lecture interagissent, à travers la médiation de l‟adulte, en l‟occurrence l‟éducateur en IPE.

La lecture interactive ici suppose de considérer que la compréhension du récit se construit non pas sur la base uniquement de ce que le livre donne à comprendre. Le sens du récit est construit à partir de l‟interaction entre différents éléments: ce que le livre donne comme indices dans les images, le texte, dans son organisation et les éléments qui se rapportent à l‟intention de l‟auteur/illustrateur. Le sens se construit à partir aussi de la médiation de l‟adulte: ce sur quoi il s‟arrête, commente avec le ou les enfants, les réponses à leurs questions, etc. Et il y a aussi ce qui vient de l‟enfant lui-même, ce qui lui parle, ce qui pour lui a du sens, à partir de ses connaissances antérieures, etc.

1.2.1 Un dispositif de recherche pour implémenter de nouvelles pratiques éducatives en IPE C‟est ici que peut commencer le travail du didacticien consistant à proposer et à tester des solutions5 en étroite collaboration avec les partenaires de terrain (Bronckart & Schneuwly, 1991). Ces solutions seront construites à partir des savoirs théoriques reconnus, des emprunts issus de plusieurs disciplines de référence, en particulier à la didactique du français et des informations recueillies (Navarro-William, 2005) concernant les pratiques éducatives effectives de lecture en IPE. L‟ingénierie didactique a comme bénéfice de cumuler une double visée majeure. La première consiste à élaborer des moyens d‟enseignement qui puissent perdurer au-delà de la recherche menée, or nous savons que dans les pratiques éducatives en IPE, ces moyens manquent. La deuxième est de constituer un point d‟appui expérimental pouvant engendrer des réponses théoriques pour les IPE.

1.2.2 Vers l’exploration de nouvelles pratiques éducatives en IPE

La thèse présentée ici se propose d‟approfondir cette question en étudiant longitudinalement, de manière comparative, les répercussions de deux pratiques différentes de lecture/écriture observées en IPE, sur l‟entrée dans l‟écrit en première année du cycle scolaire élémentaire.

Ces deux pratiques sont la « lecture/écriture émergente » (LEE, voir Saada-Robert, Auvergne, Balslev, Claret-Girard, Marzurczak & Veuthey, 2003) et la « lecture/écriture récréative » (LER) basée sur la « lecture à haute voix » (Brabham, 2002) ou le « regular reading » (Sénéchal, 2000), complétée d‟une activité d‟écriture6.

Concrètement la lecture/écriture émergente (LEE) consiste en une lecture interactive, où l‟adulte montre progressivement les images d‟un album de littérature enfantine (texte et images) en sollicitant les enfants à formuler des hypothèses sur le contenu narratif. Cela veut dire que les questions de l‟éducateur visent à amener les enfants à non pas seulement décrire

5 Voir dispositif de recherche section 7.2.1

6 Nous développons les pratiques de LEE/LER au point 2.6 du chapitre 2 ainsi que dans le cadre méthodologique.

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ce qu‟ils voient sur les images (Qu‟est- ce que tu vois? Qu‟est-ce que c‟est?, etc.) Mais à les aider à faire des liens inférenciels entre les images, à relever les événements pertinents pour comprendre le récit, sur le plan de l‟enchaînement temporel et des relations de cause à effets (relever les causes et conséquences des actions principales) et à anticiper la suite du récit en faisant des hypothèses (Qu‟est-ce qui va se passer ensuite?). Il s‟agit de construire la compréhension du récit, ensuite vérifier les hypothèses par la lecture du texte. La compréhension est un élément clé de l‟éveil à l‟écrit, avant de passer à l‟apprentissage formel de la lecture/écriture à l‟école.

La lecture récréative quant à elle, consiste en une lecture « à haute voix » en continu par l‟adulte pour faire plaisir aux enfants. Ces deux pratiques (LEE/LER) sont analysées dans leur fonctionnement même à travers les interactions éducateur-enfants et selon leur impact sur les connaissances stabilisées des jeunes enfants. Enfin, pour établir un bilan des compétences intériorisées à partir des interactions en IPE, et donc pouvoir comparer les répercussions de chacune des deux pratiques de lecture/écriture, une série d‟épreuves psycholinguistiques portant sur la reconnaissance visuelle de mots et de lettres sont proposées aux enfants, d‟abord en IPE puis en première année du cycle élémentaire.

1.3 Contexte Institutionnel de la recherche

Nous choisissons d‟observer les processus d‟acquisition des connaissances, particulièrement la dimension didactique de cette acquisition, autrement dit, l‟étude triadique de la construction des savoirs d‟enseignement/apprentissage de la littéracie émergente dans le cadre de notre thèse, en lien avec l‟échange ou la négociation des significations entre partenaires (éducateur-enfants) en temps et en lieu réels en IPE. En effet, un certain nombre de recherches qui ont alimenté les développements conceptuels de la perspective située (Lave & Wenger, 1991) portent sur ce champ disciplinaire dans des travaux liés à la notion de microculture de classe (Mottier-Lopez, 2005) dans le cadre de l‟enseignement/apprentissage des mathématiques à l‟école primaire ou dans d‟autres recherches comme les travaux de Rieben et Saada-Robert (1997) ; Saada-Robert et al. (2003) ; Balslev (2006). Il nous paraît intéressant de s‟appuyer sur les travaux effectués dans ce domaine car ces travaux font référence à la psychologie génétique soulignant la construction des connaissances au travers des interactions avec l‟environnement et à la psychologie sociale mettant en exergue, la fonction des interactions sociales dans le développement cognitif.

L‟IPE concernée par notre recherche est implantée dans le canton de Genève. L‟éducatrice qui a plus d‟une vingtaine d‟année d‟expérience professionnelle, manifeste d‟emblée un rapport positif aux moyens didactiques introduits. Notre observation s‟est déroulée tout au long d‟une année scolaire et demie, nous avons étudié les processus de construction de connaissance qui portent sur un contenu de savoir spécifique, la littéracie. La microgenèse didactique nous amène à analyser par quels gestes professionnels l‟éducatrice et les enfants construisent-ils une zone de compréhension commune (Saada-Robert & Baslev, 2004), ainsi que les similitudes et différences des deux pratiques de lecture, LEE et LER7.

Il s‟agit d‟une Garderie (placement des enfants à temps partiel de une à trois demi-journées par semaine) implantée comme mentionné plus haut, dans une commune genevoise périphérique, dans un quartier à population pluriculturelle. Cinq éducateurs, et deux

7 Ces éléments sont développés dans le chapitre 6, au point 2.

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auxiliaires constituent l‟équipe qui accueille 120 enfants environ sur la semaine, répartis en trois groupes d‟âge (0-2 ans) (2-3 ans) (3-4 ans). L‟institution travaille en deux temps avec deux groupes d‟enfants différents. Plus précisément, elle accueille 24 enfants de 8h à 11h45, l‟après-midi un autre groupe de 24 enfants de 13h30 à 17h15, encadrés par quatre éducateurs et auxiliaires. La responsable assume plusieurs rôles dans l‟institution. Elle est responsable pédagogique, gère le personnel, accueille les inscriptions et les familles, elle est aussi co-responsable avec la comptable de l‟administration, des questions de budget et représente l‟institution auprès des autorités et intervenants extérieurs, Mairie, Protection de la Jeunesse, Guidance infantile, Service de Santé de la Jeunesse, Service Educatif Itinérant. Afin d‟assumer pleinement sa mission, l‟équipe éducative se réunit pour des colloques hebdomadaires dans le but de prévoir le planning des activités et pour échanger sur les difficultés rencontrées avec les enfants ou leurs familles et essayer de trouver ensemble une solution aux problèmes. Le comité formé de parents bénévoles est l‟organe décisionnel et l‟employeur de l‟institution. Les membres se réunissent toutes les six semaines pour discuter les affaires courantes ayant trait au fonctionnement de la Garderie.

1.4 Enjeux de la recherche

« Devenir un bon lecteur, c‟est l‟affaire de tous » : tel était le titre d‟un forum sur la lecture tenu à Genève en 2004. A ce propos, Charles Beer (2005), chef du Département de l‟Instruction Publique genevois souligne :

Une véritable offensive est lancée dès l‟enseignement primaire pour accroître la motivation des élèves et l‟apprentissage « en continu » de la lecture et de l‟écriture, compétences conjointes et nécessaires dans tous les domaines […] L‟école est publique et donc ouverte à chacun sur un pied d‟égalité : pour cela, elle renforce le dialogue pour se rapprocher des familles très marginalisées et lutter ainsi contre l‟échec scolaire. (p. 5)

1.4.1 Quelques constats alarmants

En effet, il s‟avère que les résultats de l‟enquête PISA 2000 (Nidegger, 2001, p.121) confirment que 11% des élèves de 9e année de Suisse Romande sont « seulement capables de repérer un élément simple, d‟identifier le thème principal d‟un texte ou de faire une connexion simple avec des connaissances de tous les jours ». Mais ce constat n‟est pas seulement le problème de l‟école genevoise ! Il s‟inscrit bien dans un contexte plus large, car bon nombre de recherches récentes relatent les problèmes rencontrés par de nombreux adultes des pays industrialisés face à la langue écrite (Lurin & Soussi, 1998). Si certaines de ces personnes peuvent être considérées comme analphabètes (ne sachant pas lire et écrire parce qu‟elles n‟ont pas été scolarisées, notamment lorsqu‟elles sont originaires de pays qui ne sont pas encore parvenus à une alphabétisation complète), nettement plus nombreuses sont celles qui ont fréquenté l‟école, y compris parmi les natifs des pays occidentaux, qui ont donc reçu un enseignement en lecture et en écriture, sans pour autant avoir pu acquérir ni stabiliser les notions et les pratiques leur permettant de communiquer par écrit de manière autonome, dans un cadre social toujours plus exigeant. On parle alors d‟illettrisme. En 1990, on estimait à 10% la proportion de la population des pays industrialisés relevant de l‟illettrisme (Lurin &

Soussi, 1998).

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Ce constat général soulève le problème de l‟évaluation du « savoir lire et écrire » : à partir de quelle frontière peut-on affirmer que quelqu‟un sait lire ou ne sait pas ? En 1978, l‟UNESCO a défini l’analphabétisme fonctionnel en référence à « une personne incapable d‟exercer toutes les activités pour lesquelles l‟alphabétisation est nécessaire, dans l‟intérêt du bon fonctionnement de son groupe et de sa communauté et pour lui permettre de continuer à lire, écrire et calculer en vue de son propre développement et de celui de sa communauté » (Besse, Potel & Servant-Odier, 1989, p. 3). S‟agissant aussi bien de l’état des compétences actuelles d‟une personne, que de ses capacités à développer et à poursuivre son apprentissage, il devient alors difficile de situer une frontière nette entre l‟illettrisme et l‟analphabétisme fonctionnel.

1.4.2 Nécessité d’une exposition précoce à l’univers de l’écrit

Il ressort des multiples recherches entreprises sur la lecture et l‟écriture que leur apprentissage se prépare longuement au cours de l‟enfance, lors d‟un processus qui repose sur des racines précoces (Dickinson & Smith, 1994 ; Elster, 1994 ; Ferreiro, 1988 ; Perfetti, Rieben & Fayol, 1997). Par ailleurs, l‟acquisition de la lecture/écriture résulte de plusieurs éléments qui agissent en interdépendance les uns avec les autres : les connaissances antérieures du lecteur/scripteur (connaissances langagières à l‟oral et à l‟écrit), les caractéristiques du contexte économique et culturel et celles du micro-contexte de la situation de lecture, et finalement les propriétés des textes lus/produits et de leur genre textuel (Coirier, Gaonac‟h. &

Passerault, 1996).

Cette recherche va justement permettre de répondre à la demande de prévention contre l‟illettrisme et d‟un meilleur engagement du jeune élève dans l‟apprentissage de la littéracie.

A une période où le système éducatif dans son ensemble et l‟école en particulier sont interpellés par les résultats des enquêtes internationales, la pratique de la lecture/écriture émergente comparée à celle de la lecture/écriture récréative, plus familière dans le contexte des IPE surtout chez des enfants où la lecture n‟est pas ancrée dans une pratique familiale régulière (Neuman & Dickinson, 2003 ; Saada-Robert et al., 2003), pourrait contribuer à favoriser l‟acquisition ultérieure de la langue écrite à l‟école. Précisons d‟emblée qu‟il ne s‟agit nullement d‟implanter un « apprentissage précoce » de la lecture et de l‟écriture, mais plutôt de montrer les pistes d‟une mise en condition qui permette à l‟enfant de comprendre un récit sur la base d‟un album de littérature enfantine et lui permette d‟« écrire » un message, du point de vue des gestes quotidiens et partagés en IPE.

1.5 Les Paris d’une exposition à l’album de littérature enfantine 1.5.1 Epanouissement affectif et social

La première rencontre avec le livre est avant tout un moment de partage affectif et social lors de la lecture partagée avec l‟adulte- le ou les parents- le plus souvent. Un moment de proximité physique dans les bras de son ou ses parents: l‟occasion pour l‟enfant de se faire bercer par cette voix et de l‟intérioriser, l‟occasion aussi de partager l‟attention sur un même objet et de faire un petit voyage ensemble dans l‟univers de l‟histoire proposée, dans un ailleurs au niveau spatio-temporel. Un autre pari est celui de l‟intégration sociale : le livre véhicule des valeurs socioculturelles et permet de pallier les inégalités, lors de la scolarisation, liées aux différences culturelles quant à la présence du livre et à l‟utilisation de ce dernier dans différents milieux socioculturels.

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1.5.2 Le monde du livre et le développement du langage

Un autre grand pari est bien sûr le développement du langage. Diverses activités permettent le développement du langage, qui est essentiellement un acte de partage et de communication concernant le sens que chacun donne à ce qu‟il vit, à ses expériences et à ce qu‟il comprend du monde autour de lui. On lit pour faire plaisir aux enfants car l‟activité de lecture correspond au partage d‟un moment de convivialité, aussi bien relationnelle que langagière et ludique. Entendre raconter une histoire, c‟est se livrer aux plaisirs de la parole, au plaisir des mots qu‟on découvre et avec lesquels on joue, des mots qui ont de jolies sonorités et qui font naître des émotions et des images mentales. Entrer dans un récit c‟est entrer dans un ailleurs qui amène l‟enfant dans le monde de la représentation et des inférences, hors de l‟ici et du maintenant et l‟aide à développer un langage de plus en plus abstrait, au delà de la simple description ou dénomination locale d‟objets présents dans son champ de vision immédiat.

1.5.3 Les grandes lignes du développement langagier de l’enfant préscolaire

Un bref détour est ici nécessaire pour pointer chaque élément du développement langagier en jeu dans les activités de lecture en IPE. Le langage à l‟âge préscolaire peut être étudié à travers l‟acquisition du répertoire phonologique de la langue, le développement lexical, les relations sémantiques et le développement morphosyntaxique, la production de discours cohérents et finalement les aspects pragmatiques de la communication (Rondal, Esperet, Gombert, Thibault & Comblain, 1999). Entre 1,5 et 4 ans, le vocabulaire, les principes de la langue maternelle c‟est-à dire la grammaire implicite et sa syntaxe s‟acquièrent de façon progressive mais très rapide. L‟enfant non seulement imite les adultes, il produit aussi de la syntaxe en appliquant les règles qu‟il a intégré. A partir de 3 ans, il apprend environ cinq à dix mots de vocabulaire par jour, il connaît de façon spontanée une grande partie de la syntaxe orale de sa langue maternelle alors qu‟il est encore loin de pouvoir lacer seul ses chaussures.

Au niveau de la production phonologique, c‟est vers la troisième année que l‟enfant se fait généralement comprendre et l‟articulation s‟améliore encore à quatre ans, malgré quelques omissions et distorsions. A cinq ans, l‟enfant est capable de produire correctement la plupart sinon tous les sons de sa langue maternelle (Rondal et al., 1999). L‟acquisition lexicale, quant à elle, connaît une véritable « explosion de vocabulaire », à partir de la moitié de la deuxième année, avec un décalage entre production et compréhension, cette dernière étant souvent plus précoce (Bassano, 2003). Au niveau de l‟acquisition du sens des mots, de nombreuses recherches tentent de cerner comment l‟enfant fait correspondre les mots avec les événements du monde réel, en étudiant la mise en relation de mots comme la sous-extension ou la sur-extension (Bassano, 2003) ou la contrainte taxinomique (Rondal et al., 1999). Si le lien entre le développement lexical et le développement phonologique est bien connu, la relation avec le développement grammatical est complexe et fait l‟objet de nombreuses recherches (Bassano, 2003). La mise en relation de différentes énoncés sous-tend l‟organisation du discours, ainsi que l‟utilisation par l‟enfant du langage de manière décontextualisée (Rondal et al., 1999). Le maintien de la référence aussi bien temporelle que spatiale dans le discours se développe graduellement (Hickmann, 2004, p.106). Karmiloff-Smith (1986) distingue ainsi trois phases de développement : 3-5ans, 5-8 ans et 8-12 ans, pendant lesquelles l‟enfant apprend à maîtriser l‟usage multifonctionnel des marques linguistiques spatio-temporelles. En plus de la cohérence du discours, l‟enfant acquiert aussi une autre compétence : connaître et savoir modifier son discours en fonction du contexte de communication ainsi que du destinataire. En mettant en évidence différents niveaux d‟ajustement du discours, plusieurs recherches ont

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montré la capacité qu‟a l‟enfant, dès 4 ans, de comprendre l‟état mental du destinataire (Bernicot, 2004). Nous élaborons au chapitre suivant les aspects du langage liés à la production et à la compréhension d‟inférences inhérents à la « compétence narrative » (Paris

& Paris, 2003), après avoir présenté les pratiques littéraciques au préscolaire.

1.5.4 La langue de récit: une passerelle entre le langage oral et le langage écrit

Le genre de livres le plus fréquemment utilisé pour la lecture partagée entre un adulte et un enfant non lecteur est le livre d‟images ou album. Les albums se présentent le plus souvent sous la forme d‟un récit où le texte et les illustrations contribuent tous les deux à l‟élaboration du récit. Ce qui aide l‟enfant à développer un langage abstrait qu‟est la langue de récit: c‟est-à-dire hors de l‟ici et maintenant. Ce langage de récit est une sorte de passerelle permettant le passage graduel du langage oral vers le langage écrit. Ce langage « décontextualisé », se développant graduellement, implique le développement de certaines capacités mentales permettant une mise en relation de différents moments du récit: d‟abord la relation de temps (Ducret, 2008) ; le récit donne à l‟enfant un cadre spatio-temporel précis. Il apprend à situer dans l‟espace les phases d‟une action et à en suivre le déroulement chronologique et permet donc de comprendre l‟enchaînement des événements et aussi la relation de causalité, qui concerne le rapport de cause à effet entre les différents événements du récit.

1.6 Cadres épistémologiques, fondements de référence et présupposés théoriques

Plusieurs cadres épistémologiques interviennent dans notre recherche. C‟est ainsi que les modèles de la didactique, parce qu‟ils traitent du savoir et des connaissances construites à partir des situations (nous y reviendrons ultérieurement), constituent pour nous un cadre contributif incontournable, la didactique implique que le savoir en jeu constitue un pôle aussi important que le sont ceux de l‟enseignant et de l‟apprenant (Bronckart & Schneuwly, 1991), toute didactique vise la compréhension du rapport entre l‟enseignement et l‟apprentissage d‟un objet spécifique et « se questionne sur les modalités de la médiation en classe, comme sur les modalités de transmission culturelle des objets d‟enseignement » (Dolz & Thévenaz-Christen, 2002); le cadrage proposé par la didactique comparée (Schubauer-Leoni, 2002) permet d‟importer des concepts qui, a priori, n‟ont pas été pensés pour observer ce qui se passe en dehors de l‟école. Depuis quelques années, des chercheures (Munch, 2009 ; Leutenegger & Munch, 2002 ; Schubauer-Leoni, Munch & Kunz-Félix, 2002) proposent de

Plusieurs cadres épistémologiques interviennent dans notre recherche. C‟est ainsi que les modèles de la didactique, parce qu‟ils traitent du savoir et des connaissances construites à partir des situations (nous y reviendrons ultérieurement), constituent pour nous un cadre contributif incontournable, la didactique implique que le savoir en jeu constitue un pôle aussi important que le sont ceux de l‟enseignant et de l‟apprenant (Bronckart & Schneuwly, 1991), toute didactique vise la compréhension du rapport entre l‟enseignement et l‟apprentissage d‟un objet spécifique et « se questionne sur les modalités de la médiation en classe, comme sur les modalités de transmission culturelle des objets d‟enseignement » (Dolz & Thévenaz-Christen, 2002); le cadrage proposé par la didactique comparée (Schubauer-Leoni, 2002) permet d‟importer des concepts qui, a priori, n‟ont pas été pensés pour observer ce qui se passe en dehors de l‟école. Depuis quelques années, des chercheures (Munch, 2009 ; Leutenegger & Munch, 2002 ; Schubauer-Leoni, Munch & Kunz-Félix, 2002) proposent de