• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 3 : UNE APPROCHE CONCEPTUELLE PLURIELLE

3.3 Le système didactique

Les analyses didactiques s‟intéressent traditionnellement à ce qui se joue quand les enseignants interviennent auprès d‟élèves auxquels il s‟agit d‟enseigner des savoirs définis par l‟institution scolaire (Chevallard, 1985/1994 ; Dolz & Schneuwly, 2002). Dans le cadre de notre recherche, c‟est le fonctionnement du système didactique qui nous intéresse tout particulièrement, surtout depuis qu‟il a été étendu récemment à l‟analyse des pratiques éducatives en général. Plus précisément, le cadrage proposé par la didactique comparée (Schubauer-Leoni, 2002) permet d‟importer des concepts qui, a priori, n‟ont pas été pensés pour observer ce qui se passe en dehors de l‟école. Depuis quelques années, certains chercheurs (Munch, 2005, 2009 ; Schubauer-Leoni, Munch & Kunz-Félix, 2002) proposent de transposer au milieu préscolaire et plus particulièrement dans le contexte institutionnel de la petite enfance les trois pôles du système scolaire élève-enseignant-savoir disciplinaire qui

43

deviennent dès lors : un pôle « enfant », un pôle « éducateur » et un pôle « objet enjeu de la co-présence des deux autres pôles » (Munch, 2005, p. 1). Ce dernier peut être constitué par des objets physiques, mais en même temps, par des objets liés à la motricité ou des objets symboliques et langagiers, susceptibles de véhiculer des notions appropriées. Plus précisément dans la situation de lecture/écriture émergente, ce sont les connaissances que le jeune enfant va construire à travers la lecture avec la médiation de l‟éducateur. Soulignons que pour l‟enseignement/apprentissage scolaire les trois pôles du système s‟inscrivent dans un contrat didactique (Brousseau, 1986), défini comme « l‟ensemble des règles qui spécifient la place de chacun des trois termes du système didactique et qui organisent leurs relations » (Bronckart & Schneuwly, 1991, p. 19). Ces trois pôles pris de façon croisée génèrent des analyses dynamiques, celles qui pourront rendre compte du fonctionnement littéracique, puisque les trois instances évoluent de façon interdépendante et solidaire. Pour saisir et comprendre l‟évolution dynamique de ce système triadique, le champ constitué par l‟étude des microgenèses (nous y reviendrons ultérieurement) s‟avère particulièrement approprié.

3.3.1. Le pôle du savoir

La transposition didactique (Chevallard 1985, 1994) concerne les processus de transformations qui caractérisent les passages entre différents états de savoir : les savoirs scientifiques et les pratiques sociales de référence dans un domaine donné (objet de savoir), les contenus à enseigner qui en sont dégagés (objet à enseigner), puis leur autonomisation en contenus d‟enseignement dans un curriculum particulier (objet d‟enseignement) (Jonnaert, 1988). Les étapes qui nous intéressent ici sont celles allant de l‟objet à enseigner à l‟objet approprié (Aeby Daghé & Dolz, 2008). Ces étapes sont inter-reliées : l‟objet enseigné ne dépend pas seulement de l‟objet d‟enseignement mais également des stratégies des apprenants et des interventions de l‟enseignant/éducateur. Le savoir est ici pris dans une acception plus large qu‟elle ne l‟est dans la théorie de la transposition didactique, puisqu‟elle englobe tant les savoirs issus de la communauté scientifique que les pratiques sociales de référence (Caillot, 1996). Les savoirs sont transposés dans des situations didactiques, définies ci-après.

Situation didactique ou tâche ?

Brousseau (1986) définit la situation didactique comme une « situation où on peut repérer un projet social de faire approprier par un élève/enfant un savoir constitué ou en voie de constitution. » (p. 54). Ainsi, nous parlons de situation didactique pour désigner le contexte et aussi l‟ensemble des caractéristiques de la situation par lesquels l‟enfant construit des connaissances, ici littéraciques, en y repérant le savoir en jeu et le projet social. Il s‟agit ici plus concrètement de la situation de lecture/écriture émergente et lecture /écriture récréative.

Nous parlons de situation plutôt que de tâche en raison de l‟analyse que nous en faisons. En effet, la situation dépasse le simple dispositif pour prendre en compte ses liens avec les deux autres pôles du système didactique, même si chez Brousseau (1986) ces derniers ne sont pas analysés dans toutes leurs dimensions ; son analyse tient compte du savoir formel qu‟elle contient, de l‟analyse de la transposition par l‟enseignant ou l‟éducateur et de la manière dont elle fonctionne chez l‟apprenant (Saada-Robert & Mazurczak, 2002, Balslev, 2006). Dans l‟analyse de la situation de lecture/écriture émergente nous nommerons les composantes du savoir que la situation permet d‟activer ; les composantes que l‟enfant a effectivement mobilisées lors de sa lecture émergente, et les objectifs de l‟éducateur. Il convient à ce sujet de mentionner les travaux de Brossard (1998) qui pose la nécessité de réinterroger les transformations qui s‟opèrent lors du passage des formes quotidiennes aux formes plus institutionnalisées d‟apprentissage. Il distingue, en effet, les situations informelles des

44

situations formelles16 d‟apprentissage. La distinction essentielle entre ces deux situations se situe dans la question du sens. En effet, dans les premiers, les séquences d‟apprentissage

« (…) sont de toutes parts irriguées par les significations des situations quotidiennes dans lesquelles elles s‟inscrivent.» (p. 41) alors que :

Les situations formelles se caractérisent au contraire par le fait d‟avoir pour finalité explicite la transmission des savoirs. Ces situations nouvelles sont instituées et organisées de part en part en vue de cette fin. Mais du même coup ces situations deviennent moins lisibles par les enfants qui risquent ne pas en voir la finalité sociale (qui n‟est plus différée). (p. 41)

Pour notre part, dans l‟analyse du déroulement des situations effectives d‟enseignement/apprentissage nous accordons un intérêt particulier aux significations mobilisées dans la situation ou qui émergent de cette situation car elles constituent le lieu de rencontre entre savoir enseignant/apprenant, plus précisément, dans le cas de la situation éducative qui nous occupe, la possibilité de rencontre entre les significations véhiculées par les objets d‟enseignement présentés en IPE à travers un dispositif précis comme par la médiation de l‟éducatrice et les significations que les enfants sont à même de leur attribuer, étant donné leurs connaissances antérieures.

Si les significations tiennent une place prépondérante dans l‟acquisition des connaissances, dès le plus jeune âge, en quoi consistent-elles ? Qu‟ce qu‟une signification? Comment est-elle envisagée dans les interactions éducateur-enfant ? Comment les deux partenaires, l‟éducateur et l‟enfant-le groupe d‟enfants- participent-ils à sa construction ? Quel est le rôle des significations dans le processus d‟enseignement-apprentissage ? Afin de mieux saisir la notion de « signification », nous allons faire le tour de quelques auteurs l‟ayant défini, conceptualisé ou problématisé dans le contexte de l‟enseignement-apprentissage.

Significations et situation d’enseignement-apprentissage

Dans le cadre de notre travail l‟usage du terme signification est interactive et dépendante du contexte c‟est-à-dire dans une relation dialectique avec le monde social et les personnes en activité dans ce monde (Lave, 1991 ; Lave & Vanger, 1991), contrairement à la connaissance qui présente un caractère stable (Saada- Robert & Baslev, 2004). Moro et Rickenmann (2004) distinguent une double posture dans la définition de la signification, selon que l‟on focalise certains pôles de la situation éducative, et ajoutent qu‟une cohabitation des deux postures peut se faire avec des accentuations particulières au sein des différents travaux. D‟une part, la posture interactionniste d‟origine anglo-saxonne envisage la signification comme le produit des interactions sociales. Les tenants de cette posture mettent l‟accent sous l‟angle interactionnel et de co-construction des significations et des contextes, par exemple, (Grossen, 1999 ; Barbier, 2000).

La deuxième posture, plutôt issue de l‟Europe continentale, tend à saisir la signification telle qu‟elle apparaît au travers des pré-construits culturels (approche didactique et paradigme historico-culturel vygotskien). Les représentants de cette posture, par exemple, Bronckart et Schneuwly (1991) soulignent que « chaque objet d‟enseignement a une signification (qui résulte notamment de son mode d‟insertion historique et synchronique- dans les différents systèmes) ; ensuite que l‟apprentissage consiste en une reconstruction, par l‟élève, de cette signification et donc en une appropriation (…) » (p. 17).

16 Notion de « formelle » « informelle », comme vu dans le chapitre 2 dans la section 2.6.

45

A l‟instar de nombre d‟auteurs (notamment, Goigoux, 2001), nous considérons que l‟enseignant/éducateur- comme l‟apprenant attribuent des significations aux objets de savoir ; et l‟optique adoptée dans le cadre de notre travail s‟inscrit dans une perspective didactique, qui considère l‟objet de savoir comme central pour l‟analyse des interactions.

La signification en contexte d‘enseignement-apprentissage

L‟apprentissage consiste en une appropriation des significations recélées dans l‟objet d‟enseignement (Bronckart & Schneuwly, 1991). Pour d‟autres auteurs, la signification est avant tout le fruit d‟une reconstruction (Bernié, 2002 ; Brossard, 1998 ; Grossen, 1999).

Ainsi, chacun des partenaires didactiques participe à la co-construction de significations partagées ou d‟un espace socio-discursif de partage de significations. Comment appréhender le processus de co-construction de significations ? Moro et Rodriguez (2005) s‟interrogent aussi sur la manière méthodologique, de saisir le processus de la construction ou de la reconstruction des significations « le postulat d‟une reconstruction possible des significations socio-historiquement élaborées permettant de comprendre comment les significations externes recélées dans les construits sociaux sont transmises et progressivement appropriées (ou reconstruites) par les sujets apprenants pour s‟instituer, à terme, comme part de leur répertoire interne. La question qui se pose centralement est celle des modèles et méthodologies permettant de saisir le procès de (re) construction des significations au sein de la situation éducative et ce, dans sa complexité d‟ensemble. ». (p. 8). Le terme de signification dans le cadre de notre recherche se définit par distinction à la notion de connaissance (cf. plus loin fig.1). Alors que la connaissance présente un caractère stable, la signification par contre dépend du contexte et est locale (Balslev, 2006). L‟apprenant attribue des significations aux objets de savoir selon le moment de son utilisation contextuelle (Saada-Robert & Balslev, 2004). « Les significations contribuent ensuite à la construction de connaissances stables.

Comme les significations émanent du contexte, c‟est lors du déroulement même de la situation didactique qu‟elles se recèlent » (ibid p. 55). Dans le cadre de notre recherche nous nous intéressons plus particulièrement à la rencontre entre « deux instances de significations » (Brossard, 1998), celle de l‟éducateur et celle de l‟enfant ou groupe d‟enfants débouchant sur une construction de connaissance chez l‟enfant (Balslev & Dezutter, 2008)

3.3.2 Le pôle de l’apprenant/enfant

En sciences de l‟éducation, une place croissante est accordée à l‟analyse de l‟activité d‟enseignement au niveau scolaire. En effet, les travaux qui traitent cette problématique sont aujourd‟hui abondants. Cependant on constate un nombre moins important consistant à décrire les apprentissages, Des auteurs (Saada-Robert et al., 1996 ; Rieben & Saada-Robert, 1997) ont étudié les pratiques d‟apprentissage en situation de classe, dans des recherches visant à comprendre les processus d‟apprentissage de la littéracie. Les observations se sont focalisées sur des enfants dans des situations didactiques d‟entrée dans l‟écrit. Elles utilisent le concept de stratégie, emprunté à la psychologie cognitive et qui se définit comme

« l‟organisation mentale de plusieurs connaissances, organisation permettant leur enchaînement orienté en fonction du but posé dans un problème à réaliser. » (Saada-Robert et al., 1997, p. 22). A ce niveau, il est important de relever la manière dont l‟apprenant s‟y prend pour s‟engager dans la tâche à réaliser, la façon dont il s‟y prend pour interagir avec l‟enseignant/l‟éducateur et des procédures qu‟il met en œuvre pour construire une zone de compréhension commune à lui et à l‟éducateur. Martinet, Balslev et Saada-Robert (2007)

46

parlent à ce propos de « modalité énonciative », ce qui implique d‟appréhender les intentions derrière les énoncés des partenaires et peut contribuer à éclairer le processus de co-construction d‟une zone de compréhension commune et de gestes didactiques.

3.3.3 Le pôle de l’enseignant/éducateur

Selon la thèse de Schneuwly (2000, 2001), le travail de l‟enseignant/éducateur est toujours fondé sur un processus de double sémiotisation. Ainsi pour l‟aménagement d‟un contenu, l‟enseignant se voit obliger d‟une part de présenter l‟objet de savoir grâce à des techniques d‟enseignement en le rendant vivant sous des formes divers (objets, albums, …), et d‟autre part de créer des conditions nécessaires pour que les élèves puissent investir cet objet de savoir. Cela signifie que cet objet de savoir à apprendre est aussi là en tant qu‟objet sur lequel l‟enseignant guide l‟attention de l‟élève par différents canaux sémiotiques (montrer, pointer, mimiques, gestes, manière de dire…), en faisant de ce contenu un objet d‟étude. Comme on le voit les deux processus « rendre présent l‟objet » et « montrer/pointer » sont intimement liés et se définissent réciproquement. Schneuwly (2001) poursuit en avançant l‟hypothèse suivante :

Aussi bien le matériau pour rendre présent l‟objet à enseigner que les formes de guidage de l‟attention sont liés à des disciplines et peuvent et doivent faire l‟objet d‟une description précise et systématique dont nous sommes pour l‟instant très éloignés. (p. 2)

Dans le cadre de notre étude nous gardons l‟ambition de permettre une avancée sur ce genre de problématique sans pour autant prétendre à l‟exhaustivité par rapport à cette question. Pour comprendre l‟action de l‟enseignant, nous disons à la suite de Schneuwly (ibid.) qu‟une tâche (pour nous situation éducative) représente l‟un des outils de l‟enseignant/éducateur pour la transformation des modes de penser, parler et faire de l‟élève/enfant.

Dans le contexte de l‟enseignement/apprentissage en situation formelle, la médiation se traduit en pratiques enseignantes, dispositifs et situations. Dans le cas de la transposition des savoirs, c‟est en effet à l‟enseignant/éducateur de rendre le savoir accessible à l‟apprenant.

Grossen et al. (1997) définissent l‟adulte – ou dans notre cas, l‟éducateur – comme représentant d‟une culture socialement et historiquement située, dont le rôle est de placer les partenaires dans certaines situations et de soumettre aux apprenants une tâche dont la résolution nécessite le recours à ces médiations sémiotiques. L‟enseignant/l‟éducateur et le dispositif didactique ont donc comme fonction de « mettre en scène » le savoir. Dans cette perspective, « l‟adulte et la tâche constituent eux-mêmes des formes de médiation qui étayent l‟activité cognitive des sujets » (p. 237).

Nous considérons avec Balslev (2006) que la médiation sémiotique ne rend toutefois pas compte du rôle de l‟apprenant, si ce n‟est qu‟il doit recourir à ces médiations sans avoir accès à la construction des significations elle-même. Nous postulons alors que cette médiation, à charge de l‟enseignant, doit être étendue à une co-construction dans laquelle l‟apprenant est également engagé. Au sein d‟un contexte de négociation, les significations co-construites assurent simultanément une fonction double : une fonction sociale (inter-psychique) de communication et une fonction cognitive (intra-psychique) de significations et d‟élaboration des contenus de savoir. Ceci, au sens du constructivisme piagétien, qui considère que toute

47

connaissance est le produit d‟une construction interne à l‟apprenant lié aux actions et aux opérations déroulées sur le milieu extérieur (Saada-Robert et al., 1997). Ainsi l‟apprentissage est dépendant de la rencontre possible entre la médiation sémiotique opérée par l‟enseignant et la zone d‟accommodation17 permise par les connaissances antérieures que l‟apprenant active en situation.

Régulations

Pour Saada-Robert, Claret-Girard, Veuthey et Rieben (1997) :

Les régulations consistent en interactions avec les apprenants, interactions qui ont en particulier la caractéristique d‟amener l‟enfant à une progression, ce qui n‟est pas le cas de toutes les interactions (notamment celles qui ne font aucune place aux erreurs). Pour viser une progression, l‟enseignant doit tenir compte à la fois des composantes du savoir qu‟il met en scène dans une situation et des stratégies d‟apprentissage des apprenants, sans quoi il n‟y aura pas « rencontre » entre ces deux éléments. (p. 14)

Il s‟agit donc pour l‟éducatrice de prendre en charge la médiation sémiotique en tenant compte des stratégies de l‟enfant, en faisant fonctionner le système didactique, c‟est-à-dire d‟articuler les processus d‟enseignement/apprentissage. Allal et Saada-Robert (1992) dans une approche de psychologie cognitive introduit les concepts de régulations cognitives et métacognitives intervenant dans la construction des connaissances et dans leur exploitation face à des tâches nouvelles. Dans la perspective formulée par Vygotski (1978), les conduites d‟autorégulation de l‟apprenant se développent par un processus d‟intériorisation, défini, comme « reconstruction » interne de régulations médiatisées au départ par l‟interaction sociale. En situation scolaire [ici : préscolaire] , cette médiation peut provenir des interactions de l‟enfant avec l‟éducateur ou avec un pair plus expert, mais aussi d‟autres formes d‟étayage (scaffolding) assurées par la structure de la situation didactique (consigne, matériel, outils proposés).

D‟après Allal et Saada-Robert (1992) les modalités de régulation interviennent à deux niveaux : celui de l‟acquisition de nouvelles connaissances et celui de la mobilisation et de la gestion des connaissances déjà acquises. Dans le premier cas, les régulations contribuent au dépassement d‟une erreur ou d‟un obstacle et à l‟appropriation d‟un savoir. Dans le second cas, les régulations interactives aident l‟enfant à gérer (mobiliser, mettre en œuvre) ses connaissances existantes dans une situation complexe. En ce sens, la régulation reflète la nécessité pour l‟éducateur d‟appréhender à la fois des stratégies de l‟enfant et du contenu de savoir dans le but d‟une progression. Toutefois se pose la question de savoir comment tenir compte de ces stratégies dans le déroulement même de la situation didactique.

17 Pour rappel, selon Piaget 1975/1977, c‟est le moment où le déséquilibre entre le savoir proposé et les

connaissances acquises de l‟apprenant est le plus bénéfique à l‟apprentissage, dans la mesure où les conflits intra ou intersubjectifs, les problèmes, les contradictions, les lacunes, les arguments, les défis, sont pleinement pris en compte (étape béta de« l‟équilibration majorante »), alors qu‟ils sont ignorés auparavant (étape alpha) ou résolus ensuite (étape gamma). Piaget (ibid) parle d‟ouverture au milieu (béta) ou de fermeture (alpha et gamma) d‟une structure de connaissance.

48 Le guidage interactif

Le guidage interactif prend forme lors de régulations résultant des interventions de l‟enseignant auprès des apprenants (Allal & Saada-Robert, 1992, cité par Balslev, 2006). Il a été formulé à divers reprises par Saada-Robert et ses collègues (Saada-Robert et al., 1997 ; Saada-Robert, Auvergne, Balslev, Claret-Girard, Mazurzak &Veuthey, 2003 ; Saada-Robert, Gamba & Auvergne, 2005) et consiste en régulations spécifiques, qui seraient plus à même de faire progresser l‟apprenant. Saada-Robert et al. (1997) distinguent plusieurs types de guidage dont le guidage interactif :

Le guidage qui consiste en un découpage a priori de la tâche en unité linéaires, à la place de l‟enfant. [Au contraire], dans le guidage interactif, il s‟agit à la fois de déléguer, de dévoluer la construction donc la gestion à l‟enfant et d‟intervenir pour le faire progresser, en fonction de ses représentations et démarches. […]. Dans une perspective constructiviste pour guider l‟élève vers la progression, il [l‟enseignant] doit rencontrer ses représentations, pour s‟ancrer sur elles. Il doit alors trouver un moyen de saisir ces représentations, et c‟est là qu‟interviennent les principes de base de la méthode clinique qui au départ étaient ceux du chercheur. (p. 5)

Dans le but d‟opérationnaliser ce concept et aider les enseignants à le mettre en pratique, une série de principes constitutifs du guidage interactif a été formulée (Saada-Robert et al., 1997 ; Saada-Robert et al., 2003) : celle consistant à ancrer ses interventions sur les représentations et stratégies de l‟enfant ; celle respectant une gestion optimale par l‟apprenant ; celle visant à fournir une aide graduée partant des questions les plus ouvertes (relances), en proposant à l‟apprenant des indices l‟amenant à avancer, tout en lui permettant de garder l‟initiative de la résolution du problème ; celle consistant en la demande de formulation d‟hypothèses suivie de vérifications par l‟enfant ou avec lui, en la demande de justifications, d‟explications métacognitives des représentations et des stratégies utilisées (même pour les réponses correctes), enfin celle amenant les enfants à collaborer et interagir entre eux.