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2.2. Acquisition de la lecture/écriture chez l’enfant

2.2.3. La précocité des apprentissages

Les modèles d‟acquisition de la lecture/écriture sont basés sur des recherches portant sur des conduites d‟enfants de 4-5 ans voire 5-6 ans, mais des auteurs tels qu‟Elster (1994) et Ferreiro (1988, 2000) ont fait porter leurs études plus tôt. Nous choisissons dans cette section de croiser leurs points de vue sur cette entrée précoce de la lecture-écriture.

Les stratégies de lecture/écriture émergente et leur évolution

Elster (1994) dans son analyse de la lecture émergente de 50 enfants d‟âge préscolaire qui

« lisent un livre » en interaction avec un adulte, montre que l‟expérience de lecture des enfants, de même que d‟autres facteurs comme la mémoire, la connaissance du livre, du genre du texte, la correspondance entre les images et le texte déterminent l‟émergence des stratégies de lecture. Quatre types de stratégies de lecture, au sens de la compréhension d‟une suite d‟images et d‟un texte, sont avancés : la lecture par description « dialogique14 » des images puis la description autonome, la narration basée sur les images sans appui sur la structure narrative textuelle suivie ; la narration pseudo-verbatim « comme le texte », la narration verbatim « mémorisation du texte ». Plusieurs de ces stratégies sont utilisées chez un même enfant au cours de sa lecture ; il n‟y a donc pas de « stade » dans cet apprentissage, mais des dominances de stratégies comme chez Rieben et Saada-Robert (1997). Ferreiro (1988), souligne de même la précocité des premières productions d‟écrits vers l‟âge de trois ans, elle insiste sur la psychogenèse de l‟évolution de l‟écrit (Ferreiro, 2000) qui est « influencée mais non entièrement déterminée par l‟action des institutions éducatives » (p. 13-14). Comme le

14 Lecture qui se présente sous la forme d‟une conversation

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montrent ses travaux longitudinaux dans des pays différents et des travaux d‟autres chercheurs, l‟enfant construit des connaissances avant son entrée à l‟école : il s‟approprie l‟écrit : les stratégies de lecture-écriture émergente de l‟enfant sont à comprendre à travers des étapes de cette conceptualisation qu‟elle décline en plusieurs périodes.

1e période : l‟enfant recherche des paramètres distinctifs entre marques graphiques figuratives et non figuratives. Au départ, les signes écrits sont d‟abord traités comme toutes les autres informations visuelles de manière picturale, lettres et images peuvent partager le même espace graphique sans avoir de lien significatif. Ensuite vient la réflexion métalinguistique de la part de l‟enfant en établissant la frontière qui sépare ces deux dimensions dessin et écriture. Les informations écrites, traitées conjointement par les processus pictural, phonologique et sémantique sont mises en relation. Progressivement, les lettres se différencient du dessin, s‟en distancient ; l‟enfant interprète et va développer une habituation aux régularités relatives aux configurations visuo-orthographiques (Pacton, Perruchet, Fayol & Cleeremans, 2001) ; aux mots oraux associés à ces configurations, c‟est-à-dire aux dimensions phonologiques ; aux significations associées à ces configurations, en d‟autre termes aux dimensions lexicales et morphologiques (Marec-Breton, Gombert & Colé, 2005). Cette différenciation langagière constitue l‟un des « signes » importants de la constitution des lettres en tant qu‟objets mentaux substituts.

2e période : l‟enfant construit des modes de différenciation qualitative ou quantitative entre les enchaînements des lettres. Toutefois, cette appellation « lettre » dans ce contexte a un statut de graphèmes non iconique fonctionnant comme lettre, précise encore Ferreiro. Au début de cette période l‟enfant peut produire de vraies lettres (issues du code alphabétique), des chiffres, ou des pseudo-lettres au niveau qualitatif, (les lettres ne peuvent pas être similaires) et au niveau quantitatif (les mots doivent nécessairement contenir un nombre minimum de lettres, à condition qu‟elles soient différentes). Progressivement l‟enfant prend conscience de la logique du système alphabétique et le prend en considération. Il établit des relations entre la totalité et les parties constituantes d‟un mot « […] sans en prendre conscience, l‟enfant tient compte du fait que la norme linguistique parlée, le mot, est aussi composée de parties, tout comme l‟écriture » (p. 40) ; il découvre la correspondance terme à terme ; le mot est décomposable en unités plus petites.

3e période : l‟enfant prend conscience de la segmentation syllabique puis phonémique des mots : il entre dans le système alphabétique.

En ce qui concerne les composantes comme la conscience phonologique et la connaissance des lettres, d‟autres études (Ehri, 1997 ; Treiman & Cassar 1996) montrent que le repérage des rimes et leur production sont une composante qui peut être acquise précocement en même temps que la lecture émergente. Par contre la connaissance des lettres de l‟alphabet et la segmentation en phonèmes sont des composantes qui interviennent plus tardivement et de manière parallèle à la lecture ; elles ne sont pas des pré- requis à la lecture. Contrairement à ces études, des travaux antérieurs de Gomez-Palacio et Ferreiro (1978), et d‟autres recherches plus récentes (Saada-Robert et al., 2003) constatent que les jeunes enfants possèdent déjà certaines connaissances sur les représentations du système alphabétique et sur la fonction de la lecture et de l‟écriture. Cependant lire/écrire ne se réduit pas à identifier ou à orthographier les mots. C‟est aussi être capable d‟extraire la signification qui correspond à ces derniers et le sens du texte qui les intègre (Bentolila, 2006 ; Rieben, 2006).

32 La compréhension narrative et la lecture d’images

Par la médiation de l‟adulte, la lecture interactive de livres d‟images permet, en particulier, aux enfants d‟anticiper le déroulement de l‟histoire (Saada-Robert et al., 2003) et sollicite l‟expression des liens causaux entre les événements du récit (Makdissi & Boisclair, 2004b).

Grossman (2000) définit la compréhension comme un processus qui se construit dans un système symbolique complexe, dans lequel l‟objet texte ne peut être appréhendé sans référence aux « conditions concrètes de la lecture ». De même les « enjeux de l‟interaction dans lesquels l‟acte de lecture prend place, contribuent à infléchir la manière dont est compris et interprété le texte » (p. 30). A l‟intérieur de ce système adulte-enfant-texte, Grossman (2000) distingue ce qui relève d‟une « sémiotique interne » propre aux formes discursives diverses, d‟une « sémiotique externe » au texte et qui relève de la médiation par l‟adulte dans la facilitation du processus d‟appropriation par l‟enfant (p. 8).

Dans le domaine de l‟enseignement et de l‟apprentissage de la littéracie en début de scolarité ou au préscolaire, certaines recherches portent sur la dimension «compréhension» dans la lecture d‟images. Par exemple la recherche de Gamba (2006) montre le rôle de la lecture d‟images dans les processus de compréhension, notamment de la structure narrative (Fayol, 1985, 2004). Gamba (2006) souligne que la compréhension narrative, d‟abord basée sur la structure du récit à l‟oral (Fayol, 1985) est ensuite centrée sur l‟écrit, c‟est-à-dire le texte, ses propriétés et les signes graphiques qui le constituent, mais avant tout lorsque celui-ci est accompagné d’images. En effet, largement utilisée comme fondement de la compréhension de textes, la lecture-compréhension d‟images, plus précisément la sémiopicturalité (Saada-Robert et al., 2003), s‟élabore progressivement chez le jeune enfant d‟âge préscolaire. Images et textes participent ainsi pour ce dernier au même processus de représentation sémiotique, même s‟ils doivent être clairement différenciés lorsque l‟enfant passe au caractère arbitraire du signe graphique. Dans leur analyse du développement de la compréhension du récit par les enfants d‟âge préscolaire, Fayol (2003) et Makdissi et Boisclair (2004a) montrent qu‟une hiérarchisation des relations causales se construit progressivement, par une « opération de transitivité » permettant de prédire les actions liées à un but initial, par une ré-organisation constante de la « toile de fond », au fil de la lecture. Par ailleurs, Gambrell et Jawitz (1993) relèvent pour des enfants d‟âge scolaire l‟importance égale de l‟imagerie mentale liée à la lecture du texte et des illustrations qui l‟accompagnent, chacune favorisant à sa manière l‟élaboration d‟inférences. Dans une étude où il s‟agit d‟évaluer l‟attention d‟enfants âgés de deux et trois ans en crèche, (Hudelot, Straten & Simon-Caracci, 2003) et leur capacité de rappel en fonction de supports audiovisuels différents sur la même histoire (livre d‟images, vidéo et diapositives), les résultats montrent que le rappel de l‟histoire est plus spontané et plus complet lors de la lecture du livre d‟images que suite au visionnement de la vidéo ou des images fixes.

Enfin, l‟analyse des écritures inventées des jeunes enfants permet par exemple d‟observer que l‟enfant commence à dissocier le dessin du texte écrit, puis l‟usage de traces discontinues et de pseudo-lettres pour progresser vers des lettres connues, même si elles ne sont pas encore mises en correspondance avec les sons du langage parlé (Ferreiro, 1988). Ces mêmes acquis se rencontrent aussi pendant l‟activité visant la lecture interactive d‟un livre imagé, et ceci par le passage progressif de la sémiopicturalité vers la sémiographie (Saada-Robert et al., 2003).

C‟est précisément cette différenciation entre l‟image et le texte pour construire le sens du récit (Gamba, 2005) qui fait l‟objet de notre recherche.

33 Les activités de lecture et écriture en IPE

Du point de vue des professionnels de la petite enfance, il existe de multiples activités de lecture en groupes dans les IPE. Cependant, peu d‟entre elles ont fait l‟objet de recherches et si c‟est le cas, ces pratiques sont rarement décrites dans leur déroulement.

Par exemple, la « lecture interactive » en IPE a fait l‟objet d‟une mise en relation avec l‟acquisition du langage écrit (Whitehurst, Epstein, Angell, Payne, Crone & Fischel 1994;

Neuman & Dickinson, 2003). Elle présente une corrélation positive sur l‟acquisition du langage écrit, ce qui suggère une intervention précoce auprès d‟enfants venant de familles à SES faible. On ne trouve cependant aucune description précise de cette pratique dans ces publications.

Par ailleurs, deux autres types de pratiques ont été comparés en regard de leurs effets sur l‟acquisition scolaire de la langue écrite. Corcoran Nielsen et Monson (1996) ont analysé les compétences littéraciques de 83 enfants d‟âges préscolaire partagés en deux groupes, par une comparaison pré et post-test : 42 en LE (pratique de littéracie émergente avec la lecture interactive accompagnée d‟écriture inventée (Jaffré, 1995) ; 41 en EP (jeux de reconnaissance visuelle sur les mots et sur les lettres visant un entraînement préscolaire des compétences estimées nécessaires à l‟apprentissage scolaire). Les résultats des enfants ayant suivis les activités de LE sont meilleurs en lecture et tout particulièrement chez les enfants « à risques », ce qui confirme les travaux antérieurs de Whitehurst et al. (1994). Les effets des activités de lecture émergente (LE) se marquent surtout sur les conceptions des enfants concernant l‟écrit et les signes graphiques et sur leurs compétences en oral. En ce qui concerne les compétences linguistiques plus précises et particulièrement le repérage de la première lettre des mots, les résultats sont significativement meilleurs pour le groupe de littéracie émergente également.

McMahon, Richmond et Reeves-Kaselkis (1998) confirment ces résultats, tout en les nuançant, dans leur étude portant sur 192 enfants de trois ans provenant de 12 crèches. Ils trouvent des différences qualitatives dans l‟investissement des enfants, plus impliqués et concernés dans les activités de littéracie émergente et plus « demandeurs » en connaissance et en utilisation de lettres. Par opposition, les enfants suivant les jeux d‟entraînements préscolaires (EP) s‟impliquent davantage dans des activités traitant entre autres de l‟ordre alphabétique et de la correspondance phonème-graphème. Ces auteurs suggèrent la complémentarité des deux approches plutôt que leur exclusivité et énoncent une mise en garde contre la tentation d‟exclure toute activité centrée sur le repérage de lettres ou la connaissance du nom de quelques lettres, etc.

De son côté, Hargrave et Sénéchal (2000) étudient l‟acquisition du vocabulaire lors de la lecture d‟un album par des enfants de deux ans sur un court programme d‟un mois dans deux dispositifs décrits de la manière suivante : d‟une part le dialogic reading où l‟enfant participe activement par des questions ouvertes de l‟adulte, questions qui élargissent ses connaissances et ses compétences en vocabulaire : Qui ? Quoi ? Comment ? Pourquoi ? Et ? Quand ? Etc. ; d‟autre part, le regular reading, la lecture d‟albums « régulière/habituelle » où l‟adulte interagit peu avec l‟enfant. Les résultats montrent que ce dernier fait beaucoup plus de progrès en vocabulaire avec la participation active du dialogic reading qu‟avec le regular reading.

Finalement, la pratique de la « lecture à haute voix » décrite comme la lecture en continu par l’adulte, avec ou sans contribution de l’enfant, a été étudiée par des chercheurs qui s‟intéressent au langage oral et écrit depuis plus d‟un siècle : Huey (1908) ; Smith (1934) ; Teale (1986); Feitelson, Goldstein et Share (1993) comme par d‟autres chercheurs tel que Cazden (1992) qui ciblent la transmission culturelle à travers la lecture. Différents styles de lecture à haute voix ont été distingués par Dickinson et Smith (1994) et par Brabham (2002) : la lecture à haute voix simple (just reading : consistant en une lecture du livre sans

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commentaire) après la lecture, le lecteur demande aux élèves de répondre en silence et individuellement en faisant un dessin ou un écrit relatif à l‟histoire et sans répondre oralement à des questions. La lecture performante (performance reading : le lecteur fait une lecture ininterrompue en faisant des commentaires et pose des questions avant et après la lecture et en demandant aux élèves de garder leurs questions pour après en les encourageant). Finalement la lecture interactive, (interactional reading-aloud : le lecteur pendant la lecture pose des questions pour stimuler la discussion sur la structure des évènements, les concepts de l‟histoire et la signification des mots). Les auteurs étudient les effets de ces trois styles de lecture à haute voix sur l‟acquisition du vocabulaire et la compréhension, sur des élèves du premier et troisième degré élémentaire. Les résultats montrent des différences de performances significativement meilleures en compréhension et en vocabulaire pour la lecture interactive que la lecture performante. Le résultat est plus limité en compréhension avec la lecture à haute voix simple, et un gain de vocabulaire très peu significatif par rapport aux deux autres styles de lecture.

Pour notre part, nous avons choisi de cibler précisément deux pratiques l‟une dont le dispositif didactique est clairement explicité, l‟autre dont la fréquence et la familiarité effective dans les IPE est avérée, mais qui requiert une description systématique. Ce sont la lecture/écriture émergente, proche du dialogic reading et la lecture/écriture récréative, proche de la lecture à haute voix ou du regular reading.

La lecture/écriture émergente

La lecture/écriture émergente (Saada-Robert et al., 2003) consiste en une lecture interactive, où l‟adulte montre progressivement les images d‟un livre en sollicitant les enfants à formuler des hypothèses sur le contenu narratif. Les hypothèses sont précisées au fur et à mesure de la lecture des images de chaque page et contrôlées par la lecture du texte qui leur correspond. A la fin, l‟adulte lit le récit complet aux enfants et les questionne sur la compréhension qu‟ils peuvent en élaborer. Dans un autre moment, chaque enfant « lit » (raconte) l‟album à un pair.

Plus tard encore, l‟adulte demande de dessiner un épisode de l‟histoire qui va être accompagné d‟une brève production écrite sous forme d‟écriture inventée c‟est-à-dire d‟écrire

« comme il sait, comme il pense, » un commentaire à son dessin.

Les objectifs poursuivis dans cette activité sont la différenciation entre le texte et l‟image (Navarro-William, 2009) pour construire le sens du récit (Gamba, 2005 ; 2006), la prise en compte des indices propres au texte et la nécessité des lettres pour lire/écrire. Ils portent tous les trois sur une prise de conscience du fonctionnement de la langue écrite dans sa dimension communicative, « prise de conscience à distinguer de la systématisation qui, pour apprendre à lire et écrire, est progressivement visée en lien avec la maîtrise du système alphabétique » (Saada-Robert et al., 2003, p. 29). Ainsi, l‟activité de lecture/écriture émergente permet à l‟apprenant de :

S‟investir du rôle de lecteur et de scripteur, en « lisant » et en « écrivant », de différencier le texte de l‟image dans l‟élaboration du sens, de comprendre la fonction communicative de l‟écrit, de prendre conscience de la nature représentative du signe graphique et la nécessité de connaître les lettres pour écrire/lire, ceci bien avant qu‟il ne devienne lecteur et scripteur de manière conventionnée. (Saada-Robert et al., 2003, p. 11)

35 La lecture/écriture récréative

La lecture/écriture récréative, (Navarro-William, 2006 ; 2009) proche du regular reading défini par Sénéchal (2000) mais où les interactions ne sont pas exclues (Brabham, 2002) consiste en une lecture à haute voix, où l‟adulte lit pour faire plaisir aux enfants qui l‟écoutent dans un moment de calme, sans but de stimulation littéracique, de discussion, de compréhension ou d‟acquisition de vocabulaire. Très fréquent en IPE, ce type de lecture correspond au partage d‟un moment de convivialité, aussi bien relationnelle que langagière et ludique. Entendre raconter une histoire, c‟est se livrer aux plaisirs de la parole, au plaisir des mots qu‟on découvre et avec lesquels on joue, des mots qui ont de jolies sonorités et qui font naître des émotions et des images mentales. Mais au-delà, le récit donne à l‟enfant un cadre spatio-temporel précis. Il apprend à situer dans l‟espace les phases d‟une action et à en suivre le déroulement chronologique. Contrairement à la lecture/écriture émergente, aucun objectif éducatif-didactique concernant la littéracie n‟est poursuivi. Faisant suite à l‟activité de lecture, on peut proposer à l‟enfant de dessiner et de « faire semblant » d‟écrire ce que veut dire son dessin.

L’album de littérature enfantine, support d’apprentissage

Le type de livres le plus fréquemment utilisé pour la lecture partagée entre un adulte et un enfant non lecteur est le livre d‟images ou album. Plus précisément, les albums de la littérature enfantine représentent « tous les livres dans lesquels le mariage entre le texte écrit et l‟image crée un texte d‟un type particulier, dont les deux constituants ont une importance à peu près égale » (Grossman, 2000, p. 94) et utilisent différents rapports à l‟image. Les structures narratives propres à l‟album peuvent être différenciées, selon que le texte est autonome ou non par rapport à l‟image, et selon le degré d‟élaboration des récits, qui permet l‟entrée graduelle dans l‟organisation textuelle narrative (ibid.).

Il existe plusieurs spécificités d‟images : les images sont dites dénotatives quand les illustrations traduisent fidèlement le texte ; connotatif, dans le cas d‟amplification ou enrichissement du texte, les images qui interprètent ou qui nuancent le texte, les images qui ont besoin du texte pour être comprises, celles encore qui contiennent des personnages accessoires.

Les albums se présentent le plus souvent sous la forme d‟un récit où le texte et les images (Navarro-William, 2009) contribuent tous les deux à l‟élaboration du récit. Ce qui aide l‟enfant à développer un langage abstrait qu‟est la langue de récit: qui est « décontextualisée » (Gamba, 2006), c‟est-à-dire hors de l‟ici et maintenant. Ce langage de récit est une sorte de passerelle permettant le passage graduel du langage oral vers le langage écrit.

La première rencontre avec la langue de récit se fait à travers le récit de vie, le quotidien de l‟enfant (distinction entre le moment où ont eu lieu les faits racontés et celui où ceux-ci sont relatés). Ce langage « décontextualisé » se développant graduellement implique le développement de certaines capacités mentales (Saada & Ducret, 2009) permettant une mise en relation de différents moments de l‟histoire: d‟abord la relation de temps: le récit donne à l‟enfant un cadre spatio-temporel précis. Il apprend à situer dans l‟espace les phases d‟une action et à en suivre le déroulement chronologique et permet donc de comprendre l‟enchaînement des événements, et aussi la relation de causalité, qui concerne le rapport de cause à effet entre les différents événements du récit.

Plusieurs catégories d‟albums illustrés serviront de support d‟enseignement/apprentissage : les imagiers, les albums d‟images-phrases, les abécédaires et les chiffriers, les albums sans texte, les albums avec des images récits.

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La littérature enfantine et le genre textuel choisi comme support

Si la majorité des textes narratifs (nouvelle, fable, roman, anecdote, plaisanterie, etc.) restent peu familiers à des enfants d‟âge préscolaire, compte tenu de la complexité de leur organisation interne et de leur réalisation scripturale, le conte et le récit d‟expériences font

Si la majorité des textes narratifs (nouvelle, fable, roman, anecdote, plaisanterie, etc.) restent peu familiers à des enfants d‟âge préscolaire, compte tenu de la complexité de leur organisation interne et de leur réalisation scripturale, le conte et le récit d‟expériences font