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Cadres épistémologiques, fondements de référence et présupposés théoriques

Plusieurs cadres épistémologiques interviennent dans notre recherche. C‟est ainsi que les modèles de la didactique, parce qu‟ils traitent du savoir et des connaissances construites à partir des situations (nous y reviendrons ultérieurement), constituent pour nous un cadre contributif incontournable, la didactique implique que le savoir en jeu constitue un pôle aussi important que le sont ceux de l‟enseignant et de l‟apprenant (Bronckart & Schneuwly, 1991), toute didactique vise la compréhension du rapport entre l‟enseignement et l‟apprentissage d‟un objet spécifique et « se questionne sur les modalités de la médiation en classe, comme sur les modalités de transmission culturelle des objets d‟enseignement » (Dolz & Thévenaz-Christen, 2002); le cadrage proposé par la didactique comparée (Schubauer-Leoni, 2002) permet d‟importer des concepts qui, a priori, n‟ont pas été pensés pour observer ce qui se passe en dehors de l‟école. Depuis quelques années, des chercheures (Munch, 2009 ; Leutenegger & Munch, 2002 ; Schubauer-Leoni, Munch & Kunz-Félix, 2002) proposent de transposer au milieu préscolaire et plus particulièrement dans le contexte institutionnel de la petite enfance les trois pôles du système scolaire élève-enseignant-savoir disciplinaire qui deviennent dès lors : un pôle « enfant », un pôle « éducateur » et un pôle « objet enjeu de la co-présence des deux autres pôles » (Munch, 2005, p.1). Notre recherche s‟inscrit dans le courant interactionniste vygotskien, qui insiste sur la composante sociale de l‟apprentissage, en considérant que la direction de la pensée va du social vers l‟individuel ; que toute activité cognitive s‟appuyant sur un contexte social est avant tout une activité sociale inter psychique avant d‟être intrapsychique (Vygotsky, 1985) c‟est-à-dire que l‟apprentissage est déterminé par des activités réalisées avec d‟autres dans un contexte spécifié, puis il devient propriété intériorisée de l‟individu. La découverte de l‟environnement par l‟enfant est socialement médiatisée. Les individus ne sont pas isolés, les enfants en particulier construisent la majeure partie de leurs connaissances en interaction avec leur environnement, et en particulier avec d‟autres enfants, mais aussi avec les éducateurs et enseignants. Dans ce contexte d‟interactions, l‟enfant passe d‟un plan inter psychologique à un plan intra-psychologique

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(Ninio & Bruner, 1978 ; Wertsch, 1979 ; Coll & Onrubia, 1994, cités par Brossard, 1998). En complémentarité, notre recherche s‟inscrit également dans les prémices piagétiennes sur deux points. Tout d‟abord, les connaissances s‟intériorisent par des processus internes qui assurent l‟organisation des connaissances nouvellement acquises avec les connaissances antérieures.

Ces processus internes sont notamment l‟abstraction réfléchissante et l‟équilibration majorante (voir Saada-Robert & Brun, 1996, pour une description critique de ces processus).

En second lieu, c‟est par le biais des significations attribuées par le sujet connaissant à son environnement que l‟apprentissage de nouvelles connaissances peut se faire. Ces significations sont elles-mêmes le produit des connaissances antérieurement acquises et interviennent dès qu‟une nouvelle situation se présente à l‟apprenant. Réciproquement, toute nouvelle situation provoque une construction de signification authentique, résultante à la fois de la structure de la situation et des significations que l‟apprenant lui attribue (Saada-Robert

& Balslev, 2004). Aussi, plutôt qu‟un mouvement linéaire de l‟inter individuel à l‟intra ou au contraire de l‟intra vers l‟inter, nous préférons y voir un cycle complet pour représenter le processus de l‟apprentissage, comme il est représenté par la figure 1 de la fin du chapitre 4.

Nous convoquons aussi l‟apprentissage en contexte, issu du courant de la cognition située qui considère que la construction de connaissance ne peut être détachée de l‟espace-temps dans laquelle elle a lieu (Lave & Wenger, 1991 ; Allal, 2001 ; Mottier-Lopez, 2005). Les travaux de Goigoux (2001) se situant entre la didactique du français et la psychologie ergonomique (Clot, 1995/1998 ; Pastré, 2005), pour laquelle la réalisation de toute tâche exige la mise en place d‟une activité cognitive complexe.

Notre recherche se fonde également sur quelques présupposés présentés ci-dessous, communs à plusieurs champs de recherche. Il est indispensable de les mettre à jour dans la mesure où ils sont à l‟origine de plusieurs choix, tant au niveau des concepts auxquels nous nous référons, qu‟au niveau des outils méthodologiques élaborés.

1.6.1 L’enseignement/apprentissage considéré comme action conjointe

Les travaux en Didactique comparée de plusieurs auteurs (Sensevy et al., 2005; Schubaur-Leoni, Leutenegger, Ligozat & Flückiger, 2008 ; Ligozat, 2009) soutiennent la thèse selon laquelle « on ne peut comprendre l‟action du professeur sans décrire celle des élèves ». Dans le cadre de la théorie de l‟action conjointe en didactique (Sensevy & Mercier, 2007), les contenus effectivement enseignés sont la résultante de l‟activité conjointe enseignant-élève au sein de la situation didactique (Ligozat & Leutenegger, 2008). Notre recherche, en accord avec ces postulats, considère l‟interaction en situation formelle d‟apprentissage comme une co-construction entre deux partenaires (Balslev, 2006). Dans la perspective socioculturelle, Grossen (1999), présentant une conception dialogique du social, déclare que « (…) la transmission et l‟acquisition de savoirs sont deux éléments indissociables d‟un même processus. » (p. 4). A partir de ce présupposé, se pose la question des moyens pour analyser conjointement l‟enseignement et l‟apprentissage et celle de l‟unité d‟analyse à choisir.

Comment découper le corpus de manière à tenir compte des deux partenaires de façon symétrique ? Quelles traces (Leutenegger, 2009) recueillir de manière à tirer des indices des deux processus et comment les mettre en relation ? En considérant les traces de l‟enseignant comme un corolaire des interventions des apprenants ? Ou encore en les mettant en lien de manière dynamique ? Sur le plan théorique, se pose la question des concepts à emprunter pour décrire les énoncés des deux partenaires.

19 1.7 Objectifs poursuivis et apports

L‟enjeu de cette thèse touche à la prévention de l‟illettrisme ou plus banalement à celle des difficultés d‟apprentissage en lecture/écriture (Saada-Robert, 2005). Considérant les racines les plus précoces de l‟acquisition de la lecture et de l‟écriture par les jeunes enfants dans leur milieu socio-éducatif, autrement dit, dans la famille ou en IPE, nous nous posons la question de savoir quels sont les mécanismes de l‟entrée dans l‟écrit, tant au niveau des connaissances mises en place par le jeune enfant qu‟au niveau des fonctionnements institutionnels.

Les objectifs poursuivis à travers cette thèse se situent sur plusieurs plans : théorique, méthodologique et pragmatique.

Premièrement sur le plan théorique elle permet de cerner plusieurs liens, notamment entre les connaissances littéraciques, la « zone de compréhension » et la manière dont les partenaires mènent l‟activité en jeu i.e. de faire apparaître les propriétés du dispositif et de la situation didactique. Sur ce plan, les apports consistent à décrire, comprendre et expliquer le déroulement effectif de l‟enseignement/apprentissage en situation didactique en IPE. Mais également à aboutir à des résultats sur les liens entre la progression des composantes du savoir et l‟élaboration d‟une zone de compréhension entre les partenaires, à travers un certain nombre de gestes didactiques.

Deuxièmement sur le plan méthodologique, il s‟agit de mettre en place des manières d‟appréhender le système didactique en tenant compte des trois pôles et de leurs interrelations. Il s‟agit également de parvenir à rendre compte d‟une progression (ou non) du savoir au cours d‟une séance d‟enseignement/apprentissage et de cerner les unités d‟analyse permettant de rendre compte des « gestes », des « significations », de la « zone de compréhension » et des « patterns qui la caractérisent». Il s‟agit aussi de découper et de construire des indices pour cerner chacun des objets d‟analyse (zone de compréhension, patterns, significations et gestes).

Troisièmement au niveau pragmatique, (Van der Maren, 1996), il s‟agit d‟une part de faire apparaître les propriétés du dispositif et de la situation didactique qui constituent le contexte d‟émergence, d‟amener l‟éducatrice observée à prendre davantage conscience de ses interventions, des acquis et erreurs des enfants et du savoir en jeu afin qu‟elle parvienne à mieux réguler ses interventions.

1.8 Structure du document

La thèse est organisée en quatre parties constituées de chapitres numérotés consécutivement.

La première partie, cadrage théorique comporte les chapitres 2, 3, 4, 5. Le chapitre 2 de revue de littérature présente les principaux travaux de la littéracie émergente, ses dimensions microsociales ainsi que les composantes de la lecture/écriture et les processus de son acquisition chez l‟enfant. Le chapitre 2 se termine avec la littérature enfantine et le genre textuel choisi comme support.

Le chapitre 3 présente notre approche conceptuelle plurielle, particulièrement trois champs scientifiques orientent plus spécifiquement notre thèse: il s‟agit de l‟interactionnisme, de l‟approche didactique - dans la perspective de la didactique comparée - et finalement des études sur la microgenèse exposé au chapitre 4. Est abordé aussi dans le chapitre 3 les notions de contrat didactique qui cherche à appréhender les systèmes d‟attentes et obligations

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réciproques entre l‟éducatrice et les enfants. Nous poursuivons en présentant les concepts de tâche et d‟activité, de gestes (didactique, professionnels), le concept de pratique. Les trois pôles du système didactique sont présentés. Le chapitre se termine par le concept du guidage interactif, des régulations résultant des interventions de l‟éducatrice auprès des enfants.

Le chapitre 4 expose le cadre théorique de la microgenèse, servant à étudier finement les significations et la dynamique interactive des partenaires, notamment la zone de compréhension et les patterns interactifs entre l‟éducatrice et les enfants. Une typologie de zone de compréhension et de patterns est présentée. Relevons déjà ici que ce cadre conceptuel a été défini dans un va-et-vient entre les construits théoriques et les analyses de notre corpus.

Le chapitre 5 est consacré à notre questionnement de recherche.

La deuxième partie de la thèse,cadrage méthodologique, est constituée des chapitres 6 et 7.

Le chapitre 6 commence par une présentation des fondements épistémologiques et théorique de l‟approche de recherche compréhensive-interprétative que nous adoptons pour la récolte et l‟analyse de nos données. En effet, la démarche d‟analyse compréhensive-interprétative de notre objet d‟étude suppose une activité d‟interprétation, et vise à comprendre le contexte et la dynamique de la situation didactique et sa relation avec les apprentissages littéraciques des enfants. Les critères de validité d‟une telle démarche seront discutés. Suite à ces quelques éléments de cadrage général, le chapitre 7 présente les procédures méthodologiques c‟est-à-dire les outils et les caractéristiques de l‟observation en IPE ainsi que les différentes étapes des démarches d‟analyse et d‟interprétation que nous avons entreprises. L‟étape de dépouillement des traces clôt le chapitre.

La troisième partie de la thèse, résultats, est composée de 3 chapitres. Le chapitre 8 expose le procédé d‟analyse a priori. Le chapitre 9 présente le fonctionnement global des deux activités de lecture LEE/LER ; les résultats des stratégies de lecture de LEE ainsi que les résultats des stratégies d‟écriture émergente des deux groupes de lecture LEE/LER et également les résultats des bilans de compétence narrative et des bilans psycholinguistiques. Le chapitre 10 présente le résultat de l‟analyse microgénétique pour le groupe LEE.

La quatrième et dernière partie de la thèse présente une discussion des deux pratiques LEE/LER au chapitre 11. Finalement, le chapitre 12 présente les perspectives conclusives. Il discute quelques limites de notre démarche de recherche, puis propose quelques implications et pistes prospectives de recherche visant à poursuivre la réflexion sur les pratiques éducatives en IPE.

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PREMIERE PARTIE

CADRAGE THEORIQUE ET QUESTIONS DE

RECHERCHE

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CHAPITRE 2 : UNE LITTERATURE DE REFERENCE POUR SUGGERER DES PISTES D’ACTION

Ce chapitre de revue de littérature de recherche présente les principaux travaux de la littéracie émergente sur la base desquels nous questionnerons les processus d‟enseignement/apprentissage en situation préscolaire.

2.1 Etat de la question en littéracie émergente

Plusieurs domaines de recherche sont concernés par la problématique énoncée plus haut : la littéracie émergente et particulièrement ses dimensions microsociales avec les pratiques de lecture et d‟écriture dans les familles et les institutions de la petite enfance, la psycholinguistique avec les modèles de l‟acquisition de la lecture et de l‟écriture, la compréhension narrative et la lecture d‟image, les activités de lecture/écriture en IPE.

2.1. 1 Le domaine de la littéracie émergente

La littéracie renvoie à des pratiques qui ne se définissent pas par un état (un savoir lire et écrire fixe) mais par un processus d‟acquisition portant à la fois sur la compréhension (la lecture) et sur la production écrite (Pellegrini & Galda, 1994). Du point de vue des mécanismes de l‟apprentissage, rien ne justifie donc la séparation entre le préscolaire et le scolaire, pris trop souvent comme deux mondes séparés (Ferreiro & Teberosky, 1982 ; Lancy, 1994). Dans la perspective de ces auteurs, comme dans la nôtre, ces deux univers culturels ne sont pas disjoints mais s‟inscrivent au contraire dans la continuité du développement littéracique de l‟enfant, même si les deux institutions relèvent par ailleurs de contrats sociaux spécifiques. Du reste l‟usage de l‟album de littérature enfantine dans les deux institutions en témoigne.

Origines de la littéracie émergente et éléments de définition

A la fin du XIXe siècle apparaît le terme anglo-saxon literacy, formé sur illiteracy, et portant sur le niveau d‟alphabétisation. Literate, jusque là synonyme de educated (« cultivé ») ou de learned (« savant ») prend un sens nouveau : être capable de lire et d‟écrire, (Barré-De Miniac, 2002). Depuis quelques années l‟usage du terme littéracie est bien attesté dans des écrits francophones.

Son apparition tiendrait à la place de plus en plus importante donnée aux activités de lecture et d‟écriture dans nos sociétés (Jaffré, 2004). Plusieurs travaux en psycholinguistique ont mis en évidence la coopération cognitive entre les activités de lecture et d‟écriture (Ehri, 1997) qui, à terme, construisent une compétence homogène et complexe dont ni le terme de lecture ni celui d‟écriture ne peuvent à eux seuls, rendre compte. Son apparition répondrait ainsi à la nécessité d‟une notion englobant à la fois la lecture et l‟écriture (Jaffré, 2004). De l‟orthographe8 du terme de littéracie on en distingue trois différentes qui coexistent actuellement : « litéracie », « littéracie » « littératie ». Elles ont fait l‟objet de discussions diverses que nous n‟allons pas, pour notre part développer, car il nous paraît plus judicieux de relater le sens que véhicule ce terme.

8 Voir Barré-De Miniac (2004) qui fait apparaître les arguments historiques.

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La polyvalence du concept de littéracie a été très tôt admise et même revendiquée (Barré-De Miniac, Brissaud & Rispail, 2004). Pour eux la littéracie ne traite pas seulement de la façon de lire et d‟écrire, mais également de l‟application de cette connaissance à des objectifs différenciés, dans des contextes spécifiques (Jaffré, 2004). Comme le met en évidence Barré-De Miniac (2002) la littéracie relève de différentes dimensions : linguistiques, psychocognitives et sociales puisque ces champs d‟études incluent des recherches sur les mécanismes de codage/décodage, sur la perception des unités phonologiques, sur les processus de construction de sens, sur les pratiques scolaires et extrascolaires.

(Jaffré, 2004) propose cette définition de la littéracie qui à notre avis est la plus complète : La litéracie désigne l‟ensemble des activités humaines qui impliquent l‟usage de l‟écriture, en réception et en production. Elle met un ensemble de compétences de base, linguistiques et graphiques, au service de pratiques, qu‟elles soient techniques, cognitives, sociales ou culturelles. Son contexte fonctionnel peut varier d‟un pays à l‟autre, d‟une culture à l‟autre, et aussi dans le temps. (p. 31)

En se référant à Neuman et Dickinson (2003), Barré-de Miniac (2002) soutient que l‟intérêt de ce concept de littéracie réside dans le fait qu‟elle implique une reconnaissance des acquis de la recherche en considérant que l‟apprentissage de la lecture et de l‟écriture n‟est pas seulement un produit de développement et soutient aussi l‟idée que le développement de la littéracie commence bien avant que ne commence l‟instruction formelle à l‟école (Ferreiro, 2000). L‟enfant observe les pratiques de la vie quotidienne, il imite les adultes dans leurs procédures, s‟appropriant ainsi le monde et la réalité (Chauveau, 1997).

La littéracie émergente : éléments de définition

Le terme de « littéracie émergente » est apparu dans les années 1980 en Amérique du Nord.

Saada-Robert (2003), en fait une revue approfondie. Ce terme visait à renforcer la définition de la littéracie, en tant que « processus du devenir lecteur et scripteur » (Lancy,1994). Dans cette définition, c‟est l‟enfant lui-même qui est vu comme le principal instigateur de son apprentissage, il « construit sa littéracie », dans un cadre de médiation approprié comme le milieu familial et / ou le milieu institutionnel de la petite enfance, bien avant l‟apprentissage formel de la lecture et de l‟écriture en milieu scolaire (Sulzby & Teale, 1991).

L’apprentissage de la littéracie émergente

En ce qui concerne les études en littéracie émergente, nous faisons particulièrement références aux travaux ayant été conduits dans le champ des différentes disciplines contributives telles que la linguistique (Jaffré & David, 1998 ; Katz, 2001 ; la psycholinguistique (Ferreiro, 2000 ; Ehri, 1997 ; Frith, 1985 ; Rieben & Saada-Robert ; 1997), autrement dit ce qui touche aux composantes de la lecture/écriture et aux processus de son acquisition chez l‟enfant. Ensuite, nous passons en revue les travaux sur la sociolinguistique dans la mesure où elle concerne les pratiques sociales de la littéracie. Nous allons en premier lieu, mentionner les composantes de la littéracie émergente étant donné que c‟est à partir de celles-ci que s‟effectuent nos analyses.

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Catégorisation des aspects constitutifs du savoir en littéracie émergente

Les recherches que nous venons d‟évoquer précédemment permettent de prendre en compte différentes facettes du savoir en littéracie émergente et d‟identifier les composantes majeures mises en jeu. Dans cette perspective, nous considérons à la suite de Saada-Robert et al. (2003) le savoir en littéracie selon trois dimensions : métacognitive9, textuelle et scripturale.

La dimension métacognitive (Chauveau, 1997) renvoie d‟une part à la représentation fonctionnelle que l‟apprenant se fait du langage écrit, de ses pratiques, de ses fonctions et de la manière dont s‟effectue son apprentissage. D‟autre part, la dimension métacognitive se base sur la prise de conscience de l‟apprenant relatif à ses stratégies d‟acquisition en compréhension et en production. Elle porte sur le contrôle et la planification des processus du traitement linguistique.

En ce qui concerne la nature représentative en jeu dans la littéracie émergente, les auteurs (Jaffré, 1994 ; Katz, 2001) distinguent le symbole pictural qui se construit à travers la lecture d‟images, autrement dit la sémiopicturalité et le signe graphique propre à la langue écrite (Ferreiro, 1988, 2000 ; Saada-Robert et al., 2003), autrement dit le sémiographisme.

Cependant, bien que tous deux soient de nature représentative, des fonctions et des fonctionnements différents doivent progressivement être accordés à l‟image et au signe graphique (Katz, 2001 ; Saada-Robert et al., 2003). Par ailleurs, ces deux fonctions sont renforcées par un autre médiateur sémiotique, le jeu symbolique, dont on sait le rôle important dans les activités menées en IPE. Non seulement le « faire semblant » de lire ou d‟écrire s‟inscrit chez l‟enfant bien avant l‟apprentissage formel de la lecture et de l‟écriture, mais la littéracie est aussi rappelée comme étant un processus conceptuel complexe de construction de significations dans un contexte de communication.

Dans quelle mesure les jeunes enfants parviennent-ils à différencier le symbole pictural du signe graphique ? Brenneman, Massey, Machado et Gelman (1996) ont demandé à 50 enfants d‟âge préscolaire de « dessiner une image » et d‟ « écrire le nom » correspondant à ce qu‟ils ont dessiné. Les auteurs relèvent que les enfants dessinent en lignes continues distribuées au hasard sur la page, qu‟ils écrivent en produisant des petites marques discontinues, séparées, éparpillées puis en lignes, de gauche à droite, et qu‟ils ont donc une représentation et une connaissance précoce de ce que les signes graphiques sont différents des symboles picturaux, ce qui est confirmé par Saada-Robert et al. (2003). D‟autres auteurs comme Levin, Share et Shatil (1996) élaborent un modèle développemental de l‟acquisition de l‟écriture, qui va de la production de gribouillage, lignes incurvées, pseudo-lettres, aux lignes composées de lettres au hasard provenant du prénom, puis à l‟utilisation des lettres en correspondance avec les sons. De même, Ferreiro (1988, 2000) montre l‟évolution suivante des lettres : utilisation de pseudo-lettres et de lettres connues, en ligne, sans segmentation ; principe du minimum de 3 lettres pour écrire un mot ; principe de lettres différentes pour des mots différents ; principe

Dans quelle mesure les jeunes enfants parviennent-ils à différencier le symbole pictural du signe graphique ? Brenneman, Massey, Machado et Gelman (1996) ont demandé à 50 enfants d‟âge préscolaire de « dessiner une image » et d‟ « écrire le nom » correspondant à ce qu‟ils ont dessiné. Les auteurs relèvent que les enfants dessinent en lignes continues distribuées au hasard sur la page, qu‟ils écrivent en produisant des petites marques discontinues, séparées, éparpillées puis en lignes, de gauche à droite, et qu‟ils ont donc une représentation et une connaissance précoce de ce que les signes graphiques sont différents des symboles picturaux, ce qui est confirmé par Saada-Robert et al. (2003). D‟autres auteurs comme Levin, Share et Shatil (1996) élaborent un modèle développemental de l‟acquisition de l‟écriture, qui va de la production de gribouillage, lignes incurvées, pseudo-lettres, aux lignes composées de lettres au hasard provenant du prénom, puis à l‟utilisation des lettres en correspondance avec les sons. De même, Ferreiro (1988, 2000) montre l‟évolution suivante des lettres : utilisation de pseudo-lettres et de lettres connues, en ligne, sans segmentation ; principe du minimum de 3 lettres pour écrire un mot ; principe de lettres différentes pour des mots différents ; principe