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VARIATIONS DE~~GRAPHIQUES POUR LES AUTOCHTONES DE KARAKPO

Dans le document SENOUFO DES CULTURES RAPPORTDANSL (Page 147-161)

- - - -

-147

Par contre, le nombre de Dioula reste stable: à l'inverse des Sénoufo, le dynamisme démographique médiocre de cette ethnie, traduit par des naissances peu nombreuses et inférieures aux décès, est équilibré par un solde migratoire positif. Ce dernier s'explique en fait par la venue, consécutive à l'ouverture d'une école primaire en octobre 1976, d'enfants de moins de 10 ans d'émigrés, et responsable en partie du gonflement de la catégorie des neveux, constaté lors de l'analyse de la structure familiale de l'unité d'exploitation (1). L'émigration est plus faible que chez les Sénoufo, représentant 17 % des 15-45 ans (2), avec une dominance masculine égale à celle observée chez les Sénoufo (63 %). Le taux d'émigration est de 22 % pour

les hommes de 15 à 45 ans, seules les classes 3·et 4 (16-27 ans) étant concernées, avec une proportion d'émigrants de 33 %pour chacune d'elles. Ce rapport est limité à 13 %chez les femmes, les départs ayant lieu dans les classes 3 (16-21 ans) et 5 (28-33 ans) avec des taux de 29 % et 17 % respectivement. Les retours sont par contre plus fréquents que chez les Sénoufo, compensant partiellement les départs et ramenant les taux migratoires à 7 % pour les personnes de 15 à 45 ans des deux sexes, à 13 % pour les hommes et'à une valeur nulle pour les femmes.

En considérant cette fois-oi l'ensemble des autochtones de 15 à 45 ans de sexe masculin, les statuts de parenté des émigrants, par rapport au chef de l'unité dont ils étaient membres le 1er septembre 1975, sont, par ordre décroissant, les suivants : enfant célibataire

(47 %), enfant célibataire de frère (16 %), frère célibataire (16 %), autre célibataire (11 %), enfant marié (5 %), frère marié (5 %) (3). Ces valeurs dégagent une forte proPortion (86 %) de célibataires (4) et une nette majorité (68 %) d'individus ayant leur père, donc présentant une dépendance élevée. Parmi ces derni~rs, les enfants, célibataires ou mariés, de chef d'unité, représentent plus. de la moitié (53 %) des émigrants. L'émigr~tiondes frères de chef d'unité, mariés mais le plus souvent célibataires, équivaut à 21 % des émig=ants. Elle explique la régression de ces deux catégories: celle des frères célibataires est due uniquement à l'émi-gration, celle des frères mariés ne l'est que partiellement (5).

Pour l'émigration féminine, le statut de parenté est moins instructif. Il s'agit le plus souvent de femmes mariées à un émigré (5~ %) ou suivant leur époux (22 %). Deux femmes

(22 %) ont quitté le village en divorçant.

De même, la profession et le lieu de résidence étant surtout intéressants pour les hommes, nous nous limiterons à ces derniers pour l'analyse de ces informations, présentées

.

.

dans le tableau ci-dessous. L'agriculture prédomine parmi les émigrants, les trois quarts (74 %) d'entre eux étant cultivateurs. Cette activité s'exerce toutefois dans des conditions différentes de celles au village d'origine, une certaine indépendance étant recherchée la moitié des

agriculteurs sont planteurs, c'est-à-dire chef d'unité de production, un peu moins de la moitié sont salariés agricoles et

Un

seul est dépendant non salarié, alors que tous avaient ce statut avant de migrer. 21 % des émigrants sont apprentis (2 chauffeurs, l menuisier, l tailleur), et un jeune Sénoufo est parti pour des soins de longue durée dans un village proche.

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1

(1) Cf. page 130. L'autre motif de l'accroissement de la catégorie des neveux est le décès d'un frère marié de chef d'unité dioula.

(2) 3 départs de moins de 15 ans sont enregistrés, l'un pour l'enseignement coranique, les deux autres pour rejoindre un père émigré. Aucun individu de plus de 45 ans n'a quitté le village.

(3) Ces statuts de parenté par rapport au. chef d'unité sont ceux définis à la page 124 et correspondent à la

situation au 1er septembre 1975. Pour l~s Sénoufo, ces proportions sont les suivantes: enfant célibataire (50 %). ' enfant célibataire de frère (14 %), frère célibataire (21 %), enfant marié (7 %), frère marié (7 %). Pour les 1.

Dioula : enfant célibataire (40 %), enfant célibataire de frère (20 %), autre célibataire (40 %).

l

(4) En fait, deux célibataires de 1975 ont été mariés par la suite, abaissant le pourcentage de célibataire à 79 %. • (5) La diminution des frères,-célibataires ou mariés, a été vue à la page 130, lors de l'étude de la structure

t

familiale moyenne de l'unité d'exploitation. La baisse des frères mariés provient aussi d'un décès et d'une scission, qui sera abordée dans la section suivante.

Profession et résidence des émigrants masculins le 1er septembre 1978 Unité nanbre d'émigrants

RESIDEN:::E ~ .1 Centre-Qœst Dianra-Kani Nord 'IOTAL

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Ces mouvements migratoires se font presque exclusivement plein sud, deu~ '.

destinations étant largement prépondérantes, représentant

89

%des lieux de résidence des émigrants masculins: les sous-préfectures de Dianra et Kani.d'une part, la région fo=estière 'du Centre-Ouest ivoirien d'autre part. Les sous-préfectures de Dianra et, Kani, respectivement

parties septentrionales des départements de Mankono et Séguéla,. situées dans une zone de transition entre la savane à une seule saison des pluies au nord et celle à deux saisons pluvieuses au sud, accueillent 47 %des émigrants. Elles englobent la frange méridionale du pays sénoufo au sud de Boundiali mais s'étalent 'surtout en .région malinké (1). Beaucoup plus au sud, la deuxième zone d'accueil, dont les ethnies autochtones sont Bété ou Gouro, est

délimitée par les villes de Daloa; Issia, Gagnoa, Sinfra, ,Bouaflé. Elle ~~çoit 42 %des émigrants.

Seuls deux Sénoufosont restés dans le Nord (autre que Dianra-Kani) : l'un apprenti menuisier à Boundiali, et celui en mauvaise santé mentionné dans le paragraphe précédent.

Le croisement de la profession et du lieu de résidence met en évidence deux groupes principaux: les planteurs de coton dans les sous-préfectures de Dianra et Kani d'une part, représentant 37 %des· émigrants, les ouvriers agricoles des plantations de, café-cacao d:.l Centre-Ouest d'autre part, correspondant à 26 %des émigrants. En considérant en plus le critère de l'age, les émigrants les plus vieux (plus de 25 ans) sont tous planteurs de coton dans les sous-préfectures de Dianra et Kani, tandis que les plus .jeunes (moins de 25 ans) ~ont

tous ouvriers agricoles ou apprentis.~,~'

(1) Seule la partie méridionale ~u pays sénoufo au sud de Boundiali fait partie des sous-préfectures de Dianra et Kani (cf. le découpage admfnistratif de la page 3 des annex~s). La partie sénoufo de la sous-préfecture de Kani correspond à l'intégralité du sous-groupe sénoufo du NkaZakadougou, fortement. acculturé au contact des Malinké (religion musulmane, langue diou1a généralement préférée au sénoufo). Mais, ainsi qu'il apparaît en confrontant les cartes des pages 3 et 7 des annexes, la partie sénoufo de la sous-préfecture de Dianra n'inclut que la moitié sud du sous-groupe des GbatobéZé. La partie nord de ce sous-groupe ethnique dépend de la sous-préfecture de Boundiali et correspond au canton Gbato - pure création coloniale - qu'il ne faut pas confondre avec le Gbato, entité culturelle dont l'aire d'occupation est à cheval sur deux circonscriptions administratives. Nous insistons sur le fait que seule la partie du Gbatp dépendant de la sous-préfecture de Dianra est réceptrice de migrants (et encore seuls les villages les plus au sud), et que le canton colonial de même nom ne reçoit pas d'émigrants, participant au contraire au mouvement migratoire COmme cela est le cas pour Karakpo. Signalons aussi que cette poche d'accueil de Dianra-Kani est en fait incluse dans une région beaucoup plus vaste, réceptrice de migrations cotonnières de l'ensemble du pays sénoufo, particulièrement la zone dense de Korhogo, et s'étendant depuis les sous-préfectures de Dianra et Kani au nord jusqu'à Daloa et Bouaflé au sud, avec une densité d'implantation maximale dans le triangle Dianra-Mankono-Tiéningboué.

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Les deux ethnies diffèrent par la profession et le lieu de résidence. Les Sénoufo, très fortement attirés par les activités agricoles (79 % des émigrants) sont soit dans la sous-préfecture de Dianra, surtout comme planteurs mais aussi comme ouvriers agricoles, soit comme ouvriers agricoles dans le Centre-Ouest. Pas un seul émigrant dioula n'est par contre ouvrier agricole, les hommes de cette ethnie étant planteurs ou dépendants non salariés dans la sous-préfecture de Kani (1) (60 % sont agriculteurs), ou apprentis dans une des villes du Centre-Ouest •

.. Un processus migratoire plus ancien pour les Dioula

Bien que les mouvements migratoires antérieurs à nos deux recensements ne puissent être connus avec la même préci3ion que pour la période 1975-1978, un bilan, au 1er septembre 1978, de l'ensemble de l'émigration à Karakpo, peut être fait en 'se basant sur les renseignements obtenus auprès de villageois ou d'émigrés venus en congés. Afin d'éviter toute confusion, le terme "émigré" sera utilisé ici pour désigner toute personne originaire de Karakpo et n'y résidant pas le 1er septembre 1978, le mot "émigrant" étant arbitrairement réservé à un émigré ayant quitté le village entre le 1er septembre 1975 et le 1er septembre 1978. Afin de faciliter les comparaisons avec les résultats présentés au début de cette section, seules les personnes âgées de 15 à 45 ans au 1er septembre.1978 seront étudiées ici (2).

La dominance masculine se retrouve, dans l'ensemble de l'émigration au .l~r septembre 1978, de façon encore plus nette que pour celle entre 1975 et 1978 : 73 % des émigrés sont des hommes, cette proportion étant plus forte chez les Sénoufo (79 %) que chez les Dioula

(69 %). Il s'agit surtout de jeunes, 60 % des émigrés ayant.entre 15 et 27 ans, ce pourcentage étant plus faible pour les hommes (55 %) que pour les femmes (73 %), et plus élevé chez les Sénoufo (67 %) que chez les Dioula (55 %).

Une forte proportion des individus originaires de Karakpo ont migré : sur 210 personnes de 15 à 45 ans, 97 sont absentes le 1er septembre 1978, soit 46 %. Le tableau de la·

page suivante donne l'importance relative des émigrés par classe d'âge. E~.excluantla classe 2, partiellement comprise dans le groupe des 15-45 ans, le pourcentage d'émigrés a tendance à décroltre avec l'âge. Les classes 3 et 4 (16-27 ans) sont particulièrement touchées, 61 % dè leurs effectifs étant partis. Ce rapport, quoique plus modéré, reste élevé pour les classes 5 et 6 (28-39 ans) : 43 %. La classe 7 (40-45 ans) .est plus préservée: 21 % d'émigrés.

Le croisement avec le sexe montre un taux d'émigrés double pour les hommes de ce qu'il est pour les femmes: 60 % chez les premiers contre 29 % chez les secondes. De plus la décroissance avec l'âge est encore plus marquée pour les femmes que pour les hommes. En effet, chez les femmes, seules les classes 3 et 4 (16-27 ans) ont beaucoup migré (49 %) alors que la part d'émigrées n'est que de 19 % pour les classes 5 et 6 (28-39 ans) et de 7 % pour la classe 7 (40-45 ans). Par contre les hommes observent une proportion d'émigrés élevée pour toutes les classes d'age, la diminution avec l'âge étant plus modérée: 70 % pour les classes 3 et 4

(16-27 ans), 57 % pour les classes 5 et 6 (28-39 ans) et 40 % pour la classe 7 (40-45 ans).

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(1) Les migrations cotonnières de Karakpo suivent un strict cloisonnement selon l'ethnie: les S€noufo dans la sous-préfecture de Dianra, les Dioula exclusivement dans celle de Kani.

(2) Les émigrés de plus de 45 ans sont très rares. Il est de plus difficile d'avoir des renseignements sur les départs les plus anciens.

SITUATION GLOBALE DE L'Et-lIGRATIbN A KARAKPO LE 1ER SEPTEJ~BRE 1978 POUR LES 15 - 45 ANS

Unité

PROPORTION D'EMIGRES PAR CLASSE D'AGE

Pourcentage deZ 'ensembZe des individus r.;:tsidents et émigrés)

Classes d'âge HOMMES FEMMES TOT A L

N° Ages Sénoufo Dioula TOTAL Sénoufo Dioula TaI'AL Sénoufo Dioula TOTAL

2 15 ans 33 25 29

- - -

14 14 14

3 16-21 ans 85 54 69 50 57 53 71 55 63

4 22-27 ans 73 69 70 29 73 46 48 69 59

5 28-33 ans 33 77 56

-

38 19 20 62 41

6 34-39 ans 46 73 58 13 29 20 33 56 44

7 40-45 ans 43 33 40

-

17 7 20 22 21

TOTAL 56 63 60 18 41 29 39 54 46

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PROFESSION ET RESIDENCE DES EMIGRES MASCULINS Unité : nombre d' émigrés

RESIDBNCE _ Centre-Ouest Dianra-Kani Nord Abidjan Divers TOTAL

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coranique

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Si l'on retient le critère de l'ethnie, les Dioula, dont plus de la moitiê des membres (54 %) ont quittê Karakpo, prêsentent un pourcentage d'êmigrês plus grand que celui des Sênoufo (39 %). Cette proportion d'êmigrês supérieure pour les Dioula s'observe pour chacun des deux sexes, avec un êcart entre ethnies plus net chez les femmes que chez les hommes. La supê-rioritê du pourcentage d'êmigrês chez les hommes par rapport aux femmes, constatêe pour chaque ethnie, est plus marquée chez les Sênoufo. C'est ce qu'attestent les proportions d'êmigrés suivantes chez les Sênoufo, 56 % pour les hommes et 18 % pour les femmes, chez les Dioula, 63 % pour les hommes et 41 %pour les femmes.

La comparaison, entre ethnies, des valeurs d.~êm1grationselon l'a:ge, rêvèle une variation chez les Sénoufo divergeant de celle observée chez les Dioula. Chez les Sênoufo de sexe masculin, la proportion d'êmigrês est forte surtout pour les classes 3 (85 %) et 4 (73 %), leurs aInês êtant moins touchés (40%). Le pourcentage plus faible constatê pour la classe 5 peut s'expliquer par le fait que leurs membres êtaient au stade principal de l'initiation (1).

Chez les hommes Dioula, cette proportion est supêrieure à la moitié (54 %) des effectifs pour la classe 3 (16-21 ans) et atteint son niveau le plus haut (73 %) pour les classes 4, 5 et 6

(22-39 ans); la classe 7· (40-45 ans) est la moins concernêe par ce phênomène migratoire (33 %).

Chez les femmes sénoufo, seule la classe 3 (16-27 ans) est très touchêe par l'êmigration (50 %), les classes plus vieilles l'êtant beaucoup moins, voire pas du tout. Par contre, les femmes dioula prêsentent, après un taux de 57 % pour la classe 3 (16-21 ans), une proportion d'êmigrées très forte (73 %) pour la classe 4 (22-27 ans); les valeurs observêes pour leurs aInêes

rêgressent régulièrement avec l'âge.

Tout comme pour les migrations entre 1975 et 1978, analysêes au dêbut de cette section, la profession et la rêsidence des êmigrês ne seront abordêes que pour les hommes. Le tableau du bas de la pageL~indiquela rêpartition des 71 émigrês masculins selon la profession et le lieu de rêsidence au 1er septembre 1978. Le premier type d'activitê est l'agriculture, occupant 37 % des 15-45 ans, dont une majoritê de planteurs (23 %), quelques ouvriers agricoles

(13 %) et un seul dêpendant non salariê (1 %), ce qui confirme la recherche d'indêpendance êconomique constatêe pour les êmigrants de 1975-1978. Viennent ensuite les diverses professions urbaines (chauffeur,.tailleur, êlectricien, peintre), regroupêes sous la rubrique "artisan", qui correspondent à 24 % des émigrés, dont près du tiers d'apprentis. Les scolaires (êlèves des cycles primaire et secondaire, aucun du supérieur). rêsidant en dehors de Karakpo ont êtê comptês parmi les êmigrés; ils reprêsentent 14 %de ceux-ci (2). Les manoeuvres urbains correspondent'à 13 % des émigrés. Les autres professions n'occupent qu'une part rêduite

fonctionnaires (3 %), êcole coranique (4 %), divers (commerçants, malade) (6 %) .En réparti~sant

les scolaires et les divers selon le genre d'agglomêration oU,ils rêsident, les migrations de type urbain l'emportent très légèrement, avec 51 % des êmigr.és •. ,

En se limitant toujours aux hommes de 15 à 45 ans, la première rêgion de rêsidence est le Centre-Ouest ivoirien, dêfini au dêbut de cette section, accueillant près du tiers (32 %) des émigrés. Les sous-prêfectures de Dianra et Kani viennent loin derrière (17 %).

28 %des êmigrés habitent dans d'autres zones du Nord. Abidjan a attiré 8 %des êmigrês et le reste de ceux-ci se répartit dans les autres régions de la. COte d'Ivoire (un seul à l'êtranger, à ,Paris) •

(1) C'est-à-dire le stade des TioZoZé (cf. page 12 des annexes). Les hommes de la classe 5 ont achevé leur initiation le 31 août 1978, devenant Y.afokonZé (cf. nO 9 de la page 13 des annexes).

(2) Fin septembre 1978, il Y a 23 garçons autochtones dans les classes de CP2 et CEl de l'école de Karakpo.

Les fillettes sont 28. Ces écoliers (âgés de nains de 15 ans) ont été comptés comme résidents dans les recensements du 1er septembre 1978 (tableau de la page 15 des annexes).

Le croisement de la profession et du lieu de résidence met en première pla~e

la culture du coton dans les sous-préfectures de Dianra et Kani (17 %), avec une écrasante majorité de chefs d'unité de production, suivie. par les activités agricoles dans le Centre-ouest

(14 %), surtout comme ouvriers agricoles, et les artisans ou apprentis dans les villes du Centre-Ouest (14 %). Les scolaires dans le nord de la·COte d'IvDire constituent Il % des effectifs. Les autres situations sont très minoritaires.

Les deux ethnies du village diffèrent beaucoup par les caractéristiques profes-sionnelle et de localisation des émigrés. Les Sénoufo réalisent surtout des migrations de type rural (64 %) et donnent la préférence à l'agriculture (55 %) .,}ls se répartissent entre la sous-préfecture de Dianra, presque exclusivement comme planteurs, et le Centre-Ouest, surtout comme ouvriers agricoles. Le reste est assez diffus avec toutefois ~8 % de scolaires, presque unique-ment dans le Nord. Les Dioula, au contraire, privilégient les professions urbaines (63 %), avec 34 % d'artisans et apprentis, 18 % de manoeuvres. ~euls 21 % des émigrés dioula se consacrent à l'agriculture, dans la sous-préfecture de Kani ou dans le Centre-Ouest, avec une majorité de planteurs.

Le statut de parenté ne peut être retenu pour ce bilan de l'émigration à Karakpo. Le statut de parenté au moment du départ de l'émigré est difficile à retrouver, et celui par rapport au chef de l'unité, dont i l devrait. faire partie s'il était resté au village, a peu de sens, des segmentations d'unité étant parfois intervenues après son départ. Notons toutefois, parmi les Sénoufo ayant le statut de "neveu utérin". (1), la proportion élevée de ceux ayarit migré : sur les 14 agés de 15 à 45 ans, 9 sont absents, soit 64 %. Les 9 "neveux utérins" occup'ènt d'ailleurs une place non négligeable parmi les migrants sénoufo, représentant 27 % de ceux-ci •

. Par contre, la date de départ a été demand~pourchaque émigré. Vue

l'imprécision probable de l'année indiquée pour certains d'entre eux, les migrations seront réparties en trois périodes : de 1960 à 1970 inclus, de 1971 au 1er septembre 1975, de cette date au 1er septembre 1978. Seule cette dernière période est connue avec certitude. I l apparaît que l'émigration est un processus déjà ancien, débutant au moins à l'Indépendance. En excluant les scolaires et les quelques élèves d'école coranique, dont l'année de départ a peu de signi-fication, les départs se situent, dans 40 % des cas entre 1960 et 1970, dans 25 % des cas entre 1971 et 1975, dans 36 %des cas entre 1976 et 1978. Mais le rythme moyen de départ s'est

fortement accrfi ces dernières années: de 1,9 départ par an durant la première période, on est passé à 2,6 départs par an pendant la seconde période et, surtout, à 6,3 départs par an durant la troisième période.

Les observations faites, par classe d'âge, pour chaque ethnie se retrouvent dans l'ancienneté des migrations. L'émigration sénoufo est un phénomène dont l'ampleur est récente: 21 % des.départs ont eu lieu entre 1960 et 1970, 21 % entre 1971 et 1975 et 58 % entre nos deux recensements. Ce.qui donne des valeurs moyennes annuelles de 0,5 départ pendant la première période, cette cadence doublant (1,0) au cours de la deuxième période, pour atteindre le niveau élevé de 4,5 départs entre le 1er septembre 1975 et le 1er septembre 1978. En sachant qu'aucun départ sénoufo n'a été enregistré à la fin de 1975 et en 1976, cela implique un rythme de départs de 7 hommes par an en 1977 et 1978. Ch~z les Dioula, la cadence d'émigration est plus régulière et l'ampleur du phénomène plus ancienne que pour les Sénoufo : la majorité des départs (55 %) ont lieu entre 1960 et 1970, ceux entre 1971 et 1975 représentent 28 % des départs et ceux entre nos deux recensements 17. % des départs. D'oü les rythmes de départ de 1,5 en moyenne par an pendant la première période, de 1,6 durant la deuxième et 1,7 au cours de la troisième.

(1) Nous rappelons que nous réservons l'appellation "neveu utérin" au 2ème fils d'une fellllDe, qui devrait être intégré il l'unité d'exploitation de son "oncle maternel", tel que celui-ci est défini aux pages 131 et 132.

153

Faible impaat de, l'introduation des aultures de rapport sur l'émigration

Il ressort de la présentation, peut-être rébarbative, de ces différents taux de départ, que l'émigration a une incidence importante sur l'économie villageoise, par la diminution de la taille de l'unité d'exploitation qu'elle provoque, ,par le déséquilibre qu'elle crée dans la structure de la population, par le faible dynamisme démographique qu'elle entraîne chez les Dioula, pour lesquels ce processus est plus ancien.

Mais quelle est l'influence de l'introduction des cultures de rapport sur le phénomène migratoire? Une constatation est patente: les cultures_de rapport n'ont pas stoppé l'émigration. Paradoxalement l'accroissement important de l'émïgration a accompagné l'extension_ /

rapide des surfaces en cultures de rapport, particulièrement le coton. Pendant la décennie qui suit l'Indépendance, alors que les cultures de rapport ne représentent qu'une part réduite des superficies exploitées, l'émigration est faible, seuls les Dioula y participant. Elle s'accroît en même temps que les cultures de rapport de 1971 à"1975, pour atteindre des niveaux jamais vus, en 1977 et 1978.

Un fait est certain toutefois: l'insertion des cultures de rapport dans

l'~conomievillageoise n'a pas provoqué l'émigration,. l'amorce de ce processus étant antérieure.

Parmi les hommes du villag~, rares sont ceux qui ne se sont pas absentés plusieurs mois ou

quelques années. La mémoire de presque tous les vieux est profondément marquée par les migrations qu'ils ont subies à l'époque coloniale, dans le cadre du travail "obligatoire" puis "forcé", ce pour les besoins de l'administration coloniale ou d'intérêts privés européens dans la moitié méridionale de 1~_COte d'Ivoire (plantations de café-cacao, entreprises forestières). Après l'abolition du travail "forcé" (avril 1946), le mouvement vers le Sud s'est poursuivi, soit de façon définitive, soit, le plus souvent, de façon provisoire.

! L'origine des départs doit être recherchée a~tre part que dans l'introduction des cultures ~e rapport. Deux éléments jouent probablement un rôle dans cette émigration:

l'atti~ancevers une économie différente et la recherche d'une certaine émancipation, ainsi que le laissent supposer les professions exercées par. les émigrés (planteur, salarié, artisan) et le statut des migrants, surtout des jeunes, dépendant le plus souvent de leur père et n'ayant pas ou peu de dépendants' (proportion importante de célibataires) •

Deux destinations son~ préférées. La région forestière du Centre-Ouest, avec ses plantations de café-cacao et ses agglomérations urbaines, constitue le premier pOle d'attraction,' que ce soit par l'ancienneté ou par l'importance. La culture du coton dans la

savane de transition immédiatement au sud du pays sénoufo est un, objectif récent.

La progression rapide de l'émigration se poursuit-elle depuis nos observations de la. campagne agricole 1978-1979 ? Les données démographiques ont pu être actualisées avant que cette section ne soit dactylographiée (1). Les résultats du recensement de l'ensemble de la population résidant à Karakpo le 11 juillet 1980, rassemblés dans le tableau de la page suivante, montrent que la tendance ne s'est pas maintenue. En 21 mois et demi, le volume de la population 'villageoise a augmenté de 8 %, avec 6 %pour les Sénoufo et 12 %pour les Dioula. Cet

accrois-sement est provoqué essentiellement par les naissances, surtout chez les Dioula, ce qui explique

q~e la progression du nombre d'actifs (15-59 ans) soit plus faibla : 4 i pour l'ensemble du village, 6 %pour les Sénoufo et 2 %pour les Dioula. Ce qui entraîne une baisse du taux d'acti-vité pour les Dioula et pour l'ensemble du village (2).

(1) Cette actualisation des données n'a pas été possible pour les superficies exploitées, du fait de la lenteur de notre procédé de mesure.

(2) 44 % pour l'ensemble du village, 44 % pour les Sénoufo, 41 % pour les Dioula. Les taux d'activités pour 1975 et 1978 sont indiqués à la page 142.

R E C ENS E MEN T D E L A POP U LAT ION 17 JUILLET 1980

D E K A R A K P 0

Répartition par ~ge, sexe et ethnie Unité : Nombre d'individus

Classes d'âge HOMMES FEMMES TOT A L

Autochtones <Il Autochtones <Il Autochtones <Il

.. eu ..:l ~ ..:l eu ..:l

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en A E-< <Il en A E-< <Il en A E-< <Il

1 0- 11 48 31 79 13 92 35 28 63 2 65 83 59 142 15 157

2 12 - 17 10 10 20

-

20 14 13 27 1 28 24 23 47 1 48

3 18 - 23 3 3 6 1 7 3' 7 10 3 13 6 10 16 4 20

4 24 - 29 8 5 13 2 15 9 5 14 2 16 17 10 27 4 31

5 30 - 35 7 3 10 1 11 7 5 12 1 13 14 8 22 2 24

6 36 - 41 6 3 9- 3 12 5 5 10

-

10 11 8 19 3 22

7 42 - 47 3 2 5 2 7 8 4 12

-

12 11 6 17 2 19

8 48 - 53 4 3 7 1 8 6 4 10 1 11 10 7 17 2 19

9 54 -'59 6 1 7

-

7 4 1 5

-

5 10 2 12

-

12

10 60 - 65 6 2 8

-

8

-

3 3 6

-

6 9 5 14

-

14

11 66 - 70 3 1 4

-

4 5 2 7

-

7 8 3 11

-

11

12 72 - 77 1

-

1

-

1 2 1 3

-

3 3 1 4

-

4

13 78 - 83

- - - - -

1 1 2

-

2 1 1 2

-

2

T OTA L 105 64 169 23 192 102 79 181 10 191 2rJ7 143 350 33 383

,

155

Si l'on s'intéresse aux 15-45 ans, le solde migratoire est très légèrement positif. Chez les Sénoufo, deux hommes (classes 5 et 6 : 30-41 ans) sont partis cultiver du coton près de Dianra et 4 femmes ont quitté le village, 2 pour la sous-préfecture de Dianra, une divorcée récente vers le Centre-Ouest et une jeune fille mariée dans un village voisin.

Pas une seule femme n'est revenue. Pour les hommes, un,~ait est frappant: sur six retours, èinq concernent des individus de classe 4. Ces cinq retours peuvent s'expliquer par le début du stade principal d'initiation pour les membres de cette classe d'âge (1). Avec la proportion d'émigrés plus faible constatée plus haut au 1er septembre 1978 pour la classe 5, celle dont le stade principal d'initiation s'achevait alors, ceci prouve le poids encore important qu'occupe l'initiation masculine sénoufo dans les structures villageoises~

~

Chez les Dioula, quatre départs masculins (1 de classe 2, 3 de classe 3) sont enregistrés, 3 vers le Centre-Ouest comme ouvriers agricoles et 1 au Service Civique. Deux femmes de classe 4 sont arrivées au village.: une nouvelle mariée et une épouse d'émigré.

Outre l'émigration, étudiée dans la section précédente, un deuxième facteur provoque la diminution de la taille de l'unité d'exploitation. Il s'agit du phénomène de

segmentation~ c'est-~-direl'éclatement d'une unité d'exploitation en plusieurs communautés prenant leur indépendance dans la production et la consommation.

--Tout d'abord seront analysées les conditions dans lesquelles se sont réalisées les scissions entre nos recensements de 1975 et 1978. Puis, ayant profité du recensement du 17 juillet 1980 pour repérer les dernières divisions survenues, ces événements récents seront abordés. Dans un troisième point, la progressivité du processus de segmentation sera démontrée.

Pour finir, l'historique des scissions anciennes sera retracé à partir des informations recueillies auprès des vieux du village •

• 5 scissions s~noufo en~re 1975 e~ 1978

Aucune segmentation n'a été enregistrée parmi les unités d'exploitation dioula entre le 1er septembre 1975 et le 1er septembre 1978. Dans le même temps, se sont opérées chez les SénoufQ 5 bipartitions. Parmi celles-ci une distinction s'impose. La séparation, de leur unité d'exploitation respective, de deux femmes divorcées de classe 7 (40-45 ans en 1978), constitue une situation provisoire, leur intégration ultérieure à l'unité d'exploitation de l'homme de leur. choix étant probable.

Par contre la séparation de trois hommes, de leur unité d'exploitation respective, est vraisemblablement définitive. Effectuées sans l'accord des chefs d'unité concernés, ces trois segmentations affectent des unités d'exploitation de taille supérieure

~ ~a moyenne (2). L'une des unités segmentées est d'ailleurs la plus grosse du village en 1975 35 membres dont 14 actifs (15-59 ans) répartis en 4 familles (3) et exploitant près de 23 hec-tares. La seconde unité scindée comprend 3 familles, 25 personnes do~t 10 actifs et cultive plus de Il hectares. La troisième unité est composée de 2 familles, de 13 membres àont 5 actifs, et met en valeur près de 10 hectares.

(1) Seuls trois jeunes étaient présents lors de l'admission de la classe 4 dans l'enclos initiatique. Cinq sont donc venus dans les mois qui ont suivi, la cérémonie nocturne d'admission dans l'enclos initiatique étant renouvelée pour eux après paiement d'une amende constituée d'un taurillon par postulant.

(2) En 1975, la dimension moyenne de l'unité d'exploitation sénoufo est de 10,7 personnes dont 5,0 actifs, pour 6,7 ha.

(3) Voir à la page 123 le sens donné à ce terme.

Dans le document SENOUFO DES CULTURES RAPPORTDANSL (Page 147-161)