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DANS LE BASSIN VERSANT DE MEJERDA

6.1. Approche Méthodologique : élément de la cartographie de l’évapotranspiration réelle réelle

6.2.2. La variation interannuelle de l’ETR

Nous signalons d’abord que nous allons focaliser notre attention sur la variation interannuelle des cumuls de l’ETR uniquement sur la période étudiée (2000-2011). Ensuite, l’approche cartographique représentée dans la figure 74, dans la description, assurément, nous rappelons ici que nous avons choisi une moyenne de 16 pixels voisins qui représentent en général la réalité dans chaque secteur choisi. Cette échelle a été choisie pendant les campagnes de terrain et elle peut résumer l’allure du site échantillonné. Le choix de ces sites se base sur les facteurs suivants :

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Ces points de 1km de côté (grille de 16 pixels d’une résolution spatiale de 250m) ont été choisis de façon à illustrer plus en détails les grandes tendances observées à l’échelle de la région ;

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La typologie des sols : chaque site a été choisi selon la typologie des sols dans le BV de la Mejerda (cf. figure 17, les sols dans le B.V de la Mejerda). Nous avons essayé de représenter la capacité de rétention en eau de chaque type de sol pour en déduire son intervention sur le rythme de l’ETR ;

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Le taux d’humidité des sols : c’est à la base de la carte de l’humidité des sols (cf. figure 68, humidité relative des sols) que nous avons choisi les sites. En fait, l’humidité des sols nous renseigne sur l’état de la réserve utile de chaque type de sol (Gond et al. 2004 ; Simonneaux V., 2009 ; Zribi et al., 2014) pour en déduire enfin son relation avec les niveaux de l’ETR ;

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Les facteurs géographiques, notamment, la topographie, l’exposition, les conditions environnementales (changement de l’occupation des sols d’un secteur à un autre), étage bioclimatique…etc. Ceci vise à représenter les différents secteurs du BV de la Mejerda et de suivre de près les comportements interannuels de l’ETR, pour démontrer l’individualité climatique de chaque ensemble régional ;

176 L’analyse de la figure 74 relative à l’évolution de l’ETR et le tableau 35 concernant les statistiques descriptives des variables retenues, permet d’établir une certaine classification de la variabilité interannuelle des cumuls de l’ETR. Cette variabilité est classée en trois groupes56, et ce à partir de leur degré d’intensité :

Groupe 1 : variabilité élevée comprend les sites abrités et des vallées (Badrouna, Testour, Er-Ramlia). L’ETR manifeste une irrégularité importante où l’écart type enregistre le niveau le plus élevé dans le BV de la Mejerda (39,6 mm à Er-Ramlia, 38,1 mm à Badrouna et 31 mm à Testour soit une variation relative respectivement (7,1%, 6,2% et 5,9%). Dans les trois stations, le niveau minimal de l’ETR se coïncide l’année agricole 2003/2004 par contre, il atteint son maximum durant l’année agricole 2007/2008. Ces deux pics extrêmes (un coefficient de stress hydrique faible et un coefficient de stress hydrique élevé) sont liés vraisemblablement aux quantités de pluies reçues. L’on sait que la période de reconstitution des réserves utiles est très variable en fonction des conditions pluviométriques de l’année et même le niveau de ces réserves dépend fortement de la lame d’eau écoulée (Cosandey et al., 2012). Ainsi, selon les statistiques de CRDA l’année agricole 2003/2004 correspond à l’année la plus pluvieuse et inversement pour la saison 2007/2008, et ce pour la période de 2000 à 2011. L’allure de cette variabilité interannuelle est gouvernée, en premier lieu, par la position topo-climatique des sites. Ils se trouvent dans une situation abritée caractérisée par l’instabilité climatique. En deuxième lieu, apparaissent les particularités de l’occupation des terres. La forte variabilité dans ce groupe est associée à l’occupation des sols des cultures annuelles (Badrouna : blé et orge ; Er-Ramlia : fourrages) par contre la faible variabilité est observée à Testour, occupée par des plantations arborés (olivier). Cela dit que l’ETR est beaucoup plus variable pour les espèces végétales annuelles que les plantations arborées (El Garouni et al., 2001). Un autre facteur peut expliquer la variabilité de l’ETR dans ces sites retenus. Il s’agit des caractéristiques des sols, en particulier la capacité de rétention en eau, qui influence sur le stockage de la réserve hydrique. En fait, la majorité des sites retenus sont localisés sur des sols alluviaux, riveraines des cours d’eau. Ici, la recharge des réserves utiles est donc davantage dépendante de l’irrégularité du rythme des précipitations, dans la mesure où les apports infiltrés dans les sols sont très variables d’une année à l’autre.

Groupe 2 : une variabilité modérée qui concerne les stations de Cherfech et du Kef. Bien que les deux stations soient diversifiées sur plan topographique, elles se rassemblent en termes d’intensité de dispersion. Certes, les courbes évolutives des cumuls de l’ETR dans ces deux stations présentent des fluctuations un peu rapides autour de la moyenne annuelle. L’écart type oscille de 26,6 mm à Cherfech à 28,3 mm au Kef, avec une variabilité relative de 5,2 % à 5,6 %. Mais, le poids des facteurs géographiques explicatifs de la variabilité interannuelle n’est pas le même pour les deux stations. La variabilité au Kef s’explique par l’irrégularité des facteurs climatiques affectant l’évapotranspiration réelle, en particulier les précipitations, les températures, les vents et l’insolation et ce d’une année à une autre. À titre d’exemple « la variabilité spatiale et temporelle des précipitations étant très influente sur la

56 Nous avons utilisé pour la discrétisation de la série des sites la méthode « des seuils naturels » ; c’est la plus facile à mettre en œuvre et la plus couramment utilisée en géographie. Cette méthode consiste à choisir comme bornes des classes les « trous » de la distribution. Les valeurs sont placées et ordonnées sur l’échelle numérique d’un diagramme de distribution. Les zones de séparations « naturelles » plus large entre certaines valeurs sont choisies visuellement comme limite de classes (Zanin et al., 2003).

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grandeur et la répartition géographique de l’ETR » Caroline et al., 2005. Cependant, d’une

part l’effet du changement de l’occupation des sols et d’autre part, l’effet de la mer sont responsables de la disparité temporelle de l’ETR dans la station de Cherfech.

Groupe 3 : une faible variabilité s’y retrouve en trois stations (Tala, El-Feîja et Ghar Melh), malgré la disparité spatiale entre ces stations, elles présentent une faible variabilité interannuelle de l’ETR, avec une variation relative alentour de 3 %. Dans les environs de Tala, l’écart-type est de l’ordre de 12,6 mm. Ayenew T., (2000) suppose que la faible variation spatiale de l’ETR est liée à un pouvoir d’évaporation qui se déroule plus ou moins au même rythme sur la surface à sol nu durant toute l’année. Certes, l’écart diminue progressivement, dans le Haut Tell, au fur et à mesure qu’on se dirige vers le sud. Ceci s’explique par le changement du poids des facteurs géographiques relatifs à chaque station, ainsi que les éléments climatiques affectant l’évapotranspiration réelle en particulier, les précipitations, les températures, les vents et l’insolation et ce d’une année à une autre. À titre d’exemple « la variabilité spatiale et temporelle des précipitations étant très influente sur la

grandeur et la répartition géographique de l’ETR » Caroline et al., 2005. En ce qui concerne,

les massifs de la Kroumirie (station d’El-Feîja) se caractérisent par une variation de 3,6 % soit un écart-type de 17,5 mm. La faible variabilité de l’ETR est en fonction d’une réserve hydrique qui ne change pas beaucoup d’une année à l’autre et un couvert végétal qui garde sa stabilité tout au long de la période étudiée (formation forestière). Enfin, Ghar Melh enregistre la variabilité la moins élevée dans l’ensemble du BV de la Mejerda (tableau 34). Il est à noter que la variabilité de l’ETR est plus marquée dans les sites continentaux que dans les sites littoraux. Ceci confirme les propriétés de la répartition géographique des paramètres climatologiques en Tunisie, dans la mesure où la mer joue le rôle de modérateur de la variabilité climatique. De plus, le pouvoir évaporant du climat « diminue d’environ 1% chaque fois que le teneur en sel augmente de 1% à cause de la faible pression de vapeur

d’eau dans l’eau salée » Csandey et al., 2012. L’on sait que la basse Mejerda est occupée par

plusieurs plans d’eau salés et des surfaces marécageuses (Garaât Mabtouha, domaine d’Utique, Lagune Ghar Melh, Sebkhet Ariana…).

Tableau 4 : Variabilité interannuelle de l’ETR (mm) à quelques stations et parcelles-types dans le BV de la Mejerda (2000-2011)

Écart absolu (mm) Écart type (mm) Coefficient de variation (%)

Badrouna 88,9 38,1 6,2 El-Feîja 78,1 17,5 3,6 Testour 141,3 31,0 5,9 Er-Ramlia 94,1 39,6 7,1 Ghar Melh 47,3 14,8 2,9 Cherfech 101,4 26,8 4,5 Tala 30,4 12,6 3,3 Kef 101,2 26,6 5,1

178 Figure 74: Variation interannuelle de l’ETR (mm) dans le B.V de la Mejerda (2000-2011)

Au total, la cartographie permet de distinguer l’intensité de la variabilité interannuelle de l’ETR de manière synthétique dans les différentes sous-régions du B.V de la Mejerda. La disparité spatiale de cette variabilité s’explique par le changement du poids des facteurs géographiques relatifs à chaque secteur. Il est possible qu’aucune tendance temporelle ne puisse également être établie car la période considérée est courte et n’introduit pas des résultats significatifs.

179 En somme, il est important de déduire, en général, une ressemblance morphologique de la spatialisation entre l’ETR et l’ETM provenant, en grande partie, des mêmes facteurs agissants, dans la mesure où le gradient Nord/Sud et intérieur/littoral garde la même position. En revanche, l’ETR montre une variation interannuelle plus marquée que celle de l’ETM en raison de la forte irrégularité, en plus que les conditions climatiques, des propriétés pédologiques reliées au stock d’eau dans le sol (Amri R., 2013).

Pour mieux approfondir les connaissances de l’ETR dans le B.V de la Mejerda, nous proposons de fignoler l’analyse à l’échelle saisonnière et mensuelle. Afin de cerner les grands traits significatifs de la répartition spatiotemporelle de l’ETR.