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DANS LE BASSIN VERSANT DE MEJERDA

6.1. Approche Méthodologique : élément de la cartographie de l’évapotranspiration réelle réelle

6.2.1. Le niveau moyen annuel

L’analyse de la figure 73, permet de déceler le niveau de l’ETR dans ses valeurs annuelles. Ce niveau varie de 320 mm à 630 mm selon les régions et avec un écart absolu entre le minimum et le maximum de l’ordre de 310 mm, soit un écart relatif de 49,2%. La moyenne journalière de l’ETR dans la région oscille de 0,88 mm à 1,73 mm. L’écart absolu, montre que la variation de l’ETR dans le BV de Mejerda est, nettement, plus faible que celle de l’ETM qu’est d’environ de 650 mm (cf. figure 61 chap, 5). Cet écart nous renseigne aussi, sur le degré de la variation spatiale des cumuls de l’ETR dans le BV de la Mejerda. En effet, la répartition géographique de l’ETR présente, généralement, deux gradients opposés.

Le premier, latitudinal du Nord vers le Sud. Ce gradient enregistre un écart absolu de 291,5 mm (entre la station de Jendouba et Tala), soit une variation relative de 47,3 %. Ceci s’explique par plusieurs facteurs :

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L’effet du changement de l’occupation du sol : on passe, brutalement, d’une végétation dense à feuilles persistantes dans les sommets des montagnes au nord à de terres presque à nu au sud. Par conséquent, une grande partie de l’énergie solaire serait consommée sous forme de chaleur latente, ce qui augmente les quantités de l’évapotranspiration. De plus, la vitesse de l’évaporation est plus importante dans les secteurs de la Kroumirie à forêts feuillées, ainsi que ces versants à végétation agricole (les grandes cultures), à l’inverse elle est assez faible et dans les plateaux et les plaines à sols nus aux environs de Tala.

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La capacité de rétention en eau : dans le sud du Haut Tell les valeurs sont inférieures à 400 mm, sauf dans quelques secteurs couverts d’une végétation forestière (des forêts des résineux) tels que le pin d’Alep, le Genévrier le Thuya de Berbérie et le romarin, situés aux sommets des Jbels de la Dorsale plus à l’ouest. Dans cette condition, les secteurs sont à forte capacité de retenir l’eau et par conséquent un stock d’eau dans le sol utile pour l’évaporation. Par contre les secteurs avoisinants des sommets de montagnes, en particulier, les versants qui ont une faible capacité de retenir l’eau à cause de leur pente plus moins forte et en conséquent une diminution des quantités de l’ETR. Plus au nord, les versants sud de la Kroumirie enregistrent le niveau plus élevé de l’ETR dans l’ensemble de la région. Nous soulignions ici, que les quantités évaporées dépassent les 600 mm, par exemple 616,3 mm à Jendouba, 628,4 mm à El-Feïja. Ceci, est lié aux caractéristiques des sols (sols alluviaux, et luvisols) qui ont la plus haute capacité de rétention en eaux, notamment, dans l’horizon (0 à 20 cm) Ben Hassine et

al., 2002.

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La densité du couvert végétal : avec une densité assez élevée du couvert végétal, comme celle de la Kroumirie, on enregistre plus de volume d’eau stockée dans le sol (Cosandey et al.,

173 2012). Dans le cas inverse, on est devant une formation d’une couche dure dans les premiers centimètres du sol. Cette couche empêche l’eau de la pluie de s’infiltrer et diminue par la suite le rythme d’évaporation des sols.

Cependant le deuxième gradient, moins important que le premier, intéresse la destination Ouest/Est. De ce fait, les valeurs de l’ETR diminuent progressivement au fur et à mesure en allant de Jendouba à Ghar Melh. L’écart absolu entre les deux stations atteint 113 mm, soit une variation relative de l’ordre de 18,3 %. Ce gradient caractérise, essentiellement, l’axe de oued Mejerda. Il est en relation avec l’effet de la mer, dans la mesure où les valeurs du coefficient de stress hydrique diminuent lorsqu’on se rapproche du littoral. Par contre, ce coefficient prend de l’ampleur sous l’effet de la continentalité.

174 Pour approfondir l’analyse précédente, nous avons suivi, de plus près, la variation spatiale des cumuls annuels de l’ETR. En effet, la figure 73 montre, généralement, deux secteurs opposés : d’une part la vallée de la Mejerda et d’autre part, les versants de la Dorsale et les plateaux du Tell.

La haute Mejerda : il comprend les massifs de la Kroumirie et leurs versants sud, les plaines de l’axe la Mejerda, et les fonds des vallées. Dans cet ensemble, l’ETR varie de 460 mm dans les plaines et les secteurs abrités (dépression de Gardimaou à l’ouest de Jendouba, les basses terres du delta de la Mejerda) à 630 mm aux sommets des montagnes (la Kroumirie, Jbels Ouergha à l’ouest du Kef, les collines de Teboursouk). L’écart entre ces deux ensembles est de 170 mm, soit une variation relative de 27 %. Ce schéma est lié principalement au niveau de stress hydrique. Ce niveau diminue sous l’effet de l’altitude, c’est pourquoi les secteurs élevés subissent moins de stress que les bas (Feki., 2006). À titre d’exemple, El-Feîja située à environ 900 m se caractérise par une moyenne annuelle de coefficient de stress de 0,74 par contre, Gardimaou, situé au fond de la vallée Mejerda à environ 200 m d’altitude, retient un niveau moyen annuel de coefficient de stress de l’ordre de 0,67. Ce schéma s’explique aussi par le fait que « l'évapotranspiration réelle augmente avec l'altitude suivant

la disponibilité d'humidité dans le sol au lieu de le gradient de température » Ayenew T.,

2003.

Les versants nord de la Dorsale et les plateaux du Tell : ils contiennent les sommets de la Dorsale et ses piémonts, les environs de Tala et haute vallée de Mallègue. En dehors de quelques sommets de montagnes le niveau de l’ETR oscille de 320 à 420 mm par an. L’écart absolu alentour de 80 mm, soit une variation relative de 19,1 %. En effet, l’ETR manifeste une faible variation dans les environs de Tala et la haute vallée de Mallègue, sans doute, sous l’effet de la dominance des sols nus. À cet effet, El Garouni et al en 2000 ont montré que l’ETR estimée dans la basse Mejerda varie suivant l’occupation du sol : « elle est en moyenne de 2 mm par jour sur sol sec où dominent les sols nus, de 4 mm par jour dans les zones irriguées et/ou à végétation dense et elle peut atteindre 8 mm par jour sur les surfaces en eau». En ce qui concerne les faibles valeurs de l’ETR, observées dans les versants nord de la Dorsale et ses piémonts, elles s’expliquent par l’effet de l’exposition. En fait, les versants de Dorsale sont situés à l’ombre et reçoivent moins de rayonnement solaire, l’un des facteurs principaux de la demande évaporative. De plus, ces secteurs sont, généralement, situés au tracé de l’iso-ligne 400 mm et par conséquent, le stock d’eau dans le sol est moins important que les secteurs nord du BV de la Mejerda. En résultat, ce stock d’eau sera épuisé rapidement par l’ETR.

Il reste à signaler que la basse Mejerda est occupée par un palier variant de 503,6 mm à Ghar Melh à 601,7 mm à Cherfech. Les fortes valeurs de l’ETR dans cette région, bien que située à proximité de la mer, sont liées à la présence des nappes phréatiques superficielles, des surfaces d’eau (Garaât Mabtouha, Lagune Ghar Melh, Sebkhet Sidi Bahroun…) et des périmètres irriguées le long du cours d’eau Mejerda (El Garouni A., 1995).

Cette variation spatiale s’observe aussi à l’intérieur de chaque secteur, principalement, sous l’effet de la pente et de l’exposition. Les versants orientés vers l’ouest (les versants des monts d’Ouergha à l’ouest du Kef) présentent les niveaux les plus élevés qui

175 suivent la logique de l’arrivée des flux humides du Nord-Ouest. Les versants exposés au sud, notamment les versants sud de la Kroumirie, ont eux aussi des valeurs élevées de l’ETR comparées à ceux exposés au nord, et plus précisément les versants nord de la Dorsale, en raison, de leur forte densité de végétation et leur exposition au rayonnement solaire. Alors que les versants exposés au nord, étant plus secs et plus dénudés, sont situés sur les pentes fortes, au mauvais drainage et aux couverts clairs auxquels s’associent, souvent, à la culture en sec ou le pâturage, favorables au déclenchement du feu. Ces secteurs enregistrent les valeurs les plus faibles de l’ETR.

En résumé, l’analyse de la cartographie de l’ETR révèle, d’abord, que la végétation dans la région d’étude est soumise à un stress hydrique très élevé, et ensuite, une dominance très nette des surfaces souffrant d’un déficit hydrique plus ou moins fort (les secteurs secs) à l’inverse, le confort hydrique n’est représenté que sur une faible superficie, en particulier, sur la bande de la Kroumirie (Mjejra et al., 2015). Enfin, l’existence d’une structure spatiale, au regard des propriétés pédologiques, occupation des terres et des conditions hydriques (Galleguillos M., 2010). C’est-à-dire l’ETR est à la fois influencée par la teneur en eau du sol et par la manière dont cette eau du sol répond à la demande atmosphérique.