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LA VALIDITE DE LA RECHERCHE EXPLIQUEE PAR LA FORCE DU RESEAU DU CHERCHEUR

DEUXIEME PARTIE : METHODOLOGIE ET DESCRIPTION DU TERRAIN DE RECHERCHE

Encadré 15 : les relations avec la hiérarchie

3.2.4 LA VALIDITE DE LA RECHERCHE EXPLIQUEE PAR LA FORCE DU RESEAU DU CHERCHEUR

La validité d’une recherche qualitative et constructiviste se juge à l’aide de critères tels que l’adéquation et l’enseignabilité (Girod-Séville et Perret 1999). L’adéquation (Glasersfeld 1988) correspond à la capacité de la recherche à expliquer une situation donnée. Cela a été un souci constant de notre démarche. Elle résulte de l’ancrage empirique fort, des allers et retours permanents entre théorie et pratique, de la qualité de la description proposée, tels qu’exposés dans les paragraphes précédents. L’enseignabilité (Le Moigne 1995) correspond au caractère transmissible de la connaissance produite. Elle repose sur la reproductibilité, l’intelligibilité et la constructibilité. La description de notre démarche de recherche, du passage de la pratique à la théorie, puis des éléments de réflexivité, contribue à la prise en compte de ce critère.

Le chercheur-acteur est en interaction à la fois avec le monde professionnel et le monde académique, ces interactions donnant lieu à la construction de la recherche, ou dans le cas présent, de la thèse. « Autant que sur la permanente mise en question de ses propres idées, le chercheur travaille sur une zone de contact avec le terrain (Hastrup 1997), dans laquelle les acteurs du terrain le défient et le confrontent à leurs propres théorisations de leurs pratiques. Le chercheur est de plus confronté à des réviseurs puis à un lectorat plus large.

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Les effets bénéfiques de ces sources de discipline ont été mis en avant dans une étude récente de Brown (2005), dans laquelle il trouve une corrélation entre les remerciements et les présentations de versions préalables et la probabilité de publication et d’impact conséquent de la recherche. »11 (Ahrens et Chapman 2006, p. 837).

Pour la sociologie de l’acteur-réseau, la construction d’un tel projet est le résultat de la constitution d’un réseau.

C’est la démarche entreprise par Chua (1995) qui, faisant une recherche en participant personnellement à la mise en place de nouveaux outils comptables dans des hôpitaux, la présente comme le résultat construit et réflexif d’une négociation dialogique entre de multiples réalités, la sienne et celles appartenant aux collègues de l’hôpital et de l’université (p. 114).

Pour expliquer notre positionnement, nous décrirons « notre » réseau, c’est-à- dire le réseau qui nous a permis de mener à bien la recherche.

La force du réseau professionnel

Sur le terrain, nous avons été en permanence, durant les trois ans de la recherche (voire davantage avant et après la période d’observation) au contact avec de nombreux acteurs de la stratégie et du contrôle. Les acteurs mobilisés sont avant tout ceux auxquels nous avions un accès direct de par notre position dans l’entreprise : au quotidien, lors de séminaires ou de réunions de travail. Il s’agit d’abord de la direction de la division : président et membres du comité de direction, les VP (vice-présidents), y compris notre supérieur hiérarchique, le VP finance.

Certes, le travail de cette direction est directement influencé par une autre direction, celle du groupe basée aux Etats-Unis. Nous n’avions cependant qu’un accès limité, centré sur quelques projets ou moments spécifiques, à ces acteurs.

11 As well as the ongoing questioning of her own ideas, the field researcher works in a zone of contact with the field (Hastrup 1997) in which members of the field challenge and confront her with their own theorizing of their practices. The researcher is subsequently confronted with reviewers and then a wider readership. The beneficial effects of these sources of discipline are highlighted in a recent study by Brown (2005) in which he found a correlation between acknowledgements and the presentations of earlier drafts and the likelihood of publication and subsequent impact.

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Nous ne les avons donc mobilisés que quand cela était nécessaire pour expliquer les actions des acteurs de la division.

Une autre catégorie d’acteurs a en revanche joué un rôle important : les dirigeants locaux, et plus spécifiquement les responsables commerciaux locaux, ainsi que les directeurs financiers et les contrôleurs de gestion. De par notre fonction, nous étions en contact fréquent avec eux, par téléphone et par courriel, parfois de visu.

Enfin, au hasard des projets, nous étions en contact avec d’autres membres des équipes centrales ou locales.

Nous ne pouvons pas, bien sûr, oublier les acteurs non humains, constitués essentiellement d’outils comptables et informatiques et de divers reportings. La force du réseau ne vient pas seulement du nombre des acteurs, mais surtout de la force des liens créés entre les acteurs du réseau, ou en l’occurrence entre le résultat de la recherche, la thèse et les acteurs professionnels.

Il faut ainsi s’assurer que l’inscription que constitue le document final soit une bonne traduction des actions des acteurs. Pour nous assurer d’une rédaction qui respecte la réalité telle qu’elle est vécue par les acteurs, nous avons recouru à trois éléments :

- Triangulation des données (Glaser, 1978, Huberman et Miles, 1991, Yin, 1984) en utilisant plusieurs sources d’informations : documents, observations, interviews, etc.

- Constitution d’un corpus de documents vers lequel nous nous sommes souvent tournés au cours de notre travail : supports des conférences téléphoniques mensuelles, documents de référence distribués durant les deux séminaires de cadres, de nombreux supports de revues budgétaires, reportings hebdomadaires pour un pays, différents éléments de reportings, etc. La liste des documents exploités est donnée en encadré 10 ,p. 143).

- Confrontation de notre travail aux acteurs du terrain. Compte tenu des conditions d’accès au terrain, cette confrontation n’a pas revêtu le

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caractère formel habituellement recommandé pour cette étape. Notre récit final n’a pas été relu par les acteurs du terrain, peu intéressés par notre travail de recherche. Néanmoins, nous discutions de nos perceptions avec différents acteurs de l’organisation dès que nous en avions la possibilité.