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CHAPITRE 2 Modélisation et microfabrication du transducteur GaAs

2.4 Réalisation des membranes résonantes

2.4.4 Usinage par gravure plasma

Nous avons vu précédemment les limites de la gravure humide notamment la reproductibilité et la difficulté pour obtenir des gravures nettes avec un état de surface lisse, plan et sans défaut après plusieurs heures de gravure. Cette constatation nous conduit à étudier d‘autres techniques de gravure. De plus le taux de gravure dans les conditions d‘une gravure longue est relativement difficile à maîtriser. Une alternative intéressante à la gravure humide pour la fabrication de membranes de GaAs est l‘utilisation des techniques de gravure plasma. Ce procédé permet de réaliser une gravure hautement anisotrope avec un excellent profil de gravure. De cette façon, il est possible d‘obtenir des surfaces lisses et planes et de contrôler avec une plus grande précision les profondeurs de gravure. Nous avons réalisé une étude préliminaire de la technique de gravure qui offre des perspectives intéressantes pour de futurs travaux. θar manque de temps, ce procédé n‘a pas été employé pour la fabrication complète des dispositifs.

Nous utiliserons dans le cas présent un système ICP III-V (Multiplex Inductively Coupled

Plasma SR III-V system) de la compagnie Surface Technology Systems couramment employé pour la gravure de composés III-V et de métaux par plasma à haute densité, basse pression et basse énergie. La source ICP (« Inductively Coupled Plasma ») permet de créer un plasma haute densité à l‘aide d‘une antenne en forme de spirale, émettant des fréquences de l‘ordre du εHz (1γ.ηθεHzΨ selon un couplage inductif (Figure 2.21). Il en résulte que les électrons sont alors déviés par le champ électromagnétique et tournent hélicoïdalement pendant suffisamment de temps pour acquérir assez d‘énergie pour ioniser le gaz. Les ions sont plus lourds que les électrons et se déplacent beaucoup plus lentement sous l‘action du champ électromagnétique. Le plasma est formé par la création de paires ions/électrons liées aux collisions inélastiques entre les électrons chauds et les atomes neutres.

Figure 2.21: Schéma (a) d’un réacteur de plasma couplé à l’induction205 et (b) de l’intérieur

d’une chambre de gravure plasma ICP206.

La gravure plasma du GaAs est de plus en plus fréquemment réalisée par des chimies chlorées à température ambiante, qui fournissent un haut taux de gravure et donnent un état de surface relativement lisse207. Les gaz les plus utilisés sont le dichlore (Cl

2), le trichlorure de bore (BCl3), le tétrachlorométhane (CCl4), le tétrachlorure de silicium (SiCl4) ou une combinaison de plusieurs d‘entre eux. Les gaz à base de fluor peuvent également être utilisés pour produire une gravure plus sélective mais leurs produits de réaction sont en revanche non-volatiles207. C‘est-à-dire qu‘ils produiront des surfaces présentant des micromasques liés à une mauvaise évacuation de ces espèces, à l‘inverse des produits de réaction volatiles tels que les plasmas de chlorine. δ‘association des gaz BCl3 et Cl2 augmente la concentration d‘atomes de chlore neutres et permet la création d‘ions plus lourds donnant une meilleure anisotropie208 et un taux de gravure plus élevé209. Il est admis

que la gravure plasma est le résultat de la combinaison d‘une gravure chimique isotrope et d‘une gravure physique anisotrope (ou gravure ioniqueΨ. δa gravure physique est opérée par les ions qui frappent la surface avec une certaine énergie cinétique. Pour augmenter l‘anisotropie du procédé, des atomes neutres et lourds tels que l‘argon sont injectés dans le mélange de gaz réactifs. A l‘inverse la gravure chimique est réalisée par les radicaux, et non par les ions. Les espèces réactives sont produites dans le gaz du plasma, et diffusent vers la surface pour y être adsorbées avant de réagir avec cette dernière. Les produits de réaction sont ensuite éliminés par désorption puis par diffusion. δ‘inconvénient d‘une gravure plus physique est que le bombardement ionique affecte autant le masque que le substrat, la sélectivité est donc réduite. En général, plus le taux de gravure est lent, plus la profondeur de gravure maximale atteinte sera élevée, grâce au temps mis pour la diffusion des produits de réaction et des espèces réactives à travers le plasma210. La recette utilisée dans ces travaux est composée du mélange des gaz BCl3, Cl2, Ar208,211.

Masque de gravure

δa principale difficulté de l‘usinage plasma est de trouver un masque suffisamment sélectif pour réaliser une gravure profonde mais qui ne risque pas d‘endommager ou de polluer la surface du GaAs. On peut trouver dans la littérature plusieurs types de masques compatibles avec les plasmas chlorés à haute densité formés par des sources ICP : SiO2212, SiO2 + Cr208, SiO2 + Ni212, Ni210,212, Photo-résines épaisses207,211,213 ou SiNx207,212,214. Pour des gravures profondes à haut facteur de forme (par exemple des vias de 200µm), Rawal et al. préfèrent utiliser des masques en résine aux masques métalliques210 tandis que d‘autres auteurs optent pour des masques métalliques (ou « hard mask ») ou comme Volatier et al. une superposition de SiO2 et de Cr208. Ces derniers masques présentent deux avantages : (i) une relativement bonne sélectivité due à leur résistance aux chimies chlorées (ii) aucun re-dépôt qui pourrait engendrer des défauts de gravure. Cependant, les effets des masques de résine sont pertinents pour ce procédé. En effet, ils donnent un meilleur état de surface mais leur taux de gravure est réduit à cause de la re-déposition après bombardement des fragments BClx ou des produits de réaction et résidus de résines à la fois sur les zones à graver et sur les parois de gravure (comme une passivation)210,212,214,215. Plusieurs rapports montrent l‘intérêt d‘un masque de résine pour la formation de motifs avec des parois inclinées et plus lisses dues à la redéposition de la résine sur celles-ci212. Enfin, ils nécessitent moins d‘étapes pour être conçus et sont peu couteux.

Nous avons opté pour des masques avec une couche initiale de SiO2 avec ou sans surcouche métallique. Le SiO2 permet d‘éviter la diffusion d‘éléments métalliques provenant des éventuelles surcouches. Par méthode essai-erreur, nous avons testé les masques suivants : (1) SiO2, (2) SiO2 + Ni, (3) SiO2 + Al et (4) SiO2 + résine épaisse. Pour l‘ensemble des masques testés, un dépôt chimique en phase vapeur assisté par plasma (ou PECVD, « Plasma-Enhanced Chemical Vapor Deposition ») de SiO2 est réalisé sur une épaisseur d‘environ 2µm.

Pour les masques avec la surcouche métallique (2 et 3), le dépôt est réalisé par évaporation (Système Auto 306 de la compagnie BOC Edwards) puis structuré par procédé « lift-off ». Le nickel a été déposé sur une épaisseur de 400nm tandis que l‘aluminium l‘a été sur une épaisseur de θµm. δors des tests, l‘aluminium n‘a pas tenu sur le Siη2 (même à épaisseur réduite) et s‘est décollé lors de l‘étape de soulèvement (« lift-off »). La stratégie de masque SiO2 + Al n‘est donc pas envisageable pour la gravure plasma.

Le dernier masque testé (4) est constitué d‘une couche de Siη2 et d‘une surcouche de résine positive épaisse AZ9245 (MicroChemicals) de 5 µm. Après le dépôt et la structuration de la surcouche, le SiO2 est gravé par plasma fluoré dans le système Multiplex Advanced Oxyde Etch (AOE) ICP (de Surface Technology Systems).

Gravure plasma

Dans ces travaux, le plasma est obtenu à partir des gaz BCl3, Cl2 et Ar. Les débits des gaz Cl2/BCl3/Ar sont respectivement de 10/10/10sccm. Le plateau sur lequel est posé l‘échantillon à graver mesure β00mm de diamètre. δa puissance du réacteur ICθ est de 500W (puissance RF) tandis que la puissance de polarisation du plateau est de 50W. La température du plateau est régulée à 20°C et la pression de la chambre est fixée à 0.67Pa (ou 5mTorr). De par les longs temps de gravure (50min à 3h) nécessaires pour atteindre les objectifs de profondeur, il est primordial de réaliser celle-ci par étapes de 15-20min afin d‘éviter l‘échauffement local de la surface surtout pour les échantillons dotés d‘un masque en résine (celle-ci risque de brûlerΨ. δes gravures sont maintenues jusqu‘à ce que la totalité du masque soit consommée. Nous avons réalisé des tests de gravure sur de petits motifs et avec chaque type de masque, les résultats sont résumés dans le Tableau 2.4. Deux résultats différents apparaissent lorsque l‘échantillon à graver est collé ou non sur le porte-substrat du système ICP III/V. En effet, les échantillons sont soit collés avec de la cire thermique (Crystal Bond 555-HMP de SPI supplies) pendant la durée de cette étape, soit simplement

posés sur le porte-substrat. Nous pensons que la conductivité thermique diffère d‘un cas à l‘autre. Il en résulte des profondeurs de gravure et un état de surface différent. Sur les Figure 2.22 A à C et D à F sont représentées les images MEB des gravures avec masque de SiO2 (Échantillons de type 1), respectivement, lorsque le substrat est collé au support et lorsqu‘il ne l‘est pas. θour la même épaisseur de masque (β.1µm de Siη2) et pour une même durée de gravure, nous observons des gravures moins profondes pour les échantillons collés sur le porte-substrat mais dotés d‘un état de surface de meilleure qualité par rapport aux échantillons non-collés. La profondeur obtenue dans la configuration « collée » est de 26-27µm donnant un taux de gravure 530nm/min pour le GaAs contre 37nm/min pour le SiO2. δorsque le substrat n‘est pas collé, nous obtenons une profondeur de 62µm donnant un taux de gravure de 1230nm/min pour le GaAs et toujours 37nm/min pour le SiO2. On observe sur les Figure 2.22a et b, des résidus sur les parois qui se détachent ou qui délaminent sur l‘échantillon collé. La paroi conserve, tout de même, une très bonne verticalité des flancs à l‘inverse de l‘autre configuration qui a un profil plus isotrope. Enfin la rugosité de surface observée sur les images MEB semble plus importante sur l‘échantillon non-collé.

Figure 2.22: Images MEB de gravures plasma du GaAs avec un masque de SiO2 et avec le

substrat (a-c) collé ou (d-f) non-collé au porte-échantillon.

Nous avons ensuite testé des masques de SiO2 combinés avec une résine (AZ4903) ou une couche métallique (Ni ou Al). Les gravures ont été réalisées, cette fois-ci, sur des échantillons collés sur le porte-substrat, uniquement. Le masque SiO2 + Ni a permis de

tripler la profondeur de gravure (Figure 2.23) alors que le masque SiO2 + résine a donné une profondeur de près de 200µm (Figure 2.25a).

# Masques Particularités de la

gravure Résultats Inconvénients

1 SiO2 (2.1µm par PECVD) Collé au porte-substrat  Prof. max : 26-27µm  Gravure anisotrope  Très faible rugosité  Résidus sur les parois qui

délaminent La gravure est longue et nécessite d‘être réalisée en plusieurs étapes. δ‘objectif en profondeur n‘est pas atteint Non-collé  Prof. max : 62µm

 Gravure légèrement isotrope (~9.5µm en gravure latérale)  Surface rugueuse 2 SiO2 (2µm par PECVD) + Ni (500nm par évaporateur) Collé au porte-substrat  Prof. max : 75.6µm  Mauvaise verticalité des

profils

 θroblème d‘adhérence du Ni  Résidus sur les parois qui

délaminent La gravure est longue et nécessite d‘être réalisée en plusieurs étapes. 3 SiO2 (2µm par PECVD) + Al (6µm)

La surcouche d’aluminium n’a pas tenu sur le SiO2

4 SiO2 + Résine

épaisse (AZ4903) Collé au porte substrat

 Prof. max : 200µm  Gravure anisotrope  Flanc verticaux

 Résidus sur les parois qui délaminent

La gravure est longue et nécessite d‘être réalisée en plusieurs étapes pour ne pas brûler la résine. Apparition de piqûres et de défauts de gravure par micro- masquage.

Figure 2.23: Images MEB de gravures plasma du GaAs avec un masque de SiO2 + Ni et avec

le substrat collé au porte-échantillon; (a) vue en coupe et (b) zoom sur le flanc de la membrane.

Le masque SiO2 + résine semble être la meilleure protection pour réaliser une gravure profonde du GaAs. Cependant, nous avons observé la présence d‘un certain nombre de résidus de réaction lorsque l‘échantillon est collé au porte-substrat ce qui engendre des défauts de gravure par micro-masquage au fond des membranes (Figure 2.24). Toutefois en dehors de ces défauts, la rugosité de surface et les flancs de gravure pour la profondeur atteinte sont de bonne qualité (Figure 2.25b et c).

Figure 2.24: Images au microscope optique des défauts de gravure induits par la re- déposition de produit de réaction ou de débris de résine lors du processus de gravure plasma.

Voici plusieurs hypothèses relatives à l‘apparition de ces résidus :  la couche de SiO2

 la couche de résine

 le gaz BCl3, il est connu que le BCl3 dépose des sous-produits de bore sur les parois  des contaminants dans la chambre de gravure

 une combinaison de plusieurs d‘entre-elles.

D‘autres tests de gravure avec un plasma Cl2/Ar réalisés sur des substrats de GaN avec soit un masque de SiO2 soit un masque de résine, montrent la présence de résidus uniquement

avec la résine. εais l‘hypothèse la plus convaincante est la présence de contaminants dans la chambre de gravure. En effet, le système ICP III-V est utilisé pour la gravure de nombreux matériaux, y compris des substrats métalliques. Même si la chambre est nettoyée régulièrement, il est possible pour de longues gravures que des résidus non-volatils se redéposent sur les échantillons.

Les solutions proposées pour résoudre ces problèmes sont les suivantes :  réaliser un nettoyage approfondi de la chambre

ou lors de l‘utilisation de résine :

 augmenter les temps de pause pour laisser refroidir le masque  tester d‘autres résines que l‘AZ4λ0γ

Figure 2.25: Mesures profilométriques (a) d’une marche et d’un fond de membrane gravé par plasma, (b) avec ou (c) sans défaut.

Pour conclure, la gravure plasma est une technique qui se révèle prometteuse. En dépit des problèmes de micro-masquage obtenus dans certains tests et qui devraient pouvoir être résolus sans trop de difficultés, l‘état de surface des membranes, des flancs et leur planéité sont de très bonne qualité. Nous avons réussi à atteindre près de 200µm de profondeur de gravure ce qui est suffisant pour réaliser des membranes fines avec nos wafers. De plus, le

procédé est relativement reproductible et permet facilement d‘avoir une homogénéité de profondeur sur l‘ensemble des structures d‘un wafer.