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Ces conflits ont généralement pour origine les malentendus concernant les règles du jeu dans le cadre de la structure matricielle (Denis, 1986) dans la mesure où cette dernière crée de

1.3. Pour les individus en situation matricielle

1.3.1. Une situation de double appartenance génératrice de frustration

Dans les organisations par projet, les rapports qu'ont les salariés avec la hiérarchie sont bouleversés dans la mesure où ils sont soumis

à

une double autorité au sein de leur entreprise (Guérin, 1995). En effet, ils ont un lien de nature hiérarchique avec le chef de métier et un lien de nature fonctionnelle avec le directeur de projet, qui est responsable des résultats en matière de coûts, de qualité et de délais et qui fournit les méthodologies de travail.

Or, la revue de la littérature montre que les relations hiérarchiques avec un flux d'autorité unique et clair (une seule personne qui a un ascendant hiérarchique et une seule personne à qui rendre des comptes) sont plus satisfaisantes pour les membres de l'entreprise et résultent dans des performances économiques accrues. En effet, la double autorité est génératrice de frustrations dans la mesure où les employés n'ont pas l'impression de savoir qui est leur patron: qui faut-il séduire et impressionner afm d'obtenir une augmentation de salaire et des promotions (Reeser, 1969) ? En outre, si l'autorité est duale, l'individu a tendance à opérer un choix entre les deux (Kaplan, 1959, Etzioni, 1959, Evans, 1962), de sorte qu'une des deux autorité se trouve lésée.

La structure matricielle par projet remet donc en cause le principe de l'autorité unique recommandée par Fayol en 1976 (Greiner et Schein, 1981 ; Katz et Allen, 1985 ; Joyce, 1986 ; Barker et aU, 1988)21.

21Cleland (1984) est l'un des rares chercheurs àréfuter les deux arguments qui sont généralement opposés àla stnlcture matricielle, à savoir la frustration et l'inefficience qui découlent de la double autorité, d'tme part, et le déséquilibre de pouvoir entre la structure métier et la structure projet, d'autre part. En effet, il rejette le premier argument en rappelant que chaque individu est habitué, dès sa naissance, àêtre soumis àdeux sources d'autorité - le père et la mère - et il réfute le second argument en affirmant que le pouvoir du métier et du projet varie dans le temps et que seule la pratique permet de déterminer lequel des managers aura le plus d'influence sur le processus décisionnel.

Selon Baron (1993), la double appartenance est d'autant plus difficile à vivre que le projet approche de son terme. En effet, qu'ils aient coopéré sur le projet de façon accidentelle, par goût personnel, par choix de carrière raisonné ou par goût de l'aventure, tous les salariés ressentent des problèmes d'appartenance, lorsqu'ils doivent revenir à leur métier d'origine.

«Excepté le cas d'adhésion par vocation pure, les plus nombreux vivent un problème d'appartenance et de retour aux métiers àterme. Ils sontà la/ois dans un projet particulier et dans l'entreprise, àtravers tel ou tel "métier" classique. » (Baron,1993,p. 205).

Comme le montre Reeser (1969), le fait, pour les acteurs projet, de savoir que le projet dont dépend leur travail est proche de la fm, provoque de l'anxiété et des sentiments de frustration. Cette crainte est fondée dans la mesure où, comme le montre Reeser, les individus peuvent avoir à attendre longtemps, après la fm d'un projet, avant de retrouver un travail aussi responsabilisant et, ce, d'autant plus que le développement de la carrière des individus est le fruit du hasard puisqu'ils sont rarement suffisamment longtemps sous la responsabilité d'un même manager pour que celui-ci se sente responsable de leur suivi.

De façon générale, si tous les membres d'une organisation ressentent des besoins spécifiques - le sentiment d'appartenance, l'intérêt pour le travail, l'accomplissement professionnel, l'encouragement, la reconnaissance de l'accomplissement, la protection contre les conflits, la continuité dans l'emploi et la possibilité de progression de carrière - ces besoins sont plus rarement satisfaîts dans les équipes matricielles que dans les organisations fonctionnelles (Cleland, 1984).

En faît, le degré de satîsfaction des besoins individuels dépend du moment auquel l'individu rejoint l'équÎpe matricîelle, d'une part, et de l'âge de la structure matricîelle, d'autre part (Cleland, 1984). Sî l'indîvidu rejoint l'équipe au démarrage du projet, le responsable de projet a la possibîlité d'établir «de la cohérence dans le chaos ». S'il la rejoint plus tard, le degré de satisfaction des besoins individuels dépend alors de trois autres facteurs :

• la maturité de l'organisationmatricîelle,

• le stade de développement de carrière dans lequel est l'indîvîdu,

• le mode de performance de l'îndîvidu : on distingue les « starters », qui aiment faire avancer les choses, les «fmîshers », qui aiment les détails et la traduction de ces détaîls en pratique

et les «persistent/consistent », qui aiment voir un projet de dérouler de A

à

Z (Shainis et McDermott,1983).

Butler (1973), qui a comparé le «climat de satisfaction des besoins» dans les structures fonctionnelles et dans les structures matricielles, précise, quant

à

lui, que ce climat· dépend de la perception qu'ont les individus des conséquences d'un échec par rapport aux objectifs de départ et des coûts probables des actions individuelles. Or, les objectifs de performance sont, généralement, très ambitieux dans les structures matricielles par projet, ce qui tend

à

dégrader le climat de satisfaction des besoins22.

Enfm, Chambers (1989) précise que les individus sont d'autant plus insatisfaits qu'ils travaillent avec les autres membres de l'équipe sur un même lieu physique car cela les empêche d'avoir un accès immédiat aux pensées et conseils de leurs collègues et supérieurs.

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