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La structure métier doit donc redéfInir sa place autour des missions d'expertise, d'innovation, de capitalisation et de maintien d'un savoir-faire technique (EcoSIP, 1993) En effet, l'image

qui traduit la relation entre le métier et le projet est généralement celle des «innovations

validées sur étagère» ; d'un côté, les métiers mettent au point des solutions et des technologies

en dehors de la planifIcation projet, de l'autre, les responsables projet choisissent parmi ces

réponses les composantes qu'ils utiliseront dans leur projet (Midler, 1993a). Mais sa mise en

oeuvre demeure limitée parce qu'elle réclame des ressources considérables et qu'il est difficile

de piloter une recherche sans savoir si elle a une chance d'être utilisée et combinée avec

d'autres composantes. La notion de «pilotage par l'aval» développée par les organismes de

recherche :vise,d'ailleurs, à réintroduire une fmalisation dans la. logique de recherche. C'est

donc l'acteur projet qui prend le risque de l'innovation technique en fonction des enjeux

particuliers du projet.

{Il s'agit] «d'accélérer les processus de réponse aux questions qui se posent dans l'amont des projets, au lieu de chercherày répondre de manière anticipée» (Midler, 1993a, p.142).

2.5.3. Développer le pôle métier et le pôle projet avec la même force

Le "pôle" projet et le "pôle" métier doivent se développer avec la même force et non pas l'un au détriment de l'autre. Il s'agit de sortir des luttes de pouvoir qui agitent ces structures pour favoriser l'intégration de leurs objectifs. En effet, la réussite d'un projet passe nécessairement par l'implication des métiers, qui mettent à la disposition des projets une expertise technique et spécialisée, le développement et la capitalisation des connaissances ainsi que. l'innovation technique. La structure projet, quant à elle, a un effet structurant sur le travail des métiers: elle favorise le "réalisme économique", elle induit des effets d'innovation et elle encourage une approche plus globale des problèmes, ainsi qu'une plus grande sensibilité aux besoins des clients.

« Il Y a une logique métier et une logique projet qui doivent se développer toutes deux. Il faut que les gens soient structurés par les métiers et les projets. La différence entre les métiers et les projets est une différence de vision: les métiers sont des sous-marins qui vont de plus en plus profond et ont, par conséquent, une vision de moins en moins globale. Ce sont des outils et des ressources à mettre sur des chantiers projet. Les projets, eux, développent une capacité d'intégration. Les deux logiques sont parfois incompatibles, mais il faut les maintenir toutes deux. ».29

En effet, il ne s'agit plus de savoir laquelle, de la logique projet ou de la logique métier, va l'emporter et s'il faut «plus» ou «moins» de projet, mais de comprendre comment il faut reconfigurer les pratiques internes des métiers pour qu'elles soient en harmonie avec la logique des projets, tout en conservant la spécificité de leur structure. Les questions qui sont pertinentes sont donc celles de l'autonomie et de la responsabilité des agents, de la relation hiérarchique et de la gestion des compétences et des carrières (Midler, 1993b). Il s'agit donc de maintenir une tension entre une identité projets et une forte métiers pour éviter le gonflement des effectifs et la rigidification, que l'on cherche justement à combattre.

«L'apparition de nouveaux acteurs projet puissants, le rapide développement de procédures de développement originales a focalisé les réflexions et les débats sur l'opposition entre logique projet et logique métier (...). Il ne s'agitplus de savoir s'il faut "plus" ou "moins" de projet par rapport au métier, mais de comprendre plutôt quelle redéfinition des pratiques

internes des métiers peut être cohérente avec l'existence des projets, sans pour autant perdre de vue la vocation et la spécificité de ces structures. Les impératifs de la conception intégrée rejoignent alors des questions classiques du champ de l'organisation: la relation hiérarchique, l'autonomie et la responsabilité des agents, la gestion de la compétence et des carrières ...

»

(Midler, 1993a, p. 149-150).

Pour Midler (1993a), le développement de la logique projet ne doit pas mettre en danger les compétences métiers car elle se nourrit de ces compétences. Comment concilier la logique projet et le maintien des -compétences des métiers dans des domaines techniques en évolution rapide

?-La

réponse est, aujourd'hui, incertaine.

D'après Strategor (1993), le rôle des responsables de l'axe métier et de l'axe projet n'est pas de donner des ordres aux différents responsables placés

à

l'intersection des deux axes, mais de -défInir d'un commun accord les conditions de travail et les objectifs de ces responsables car les objectifs doivent résulter d'un compromis entre les exigences de chacun des axes. Pour cela, il faut équilibrer les pouvoirs du responsable fonctionnel et du responsable de projet et organiser leur confrontation afIn de gérer les conflits engendrés par la dualité de leur mission.

Finalement, il semblerait que le fonctionnement "idéal" de la structure matricielle corresponde à une position intermédiaire entre deux extrêmes: d'un côté, un fonctionnement dans lequel le métier démissionnerait (les opérationnels sont alors entièrement détachés auprès du projet, ce qui empêche d'avoir un contrôle des ressources effIcace) et de l'autre côté, un fonctionnement dans lequel le métier prédominerait (dans un tel cas de fIgure, les opérationnels ne poursuivent que les objectifs fIxés par la hiérarchie et oublient les spécifIcités du projet). Il s'agit donc de trouver un juste équilibre entre ces deux positions extrêmes.

Le tableau suivant résume les solutions proposées par la revue de la littérature pour résoudre les difficultés liées à la gestion par projet.

Profil des acteurs projet Recruter une équipe projet ayant le sens du concret, des facultés d'adaptation, des capacités créatives, des compétences en gestion, la faculté de gérer des conflits et des contradictions, une identité personnelle forte et une curiosité de terrain

Implication des acteurs projet Favoriser l'implication des acteurs projet grâce à la gestion par le stress et à l'augmentation de l'autonomie accordée aux acteurs projet

Système d'évaluation des Faire évoluer le système d'évaluation des performances en performances prenant en compte la composante affective des acteurs projet et en instaurant un système de double évaluation métier/projet Culture projet Diffuser la culture projet en apprenant aux individus à

accepter l'ambiguïté, en mettant l'accent sur l'extérieur (clients et fournisseurs) plutôt que sur l'intérieur et sur le produit plutôt que sur la corporation métier

Partage des rôles métier/projet Attribuer à la structure verticale la responsabilité de développer les compétences des individus et à la structure horizontale celle d'optimiser les performances économiques du projet, d'une part, et favoriser un équilibre des pouvoirs entre les métiers et les projets, d'autre part.

Tableau 2.4. : Synthèse des solutions proposées pour résoudre

les difficultés engendrées par

l'organisation projet

3. Synthèse

Notre revue de la littérature a recensé quatre principales difficultés inhérentes à la structure matricielle par projet. D'abord, la cohabitation de deux "systèmes" (structure, logique, horizon, culture, etc.) différents, voire incompatibles, oblige à renoncer à un système de gestion uniforme et unifié. Ensuite, la situation de double rattachement des acteurs projet augmente les coûts individuels en termes de stress et de conflits de rôle. En troisième lieu, l'enrichissement des tâches des acteurs aval est à l'origine d'une augmentation des besoins de qualification. Enfin, les acteurs projet sont confrontés à une mobilité professionnelle incertaine, due au fait que la performance des acteurs projet est évaluée selon des critères propres aux métiers.

Dans ce chapitre, nous avons également décrit les solutions proposées par la revue de littérature pour remédier à ces problèmes, en particulier:

• la redéfinition des pratiques intemesdes métiers pour qu'elles soient en harmonie avec la logique des projets ;

• le recrutement d'acteurs projet qui parviennent à supporter la dualité, le stress et l'ambiguïté inhérents à la structure matricielle par projet. Les profils recherchés concernent aussi bien les traits de personnalité que les aspects socio-professionnels. Ils doivent se trouver dans le collectif des acteurs projet et doivent évoluer selon les phases du projet;

• la mobilisation des individus sur le projet grâce à l'accroissement de leur autonomie, à la gestion par le stress età l'engagement collectif du métier derrière ses représentants dans le projet;

• l'évolution du système d'évaluation des performances individuelles dans le sens d'une meilleure prise en compte de la dynamique passionnelle liée au projet, des opinions recueillies auprès des différentes personnes gravitant autour du projet et des compétences spécifiques développées tout au long du projet;

• la diffusion de la culture projet au sein des équipes projet et à l'extérieur du projet, ce qui nécessite de mettre l'accent sur les clients et sur le produit, de remettre en cause les découpages fonctionnels et la prégnance hiérarchique, d'accepter l'ambiguïté et l'incertitude,

de participer à une dynamique d'apprentissage et de renoncer à des solidarités de métiers au profit de la logique collective.

Chapitre 3 . Construction du cadre conceptuel

Nous souhaitons construire notre cadre conceptuel à partir de deux niveaux d'analyse et de réflexion différents: d'une part, la relation entre la structure métier et la structure projet et, d'autre part, l'investissement des individus dans un projet particulier. Ce chapitre vise à élaborer un modèle permettant de décrire chacun de ces niveaux d'analyse à partir de grilles de lecture empruntées au management, à la psychosociologie, à la psychologie sociale et à la sociologie des organisations. Nous obtenons, ainsi, un modèle portant sur les modalités, les antécédents et les conséquences de la coopération entre la structure verticale et la structure horizontale (figure 3.2.) et un modèle portant sur les modalités, les antécédents et les conséquences de la participation des individus à un projet (figure 3.9.), qui sera modifié et enrichi au fur et à mesure de l'avancement de notre recherche empirique.

1. Vers une typologie des formes de coopération horizontale et

diagonale

Nous avons montré, à travers notre revue de la littérature, que si le développement de la gestion par projet constitue, en théorie, l'une des formes les plus efficaces de la coopération inter- fonctionnelle (que nous appellerons coopération horizontale), elle doit, pour remplir cette fonction, s'accompagner d'un certain nombre de dispositifs et de systèmes d'incitation particuliers. Nous avons également montré qu'il est nécessaire de renforcer la coordination entre la structure métier et la structure projet (que nous appellerons coopération diagonale) dans la mesure où il existe un danger d'isolement des équipes projet par rapport au reste de l'entreprise.

L'objectif de cette section est d'élaborer un modèle permettant de comprendre les conditions, les modalités et les conséquences de la coopération «horizontale» et de la coopération « diagonale ». Nous verrons que les antécédents de la coopération «horizontale» sont au nombre de quatre - fixation d'un objectif général, établissement de règles et de procédures,

proximité physique et disponibilité des participants. Les antécédents de la coopération

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