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Ces conflits ont généralement pour origine les malentendus concernant les règles du jeu dans le cadre de la structure matricielle (Denis, 1986) dans la mesure où cette dernière crée de

2. Quelles sont les réponses à ces difficultés?

Nous avons vu que la gestion par projet permet d'améliorer les performances économiques et de faciliter la coopération transversale des organisations qui l'adoptent, mais qu'elle comporte des coûts organisationnels et psychologiques qui en réduisent la portée.

Ce chapitre vise

à

réunir les éléments de réponse proposés par la littérature aux difficultés que nous avons répertoriées. Ces réponses, qui sont classées en cinq catégories, renvoient

à

la définition du "profil idéal" de l'acteur projet, aux conditions d'émergence d'acteurs fortement investis dans le projet,

à

l'évolution du système d'évaluation de leurs performances, à la diffusion de la culture projet dans l'ensemble de l'organisation et, enfm, à la clarification du partage des rôles entre la structure métier et la structure projet.

2.1. Recruter des profils spécifiques dans les projets

Tous les chercheurs et les praticiens s'accordent à dire que les acteurs projet doivent allier des compétences techniques et des qualités de caractère spécifiques pour pouvoir supporter la dualité métier/projet et les écarts

à

la« norme métier ».

Pour Midler (1993a), l'acteur projet doit faire preuve d'une grande capacité d'adaptation face à l'évolution du projet dans la mesure où il est le garant de la convergence des projets. En effet, un projet est la succession de trois phases:

• une phase de créativité et de dépassement, orientée vers l'exploration d'idées neuves et de la vérification de leur fiabilité ;

• une phase de contrôle et de verrouillage, dans laquelle l'acteur projet doit clore les débats, même s'il subsiste des incertitudes et des conflits non résolus dans la première phase;

• une phase de passage

à

l'acte, enfm, dont l'objectif est de mettre en oeuvre le plus rapidement possible les décisions qui ont été prises.

L'acteur projet doit donc pouvoir gérer ces trois phases, qui demandent des qualités bien spécifiques: la première phase exige des capacités créatives tandis que la seconde réclame des capacités de gestion rigoureuse. En outre, il doit gérer des contradictions puisque, à mesure que le projet avance, des solutions qui ont d'abord été rejetées peuvent être adoptées du fait de l'urgence des problèmes à résoudre. Même si certains individus savent mieux gérer l'ambiguïté que d'autre~5, tous les membres d'une organisation matricielle doivent apprendre à naviguer en eau trouble.

[Les acteurs projet doivent avoir) «des capacités d'explication importantes, mais aussi une identité personnelle suffisamment forte pour supporter ces écarts à la norme.» (Midler, 1993a, p.105).

Pour Mid1er, on ne peut pas trouver toutes ces qualités dans un même individu, d'autant que, du fait du caractère dynamique de leur rôle et de la courte durée du cycle des projets, les acteurs projet ne peuvent recevoir de formation. Les compétences techniques, mais également managériales doivent donc être collectives plutôt qu'individuelles, c'est-à-dire qu'il s'agit de trouver des profils complémentaires au sein de l'équipe projef6.

Selon Moisdon et Weil (1992b), les acteurs projet doivent avoir des compétences et des dispositions particulières. En ce qui concerne les compétences, ils doivent avoir une bonne connaissance des problèmes concrets rencontrés, une bonne expérience en tant que responsables opérationnels et une bonne maîtrise de la logique de déroulement d'un projet. En ce qui concerne les dispositions, les individus doivent faire preuve d'ouverture d'esprit, avoir une capacité de propositions concrètes, une curiosité de terrain et des qualités d'animation. Ils insistent également sur la nécessité, pour les acteurs projet, d'avoir le"

savoir technique tourné

vers les pièces"

et le "

savoir de la relation"

car ce dernier joue un rôle essentiel dans les problèmes d'interface, au niveau technique et organisationnel.

25 Knight (1976) précise que la tolérance pour l'ambiguïté est variable d'un individu àl'autre. Les «penseurs convergents» (convergent thinkers) ont davantage tendance à se diriger vers des carrières dans le domaine scientifique que les «penseurs divergents» (divergent thinkers) car ils ont une plus faible tolérance pour l'ambiguïté et ont du mal àtravailler dans un contexte où les rôles sont mal définis.

26Par exemple, sur la Twingo, il y avait une complémentarité entre le directeur du projet, qui était charismatique et créatif, et le chef de projet Etudes, qui était méthodique, réaliste et précis.

En tant que directeur de projet, Y. Dubreil (1993) observe que les caractéristiques requises pour travailler en projet sont liées à l'expérience professionnelle, d'une part, et à l'armature psychologique des individus, d'autre part.

«Il faut donc réussir une alchimie complexe entre les gens expérimentés, mais peut-être un peu prisonniers de leurs habitudes et les généralistes plus jeunes. Mais il ne faut pas de pieds

tendres: faire partie d'une structure projet, c'est gérer des tensions parfois dures

(.J.

Il faut avoir des acteurs d'un niveau suffisant pour qu'ils puissent s'engager: si chacun doit en référer àsa hiérarchie pour le moindre problème soulevé en réunion, c'est la logique des métiers qui continue à prévaloir. Il faut donc dans les groupes fonctions des membres compétents et forts psychologiquement pour assumer le conflit entre les exigences du projet et celles du métier. »(Dubreil, 1993).

Enfm, pour Greiner et Schein (1981), les spécialistes techniciens étant orientés vers l'individualisme et l'intellectualisme plutôt que vers les relations sociales, ils sont mal préparés à travailler dans l'ambiance de collaboration requise par les organisations matricielles. Il faut donc (co)recruter7 des individus tolérant bien l'arÎ1biguïté en matière d'autorité, qui respectent la valeur des autres disciplines techniques et qui accordent de l'importance à l'économique. En outre, il faut sélectionner les individus appréciant les défis, instaurer un dialogue bilatéral en matière de système d'évaluation des performances et soutenir leur avancement personnel plutôt que d'établir un contrôle sévère et une description précise de leur fonction.

De façon générale, les compétences que les acteurs projet doivent avoir en priorité sont des qualités de

«

savoir-être» (management, relationnel, communication) plutôt que de

«

savoir- faire ».

Nous avons choisi de résumer les composantes du "profil idéal" de l'acteur projet que nous avons répertoriées selon deux axes: le profil socio-professionnel (âge, parcours et compétences, qui relèvent davantage de "l'acquis") et les traits de personnalité (caractère, dispositions, qualités comportementales, qui relèvent davantage de "l'inné").

27 Pour Greiner et Schein (1981), il doit s'agir d'un co-recrutement entre la hiérarchie métier et la Direction Projet

TrmtsdepenonnaliU Profil socio-professionnel - Ouverture d'esprit -Agemoyen

- Capacités de propositions concrètes - Ancienneté minimale

.

- Curiosité de terrain - Bonne connaissance des problèmes - Qualités d'animation concrets rencontrés

- Esprit d'initiative - Bonne expérience en tant que ~ Identité personnelle forte responsable opérationnel

- Forte capacité d'autonomie - Bonne maîtrise de la logique de déroulement - Capacité àgérer des contradictions d'un projet

- Faculté de communication et d'influence - Réseaux de connaissances - Capacité d'apprentissage et d'adaptation

- Capacités créatives (10 phase du projet)

- Capacités de gestion rigoureuse (20 phase)

Ces qualités et capacités doivent se trouver dans le collectif des acteurs projet et ne doivent pas être présentes dans les mêmes proportions selon les différentes phases du projet: elles sont donc collectives et dynamiques.

Tableau 2.3. : Le profil « idéal )) des acteurs projet

2.2. Créer les conditions d'émergence d'acteurs fortement impliqués dans le

projet

Après avoir identifié le profil idéal des acteurs projet, nous souhaitons décrire les conditions qui permettent de favoriser leur implication dans le projet. Nous en mentionnerons deux: l'engagement des acteurs projet sur des contrats de performance en termes de coûts et de délais, d'une part, et l'accroissement de l'autonomie des membres de l'équipe projet par rapport au .reste de l'entreprise, d'autre part.

2.2.1. Favoriser l'engagement des acteurs sur un contrat de performance

La logique de l'esprit projet est d'amener les acteurs projet à se surpasser pour relever un défi, qui devient la référence à partir de laquelle sont définis les responsabilités de chacun, la composition des équipes et le rythme de travail. Il faut donc chercher à créer du « stresS» en essayant de le canaliser dans l'action, pour que les acteurs projet s'approprient les objectifs du projet et s'engagent sur des contrats en termes de coûts et de délais.

En effet, ainsi que l'affirme Dubreil (1993), la réussite d'un projet passe autant (sinon

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