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G LOSES LOSES & A & A BRÉVIATIONS BRÉVIATIONS

3. Liste des abréviations

0.2. Cadre théorique

0.2.2. Une approche constructionnelle

Comme nous l'avons indiqué plus haut, l'approche adoptée dans ce travail est essentiellement typologique. Néanmoins, dans la Partie III, nous adoptons également une approche constructionnelle, c'est-à-dire que nous nous plaçons dans le cadre des grammaires de construction. Ces deux approches ne sont pas incompatibles, mais complémentaires.5

Fournir une présentation générale et détaillée des grammaires de construction dépasse largement le cadre de cette section. Pour cela, nous renvoyons le lecteur à Goldberg (2003), Croft & Cruse (2004 : Ch. 10), François (2008) ou Guignard (2012). L'objectif de cette section est de présenter les

éléments de l'approche constructionnelle pertinents pour appréhender notre travail.

0.2.2.1. La notion de construction

La notion de « construction » constitue la notion centrale des grammaires de construction. Une construction est une unité composée d'une forme et d'un sens. Cette notion est assez similaire à la notion saussurienne de « signe linguistique », c'est-à-dire la combinaison d'un signifié (sens) et d'un signifiant (forme) (Saussure 1916 : 97-100). Néanmoins, la plupart des grammaires de construction ajoutent également un critère de non compositionnalité. Ainsi, Goldberg (1995 : 4) propose la définition suivante :

« C est une construction si et seulement si C est une paire forme-sens <Fi ; Si> telle que certains aspects de Fi ou de Si ne sont pas strictement prédictibles à partir des parties qui composent C, ou à partir d'autres constructions. »

La forme d'une construction englobe toutes ses propriétés formelles : propriétés syntaxiques, propriétés morphologiques et propriétés phonologiques. Le sens d'une construction renvoie à l'ensemble des aspects conventionnels liés à sa fonction, ce qui inclut ses propriétés sémantiques, ses propriétés pragmatiques et ses propriétés discursives (Croft 2001 : 18-19).

CONSTRUCTION Propriétés syntaxiques Propriétés morphologiques Propriétés phonologiques FORME lien symbolique Propriétés sémantiques Propriétés pragmatiques Propriétés discursives SENS

Figure 0.1 - Structure symbolique d'une construction

0.2.2.2. Le continuum lexico-grammatical

Selon l'approche constructionnelle, tous les niveaux de description doivent être analysés comme des constructions, ce qui inclut : la morphologie dérivationnelle et flexionnelle, des unités lexicales, des phrasèmes plus ou moins figés, des structures syntaxiques sans spécification lexicale, ou encore

des catégories syntaxiques abstraites (Goldberg 2003 : 219 ; François 2008 : 7-8).

Le corollaire de cette position est qu'il n'y a pas de différence de nature entre le lexique, les structures phrastiques, et les « règles grammaticales ». Le savoir grammatical représente un continuum à deux dimensions (Croft & Cruse 2004 : 255-256 ; Guignard 2012 : 24-25). D'une part, on reconnaît un axe atomique-complexe. Par exemple, le mot table est une construction atomique, alors que le mot porte-avion est une construction complexe. D'autre part, on reconnaît un axe substantiel-schématique. Par exemple, le mot porte-avion est une construction substantielle, c'est-à-dire entièrement instanciée. En revanche, « à condition de SV » est une construction partiellement schématique dont le SV n'est pas spécifié.

0.2.2.3. La place des constructions dans la grammaire

La façon dont les constructions s'organisent pour constituer la grammaire d'une langue est une question fondamentale pour l'approche constructionnelle. Les constructions d'une langue ne forment pas un ensemble non structuré d'entités indépendantes, mais plutôt un système extrêmement structuré d'informations (Goldberg 1995 : 5). Ce point sera traité en détail au Chapitre 10. Il sert de base théorique pour notre présentation de l'organisation des constructions verbales du wolof (Partie III).

0.2.2.4. Une approche réaliste

Les grammaires de constructions adoptent une approche que Creissels (2006a : 2) qualifie de réaliste, et que Goldberg (2003 : 219) qualifie de « what you see is what you get ». Autrement dit, cette approche est non dérivationnelle et non transformationnelle.

« Les régularités dans la construction des phrases doivent se décrire par référence aux phrases telles que nous les percevons, et non pas comme le résultat de la transformation de structures syntaxiques abstraites dans lesquelles les mots pourraient être rangés dans un ordre différent de celui qu'il est possible d'observer, ou dans lesquelles des éléments morphologiques figureraient détachés du mot dont ils font partie. » (Creissels 2006a : 2). Nous ne ferons « pas non plus appel, pour expliquer les régularités syntaxiques, à la présence d'éléments ‘effacés’ ou ‘invisibles’ qui, bien que n'apparaissant pas dans les phrases telles qu'elles sont produites, seraient susceptibles d’interagir avec les autres éléments de la phrase exactement comme pourrait le faire un mot concret. » (Creissels 2006a : 2-3).

0.2.2.5. Les différentes théories constructionnelles

Les grammaires de construction ne constituent pas un cadre théorique unique, mais plutôt un ensemble de théories partageant plusieurs principes fondamentaux. Parmi les grammaires de construction, on peut distinguer quatre grands courants (Croft & Cruse 2004 : Ch. 10 ; François 2008) : la Grammaire de Construction par Unification (Unification Construction Grammar), ou « École de Berkeley », développée par Fillmore & Kay (1993) ; la Grammaire de Construction Cognitive (Cognitive Construction Grammar), développée par Lakoff (1987) et Goldberg (1995), la Grammaire Cognitive (Cognitive Grammar), développée par Langacker (2008), et la Grammaire de Construction Radicale (Radical Construction Grammar), développée par Croft (2001). Ces différents courants se distinguent sur plusieurs points (compositionnalité, rôle de la polysémie, etc.) dont deux vont particulièrement nous intéresser : la diversité translinguistique et la formalisation.

La Grammaire de Construction Radicale (Croft 2001) est le seul courant à avoir explicitement une visée typologique. Concernant la comparabilité translinguistique, Croft (2001) adopte la position que nous avons présentée en (§ 0.2.1.3). « Pour Croft aucun test syntaxique ne pourra sélectionner toutes et rien que les entités qu'on pourrait vouloir appeler verbes, noms, adjectifs, sujets, objets, etc. à travers les langues. Les généralisations existantes sont déterminées par la motivation fonctionnelle à laquelle les constructions de chaque langue sont soumises. » (François 2008 : 12). De fait, Goldberg (1995) approuve explicitement cette position (François 2008 : 12).

Concernant la formalisation, on constate de grandes divergences d'un courant à l'autre. Il n'y a pas de mode de représentation uniforme commun à toutes les grammaires de construction. La Grammaire de Construction par Unification fait une utilisation systématique d'un mode de représentation formel similaire à celui de HPSG : structures de traits sous forme de matrices attribut-valeur (Matthieu 2003). En revanche, les autres courants n'utilisent pas de formalisation clairement définie. Ils font usage de notations schématiques plus ou moins formelles dans un but d'illustration.

L'approche adoptée dans notre étude étant essentiellement typologique, nous nous plaçons plutôt dans le cadre de la Grammaire de Construction Radicale (Croft 2001).