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3.3.4. Passé et conditionnel

En wolof, l'expression du conditionnel est liée à l'expression du passé. En effet, comme nous l'avons vu en (§ 2.2.1), avec le marqueur de passé (w)oon, un énoncé au futur (ou au parfait imperfectif) peut avoir une lecture conditionnelle (189a-b). Exprimer le conditionnel comme un « futur dans le passé » est un procédé relativement fréquent dans les langues (Comrie 1985a : 75). 189) a. Digaale =bi ci diggante réewi (Diouf 2003 : 537)

partenariat =CLb:DF.PX PREP:PX intervalle pays:GEN.PL

Afrik =yi d-oon =na baax.

Afrique =CLy:DF.PX IPF-PAS =PRF.S3SG être.bon

‘Le partenariat entre les pays africains serait une bonne chose.’

b. Mbañ-gàcce d-oon =na =fi baax. (Diouf 2003 : 563) rideau IPF-PAS =PRF.S3SG =CL.LOC:DF.PX être_bien

‘Un rideau serait bien ici.’

Par ailleurs, avec le marqueur de passé (w)oon (190a-b), ou le suffixe de passé reculé -(w)aan (190c), une subordonnée hypothétique aura une valeur de subordonnée contrefactuelle (Perrin 2005 : 173-176). Là encore, ce procédé est attesté dans d'autres langues, comme l'anglais ou le français (Perrin 2012 : 86). Ainsi, dans la traduction française des exemples (190a-c), le verbe de la subordonnée est également au passé.

190) a. Su =ma yore -woon caabi =ji, (Diouf 2003 : 434)

HYP =S1SG avoir_avec_soi-PAS clé =CLj:DF.PX

nu dem ci néeg =bi.

S1PL partir PREP:PX chambre =CLb:DF.PX

‘Si j'avais la clé, nous irions dans la chambre.’

b. Su mbaxana d-oon naan yóor, (Diouf 2003 : 409)

HYP coiffe IPF-PAS boire cerveau

kenn du =ko sol.

CL.HUM;SG:SING FUT;NEG.S3SG =O3SG porter

c. Soo bëgg-aan dugal woto ci réew =mi, (…) (Diouf 2003 : 201)

HYP:S2SG vouloir-PASR entrer:CAUS voiture PREP:PX pays =CLm:DF.PX

‘Si tu voulais importer une voiture dans le pays, (…)’

Comme nous l'avons vu en (§ 2.4.5), bu introduit généralement une subordonnée temporelle. Cependant, avec le marqueur (w)oon, la subordonnée aura une valeur de subordonnée contrefactuelle (191a) ; dans ce contexte bu et su sont synonymes (Perrin 2008 : 75). Ainsi, les subordonnées temporelles sont incompatibles avec le marqueur de passé. Dans ce type de subordonnées, le passé absolu se marque à l'aide du marqueur déictique sur le subordonnant. Le marqueur -i indique le passé (191a), et le marqueur -a indique le passé reculé (191b) (Perrin 2008 : 74).87

191) a. Boo xam-oon caay-caay =gi ci gone =gii ! (Diouf 2003 : 78)

TEMP:S2SG savoir-PAS espièglerie =CLg:DF.PX PREP:PX enfant =CLg:DEM.PX

‘Si tu savais l'esprit coquin qui anime cet enfant !’

b. B-i ma =ko gis-ee keroog, (Diouf 2003 : 216)

TEMP-PAS S1SG =O3SG voir-ANT l'autre_jour

dafa d-oon mbaaru.

FOCV.S3SG IPF-PAS marcher_comme_une_marionette

‘Quand je l'ai vu l'autre jour, il marchait comme une marionnette.’ c. B-a mu dem-ee Popongin (Diouf 2003 : 386)

TEMP-PASR S3SG partir-ANT Poponguine

daaw, dafa xëm-oon.

an_dernier FOCV.S3SG s'évanouir-PAS

‘Quand il était allé à Popenguine l'an dernier, il s'était évanoui.’

Enfin, il existe un morphème koon (ou konte), qui peut être analysé comme un marqueur d'irrealis (Perrin 2005 : 177-179). Ce marqueur apparaît dans un nombre très limité de contextes. Il est uniquement attesté dans les subordonnées contrefactuelles négatives dont le verbe est une copule (192a), et dans les propositions principales au parfait suivant une subordonnée contrefactuelle (192b).

192) a. Su d-ul koon jat, julli aay. (Diouf 2003 : 162)

HYP.S3SG COP-NEG IRR pantalon prier être_mal ‘Sans le port du pantalon, il serait mal de prier.’

b. Su =ma =ko xam-oon, wax koon =naa =ko. (Perrin 2005 : 177)

HYP =S1SG =O3SG savoir-PAS dire IRR =PRF:S1SG =O3SG

‘Si je l'avais su, je l'aurais dit.’

Le marqueur koon tend à disparaître en wolof contemporain (Church 1981 : 138-139 ; Perrin 2005 : 178). Néanmoins, si l'on en croit les grammaires du XIXe siècle, son emploi était beaucoup plus étendu dans un état antérieur de la langue. Selon Kobès (1869 : 254-257), ce marqueur est compatible avec le parfait, le parfait négatif, le futur, le futur négatif, la focalisation du sujet, la focalisation du complément, la focalisation du verbe. De plus, il est généralement décrit comme étant en distribution complémentaire avec le marqueur de passé (w)oon.

3.4. La voix

La voix peut être défini comme un mécanisme dans lequel une modification du syntagme verbal (affixation ou auxiliation) provoque une réorganisation de la relation entre les fonctions syntaxiques et les rôles sémantiques liés au prédicat (Nouguier-Voisin 2002 : 72). Le wolof a cinq voix, marquées essentiellement par des suffixes de dérivation (Tableau 3.3) : la voix moyenne (193a), la voix causative (193b), la voix applicative (193c), la voix de co-participation (193d), et la voix antipassive (193e).88

193) a. Gaynde =yi sang-u =nañu (Nouguier-Voisin 2002 : 113) lion =CLy:DF.PX laver-MOY =PRF:S3PL

ci dëx =gii.

PREP:PX fleuve =CLg:DEM.PX

‘Les lions se sont lavés dans ce fleuve.’

b. Bax-al =na ñebbe =ji. (Nouguier-Voisin 2002 : 152) bouillir-CAUS =PRF.S3SG niébé =CLj:DF.PX

‘Il a fait bouillir les niébés.’

c. Mu teg-al =leen xeex =wi jëkk (Nouguier-Voisin 2002 : 218)

S3SG poser-APPL =O3PL pierre =CLw:DF.PX être_premier

ci taax =mi.

PREP:PX construction =CLm:DF.PX

‘Il a posé pour eux la première pierre sur la construction.’ d. Rey-ante =nañu. (Nouguier-Voisin 2002 : 286)

tuer-RECP =PRF:S3PL

‘Ils se sont entre-tués.’

e. Xaj =bii du màtt-e. (Nouguier-Voisin 2002 : 310) chien =CLb:DEM.PX FUT;NEG.S3SG mordre-ANTIP

‘Ce chien ne mord pas.’

Tableau 3.3 - Liste des suffixes de voix89

Voix moyenne -u

Voix causative -e, -al, -le, -lu, -loo Voix applicative -e, -al

Voix de co-participation -oo, -e, -ante, -andoo, -aale Voix antipassive -e

Il convient de noter que si la majorité des voix sont exprimées par des suffixes de dérivation verbale, le réfléchi (194a) et le causatif (194b) peuvent être exprimés lexicalement.

194) a. Bëgg =na bopp-am. (Nouguier-Voisin 2002 : 100) aimer =PRF.S3SG tête-POSS3SG

‘Il s'aime.’

b. Yaa tax =ma dem. (Nouguier-Voisin 2002 : 137)

PRO2SG:FOCS causer =S1SG partir ‘C'est à cause de toi que je pars.’