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Un dilemme entre deux systèmes normatifs ?

Chapitre 3 Une morale dans l’engagement politique armé ?

3.4 L’ INDIVIDU ET LE COLLECTIF : CONVERGENCE ET DIVERGENCE DES UNIVERS NORMATIFS

3.4.2 Un dilemme entre deux systèmes normatifs ?

Comme nous l’avons précédemment souligné (3.2), la participation à des organisations illégales est partiellement motivée par la conviction et par le fait de souscrire et d’agir conformément à des valeurs d’ordre supérieur, aux yeux des acteurs, et concurrentes du système normatif général. À l’aune de l’entrée dans l’organisation mais également au fil du développement des actions – notamment lorsque se pose la question des exécutions – est susceptible de surgir une concurrence entre systèmes normatifs, notamment entre celui propre à l’individu, hérité de son appartenance sociale, et celui nourri par l’organisation elle-même1. Or « le respect des prescriptions du système normatif général peut être suspendu lorsque les circonstances obligent un individu à obéir à celles d’un système normatif particulier (groupes religieux, organisation criminelle ou clandestine, groupes de pairs, relations d’amitié, code d’honneur et de solidarité de la famille, etc.) » (Ogien, 1995, p. 140), dans une logique de soumission à des loyautés supérieures. L’individu affronte alors un dilemme entre l’allégeance due à la société et celle due aux proches ou à la cause, entre lesquelles il doit choisir. Lorsque ce dilemme se résout en décidant d’enfreindre les injonctions de la loi, l’infraction peut ne pas être conçue comme une violation des normes de la légalité ou comme une violation dont l’importance est minorée eu égard à d’autres enjeux normatifs2.

Les entretiens réalisés permettent alors d’élucider plusieurs questions : dans quelles circonstances advient la mise en concurrence des systèmes normatifs ? L’action illégale voire clandestine suppose-t-elle une adhésion individuelle totale aux valeurs du groupe ? Comment cette superposition s’opère-t-elle, si tel est le cas3 ? À partir de quel moment et pour quels motifs l’allégeance due à la société s’efface devant un système normatif particulier concurrent ? Comment les divergences et les conflits entre systèmes normatifs concurrents se résolvent-ils ? Les membres d’une organisation, qu’il s’agisse d’une entreprise, d’une nation ou de n’importe quel autre groupe humain, ont essentiellement deux réponses possibles, lorsqu’ils perçoivent que l’organisation manifeste un recul face à ses objectifs initiaux, à ses exigences ou une réduction des bénéfices pour ses membres : ils peuvent soit s’y soustraire, se retirer des liens crées avec elle, c’est-à-dire emprunter la voie de l’exit, conformément à la terminologie proposée par A. Hirschman (1970), ou bien ils peuvent prendre la parole, s’exprimer, c’est-à-dire tenter

1 Ainsi, par exemple, « les anthropologues envisagent encore difficilement que le comportement individuel ne résulte pas d’un ensemble de principes moraux mis en pratique, mais d’une négociation permanente entre les cadres moraux disponibles dans la société tels qu’ils sont incarnés dans les institutions, les lois et leurs représentants d’un côté et les désirs et les expériences individuelles de l’autre, ainsi que des interactions et des délibérations entre individus » (Heintz, 2015, p. 57).

2 Comme le souligne Jérémie, expliquant son engagement illégal après mai 68 : « parce que la vie, parce qu’on peut pas laisser ce monde-là comme ça. C’est une question de dignité quand même, non ? On pouvait pas faire autrement. […] Quand on est issu d’une histoire, d’un moment historique aussi. Là 68, c’est notre génération. […] On ne pouvait pas, après, retourner en oubliant tout ça de ce qu’on avait pressenti, on pouvait pas se trahir comme ça, s’investir sur des projets individuels, sur des trucs comme ça. On n’allait pas se retirer dans des terriers sécurisants… ».

3 Cette superposition semble aller de soi dans des organisations restreintes où les membres rencontrés sont les leaders. Néanmoins, comme nous le verrons, il arrive que les leaders expriment leurs divergences d’avec certains choix stratégiques réalisés par l’organisation, dans la mesure où les choix stratégiques se font collectivement (voir Cyprien).

de rétablir ou d’améliorer ces liens, en faisant part de leurs doléances, de leur griefs ou encore exprimer une proposition pour un changement, c’est-à-dire opter pour la voice. Une solution intermédiaire consiste à privilégier la loyauté (loyalty), la prise en compte de cette dernière pesant sur le calcul coûts-bénéfices, associé au choix de l’exit ou de la voice. Il demeure que, dans la théorie hirschmanienne, plus la possibilité de l’exit est importante ou facile à saisir et moins la

voice sera utilisée, ces options étant mutuellement exclusives l’une de l’autre (Hirschman, 1970,

p. 16). De façon générale, l’élection de la voice ou de l’exit dépendra des coûts et des bénéfices associés à ce choix, l’option la moins coûteuse étant systématiquement privilégiée.

L’exit peut constituer le point d’aboutissement d’expériences de dissonance cognitive. Ainsi plus l’acteur s’éloigne dans le questionnement réflexif de ses croyances politiques initiales, plus la dissonance cognitive devient insupportable, et l’identité personnelle se déstabilise (voir Tarragoni, 2012, p. 116). Pour éviter le conflit identitaire et une prise de distance excessive d’avec les convictions auxquelles il est le plus attaché, l’acteur peut être conduit à remettre en question de manière « radicale » la croyance radicale à laquelle il a adhéré. Cette « bifurcation » l’oblige soit à repartir « de zéro », à recommencer sa vie sociale laissée avant l’entrée en radicalité, soit à se recréer une nouvelle identité à partir d’une deuxième bifurcation qui annule la précédente. Toutefois la conscience de l’écart croissant avec les options initiales voire les principes auxquels les individus sont attachés n’induit pas nécessairement de bifurcation, en particulier lorsque les circonstances matérielles n’y sont pas favorables. Des mécanismes d’irréversibilité sont induits par le phénomène de la clandestinité. Les propos de Marco sont, sur ce point, éclairants :

« la fuite habitue à l’idée de clandestinité. C’est-à-dire qu’elle te détache encore plus de l’idéal… enfin, à un moment, cela apparaît irréversible. C’est ça, le problème. Et même si la foi du début commence à vaciller, tu ne sais plus comment t’en sortir, tu es allé trop loin. C’est un des problèmes fondamentaux, selon moi ».

D’un point de vue empirique, cette divergence peut s’illustrer de façon soit collective soit individuelle. Au plan collectif, elle s’incarne dans le positionnement déclaré de groupes d’individus ou de collectifs similaires, eu égard à certaines lignes politiques et militaires. On l’observe en France avec le congrès du 1er août 1982 qui institue une scission au sein d’AD entre

le noyau internationaliste, qui poursuit ses actions, et la branche qui préfère se placer en retrait pour quelque temps. Plusieurs des membres interrogés de ce groupe dissident sont explicites sur ce point1. On le note également en Italie, dans un contexte où les organisations illégales sont

1 Tel Damien : « - Vous disiez que la question qui s’est posée alors était de “monter d’un cran” ou pas. À quelles actions pensiez-vous ? - À moment donné, un choix s’est posé. C’est pour ça que nous avons décidé de dissoudre, ou de quitter AD. On savait que si on continuait dans ce truc, à ce moment précis dans une situation précise, nous allions être amené à faire pour continuer à exister. Quand tu en arrives là, tu commences à ne plus maîtriser grand chose. Nous ne savions pas ce qui allait se passer, mais nous pressentions la suite. Nous considérions que la situation ne s’y prêtait pas. Ça n’est pas tant par respect de la vie d’un marchand d’armes et d’un grand patron, quoique je n’aie jamais rencontré dans la lutte armée d’extrême gauche, un seul individu qui ait pu considérer que tuer est une fin en soi, ou en tirer plaisir. Mais la question principale, c’est à quoi ça sert ? Et ça n’est pas moraliste. Il y a des périodes dans l’histoire où les réalités sociales ne sont pas comparables. Les résistants de la M.O.I. ont exécuté de simples trouffions et officiers subalternes allemands qui étaient bien moins impliqués dans le régime nazi que Besse et Audran ne l’étaient dans le fonctionnement du capitalisme. Le problème c’est la surenchère et le “faire pour continuer à exister”. La surenchère, je n’ai rien contre dans une lutte de masse. Si les grévistes veulent faire de la surenchère en allant jusqu’au bout, en passant à la grève générale ou au sabotage, tant mieux ! Lorsqu’il s’agit d’utiliser des armes et explosifs, ça peut vite déraper. Lorsqu’on s’est fait gauler, on préparait des attentats en soutien au mouvement des sidérurgistes qui était assez radical : ils avaient fait cramer deux ou trois châteaux patronaux, et ce genre de surenchère, on trouvait ça plutôt chouette ! ». Yvon, évoquant la possibilité des exécutions, lui fait écho : « je ne juge pas. Je dis pas que ceux qui l’ont fait sont des salauds. C’est des copains autour de moi qui l’ont fait donc c’est pas des salauds. Je ne crois pas du tout moi à… Eux, ils pensaient – je pense – à l’exemplarité ; je crois pas à cela, moi. […] Je me trompe peut-être mais je crois pas. Eux, ils disaient qu’il fallait monter… en intensité, tout ça. Vous savez, c’était le fameux truc. Et moi, je pensais que chaque fois qu’on grimpait

plus nombreuses et le climat social plus tendu encore. A. Stella, membre de Potere Operaio, en témoigne lorsqu’il revient sur le contexte des années 1970 dans son pays1. Dans un cas comme dans l’autre, la question cruciale qui provoque une bifurcation dans les trajectoires individuelles réside dans l’exécution ou le crime politique2. La rivalité entre les organisations participant à d’intenses mouvements sociaux, soulignée par Damien et A. Stella, explique l’escalade dans l’usage de la violence (voir Della Porta, 2013, p. 150, p. 285).

Les questions organisationnelles jouent également un rôle crucial dans la principale scission, en 1974, entre ETA-m, dont les militants voulaient que l’organisation se concentre sur les actions militaires, et ETA-pm constituée par ceux qui souhaitaient donner la priorité aux considérations politiques (voir Della Porta, 2013, p. 164). ETA-m, qui regroupe alors l’essentiel des militants, prend ses distances avec la logique d’organisation par les masses du noyau armé, responsable des actions militaires, déclarant qu’il était impossible pour une même organisation de concilier ces actions et les formes d’activisme menées par la base3. Ces conflits sont réactualisés en septembre 1982, lorsque ETA-pm renonce à la lutte armée.

en intensité comme ça, de plus en plus on s’éloignait de ceux dont on voulait se rapprocher… en France, au moins. En Italie, c’est autre chose parce que c’est une vraie… c’est une mini guerre civile en Italie. C’est un truc populaire, il y a des centaines de mecs qui sortent des usines. C’est un mouvement. […] C’était mieux de bloquer toutes les ANPE de Toulouse que d’attraper un mec qui bossait à l’ANPE et de lui coller une trempe… même s’il l’a “mérité” 100 fois, même si j’aime pas trop le mot “mériter”. Je ne suis pas un procureur ni un bourreau, ni un machin. Peut- être qu’un jour il faudra y participer, mais dans le combat, dans la guerre. Je comprends que ceux qui étaient à Terrouelle attrapaient ceux d’en face… Il y a de problème. Et ceux d’en face quand ils nous attrapaient… Il y avait pas d’avocat là. Mais ça je le comprends. C’était des hommes en armes contre d’autres hommes en armes, hommes ou femmes. […] Parce que je fais une différence. C’est peut-être ça l’erreur de certains copains ou camarades. Tout n’est pas égal à tout. Moi je pense réellement que par exemple la démocratie française dans les années 1975-76 – le radicalisme comme vous dîtes –, c’est pas la même chose que de vivre à Santiago ou à Gorki […] ou aux États-Unis, si je suis noir. C’est pas la même chose. L’Italie n’est pas la même chose. Elle est encore pleine de relents fascistes, les carabineri sont fascistes, une grande partie de l’appareil d’État est fasciste, comme en Allemagne, où il y a jamais eu de dénazificaion. Il y a qu’à voir le maire de machin, Hans-Martin Schleyer, le patron des patrons, ancien capitaine des Wafen… ! Donc tout n’est pas égal. L’Espagne de Franco, elle n’est pas égale à la France de Giscard ou de Pompidou. Bien sûr, il y a des choses dégoûtantes dans les deux pays mais c’est pas la même chose. Maspero existe en France, et il y en a pas chez Franco. […] Champs Libres existe pas à Gorki… ou à Santiago. Donc on peut pas dire que c’est la même chose. On peut pas dire que c’est la même chose de recevoir des lacrymos ou de se faire massacrer à coups de matraque, que de se faire tirer au 7.62 comme à Santiago. Moi je pars de ça. Ça veut pas dire qu’au Chili ou ailleurs, aux États-Unis je serais rentré aux Weathermen par exemple ». Yvon ajoute plus loin : « Cette violence, violence-là, l’exemplarité… d’individus d’avant-garde, ça sert à rien : la preuve ! Soyons honnête, soyons concret. Sur le moment, on n’a pas la distance, on est dans le coup de speed, tout ça, bien sûr. Mais 30 ans après, faut analyser, la preuve en est qu’on est plus cons qu’avant, on a régressé. On a échoué ! ». Pour une analyse de la concurrence entre les organisations, voir Della Porta, 1995, chap. 4 ; 2013, p. 150-151.

1 « Petit à petit, les groupes ont commencé à s’armer… pour de vrai. Et donc d’actions de défense, on est passé à des actions d’offense. Mais tout le monde a conçu l’action de défense comme accompagnement des luttes sociales de masse ». Voir la fin de la citation en 5.1.2.a, p. 248*.

2 Au sein d’IK, la ligne est très claire, comme l’un des leaders politiques du groupe le rappelle, lorsqu’il est interrogé sur ce qu’il n’était pas prêt à faire : « À ça je peux vous le répondre tout de suite ! – de concevoir que tuer au nom d’une idée politique, tuer volontairement, non. Ça, non. Ça c’est clairement ligne rouge. Même le pire des ennemis… du pays basque, de la lutte en pays basque nord. Non, ça c’est la ligne rouge. On l’a jamais fait. Il y a eu des accidents, ça c’est vrai. À partir du moment où il y a des armes qui circulent dans les mains… ça peut déraper. C’est sûr. Mais là tuer volontairement au nom… d’une stratégie politique, pour moi, non, jamais. Parce que après ça change tout, ça devient beaucoup plus difficile : il y a des morts au milieu et des morts volontaires » (Alexis). Voir aussi infra, Laure, p. 160, note 5* évoquant « la ligne rouge » qu’elle s’était fixée. Ainsi IK a marqué ses distances avec ETA, non pas seulement au nom d’un désaccord stratégique, mais également en raison de la question des exécutions.

3 Au moment de la scission, à l’été 1974, ETA-m où converge la majorité des acteurs du front militaire publie un document expliquant sa décision de ne pas entrer dans la légalité démocratique et de demeurer une structure clandestine afin de ne pas renoncer à la lutte armée et de ne pas attirer la répression sur le mouvement » (voir

La divergence peut être le fait d’une posture individuelle qui n’engage qu’une singularité. Formulons à ce propos une réserve méthodologique. L’entretien semi-directif peut induire un biais concernant l’expression de cette divergence, les individus étant susceptibles de se servir de l’entretien comme d’un moyen pour revenir sur le passé et racheter leurs divergences d’avec l’organisation à laquelle ils ont appartenu. Pour une autre part, les acteurs qui ont accepté, de façon préférentielle, l’entretien sont, pour l’essentiel, restés en accord avec leurs principes de l’époque et qui n’ont guère changé de ligne idéologique (ou intellectuelle), seul le passage à l’action ayant été mis entre parenthèses. Pour ceux – peu nombreux – qui ont refusé l’entretien, on peut supposer qu’une page a été définitivement tournée.

Dans les entretiens menés, la divergence individuelle survient notamment concernant l’usage de la violence, comme l’exprime Alexandra, dissociée officielle des BR1, lorsqu’elle est interrogée sur la première action violente à laquelle elle a participé :

« en fait, moi, je n’ai jamais fait partie des services d’ordre pendant les manifestations. Donc je ne me suis jamais heurtée directement à la police, j’ai toujours fui honteusement. Mais, justement, cette période m’a beaucoup perturbée, parce que j’avais vraiment l’impression qu’on était de la chair à canon, à un certain moment. La première action violente à laquelle j’ai participé a été un attentat contre une personne, que je n’ai pas effectué directement, mais pour lequel j’avais un rôle de couverture rapprochée. La couverture rapprochée, c’était le rôle de celui qui était prévu pour intervenir au cas où celui qui devait conduire l’action directement en aurait été empêché pour un tas de raisons, comme une arme qui s’enraye, ou quelque chose de ce genre. Et ça a été un choc assez traumatisant. Assez traumatisant dans le sens où j’ai eu des séquelles pendant longtemps, avec des cauchemars assez explicites, qui me poussaient à abandonner. Mais il est très difficile, très difficile – une fois que tu as mis le pied sur

ce chemin, une certaine dynamique s’est enclenchée, avec des attentes de la part des autres qui pèsent sur toi – de se retirer. Moi, j’ai toujours eu un rapport très

conflictuel avec la violence, je la voyais comme une nécessité inévitable mais qui me pesait, me pesait énormément, de manière très contradictoire. Et cela, si on veut, moi je le considère, du moins personnellement, comme une circonstance aggravante. Au sens où avoir conscience que l’usage de la violence est presque contre nature, je ne sais pas comment dire, devrait induire à réfléchir un peu plus, pousser à s’arrêter. Et ne pas écouter cette voix intérieure, à mon avis, est une chose grave, même si, bien sûr, il y a 10 000 motifs et 10 000 choses qui te poussent à continuer. Mais bon, moi, je voyais que d’autres camarades, d’autres personnes affrontaient ce sujet, ce problème de la violence avec bien plus de légèreté. Peut-être parce que ces personnes étaient des hommes, je ne sais pas » (nous soulignons).

Alexandra est dissociée mais non repentie. De même, d’autres critiquent – tout en les comprenant – certaines actions de leur organisation sans les condamner. Julien avoue dans une conversation informelle qu’il n’aurait pas voulu avoir à se prononcer sur l’exécution de Yoyes (voir supra p. 99, note 2*). Un leader d’AD reconnaît que le moment auquel l’exécution de G. Besse a été réalisée était stratégiquement mal choisi. Ainsi il est des situations – relativement nombreuses – où les individus, sans être en accord avec les actions de l’organisation, qu’ils en soient membres ou non, ne les dénoncent pas ni ne s’en désolidarisent2. Cette posture s’exprime dans la fameuse déclaration voulant que les auteurs d’assassinats « sont des camarades qui se

ouvrier/syndical, culturel et militaire) dans sa volonté d’organiser les différents « secteurs partageant des intérêts similaires aux nôtres, stratégie qui a exposé en même temps les acteurs à la répression » (voir Agiria, cité in Ibarra, 1989, p. 106).

1 Alexandra a été une des initiatrices du mouvement de la dissociation. 2 Les exemples sont innombrables concernant ETA pour les exécutions.

trompent », laquelle a surgi aussi bien suite aux exécutions menées par AD que face aux actions les plus dures des BR1.

Toutefois ce qui, pour une part, peut sembler constituer des divergences stratégiques, renvoie bien souvent et en dernière analyse à des divergences morales. Cette posture appert aussi bien pour les individus les plus engagés dans la lutte armée que pour ceux qui se situaient aux marges de ces organisations. Alberto Franceschini, ancien brigadiste, interrogé sur l’existence d’une éthique dans la lutte armée est clair sur ce point : « moi, justement, je me suis séparé de la lutte