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CHAPITRE 4 : CARTOGRAPHIE DE LA STRUCTURE DES FORÊTS DENSES HUMIDES

4.4.3 Typologie structurale des forêts

Nous proposons donc ici la première typologie structurale des forêts néo-calédoniennes, basée sur une zone d'étude vaste, des données quantitatives et standardisées permettant un suivi multi-temporel et une application à l'ensemble des forêts du territoire néo-calédonien. Les forêts appartenant à la classe de texture fine sont denses, caractérisées par une gamme de distribution des DBH restreinte, centrée vers les petits DBH (Dquad faible, et D40 faible); elles présentent des aires basales et des biomasses aériennes peu élevées. Les forêts appartenant à la classe de texture grossière sont caractérisées par une organisation structurale plus complexe avec une large gamme de distribution des DBH, des diamètres quadratiques moyens et des densités de grosses tiges élevées. Enfin, les forêts appartenant à la classe de texture intermédiaire sont caractérisées par des paramètres structuraux, liés au DBH, dans une gamme moyenne. Les valeurs de D, AB et d'AGB des classes de texture intermédiaire et grossière se confondent et sont plus élevées que celles de la classe de texture fine.

d'une texture de la canopée fine vers une texture de la canopée grossière, a été observé. En effet, l'augmentation du Dquad, de la densité de grosses tiges, de la gamme de distribution des DBH, et la diminution de la densité de tiges totale indiquent une stratification horizontale plus hétérogène, marquée par la présence de gros arbres. Celle-ci explique l'augmentation des AB et des AGB et induit également une stratification verticale rendant la canopée plus complexe (Richards 1996). Différents processus écologiques peuvent être à l'origine de ce gradient de complexification. En effet, le vieillissement des peuplements et l'action de gradients environnementaux sont reflétés dans les éléments de structure des forêts (e.g. Clark et Clark 1996 ; Pan et al. 2013), tels que les distributions de la taille des diamètres des troncs d'arbre (Rubin et al. 2006), les biomasses aériennes (Rice et al. 2004) et les profils de la canopée, définis par la distribution verticale des couronnes (e.g. Montgomery et Chazdon 2001 ; Stark et al. 2012). Cependant, s'il est impossible de définir le ou les processus écologiques expliquant la structure des peuplements caractérisés par une texture fine ou intermédiaire (voir Chapitre 3, 3.4.4), il est possible de définir les peuplements caractérisés par des textures de canopée grossière comme des peuplements de forêt mature. En effet la présence des grands arbres et l'hétérogénéité spatiale définissent les caractéristiques des forêts de fin de succession. La structure hétérogène des forêts de fin de succession comprend la variation de la densité des arbres et de leur taille dans le paysage, ainsi que la variation de la structure verticale de la canopée et de l'architecture des couronnes des arbres (Montgomery et Chazdon 2001 ; Guariguata et Ostertag 2001).

4.4.4 Les spécificités de l'application de l’analyse de la texture sur les forêts denses humides néo-calédoniennes

Etant donné la complexité des variations structurales des forêts denses humides dans la zone d'étude, du fait de l'influence des gradients environnementaux et des différents stades dynamique présents, pour partie résultats de la fragmentation des forêts denses humides, les relations entre la texture de la canopée et les paramètres structuraux se sont avérées plus subtiles que dans les études précédentes utilisant la même méthodologie (par exemple Ploton et al. 2012 ; Bastin et al. 2014 ; Singh et al. 2015). En effet, comme mis en évidence par Bastin et al. (2014), des niveaux de D, d'AB et d'AGB à la fois haut et bas ont été observés pour des parcelles caractérisées par une texture

grossière ou intermédiaire. La parcelle FP44 est par exemple caractérisée par une texture de canopée grossière liée à la présence de nombreux figuiers épiphytes étrangleurs émergents (12 individus, 8% de l'aire basale, voir Chapitre 3) caractérisés par de très larges couronnes (observations de terrain), et présente une AGB relativement faible (243 t/ha), certainement à cause de la très faible densité de tiges (766 tiges/ha) et de la faible hauteur de la canopée (env. 12 m) qui caractérisent cette parcelle. Inversement, la parcelle FP15, qui présente l'AGB la plus élevée (451 t/ha) du site de Forêt Plate, est quant à elle caractérisée par une texture intermédiaire. En effet, la plupart des arbres de canopée de cette parcelle appartiennent à l'espèce Agathis moorei (observation de terrain). Le modèle architectural de leurs couronnes s'apparenterait au modèle de Massart (Hallé et al. 1978 ; Veillon 1980), dont la ramification du méristème terminal de l'axe porteur est de type cyme unipare. Ceci aurait pour conséquence de minimiser la superficie de leurs couronnes lorsqu'elles sont vues du dessus, expliquant de ce fait que la texture de la canopée de cette parcelle ait été classée dans la classe intermédiaire plutôt que dans la classe grossière. Ces deux exemples montrent que des types architecturaux très particuliers peuvent créer des situations aberrantes par rapport à la tendance générale. Ceci n’a pas permis d’utiliser toutes les parcelles de terrain de FP pour la mise en place du modèle texture-structure dérivé de FOTO.

Notre site d'étude est situé sur une chaîne de montagne, aussi les variations topographiques locales induisent de la macro-hétérogénéité au sein des images de texture. En effet, une première et évidente influence des variations de la topographie sur les spectres-r des imagettes a été identifiée dans les premières étapes de l'analyse de texture, en comparant la position des imagettes sur les plans de l'ACP à l'évaluation visuelle de la texture de la canopée qui les caractérisait. Les variations topographiques locales peuvent créer de très grandes variations d'éclairage qui induisent des variations de texture à l'échelle d'une imagette sans rapport avec les variations des propriétés texturales de la canopée. Nous avons par exemple montré que les imagettes localisées au niveau d'une opposition de pente, sur les deux côtés d'une ligne de crête ou d'un talweg profond, pouvaient englober deux types distincts de texture de canopée à cause des variations marquées d'éclairage selon l'orientation des pentes. Ces imagettes affichent donc un patron d'illumination particulier et sont par conséquent

textural en fonction de cette macro-hétérogénéité (le long de l'axe 2, Figure 4.5) puis de leur grain de canopée. Ces résultats confirment les observations de Couteron et al. (2005) qui avaient expliqué l'organisation des imagettes sur un des axes de l'ACP défini par cette macro-hétérogénéité induite par le relief. Cette macro-hétérogénéité, due aux variations topographiques ne permet pas d'identifier correctement la texture de certaines imagettes du fait des ombrages créés et donc peut fausser les prédictions de structure de ces imagettes. Notons que la plupart de ces imagettes ont été classées dans la classe de non-forêt et ont donc été supprimées de l'analyse ultérieure.