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CHAPITRE 4 : CARTOGRAPHIE DE LA STRUCTURE DES FORÊTS DENSES HUMIDES

4.2.1 Analyse de la texture de la canopée

La méthode FOTO a été utilisée pour l'analyse de la texture du grain de la canopée. L'analyse des spectres dérivés du périodogramme de Fourier a initialement été proposée pour étudier la géomorphologie (Mugglestone et Renshaw 1998). Ces spectres ont été ensuite utilisés pour l’étude du couvert végétal par Couteron (2002) qui, de plus, a eu recours à une analyse en composante principale (ACP) pour comparer et ordonner systématiquement un grand nombre de spectres et faire ressortir les principaux gradients de texture. D’où le nom de FOTO (" FOurier-based Textural Ordination ") donné par Proisy et al. (2007). Cette méthode a été adaptée pour étudier les caractéristiques du paysage et de la végétation des zones arides (Couteron 2002 ; Barbier et al. 2006 ; Couteron et al. 2006 ; Deblauwe et al. 2011), ainsi que la structure de la canopée des forêts denses humides (Couteron et al. 2005), à partir de photographies aériennes et d’images satellitaires à haute et très haute résolution spatiale (THR). FOTO associe une transformée de Fourier rapide bidimensionnelle (2D-FFT) suivie d’une ACP pour produire des indices de texture. La présentation détaillée de la 2D-FFT et son application à des images numériques sont disponibles dans la littérature (Ripley 1981 ; Renshaw et Ford, 1984 ; Couteron 2002), seules les principales caractéristiques sont développées ci-après. Nous avons appliqué

cette méthode sur les images THR Pléiades en suivant la procédure présentée dans Proisy et al. (2007) et en utilisant un algorithme, nommé FOTOPAD, programmé par N. Barbier (version juin 2015) avec le logiciel MatLab® (The Mathworks, Natick, Massachusetts, USA). La méthode FOTO a ici été appliquée sur les huit images Pléiades : Aoupinié, Arago, Forêt Plate, Tiwaé, La Guen, Jiève, Atéu et Bouirou.

La méthode FOTO a été appliquée sur les images panchromatiques. Le canal panchromatique a été utilisé pour : (i) sa résolution spatiale (0,5 m) supérieure à celle des canaux multispectraux (2 m), et donc plus à même de capturer les variations de textures liées à des petits objets et (ii) sa capacité à résumer les informations radiométriques multi-spectrales (Proisy et al. 2007). La méthode FOTO donne des indices de texture dont l’interprétation est dépendante de la végétation étudiée, et nous l’avons d'abord appliquée sur des surfaces de végétation dont la canopée est suffisamment fermée pour que le grain de la canopée puisse traduire des gradients de taille de couronne et de stature des arbres (Couteron et al. 2005 ; Proisy et al. 2007), et une partie des images satellitaire a donc été masquée (Figure 4.1 étape 2). Afin de définir les zones à masquer, une cartographie au 1/3000 ème des forêts denses humides1 de la zone d'étude, digitalisée visuellement à partir des images aériennes (résolution = 0,5 m), a été utilisée. La savane à Niaoulis (Melaleuca quinquenervia), le maquis et les plantations monospécifiques de Pinus caribaea (espèce invasive) ont également été cartographiés visuellement sur l'image de Forêt Plate. Enfin les zones non végétalisées, à exclure de l’analyse de la texture, ont été délimitées : les nuages, leurs ombres, les cours d'eau, les routes, les sols nus et les zones anthropisées. Afin d'optimiser la superficie étudiée, l’analyse de la texture a été réalisée sur les patches de forêts denses humides et toutes les autres formations végétales incluses dans ces patches (par exemple les savanes à Niaoulis, les maquis et les plantations de Pinus caribaea). Ces formations n'ont pas été masquées afin de limiter la fragmentation des zones d'étude qui restreint la surface sur laquelle le modèle FOTO peut travailler. L’analyse de la texture se faisant à partir d'une fenêtre glissante de taille définie (Figure 4.1, étape 3), qui exclut une partie des surfaces sur la bordure des patches (Figure 4.2),

car les imagettes qui ne sont pas exclusivement composées de végétation (donc non-masquées) ne sont pas traitées par la méthode FOTO.

Figure 4.1 : Flux des opérations de l'application de la méthode FOTO sur les images Pléiades THR. Etapes 3 à 5: description de l'algorithme du programme Matlab FOTOPAD (Barbier 2015), implémentant une variante récente de la méthode FOTO, et menant de l’image satellitaire THR étudiée aux indices de texture.

Figure 4.2 : Illustration des effets de bord résultants de l'application de la méthode FOTO. Extrait du résultat de l’analyse de la texture sur l'image satellitaire d'Arago. Au 1er plan en couleur le composé RGB (" Red-Green-Blue ") et en arrière-plan l'image panchromatique Pléiades. Les zones qui apparaissant en niveaux de gris, en bordure du masque, illustrent les effets de bords : les imagettes incluant des pixels du masque n’étant pas traitées.

Les images masquées ainsi produites ont été utilisées pour l'analyse de texture, sans aucune transformation radiométrique ou géométrique. Elles ont été segmentées en imagettes d’1 hectare (Figure 4.1 étape 3). Plusieurs tailles d'imagettes ont été testées (de 0,5 à 4 ha), et l'hectare a été retenu car il était suffisamment grand pour inclure plusieurs répétitions des plus grands motifs, c'est-à-dire les grandes couronnes des arbres de forêt mature, dont le diamètre a été estimé à 16 m (au moins six répétitions). L'hectare était de plus suffisamment petit pour limiter les variations de texture liées au relief (voir Couteron et al. 2005) et également compatible avec la taille des parcelles mises en place dans les forêts. Pour améliorer la résolution spatiale de l'analyse de texture, les imagettes consécutives en X et Y se chevauchent tous les 50 m (par une logique de fenêtre glissante), ainsi la (pseudo-) résolution finale est de 50 m. Chaque imagette est une matrice carrée représentant la disposition

spatiale de la radiance panchromatique des pixels (en niveau de gris). Un spectre radial de Fourier (ou spectre-r) est calculé à partir du périodogramme 2D de chaque imagette, en faisant la moyenne des valeurs du périodogramme pour chaque nombre d’onde, sur l’ensemble des azimuts, donc en ignorant l’information liée aux différentes orientations. Le spectre-r transpose la radiance panchromatique exprimée dans le domaine spatial cartésien (XY) vers le domaine fréquentiel, correspondant au nombre de fois où un motif sinusoïdal de fréquence de référence (nombre d'onde) se répète à l'intérieur d'une imagette, en fonction des particularités du grain de canopée (Figure 4.1, étape 4, à droite). En d’autres termes, la variance de chaque imagette est partitionnée selon des classes de fréquences spatiales (Figure 4.1, étape 4, à gauche). Les fréquences spatiales, peuvent être exprimées par des nombres d'ondes (r), nombre de fois où le motif se répète dans l'imagette ou en cycles par kilomètre, tel que ݂ ൌ ͳͲͲͲ ൈ ݎ ൈ ܰିଵൈ ߂ܵିଵ (avec ߂ܵ la taille des pixels en mètre et ܰ la taille des imagettes en pixels) donnant le nombre de fois où un motif périodique se répète sur une distance d'un kilomètre. L'ensemble discret des fréquences spatiales ݂ utilisées peut également être transformé pour exprimer la taille des motifs (longueurs d'ondes) en mètres, tel que ൌ ͳͲͲͲ ݂Τ ; ߣ représentant typiquement le diamètre médian apparent de l'ensemble des couronnes des arbres visibles en canopée sur les images satellitaires (Barbier et al. 2010). Pour résumer, le spectre-r constitue un descripteur simple représentant la structure spatiale des imagettes en fonction de la partition de leurs variances selon un ensemble limité de fréquences spatiales. Les imagettes avec une texture grossière sont généralement associées à des spectres asymétriques dans les basses fréquences, tandis que celles avec une texture fine sont généralement associées à des spectres plus équilibrés. Initialement, l’échantillonnage des fréquences était uniquement basé sur l’ensemble des fréquences harmoniques de Fourier. L’algorithme FOTOPAD permet une interpolation du spectre en référence à un ensemble choisi de fréquences (généralement exprimées par leurs longueurs d’onde). Il utilise aussi le " zero-padding " (Percival et Walden 1993 ; Kunttu et al. 2005) pour interpoler les grandes longueurs d’onde se rapprochant de la taille des imagettes. Le principal effet est que l'échantillonnage est mieux équilibré entre les petites et grandes longueurs d'onde spatiales, ce qui rend l'analyse plus robuste aux variations instrumentales dans les textures fines qui peuvent être induites par exemple par des modifications de la fonction de

4.2.2 Analyse en composante principale sur le tableau des spectres-r et calcul des indices de