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Les différents types de contrats non permanents utilisés dans les IAA

L’intérim : il ne peut être utilisé que pour le remplacement d’un salarié

permanent absent ou pour faire face à un surcroît temporaire d’acti- vité ; il ne peut être renouvelé qu’une fois, la durée totale variant selon le motif du recours (entre 9 et 24 mois) ; il existe un délai légal de carence entre deux contrats ; le salarié perçoit une « prime de précarité » (10 % du salaire versé pendant la durée du contrat).

Le contrat à durée déterminée (CDD « normal ») : les restrictions

d’utilisation sont les mêmes que pour l’intérim ; ce contrat prévoit une date de fin et ne peut excéder 18 mois successifs pour un même salarié dans une même entreprise (renouvellements compris) ; un délai de carence doit être respecté entre deux contrats pour un même poste ; le salarié perçoit aussi une « prime de précarité » (10 % du salaire versé sur la durée du contrat) s’il n’est pas embauché sur un contrat à durée indéterminée à la fin de son CDD.

Toutes les entreprises de notre échantillon ont recours à de la main- d’œuvre temporaire et le choix des contrats temporaires fait lui-même l’objet d’une stratégie. Les entreprises arbitrent entre les différents types de contrats qui existent dans la législation du travail française en fonction du coût direct du travail et des règles d’utilisation qui y sont attachées (encadré 4). Par ailleurs, elles combinent également ces contrats de façon à satisfaire des besoins différents et susceptibles de varier dans le temps.

Certaines entreprises en font un usage structurel lié à la forte saisonnalité de leur activité. Dans notre échantillon, Regsweet et Chochris (qui réalisent entre 60 et 70 % de leur chiffre d’affaires pour les fêtes de Noël) sont reconnues comme ayant une activité saisonnière et, à ce titre, ont le droit d’utiliser des contrats saisonniers. Ce n’est pas le cas de Regsaus, pourtant

Le CDD saisonnier : il ne peut-être utilisé que par les entreprises

dont l’activité est reconnue comme saisonnière par la loi ; il est d’une durée maximale de 8 mois sur l’année et n’a pas obligatoirement de date de fin fixée par avance ; il peut faire l’objet d’une reconduction automatique d’une année sur l’autre ; il n’existe pas de délai de carence entre deux contrats ; il ne donne pas droit à la prime de précarité.

Le CDD étudiant : il est utilisé pendant les vacances scolaires

pour un jeune en cours de cursus scolaire ou universitaire. Le jeune doit obligatoirement reprendre son cursus à la fin du contrat dont la durée maximale est de deux mois. Il ne donne pas non plus droit à la prime de précarité. Il est fréquemment utilisé, entre autres, pour les vendanges.

Le statut de « tâcheron » : il concerne des travailleurs employés

par une firme extérieure et détachés dans l’entreprise utilisatrice (ce statut est d’usage traditionnel dans les industries charcutières bretonnes où les tâcherons sont principalement employés au désossage).

soumise aussi à une forte saisonnalité (consommation des saucisses en hiver, période au cours de laquelle la production est multipliée par cinq). Dans ces trois entreprises, les effectifs augmentent de 30 à 50 % pendant la haute saison. La disponibilité d’un nombre suffisant de saisonniers et temporaires dotés d’une certaine fiabilité revêt donc pour elles un caractère crucial.

Il est intéressant de noter que la vente croissante des produits par le circuit de la grande distribution a accru le caractère saisonnier de la produc- tion, mais aussi les variations à plus court terme, du fait notamment des campagnes promotionnelles. Par exemple, chez Regsaus, ces dernières peuvent entraîner une augmentation de la production de près de 30 % d’une semaine à l’autre. Pour ces fluctuations de plus court terme, les entreprises utilisent les contrats d’intérim, alors qu’elles recourent plutôt au contrat saisonnier ou au CDD pour les fluctuations saisonnières.

Dans d’autres entreprises, qui ont une activité assez régulière sur l’année, les travailleurs temporaires sont principalement utilisés pour le remplacement de salariés permanents absents. Ce recours tend à augmenter. D’une part, les entreprises ont de plus en plus tendance à produire toute l’année sans interruption (par exemple Canpat, qui a supprimé la fermeture pendant un mois d’été). D’autre part, la mise en place des 35 heures a entraîné une augmentation importante du nombre de jours de congés (jusqu’à 23 jours en plus des 5 semaines légales de congé, par exemple chez Hambac). Par ailleurs, l’absentéisme et les arrêts pour maladie sont une cause supplé- mentaire et croissante du besoin de main-d’œuvre ponctuelle. Enfin, comme pour les autres entreprises, les contraintes liées à la grande distribution (production en juste-à-temps, campagnes promotionnelles, voir supra) accroissent les exigences en termes de flexibilité. Au total, par exemple chez Hambac où le taux d’absentéisme est particulièrement élevé (15 % parmi les opérateurs), la main-d’œuvre temporaire représente en permanence entre 20 et 30 % de l’effectif total des ateliers concernés. Si les CDD standard

ou étudiants sont privilégiés pour les remplacements des congés d’été, c’est surtout le travail intérimaire qui est utilisé au cours de l’année.

D’autres raisons d’utilisation de contrats temporaires peuvent intervenir, comme le lancement d’un nouveau produit, la prise d’un nouveau marché ou l’attente de l’automatisation de certains postes sur lesquels on ne remplace plus les permanents partis à la retraite ou réaffectés à d’autres postes. Ce sont plutôt des travailleurs intérimaires qui sont alors utilisés. Ici aussi, les salariés temporaires jouent un rôle « d’amortisseur ». Il faut égale- ment souligner que les entreprises se servent des emplois temporaires pour sélectionner leur main-d’œuvre permanente. Ainsi Multiprod impose aux candidats à l’embauche ce que le directeur des ressources humaines qualifie lui-même de véritable « parcours du combattant ». Pendant une durée pouvant aller jusqu’à 18 mois, ils doivent enchaîner des périodes de CDD et d’intérim avant d’être éventuellement embauchés en CDI.

Il faut noter que l’enchaînement de contrats temporaires de différents types est aussi une pratique fréquente : enchaînement contrat saisonnier + intérim, où l’intérim permet de prolonger la durée d’emploi des saisonniers au-delà de la durée légale maximale du contrat saisonnier – 8 mois par an (chez Chochris par exemple) ; enchaînement intérim + contrat saisonnier ou CDD : l’intérim étant utilisé comme test avant l’embauche des tempo- raires pour la saison (test de leur résistance aux conditions de travail et de leur fiabilité…) ou bien parce que les entreprises rencontrent des difficultés pour recruter leurs saisonniers et utilisent les services de sociétés d’intérim qui, par ailleurs, assurent souvent une formation minimale aux règles d’hygiène et de sécurité (comme par exemple chez Regsaus et Regsweet).

Il faut enfin évoquer un type très particulier de travailleurs non perma- nents : les tâcherons, utilisés uniquement dans l’industrie charcutière, sur des postes particulièrement pénibles et que les entreprises ont du mal à pourvoir, tels que le désossage. Les tâcherons sont des travailleurs officiel- lement salariés par une entreprise prestataire de services. Mais cette dernière

joue en réalité le rôle de simple intermédiaire, et les tâcherons peuvent être assimilés de fait à des travailleurs indépendants, travaillant dans l’entre- prise d’accueil avec leur propre équipement (couteaux, protections…) et payés à la tâche1.

Salariés temporaires : les « meilleurs candidats » aux bas salaires et aux emplois peu qualifiés

Les salariés temporaires sont massivement affectés aux postes d’opérateurs de la production et du conditionnement, les plus simples et les moins qualifiés (manutention, emballage manuel…)2. De ce fait, ils sont majoritairement employés aux plus bas coefficients de salaire (120 ou 125, voir tableau 13). Généralement, ils restent à ces niveaux même s’ils effectuent plusieurs contrats successifs pour la même entreprise. En règle générale, ils n’ont pas accès à l’ensemble des primes et des avantages dont bénéficient les salariés permanents3, d’où la concentration de bas salaires dans cette catégorie. Ce n’est que depuis le début de l’année 2005 que les saisonniers peuvent bénéficier de la prime d’ancienneté, à certaines conditions et de façon proportionnelle à la durée du temps passé dans l’entreprise. Les salariés embauchés en CDD standard et les intérimaires bénéficient cependant d’une prime de précarité,

1. Le paiement à la tâche étant officiellement interdit en France, leur rémunération est présentée sous la forme d’une rémunération mensuelle avec primes au rendement et autres primes (déplacements…).

2. Certains de ces postes, dans l’emballage manuel notamment, sont soumis à des objectifs stricts en termes de rendement (comme chez Chochris et Regsweet). Deux cas peuvent se présenter selon les entreprises : soit les temporaires ne changent pas de postes et assurent donc des travaux très répétitifs, soit ils tournent d’un atelier à l’autre en fonction des besoins.

3. Ils doivent légalement bénéficier des primes compensatrices des conditions de travail (travail de nuit, travail dans le froid…).

à laquelle n’ont pas droit les personnes embauchées en CDD saisonnier ou étudiant.

Ces salariés n’ont que très peu accès à la formation. En règle générale, ils bénéficient d’une formation a minima à l’hygiène et la sécurité lors de leur entrée dans l’entreprise (d’une durée de quatre heures chez Hambac pour les jeunes recrutés en CDD étudiants par exemple), et d’une formation sur le tas au poste de travail généralement assurée par les salariés perma- nents. Pour les intérimaires, cette formation minimale est souvent assurée par les sociétés d’intérim. L’affectation des temporaires aux postes les plus simples vise justement à éviter d’avoir à les former et à faire en sorte qu’ils soient opérationnels très vite. De même, les perspectives de promotion sont quasiment nulles pour cette catégorie de salariés sauf pour ceux qui, à terme, intégreront l’effectif permanent de l’entreprise.

Comme leurs collègues permanents, les salariés temporaires que nous avons rencontrés ressentent une intensification du travail. De plus, alors qu’ils sont souvent surreprésentés dans les accidents du travail, ils se sentent moins protégés que les permanents en cas de problèmes de santé. Du fait de la situation précaire dans laquelle ils se trouvent (peur de ne pas être repris), ils ont eu tendance à minimiser ces problèmes au cours de nos différents échanges avec eux. Enfin, ils ont le sentiment de n’être pas ou peu représentés par les syndicats, ce que confirment plusieurs représentants du personnel rencontrés (selon le délégué du personnel de Regsaus, par exemple, « les intérimaires on ne les connaît pas, on n’a pas beaucoup de contact »).

Cette description d’une gestion a minima doit cependant être nuancée. Il existe en effet plusieurs modes de traitement des travailleurs tempo- raires qui diffèrent selon les entreprises et, parfois, au sein de la même entreprise. Dans plusieurs des cas rencontrés, il y a des volants de salariés temporaires relativement stables, ce qui correspond à un double objectif des entreprises – fidélisation et sas à l’embauche. Chez Hambac, certains

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