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C AUSES DE LA FAIBLE INCIDENCE DU TRAVAIL À BAS SALAIRE

Robustesse des résultats

C AUSES DE LA FAIBLE INCIDENCE DU TRAVAIL À BAS SALAIRE

Rôle du smic

Depuis juillet 2008, le smic horaire brut est de 8,71 euros, soit 6,84 euros net et s’applique en principe1 à tous les salariés de plus de 18 ans. En 2005, il représentait 47 % du salaire brut moyen, soit un pourcentage sensiblement identique à celui des Pays-Bas (46 %) – pour les salariés de 23 ans et plus2, mais très supérieur à celui du Royaume-Uni (35 %) ou encore des États-Unis

1. Certains travailleurs ne sont cependant pas couverts : les VRP dont le temps de travail n’est pas comptabilisable, ou les animateurs de centres de loisir ou de vacances qui touchent une indemnité (de l’ordre de 25 euros par jour).

2. Les Pays-Bas ont des taux de salaire minimum pour les jeunes qui dépendent de l’âge ; ils varient de 30 % (à 15 ans) à 85 % (à 22 ans) du salaire minimum « adulte » (qui s’applique à partir de 23 ans). En 2005, près de la moitié des salariés au salaire minimum avaient moins de 25 ans.

(34 %)1 [43]. L’existence d’un « salaire-plancher » assez élevé en termes relatifs joue, bien sûr, un rôle majeur pour expliquer la compression des inégalités salariales, en particulier au bas de la distribution. Son impact va cependant au-delà de ce seul effet mécanique dans la mesure où il joue également sur l’offre d’emplois peu qualifiés et à bas salaire.

Effets du smic sur la distribution des salaires

Le premier effet du smic sur le travail à bas salaire est de nature mécanique. En effet, le salaire minimum comprime la partie basse de la distribution salariale alors qu’il affecte relativement peu le salaire médian. D’un point de vue dynamique, cette compression résulte du fait que les augmentations du smic ne se diffusent pas intégralement au reste de la distribution des salaires : si la diffusion est de 100 % au bout d’un an entre 1 et 1,1 smic, elle diminue au fur et à mesure que l’on monte dans la hiérarchie des salaires, pour n’être plus que d’environ 7 % entre 1,4 et 1,5 smic [45]2. Le principal effet du smic est donc de rapprocher les salaires les plus faibles du seuil de bas salaires retenu ici.

Dans ces conditions, un nombre potentiellement important de travailleurs dont le salaire (effectif) de base se situe au-dessous du seuil des bas salaires se trouve en fait percevoir une rémunération horaire supérieure à ce seuil par le seul jeu des primes et des bonus. C’est le cas d’une partie des travailleurs rémunérés au smic : en 2002, 26 % des « smicards » percevaient

1. Les fortes hausses du salaire minimum fédéral programmées depuis 2007 et celles promises par Barack Obama devraient porter ce ratio, aux États-Unis, à un niveau proche de celui constaté en France.

2. En d’autres termes, une augmentation de 10 % du smic n’entraînerait en moyenne qu’une augmentation de 0,7 % des salaires compris entre 1,4 et 1,5 smic. Cette estimation se fonde sur l’étude des grilles de salaire d’un échantillon représentatif d’entreprises de plus de 10 salariés.

ainsi une rémunération horaire – incluant les primes et bonus – d’au moins 30 % supérieure au smic horaire et se situaient, de ce fait, sensiblement au- dessus du seuil des bas salaires [70]. C’est la raison pour laquelle la proportion de travailleurs à bas salaire (11,1 % en 2005 si l’on inclut les apprentis) est inférieure à la proportion de travailleurs payés au smic horaire comme salaire de base (16,3 % en 2005).

Au-delà de ses effets sur le niveau et la structure des rémunérations, le smic affecte également la demande de travail et donc, symétriquement, l’offre d’emplois au bas de l’échelle des salaires.

Effets du smic sur la demande de travail

La raison pour laquelle le smic est susceptible d’affecter la demande de travail, en particulier dans les emplois à bas salaires, est que, toutes choses égales par ailleurs, un salaire minimum élevé engendre un coût du travail élevé. Le modèle néoclassique du marché du travail nous enseigne que si le marché est parfaitement concurrentiel, un coût du travail élevé au bas de l’échelle des rémunérations aura pour effet de réduire la demande de travail et donc le niveau d’emploi, tout particulièrement pour les salariés dont les niveaux de rémunération sont proches du smic, à savoir les jeunes et les travailleurs peu qualifiés. La faible incidence du travail à bas salaire en France trouverait donc sa contrepartie dans un niveau élevé du chômage, surtout parmi les jeunes et les non-qualifiés.

De fait, le taux de chômage en France est élevé par rapport aux autres pays industrialisés. Il atteignait ainsi 8,3 % en 2007 contre 7 % dans l’Union européenne (UE-15) et 4,6 % aux États-Unis1. Il est également particuliè- rement élevé parmi les jeunes (19,6 % pour les moins de 25 ans en 2007) et parmi les salariés n’ayant pas atteint le second cycle du secondaire (11 %

en 2006). Parallèlement, le smic apparaît élevé, à la fois par rapport aux salaires minima des autres pays européens et par rapport au salaire médian français. Selon Eurostat, la France se situe dans le groupe de tête des pays européens concernant le niveau du salaire minimum mensuel à temps plein : en janvier 2008, sur vingt et un pays1 ayant un salaire minimum légal national, la France arrive en sixième position après les pays du Benelux, l’Irlande et le Royaume-Uni, et en cinquième lorsque l’on compare les salaires en parité de pouvoir d’achat. Par ailleurs, le smic est élevé par rapport au salaire médian français (calculé pour les salariés à temps plein) : en 2005, il aurait atteint 66 % de ce dernier contre 45 % au Royaume-Uni2, par exemple. Cela a été à l’origine d’un coût relatif du travail très élevé au niveau du salaire minimum dans la première moitié des années 1980 avant que ce coût n’amorce une baisse (figure 1), baisse qui s’est accélérée à partir du milieu des années 1990 avec la politique continue d’allégement des cotisations sociales employeurs. Celle-ci a été mise en place à partir du début des années 1990, suite à l’adoption de la loi quinquennale pour l’emploi (1993)3. Au total, le coût relatif du salaire minimum est actuellement inférieur à celui qui prévalait depuis le milieu des années 1970.

1. L’étude porte sur dix-huit pays membres de l’Union européenne, deux pays en voie d’adhésion (Roumanie et Bulgarie) et un pays candidat (la Turquie).

2. Voir OECD Earnings Database. Les statistiques pour les différents pays étant construites à partir d’enquêtes hétérogènes (par exemple champ DADS pour la France, champ exhaustif pour le Royaume-Uni), elles sont à utiliser avec prudence pour les comparaisons.

3. Les modalités ont changé de nombreuses fois au cours du temps. Début 2008, l’allégement atteignait un maximum de 26 points de pourcentage (en proportion du salaire brut) au niveau du smic (et même 28,1 points pour les entreprises de moins de 20 salariés) et baissait de façon continue pour s’annuler à 1,6 smic.

Le modèle néoclassique du marché du travail évoqué plus haut suggère que le niveau relativement élevé du smic est vraisemblablement à l’origine du faible taux d’emploi au bas de l’échelle des salaires. Deux mécanismes sont potentiellement à l’œuvre : (1) à niveau d’activité donné, un coût du travail élevé au niveau du smic favorise la substitution capital-travail ainsi que la substitution entre travail qualifié et travail non qualifié ; (2) par ailleurs, il contribue à déformer la structure des activités au détriment des activités intensives en travail faiblement rémunéré.

Le premier point mentionné ici fait toutefois débat dans la littérature économique [59]. Un grand nombre de travaux mettent effectivement en évidence une élasticité négative du taux d’emploi au salaire minimum, en

Figure 1 – Ratio du smic au salaire médian (1959-2006).

Note : sur la période 1998-2006, le salaire minimum considéré correspond à la moyenne des situations des salariés à 35 heures et à 39 heures, pondérées par leurs poids respectifs. Source : DGTPE, « Le smic », conférence emploi, pouvoir d’achat, 23 novembre 2007.

Ratio smic mensuel/salaire médian temps complet (coût du travail)

smic rattrapage desinflation

compétitive

Ratio smic mensuel/salaire médian temps complet (net de cotisations, CSG et CRDS) 68 % 64 % 60 % 56 % 52 % 48 % 44 % 40 % 1959 1961 1963 1965 1967 1969 1971 1973 1975 1977 1979 1981 1983 1985 1987 1989 1991 1993 1995 1997 1999 2001 2003 2005 allègements de cotisations

particulier pour les salariés les plus jeunes et les moins qualifiés, entre autres [57, 58]. Toutefois, un autre courant de la littérature souligne que, si le marché du travail est imparfaitement concurrentiel et si, en particulier, les entreprises disposent d’un pouvoir de monopsone et donc d’une certaine marge de manœuvre pour fixer les salaires1, alors une augmentation du salaire minimum peut même commencer par accroître le niveau d’emploi, avant de le diminuer dans un second temps [51]. Le salaire minimum joue également sur l’offre de travail ; sa hausse peut entraîner celle de la partici- pation au marché du travail. Ces résultats sont cohérents avec un ensemble de travaux empiriques qui mettent en évidence une élasticité nulle, voire positive, de l’emploi au salaire minimum, y compris pour les catégories les plus concernées par ce dernier [9, 22, 23, 32]. Plus récemment, les travaux sur la réintroduction du salaire minimum au Royaume-Uni et sa for te augmentation dans les années 2000 ne parviennent pas à mettre en évidence un impact négatif significatif sur l’emploi [55]. Cependant, aussi bien au Royaume-Uni qu’aux États-Unis, le rapport du salaire minimum au salaire médian (ou moyen), comme souligné plus haut, reste nettement inférieur au ratio constaté en France, où les effets négatifs potentiels sur l’emploi peuvent donc être plus importants.

1. En toute rigueur, un monopsone désigne la situation de marché où un seul demandeur fait face à une multiplicité d’offreurs, situation rarissime sur le marché du travail. Cependant, des imperfections diverses engendrent des coûts pour les travailleurs (coûts de mobilité, coûts d’information sur les autres opportunités d’emploi), donnant naissance au pouvoir de monopsone des entreprises. En termes techniques, cela signifie que ces dernières ne font pas face à une courbe d’offre de travail infiniment élastique. En d’autres termes, si elles baissent leur salaire, elles ne perdront qu’une partie de leurs salariés – partie d’autant plus faible que ce pouvoir de monopsone est important. Au total, le pouvoir de monopsone traduit simplement le pouvoir de marché des entreprises face à des catégories de main-d’œuvre (notamment les jeunes, les immigrés et les femmes peu qualifiés) dont les opportunités d’emploi sont réduites.

Les estimations réalisées par J. Abowd et al. montrent qu’un accroissement de 1 % du smic réduit la probabilité d’emploi des salariés concernés de 1 % pour les hommes et 1,3 % pour les femmes [1]. De même, F. Kramarz et T. Philippon montrent qu’une augmentation de 1 % du coût du travail au niveau du smic accroît de 1,5 % le risque de transition de l’emploi vers le non-emploi pour les salariés affectés par cette mesure [46]. Toutefois, il faut souligner que, malgré les augmentations du smic, le coût relatif du travail au niveau du salaire minimum a beaucoup baissé depuis le milieu des années 1980 et surtout à partir de 1993 (voir figure 1). Cela tient évidemment aux allégements de charges pour les employeurs qui ont permis de compenser les augmentations du smic contribuant ainsi à faire repartir à la hausse la part de l’emploi non qualifié dans l’emploi total [37]. Cette tendance s’est légèrement inversée à partir de 1996, mais la hausse du coût du travail au niveau du salaire minimum reste limitée. De ce fait, malgré l’augmentation du smic horaire suite à la convergence par le haut des smic 35 heures, le rapport entre le coût du travail au niveau du smic et le coût évalué au niveau du salaire moyen reste inchangé [63] ; en 2006, il est inférieur à celui constaté aux Pays-Bas (pour les salariés de plus de 23 ans) tout comme dans certains pays anglo-saxons (Irlande, Nouvelle-Zélande, Australie), mais supérieur à celui de nombreux autres pays, dont le Royaume-Uni et les États-Unis.

Dans ces conditions, l’impact du salaire minimum sur le niveau global de l’emploi au bas de l’échelle des rémunérations reste relativement incertain. Il existe cependant des indications suggérant que la substitution capital- travail est potentiellement forte en France. L’intensité capitalistique – ratio du stock de capital au nombre d’heures travaillées – est en effet parmi les plus élevées de l’Union européenne. Elle s’élevait à 103 % de l’intensité capitalistique américaine en 2005 contre 77 % pour le Royaume-Uni et 92 % pour l’Union européenne en général. La France se situe en revanche derrière l’Allemagne (115 %) et le Danemark (121 %) [44].

Parallèlement, la productivité horaire du travail est élevée en France : elle atteint presque le niveau américain1, alors que les autres pays européens – hormis la Belgique et, dans une moindre mesure, les Pays-Bas – sont, eux, loin derrière les États-Unis (tableau 5).

Cela s’explique bien sûr, en partie, par la forte intensité capitalistique de notre pays, mais probablement aussi par un effet de sélection dû à la faible proportion de salariés peu qualifiés en emploi. Quelle que soit l’importance

1. Ce n’est pas le cas de la productivité par tête du fait d’un nombre d’heures travaillées par salarié et par an beaucoup plus faible en France (1 468 en 2006) qu’aux États-Unis (1 809 en 2006).

Tableau 5 – Productivité du travail (2006) (en % de la productivité américaine).

Par heure travaillée Par salarié

France 98 85 Allemagne 83 66 Pays-Bas 92 72 Danemark 85 75 Royaume-Uni 85 77 Belgique 96 86 Italie 82 72 Espagne 61 60 États-Unis 100 100

relative de ces deux effets, le niveau élevé de l’intensité capitalistique et de la productivité du travail1 indique que les entreprises françaises recourent à des processus productifs relativement peu intensifs en travail. La question est alors de savoir si ce « biais capitalistique » affecte uniformément la structure de l’emploi ou si les travailleurs les moins bien rémunérés sont particulièrement touchés.

Au-delà des effets de substitution capital-travail, le niveau du salaire minimum influe également sur la demande de travail au bas de l’échelle des rémunérations par l’intermédiaire de son impact sur la structure de l’activité. Un smic élevé peut ainsi inciter les entreprises à redéployer leurs activités au détriment des secteurs intensifs en travail à bas salaire pour se concentrer sur des activités à plus forte valeur ajoutée. Cela semble bien être le cas en France puisque, de 1970 à 2000, l’écart entre notre taux d’emploi et celui des États-Unis est passé de 1,2 à 17,1 % (au bénéfice des États-Unis). Or, près de 95 % de cet écart s’explique par un déficit d’emploi dans le secteur des services, tout particulièrement dans l’hôtellerie-restauration et le commerce, dont nous verrons qu’ils sont très intensifs en travail à bas salaire (chapitres 4 et 5). Selon A. Glyn [39], en 1999, le nombre d’heures travaillées dans les secteurs du commerce, de l’hôtellerie-restauration et des traiteurs, rapporté au nombre d’individus âgés de 15 à 64 ans dans la population était de 304 aux États-Unis, 239 au Royaume-Uni et 217 en Allemagne contre seulement 175-180 en France et aux Pays-Bas, soit un écart de taux d’emploi de près de 70 % avec les États-Unis.

1. Ces chiffres élevés au niveau macroéconomique en matière de productivité et d’intensité capitalistique pourraient s’expliquer en partie par un effet de composition lié à la structure des activités : la France souffrirait d’un « déficit » dans les activités par nature peu intensives en capital et donc peu productives, comme nous allons le voir dans le paragraphe suivant. Les résultats obtenus par Mason et al. [52] suggèrent cepen- dant qu’un tel effet n’explique pas tout : le niveau élevé de la productivité du travail dans notre pays s’observe également à l’intérieur de secteurs d’activité définis à un niveau fin.

Cela suggère qu’il existe en France un déficit d’emplois dans le secteur des services. Son origine fait toutefois l’objet de débats. T. Piketty [66] montre que la décélération du taux de croissance de l’emploi dans les services est fortement corrélée aux hausses du smic intervenues dans les années 1970. A. Glyn insiste, lui, sur le fait que le faible niveau d’emploi dans le secteur de la distribution est principalement dû au niveau de consommation, sensi- blement plus faible dans les pays européens qu’aux États-Unis [39]. Cette seconde interprétation n’est cependant pas exclusive de la première, dans la mesure où le recours au marché plutôt qu’à la production domestique pour un certain nombre de services (restauration, garde d’enfants, tâches ménagères, etc.) dépend évidemment de leur coût : s’il est plus élevé en France qu’aux États-Unis, on peut s’attendre à ce que les Français produisent eux-mêmes ce que les Américains achètent sur le marché [36].

De récentes analyses montrent cependant que le déficit d’emplois dans certains secteurs de services peut également trouver son origine dans la réglementation du marché des produits [20]. Selon l’OCDE [61], la crois- sance de la productivité et de l’emploi dans le secteur des services aurait été entravée par le manque de libéralisation dans les industries de réseau (telles que les télécoms, l’électricité, les services postaux et le transport ferroviaire) et par une réglementation trop stricte en matière de création d’établissements dans les secteurs du commerce de détail et des services aux entreprises. Le développement des super et des hypermarchés a ainsi été considérablement limité par les lois Royer et Raffarin (voir chapitre 5). Celles-ci ont fortement réduit la croissance de l’emploi dans le secteur : d’après certaines estimations, le nombre d’emplois pourrait être près de 15 % plus élevé en l’absence de ces réglementations [16].

Au total, la faible incidence du travail à bas salaire en France semble due à la fois à l’effet mécanique de compression induit par le smic et à une offre d’emplois réduite au bas de la hiérarchie des salaires. Cette dernière est toutefois activement soutenue depuis le milieu des années 1990 par la

politique de baisse des charges sociales. Celle-ci a ainsi permis d’enrayer la baisse de l’emploi peu qualifié dans l’emploi total sans que cela se traduise par un accroissement de la part du travail à bas salaire. Mais la France se trouve de ce fait dans une situation très particulière, l’emploi peu qualifié étant fortement subventionné par la puissance publique.

Au-delà des effets sur la demande de travail, l’offre de travail potentiel- lement peu rémunéré a pu, elle aussi, être affectée par un certain nombre de dispositifs de politique de l’emploi dont la plupart ont été réformés dans les années récentes, mais avec des effets semble-t-il mitigés.

Indemnisation du chômage, minima sociaux et offre de travail à bas salaire

L’importance de l’emploi à bas salaire ne dépend pas seulement de la demande de travail de la part des entreprises mais peut être affectée par l’offre de travail (le nombre de personnes acceptant d’occuper ces emplois). De ce point de vue, il convient d’analyser les déterminants du salaire de « réservation » des individus, c’est-à-dire le niveau de salaire en dessous duquel un travailleur refusera un emploi.

Le premier dispositif susceptible d’affecter ce salaire de réservation est le système d’indemnisation du chômage. En effet, les travaux empiriques récents s’accordent sur le fait qu’un taux de remplacement élevé et une longue durée d’indemnisation sont tous les deux facteurs d’un taux de chômage important [62]. Or, le système français d’indemnisation apparaît relativement généreux sur ces deux points avec un taux de remplacement moyen de 59 % du salaire brut en 2004, et une durée de versement des indemnités pouvant aller jusqu’à trois ans pour les salariés ayant travaillé le plus longtemps. Toutefois, le taux de couverture est, lui, relativement faible : en 2004, il atteignait en moyenne 62,3 % des demandeurs d’emploi inscrits à l’Agence nationale pour l’emploi, et seulement 43,3 % pour les chômeurs de moins de 25 ans [56]. Au total, le degré de générosité du

système français est donc moyen. Il serait cependant renforcé par la faiblesse des contrôles pesant sur les demandeurs d’emploi jusqu’au milieu des années 2000 et ce, malgré la mise en place du plan d’aide au retour à l’emploi (PARE) en 2001. En particulier, le taux de sanctions1 en cas d’insuf- fisance dans la recherche d’emploi ou de tricherie à l’égard du système d’indemnisation est beaucoup plus faible en France que dans d’autres pays de l’OCDE, comme l’Allemagne ou le Danemark [20]. Malgré tout, les résul-

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