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Sur quel type de données appuyer une connaissance des réseaux ?

L’analyse de SISPEA montre les difficultés à faire de la base de données nationale un outil de benchmarking et de gestion. Cependant, en dehors de SISPEA, il existe d’autres outils de connaissance et de partage de connaissance sur la gestion patrimoniale des réseaux d’eau qu’il est sans doute intéressant de comprendre et d’utiliser pour alimenter des stratégies de financement de la gestion patrimoniale.

Deux types de démarche ont pu être isolés au cours de la première phase du projet, qui montrent les ressources sur lesquelles s’appuient les différents acteurs pour développer de la connaissance et des échanges de pratiques sur l’état des réseaux d’eau et d’assainissement.

3.1. Comment créer du comparable : la méthode FNCCR

Certaines associations de collectivités ont développé une expertise sectorielle, et surtout une pratique de comparaison. Face à une base SISPEA dont les données sont principalement déclaratives et dont le contrôle reste parfois insuffisant, la FNCCR a ainsi développé depuis une dizaine d’années des études comparées pour une quarantaine de ses adhérents sur les questions de gestion patrimoniale.

La vocation de ces études n’est toutefois pas de développer une approche statistique (que les problèmes de qualité de la donnée dans SISPEA rendent de toute façon peu pertinente), mais de créer des lieux de partage d’expérience.

« SISPEA ne suffit pas : c’est un exercice souvent fastidieux, mais un peu court pour comparer. Il faut bien comprendre que la richesse n’est pas dans la donnée, mais dans le dialogue créé » (entretien responsable FNCCR). En mettant en place des groupes de pairs, la FNCCR construit du comparable, et peut développer de nouveaux outils communs sur certains points comme l’analyse fonctionnelle des coûts.

C’est notamment par cette pratique de comparaison et une discussion collective que d’autres approches de la gestion patrimoniale arrivent à émerger, sortant d’une vision uniquement cadrée par les indicateurs de comparaison nationale comme le rendement ou le taux de renouvellement. C’est dans cet esprit que les autorités organisatrices des groupes de travail cherchent à davantage investir dans des méthodes de gestion de la maintenance plus globales, en développant par exemple l'usage d'outils de GMAO (gestion de maintenance assistée par ordinateur)15 qui dépassent le seul horizon du renouvellement, en se focalisant notamment sur

15 Pour l’instant, la GMAO a été bien intégrée pour les usines de potabilisation ou de traitement des eaux usées,

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les solutions permettant d'optimiser les réseaux existants ou d'allonger la durée de vie des canalisations.

3.2. Utiliser les données des opérateurs et canalisateurs

Des entretiens avec les opérateurs et les entreprises de pose de canalisation ont également permis de mettre en avant d’autres outils, informations et données, dont l’appréhension est précieuse pour pouvoir comprendre les stratégies de gestion patrimoniale existantes et orienter les possibles investissements dans le secteur.

L’approche complète de l’outil Mosare : avoir une approche statistique au niveau local et non national

Une entreprise comme Veolia a ainsi développé des outils permettant d’approfondir la connaissance de l’état des réseaux et d’affiner les facteurs conduisant à un renouvellement potentiel des canalisations. Les méthodes d’analyse sur les canalisations qui ont longtemps fait référence sont celles de l’étude Cador de 2002, pour Geophen. Dans ce cadre, le niveau de renouvellement était estimé à partir d’une entrée par le matériau et une durée de vie moyenne par type de matériau.

La méthode développée à travers l’outil Mosare de Veolia, issu de premiers développements réalisés par le bureau d’études G2C/Alteréo, permet d’aller plus loin, pour aller vers une approche plus statistique des canalisations, mais au niveau local et non national. L’outil prend en compte ainsi un diagnostic s’appuyant sur :

- Des analyses structurelles, constituées des données sur o Les prélèvements de secteurs

o Des analyses non destructives pour voir la corrosion (analyse en labo possible, pour voir la tenue de la matière). C’est ce qui permet par exemple d’identifier une dégradation des canalisations en Polyéthylène liée aux antioxydants, ce qui peut générer des problèmes sur les branchements en cette matière. o Une inspection intrusive avec un petit robot (plus chère)

- Des analyses des facteurs de vieillissement

o Le caractère incrustant, entartrant, corrosif, abrasif, auxquelles on ajoute, le cas échéant, une analyse des zones de mélange d’eaux

o Le sol, surtout sur les conduites d’adduction

- Une analyse de l’impact d’une dégradation : nombre de personnes impactées en cas de casse ou d’arrêt

L’outil Mosare permet ainsi d’intégrer l’historique des interventions, le résultat des analyses d’inspection / destructives et sol. Cela permet de modéliser le réseau et de calculer un futur taux de défaillance. En croisant ces données avec des données de conséquences potentielles, on peut alors établir une matrice de risque sur les canalisations et une évaluation des

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conséquences locales. On peut alors établir une note patrimoniale, en fonction des valeurs à neuf des canalisations les plus fragiles.

L’outil Canascan : penser les réseaux en cycle de vie et en usage réel

Des outils de connaissance permettant d’optimiser les canalisations ont également été développés ou sont en cours de développement par les entreprises de pose des canalisations, comme la SADE.

C’est le cas du projet Canascan, qui est une solution permettant, à partir de l’analyse d’une canalisation de 50 cm, prélevée lors d’une ouverture de voirie pour détecter ou réparer une fuite, d’apprécier via un scanner 3D la façon dont la canalisation a évolué dans le sol, et d’y associer un indice de sécurité et de risque de casse. L’outil est conçu comme un outil d’aide à la décision, et devrait être présenté à l’ensemble des partenaires de la filière des canalisateurs. La solution Canascan a été développée pour les matériaux dits nobles, à savoir la fonte et l’acier, mais a vocation à être développée également pour le plastique. Elle propose pour un coût relativement faible (500€) une première analyse, là où des entreprises comme Pont-à- Mousson proposent des analyses 3D plus poussées à des prix beaucoup plus élevés.

Cette approche via Canascan répond là encore à une volonté partagée par les canalisateurs

et la FNCCR, celle de travailler sur le prolongement de la durée de vie des canalisations.

Cette préoccupation est congruente avec celle de certains opérateurs, qui se retrouvent parfois à négocier avec leurs autorités organisatrices pour dépasser une approche par le taux de

renouvellement.

Synthèse du chapitre 2 principaux arguments

- En dehors des bases nationales comme SISPEA, d’autres outils ont émergé au cours des dernières années pour aider à la décision sur la mise en place de stratégies de

renouvellement et les politiques de maintenance. La FNCCR en propose une approche thématique, en construisant du comparable sur de petits groupes, pour faire évoluer les référentiels d’action plutôt que de se focaliser sur l’atteinte d’un indicateur. Ces ressources sont pour l’instant relativement peu valorisées en dehors de petits cercles de pairs.

- Les entreprises de canalisations et les opérateurs, publics comme privés, développent en parallèle des modèles de maintenance plus globale et mettent en place des outils permettant d’affiner localement les diagnostics des états des réseaux et d’affiner une appréhension de la question standardisée par le seul matériau et durée de vie moyenne.

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Chapitre 4 Stratégies et enjeux émergents autour de la gestion