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TRAVAUX PERSONNELS : Evaluation neurotoxicologique des chélates de Gd adminis trés de façon répétée

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A. Introduction

Les effets neurotoxiques de l’accumulation cérébrale de Gd sont, pour le moment, inconnus. En effet, les patients suivis régulièrement par IRM injectées souffrent souvent de pathologies non anodines, ce qui induit de nombreux facteurs confondants. Il est essentiel d’évaluer une telle toxicité. Le recours à des études pré- cliniques présente l’avantage d’être prospectif et de permettre un suivi rigoureux des animaux étudiés au moyen de tests validés.

Pour rechercher cette éventuelle toxicité, nous avons choisi de réaliser cette étude préliminaire sur un mo- dèle ayant reçu des doses plus élevées que celles des protocoles précédents, et sur des rats sains. En effet, nous n’avons pas souhaité utiliser ici le modèle sensibilisé par l’insuffisance rénale, pour éviter toute source de biais (Nongnuch, 2014). Ces exploratoire ont été réalisée pour des administrations réitérées de plusieurs fois la dose clinique de chélates de Gd.

Les conséquences toxiques de l’accumulation de Gd peuvent se manifester à différents niveaux :

 Au niveau systémique, avec des altérations neuro-comportementales, des troubles moteurs ou co- gnitifs ;

 Au niveau tissulaire, avec par exemple une toxicité sur les cellules endothéliales des vaisseaux, ou encore l’induction d’une gliose, c’est à dire l’activation et la prolifération de cellules gliales (astro- cytes, oligodendrocytes, microglie), ou une dégénérescence neuronale, etc. ;

 Au niveau moléculaire, avec la modification des concentrations de neurotransmetteurs, du système énergétique cellulaire, ou encore la circulation de marqueurs de toxicité.

Bien que reposant sur une rationnelle liée au métal étudié, le Gd, et aux structures principalement concer- nées par son accumulation, une large batterie de tests neuro-comportementaux, mais aussi de techniques expérimentales a ainsi été réalisée, afin de caractériser de façon large notre modèle sur le plan comporte- mental. La plateforme de comportement n’existait pas dans nos laboratoires et a donc été créée pour ces études.

Ainsi, les études neuro-comportementales étudieront la coordination motrice, principale fonction assurée par les noyaux cérébelleux profonds, mais également l’activité, l’anxiété, l’apprentissage, la mémoire, et des fonctions sensorielles. En effet, comme nous l’avons vu dans les études précédentes (publications 1 et 2), du Gd est retrouvé accumulé dans toutes les structures cérébrales étudiées, en proportions variables.

Des études histologiques et le dosage de certains métabolites et marqueurs de toxicité ont complété cette évaluation de la neurotoxicité éventuellement engendrée par l’accumulation cérébrale du Gd.

B. Matériels et méthodes communs aux deux études

Les procédures des études ont été approuvées par le Comité Interne d’Ethique de l’Expérimentation Animale et par le ministère de la Recherche. L’étude a été réalisée conformément à la Directive Européenne 2010/63/EU et à la législation française (articles R214-87 à R214-137 du code rural).

1. Conditions d’hébergement

Une semaine d’acclimatation était accordée aux rats à leur arrivée, avant d’initier l’étude. L’hébergement était réalisé dans des conditions standards, dans une animalerie conventionnelle agréée, dont la température ambiante était fixée à 22°C, l’hygrométrie à 55% et dont le cycle obscurité/lumière était de 12/12 heures (non-inversé). Les rats avaient accès à l’eau et à la nourriture ad libitum. Un suivi clinique et un suivi du poids ont été effectués hebdomadairement. Le change de la litière étant un élément perturbateur du comporte- ment du Rat, il n’a été effectué qu’une fois par semaine, une fois les tests terminés.

2. Injections et organisation générale de l’étude

Les rats (Sprague Dawley, femelles, Charles River) ont reçu soit une solution saline NaCl 0,9% (300 mOsm/kg d’eau), soit un chélate de Gd, à raison de 4 injections par semaine pendant 5 semaines. La dose clinique, adaptée à l’espèce Rat (après correction par la surface corporelle), correspond à 0,6 mmolGd/kg. L’injection a été réalisée dans la veine caudale, sous anesthésie à l’isoflurane.

3. Étude comportementale

Plusieurs tests comportementaux ont été menés pour renseigner à la fois l’activité générale des rats, leur mémoire, leur niveau d’anxiété et leur coordination motrice après administration répétée de chélates de Gd, en comparaison au groupe témoin. Ces tests ont tous été effectués sur une même plage horaire (l’après- midi), dans une pièce à 22°C. L’ordre des rats était randomisé chaque jour afin que l’heure ou l’ordre de passage n’influencent pas les résultats. Tous les tests ont été filmés, les vidéos étudiées a posteriori, soit à la main, soit à l’aide d’un logiciel (ActualTrack®, ActualAnalytics, Edimbourg, Royaume Uni), toujours en aveugle.

Tableau 13 : Résumé des tests comportementaux choisis (deux études confondues)

Comportement testé Test sélectionné

Comportement général

Irwin modifié Open Field Actimétrie

Anxiété Labyrinthe en croix surelevé Openfield Mémoire

Piscine de Morris Labyrinthe en Y

Reconnaissance de nouveaux objets Apprentissage Protocole d’apprentissage dans le labyrinthe en Y Coordination motrice fine

Balance Beam Staircase

Catwalk Rotarod

Test sensoriel Sensibilité/Douleur : Von Frey Olfaction : Pellet caché

E.

Comportement général

Irwin modifié

Le Test d’Irwin modifié (Irwin, 1968 ; Roux, 2005) consiste en l’observation de l’animal dans son lieu d’hébergement avec ses congénères, pour évaluer son comportement général dans un lieu connu (aspect général, état d’excitation ou de sédation, éventuel comportement agressif etc.). Des tests sensitivo-moteurs ont aussi été effectués sur l’animal sorti de sa cage (réaction au pincement de la patte, évaluation du tonus musculaire ou du réflexe palpébral …). Sa force d’agrippement sur une grille a ensuite été évaluée : les pattes avant du rat étaient placées sur le haut d’une grille et celui-ci était tiré vers le bas par l’expérimentateur. La résistance de l’animal et donc sa force d’agrippement étaient cotée de 0 à 2 (0 : aucun agrippement, 1 : faible agrippement, 2 : forte résistance et agrippement). Enfin, un test de suspension à une barre placée horizon- talement en hauteur a évalué de façon générale le tonus musculaire, la capacité de traction et l’équilibre de l’animal. Ses pattes avant étaient placées sur la barre, et l’on a évalué pendant 90 secondes, par un système de score sur le temps de chute, la capacité du rat à rester accroché, sachant qu’il avait la possibilité de monter ses 4 pattes sur la barre voire même de rejoindre les barres verticales pour se laisser glisser jusqu’en bas. Le test a été répété 3 fois à 1 minute d’intervalle.

Openfield

L’openfield est un test permettant de mesurer les activités locomotrices de l’animal et son anxiété (Walsh, 1976). Pour cela, le rat était placé pendant 10 mn dans un espace vide d’un mètre carré entouré d’une paroi de 60 cm de haut (Bio-Concept Technologies). Le sol était quadrillé en carrés de 20 cm de côté afin de déli- miter l’espace central de la périphérie. Naturellement, le Rat se sent plus à l’aise, car moins exposé, près des parois, en périphérie, et y passera plus de temps (thigmotaxie). La différence de luminosité entre le centre et la périphérie accentue la zone anxiogène qu’est le centre. Un rat se déplaçant moins au centre de l’open- field que des rats témoins était donc considéré comme étant plus anxieux. L’analyse à l’aide d’un logiciel, complétée par une analyse manuelle, ont permis l’enregistrement des durées de séjour dans les deux zones citées précédemment, des distances parcourues, du temps d’immobilité, ainsi que des petits comportements (toilettage, redressement, reniflement…).

Actimétrie

La collaboration avec l’équipe de MIRCen au CEA de Fontenay-aux-Roses a permis d’étudier le comporte- ment des rats pendant 46 heures grâce à des cages d’actimétrie PhenoTyper® (Noldus). Le rat était déposé, seul, dans une cage avec nourriture et eau ad libitum et il était filmé en permanence. Les variables mesurées par le logiciel EthoVision® étaient la distance totale parcourue ainsi que la distance parcourue heure par heure.

Figure 82 : Tests de l’évaluation comportementale générale : (A) Barre horizontale, (B) Openfield, (C) Cage d’actimétrie.

F.

Anxiété

Labyrinthe en croix surélevée

Le test du labyrinthe en croix surélevée, utilisé pour évaluer l’anxiété, consiste en un labyrinthe surélevé de 70 cm, comportant deux bras opposé dit « fermés » et deux bras « ouverts » (Ennaceur, 2016). Les bras « fer- més » sont entourés de parois opaques de 30cm de haut, les bras « ouverts », quant à eux, n’ont aucune paroi. Les bras font tous 50 cm de long sur 15,5 cm de large. Le rat a été déposé au centre de la croix et il a pu se déplacer librement pendant 10 minutes. Tout comme le principe de l’openfield, un rat anxieux visite moins les bras ouverts, plus anxiogènes. Etaient comptabilisés le temps passé dans chaque type de bras et leur fréquentation (nombre d’entrée dans chaque type de bras), ainsi que les petits comportements.

Figure 83 : Tests permettant l’évaluation de l’anxiété : (A) Openfield (1 x 1 m), avec des repères de couleur indiquant la zone anxiogène (rouge) et la zone périphérique (verte), (B) Labyrinthe en croix surélevée, avec les deux bras ouverts et les deux bras fermés.

G. Mémoire

La piscine de Morris

La piscine de Morris permet d’évaluer la mémoire spatiale à long terme du Rongeur (Morris, 1984). Il s’agit de faire nager l’animal dans une piscine de 1,80 m de diamètre, remplie de 30 cm d’eau à 20 ± 1 °C. La piscine est délimitée en 4 quadrants. Une petite plateforme immergée de 2-3 cm était placée dans l’un d’entre eux (Figure 84 A). Un entrainement de 4 jours a permis à l’animal d’apprendre où est située la plateforme, par rapport à des repères muraux. Chaque jour, l’animal était placé dans les 4 quadrants, dans un ordre aléatoire, et il nageait jusqu’à rencontrer la plateforme (un délai de 90 secondes lui a été accordé afin de la trouver, sans quoi il était guidé vers celle-ci par l’expérimentateur). Une fois monté dessus, le rat pouvait regarder autour de lui et remarquer 3 indices spatiaux de formes et de couleurs différentes, affichées sur le mur, qui l’aidaient à s’orienter. Le jour du test, la plateforme a été retirée, mais le reste de la procédure s’est déroulée comme lors des entrainements : le rat a été déposé au départ d’un des 4 quadrants, et a nagé librement pendant 1mn 30. Le temps passé dans le quadrant où était initialement la plateforme, a été mesuré durant la première minute d’exploration. Si l’animal a correctement mémorisé l’endroit initial de la plateforme, il y passera la majorité du temps, à la chercher en vain. Les performances des 4 premiers jours peuvent servir à l’évaluation de la capacité d’apprentissage.

Labyrinthe en Y : test de mémoire

Ce test permet de tester la mémoire à court terme de l’animal (Deacon, 2006). Le Rat était tout d’abord placé au centre d’un labyrinthe à trois bras, dit « en Y ». Deux des bras étaient ouverts à l’exploration pendant 5 minutes, tandis que l’accès au 3e était condamné (Figure 84 B). Le rat a alors été replacé dans sa cage pendant 3 minutes. Ensuite, l’animal a été alors placé dans le labyrinthe pendant 3 minutes avec, cette fois-ci, les 3 bras à sa disposition. Si sa mémoire à court terme est satisfaisante, la curiosité naturelle de l’animal doit l’amener à explorer en premier le bras auquel il n’avait pas accès lors du premier passage. Les durées de séjour dans chaque bras ont également été mesurées.

Reconnaissance d’objet nouveau

La curiosité est un comportement naturel chez le Rat, qui, mis en présence d’un nouvel objet, l’explore d’avantage qu’un objet dont il a l’habitude (Léger, 2013). Comme le labyrinthe en Y, ce test est donc un test de la mémoire, où l’on évalue si l’animal se souvient de ce qu’il a vu auparavant. L’animal était mis en pré- sence de 2 objets identiques pendant la durée nécessaire pour atteindre 20 secondes d’exploration totale, sans excéder 10 minutes. Le lendemain, le même test était réalisé mais avec un des deux objets différent de la veille. S’il le rat se souvient de l’objet connu, il ira d’avantage observer l’objet inconnu (Figure 84 C).

Figure 84 : Tests de mémoire : (A) Piscine de Morris, (B) Labyrinthe en Y, (C) Reconnaissance d’objet nouveau.

H. Apprentissage

Afin d’évaluer la capacité d’apprentissage, nous avons testé un protocole alternatif dans le labyrinthe en Y. Grâce un à système de renforcement positif, le test vise à apprendre à l’animal à aller systématiquement dans le bras de droite (par exemple), quel que soit le bras dans lequel il a été placé au départ (Ferbinteanu, 2016 ; Asem, 2015). Cet exercice s’est déroulé sur 2 semaines et chaque jour le rat faisait 5 passages avec des départs randomisés (c’est-à-dire un départ depuis le bras A, B ou C). Un pellet de saccharose a été placé dans le bras droit afin que l’animal apprenne qu’il est dans le « bon bras ».

Plusieurs paramètres ont été mesurés : la réussite de l’exercice (établissement d’un score de 0 à 1, 1 étant la réussite), le temps écoulé avant de manger la récompense et le nombre de bras visités avant de consommer cette friandise.

I.

Coordination motrice

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