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Introduction à la capture cérébrale des chélates de Gd

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Chapitre 4 Introduction à la capture cérébrale des chélates de Gd

En janvier 2014, la parution d’un article vint interrompre le calme qui était revenu dans la communauté ra- diologique, après la tempête qu’avait provoquée la fibrose systémique néphrogénique. Une équipe japonaise suggéra en effet l’accumulation progressive de gadolinium dans des structures cérébrales saines, au cours d’injections répétées de chélates de Gd (Kanda, 2014). C’est alors qu’une agitation notable reprit…

A. Données cliniques concernant la capture cérébrale des chélates de Gd

Le premier article est publié en janvier 2014, par l’équipe du Dr Tonomori Kanda, radiologue à l’hôpital d’Akashi, dans la préfecture d’Hyōgo, au Japon (Kanda, 2014). Cette équipe a mené une étude rétrospective, menée sur une cohorte de 381 patients présentant une histoire de néoplasie cérébrale. Des examens IRM non-injectés et pondérés T1 ont ainsi été réalisés pour évaluer la taille tumorale ou la recherche de nouvelles métastases. Parmi ces patients, 2 groupes ont pu être constitués. Le premier était composé de 19 sujets (sans insuffisance rénale) ayant reçu exclusivement de gadopentétate (Magnevist®) ou de gadodiamide (Omnis- can®) lors de 6 à 12 IRM. Le second, constituant le groupe témoin négatif, comprenait 16 patients ayant bénéficié de 6 à 13 IRM, jamais injectées.

L’étude approfondie des images obtenues au cours du suivi des patients a mis en évidence une corrélation entre le nombre d’administrations de chélates de Gd, et la survenue d’un rehaussement du signal T1 dans certaines structures cérébrales saines (sans anomalie de la perméabilité de la barrière hématoencéphalique): le globus pallidus, et le noyau dentelé du cervelet, par rapport aux structures adjacentes, respectivement le thalamus et le pont (Tableau 10). Ces données suggèrent donc que ce rehaussement local du signal T1, crois- sant au cours des injections, reflète la présence (croissante, donc, elle aussi), de Gd spécifiquement accumulé dans ces structures, a priori saines et sans évidence de lésion de la barrière hémato-encéphalique.

Une seconde équipe a très vite confirmé ces résultats, étudiant à la fois des patients possédant des métas- tases tumorales (n=37) et d’autres souffrant d’une sclérose en plaque (n=38) (Errante, 2014). Ils constatent également un rehaussement du signal T1 du noyau dentelé et du globus pallidus, croissant avec le nombre d’injections de gadodiamide (Figure 20).

Tableau 10 : Synthèse des résultats présentés par Kanda et al. (Kanda, 2014).

Structure

impliquée IRM non-injectées pondérées T1

Représentation des ratios d’intensité de signal vs. le nombre d’injections de

chélates de Gd préalablement reçues

Conclusion Globus pallidus (noyaux gris pro- fonds)

Une corrélation signifi- cative est observée entre le ratio des inten- sités de signal globus pallidus / thalamus et le nombre d’injections de chélates de Gd préala- blement reçues (P < 0,001 ; r² = 0.288) Noyau dentelé (cervelet)

Une corrélation signifi- cative est observée entre le ratio des inten- sités de signal noyau dentelé / pont et le nombre d’injections de chélates de Gd préala- blement reçues

(P < 0,001; r² = 0.695)

Ces deux équipes avaient identifié des articles plus anciens rapportant un rehaussement T1 spécifique du noyau dentelé dans le cas de la sclérose en plaque, et chez des patients présentant une tumeur cérébrale et traités par radiothérapie (Roccatagliata, 2009 ; Kashara, 2011). Des hypersignaux du globus pallidus étant également décrits dans le cas de dysfonction hépatiques, des maladies de Wilson et de Rendu-Osler-Weber, d’une toxicité au manganèse, d’hémodialyse, de calcification, de nutrition parentérale, ou d’une neurofibro- matose de type I (Kanda, 2014), les auteurs se sont alors interrogés sur l’implication d’injections réitérées de chélates de Gd dans l’étiologie de ce phénomène. Une autre hypothèse, prédominante à cette époque, at- tribuait l’origine de ces hypersignaux à la radiothérapie (Kanda, 2014).

Figure 20 : Augmentation progressive de l’hypersignal T1 au niveau du noyau dentelé (l’un des NPC) chez un patient présentant des métastases cérébrales (A-D) et un patient présentant une sclérose en plaques (E-H) (Errante, 2014).

Ces travaux princeps ont rapidement été suivis d’un très grand nombre d’études cliniques, logiquement ré- trospectives, qui les confirment, tant chez l’adulte (Annexe 1) que chez l’enfant (Annexe 2).

Les différentes équipes sont arrivées à un consensus : plus la dose cumulée de chélate de Gd est élevée, plus l’hypersignal T1 se manifestera au niveau de certaines structures cérébrales saines, avec une relation dose- effet comme celle décrite à la Figure 21 (Adin, 2015).

Figure 21 : Lien établi entre le nombre de procédures IRM injectées, et l’apparition d’un hypersignal au niveau du noyau dentelé (CEMRI : « contrast-enhanced magnetic resonance imaging » ; HDN : hypersignal apparent du noyau dentelé ; NDN : noyau dentelé normal) (Adin, 2015).

Par la suite, comme cela avait été fait dans le cadre de la FSN, les radiologues se sont intéressés aux cas dits « purs », c’est-à-dire concernant les patients n’ayant reçu qu’un unique chélate de Gd, et non plus plusieurs agents différents. C’est ainsi qu’il a été établi que cet hypersignal T1, enregistré lors d’IRM non injectées, est associé quasi-uniquement à l’injection répétée de chélates de Gd linéaires (Quattrochi, 2015 ; Radbruch, 2015 a et b; Weberling, 2015 ; Kanda, 2015a ; Agris, 2016 ; Runge, 2015).

Figure 22 : Rapport du signal T1 noyau dentelé / pont de patients ayant reçu plus de 6 injections de gadopentétate (Magnevist®, linéaire), ou de gadotérate (Dotarem®, macrocycle) (50 patients par groupe). Dans le cas du chélate de Gd linéaire, un rehaussement du signal T1 du noyau dentelé est observé par rapport à celui du pont, mais pas dans le cas du chélate macrocyclique (Radbruch, 2015a).

La présence de Gd dans ces structures cérébrales est avérée. Cela a été démontré par dosage de Gd par spectrométrie de masse (Kanda, 2015b). L’analyse de dépôts localisés en microscopie électronique dans ces zones a également permis d’identifier par spectrométrie de rayons X, la présence de gadolinium tissulaire (McDonald, 2015). Cette même étude a déterminé la concentration tissulaire de Gd chez 13 patients ayant reçu entre 4 et 29 injections de gadodiamide : elle se situait entre 0,6 et 374,0 nmolGd/g dans le noyau dentelé et de 0 à 109,4 nmolGd/g dans le globus pallidus, avec une corrélation significative entre la dose reçue et la concentration de Gd total dosée dans plusieurs structures, mais aussi, voire même surtout, entre la dose de gadodiamide préalablement reçue et l’augmentation du signal T1 (McDonald, 2015), comme cela apparait ci-dessous (Figure 23).

de Gd (ICP-MS) vs. la dose cumulée de gadodiamide (mL) (McDonald, 2015).

C’est dans ce contexte qu’une première étude de mise au point d’un modèle préclinique a été menée dans le laboratoire (Robert, 2015). Ce modèle d’injections répétées d’un chélate de Gd linéaire chez le Rat, a per- mis de reproduire l’apparition progressive de l’hypersignal T1 en IRM, dans les noyaux cérébelleux profonds (pas uniquement le noyau dentelé, mais les 3 noyaux). C’est sur la base de ce modèle que cette thèse a été initiée.

Différents axes de recherches nous sont alors apparus essentiels, s’organisant autour des questions présen- tées sur la figure suivante. Autant de questions auxquelles il nous faudra tenter de répondre au cours de cette thèse.

Figure 24 : Les différentes questions se posant autour du phénomène de l’accumulation cérébrale des chélates de Gd, auxquelles nous nous efforcerons de répondre dans ce travail.

Partie II : Caractérisation de l’accumulation cérébrale des

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