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Chapitre I : Introduction

7. Traitement de la tuberculose

Le traitement de la tuberculose latente et celui de la tuberculose active doivent être envisagés comme deux entités distinctes.

7.1. Traitement de la tuberculose latente

Lorsqu’une tuberculose latente (primo-infection) est mise en évidence chez un patient, un traitement prophylactique peut être proposé. Ce traitement n’est pas appliqué systématiquement en cas de positivation de l’intradermoréaction mais sera conseillé chez toutes personnes à risque de développer la maladie : individus récemment contaminés, immunodéprimés (VIH positif,…), jeunes enfants, porteurs de lésions pulmonaires évoquant une tuberculose (ou autre maladie pulmonaire) antérieure, … (FARES, 2006a, Landry & Menzies, 2008). Dans les pays en voie de développement, on ne traite pas les patients présentant une tuberculose latente.

Dans de rares cas, une chimioprophylaxie anti-tuberculeuse peut être proposée à un patient dont l’intradermoréaction est négative. Cette décision est indiquée, notamment, pour les patients séropositifs ou les enfants ayant eu un contact avec un tuberculeux contagieux (Frothingham et al., 2005).

Le traitement prophylactique consiste, en général, en la prescription quotidienne d’isoniazide

(Nicotibine®) pendant au moins 6 à 9 mois (5 mg/kg/jour). Cette monothérapie permet de

réduire l’incidence de la tuberculose active avec une efficacité de 65 à 75%. Chez les sujets porteurs du VIH, le traitement est prolongé à 9 ou 12 mois (Cohn, 2003). L’usage d’une monothérapie se jusifie par le risque limité d’induire une résistance étant donné le faible nombre de bactéries impliquées dans la tuberculose latente. Parfois, une bithérapie (isoniazide et rifampicine ou rifampicine et pyrazinamide) est prescrite pendant 3 mois (Landry & Menzies, 2008, CDC, 2003). L’administration d’un traitement prophylactique ne peut se faire qu’après avoir vérifié l’absence d’une maladie tuberculeuse par radiographie pulmonaire et examen bactériologique. En effet, si un patient atteint de maladie tuberculeuse est traité par monothérapie, le risque de sélectionner un mutant résistant sera élevé (Tattevin, 2007).

7.2. Traitement de la tuberculose active

Les études montrent que, lorsque les antibiotiques appropriés sont disponibles et que la thérapie combinée est gérée convenablement, le contrôle de la tuberculose est efficace (Kochi

et al., 1993).

Isolement

Il convient d’isoler (avec ou sans hospitalisation) les patients contagieux pendant les 3 premières semaines du traitement afin de limiter les risques de transmission. La levée de l’isolement peut se faire après amélioration de l’état général du patient et l’obtention de trois examens microscopiques des expectorations négatifs (Bouvet et al., 2003).

Schéma thérapeutique standard

Le traitement standard fait appel aux antibiotiques dits de « première ligne ». Ces

antibiotiques sont : l’isoniazide (Nicotibine®), la rifampicine (Rifadine®), la pyrazinamide

(Tebrazid®) et l’éthambutol (Myambutol®). Dans certains pays, la streptomycine est

également utilisée comme antibiotique de première ligne à la place de l’éthambutol (Rabarijaona et al., 1999). La durée du traitement standard est de 6 mois et comporte 2 phases successives. La phase initiale dure 2 mois et consiste en l’administration de 4 antibiotiques : l’isoniazide, la rifampicine, la pyrazinamide et l’éthambutol. La deuxième phase, appelée aussi « phase de continuation », dure 4 mois et consiste en une bithérapie à base d’isoniazide et d’un second antibiotique, en général la rifampicine (Tattevin, 2007). La prise des médicaments est quotidienne et orale (de préférence le matin à jeun) (Figure 16).

Importance de la phase thérapeutique initiale

L’administration initiale de 4 antibiotiques se justifie pour plusieurs raisons : la PZA exerce principalement son effet au cours des premiers mois de traitement et n’apporte aucun avantage en cas d’aministration plus prolongée ; la diminution de la charge bactérienne importante au début du traitement est capitale car elle permet de prévenir l’apparition de mutants résistants et permet également de réduire la contagiosité du patient (en général la négativité des expectorations est obtenue après seulement quelques semaines de traitement) (Fortun et al., 2007).

Intérêt de la thérapie combinée

Des mutations spontanées peuvent avoir lieue dans les bacilles tuberculeux et provoquer, de ce fait, la résistance à un antibiotique, qui, par pression de sélection, peut favoriser le développement de mutants résistants à cet antibiotique (David, 1971). Cette observation mena à la thérapie combinée, permettant de réduire l’émergence d’isolats de M. tuberculosis résistants durant le traitement (Canetti & Grosset, 1961, Council, 1972).

En effet, un patient traité exclusivement par de l’isoniazide ou de la rifampicine peut

développer une bactérie mutante résistante à l’un de ces deux antibiotiques (10-7 à 10-8 par

événement), capable de se multiplier sans contrainte dans le corps du patient. Par contre, si

on traite ce patient par une bithérapie, isoniazide et rifampicine, il aura peu de chance (10-14 à

10-16) de développer un double mutant, c’est-à-dire d’acquérir deux mutations indépendantes

simultanément (Iseman & Madsen, 1989).

La thérapie combinée permet également de cibler des populations différentes de M.

tuberculosis. En effet, les 3 antibiotiques principaux du traitement ciblent des populations de M. tuberculosis présentant des états métaboliques différents :

• l’INH est bactéricide pour les bacilles tuberculeux en multiplication (division) active

• la RIF est bactéricide pour les bacilles tuberculeux présentant un métabolisme

sporadique

La RIF et la PZA ont un effet stérilisant car ces antibiotiques éliminent les bactéries qui ne sont pas en division.

Médicaments combinés et compliance

Des médicaments combinant plusieurs antibiotiques sont disponibles (Table 1). Ils présentent l’avantage d’éviter une monothérapie et ses risques de sélection de mutants résistants, en cas de manque de compliance du patient quant à la prise de plusieurs antibiotiques.

Combinaisons Quadruple Triple Triple Double Double

Isoniazide 75 50 75 150 70

Rifampicine 150 120 150 300 150

Pyrazinamide 400 300 400 - -

Ethambutol 275 - - - -

Spécialité Rimstar Rifater Rimcure Rifinah Rimactazid

Posologie 30-37 kg – 2 38-54 kg – 3 55-70 kg – 4 > 70 kg – 5 30-39 kg – 3 40-49 kg – 4 50-65 kg – 5 > 65 kg – 6 30-37 kg – 2 38-54 kg – 3 55-70 kg – 4 > 70 kg – 5 > 50 kg – 2 30-37 kg – 2 38-54 kg – 3 55-70 kg – 4 > 70 kg – 5

Table 1 : Différentes combinaisons d’antibiotiques disponibles pour le traitement de la tuberculose: antibiotiques, dosage (mg) et posologie (Bouvet et al., 2003)

La compliance du patient est indispensable à la réussite du traitement tant sur le plan thérapeutique que pour la sélection de bacilles résistants aux antibiotiques (Davies, 1998). Le respect de la durée du traitement ainsi que la prise quotidienne de l’ensemble des comprimés prescrits sont capitaux. L’utilisation de médicaments combinés peut aider dans ce dernier cas. Le rôle du médecin est aussi primordial : il doit, par exemple, identifier d’éventuels effets secondaires qui pourraient inciter le patient à arrêter la prise du traitement.

Suivi médical

Un suivi médical doit être réalisé au cours du traitement. A chaque visite de contrôle, le médecin devra évaluer plusieurs paramètres :

• l’évolution générale de l’état du patient : le médecin doit évaluer l’amélioration (ou

non) des signes de la maladie tels que la toux, la fatigue, la perte de poids,… Tout comme l’anamnèse, l’examen physique (auscultation thoracique) et des examens

bactériologiques réguliers (négativation des expectorations) sont indispensables. Une radiographie du thorax doit également être réalisée après 2 mois de traitement afin d’évaluer la régression des lésions (FARES, 2006a).

En général, le traitement est initié avant l’obtention de l’antibiogramme afin d’agir au plus vite. Dès que le profil de sensibilité/résistance est connu, le traitement sera adapté si une résistance est détectée à certains antibiotiques. Lorsqu’une résistance à un antibiotique de première ligne est mise en évidence, le traitement peut nécessiter l’utilisation d’antibiotiques dits de seconde ligne, tel que l’éthionamide, la cyclosérine, l’acide p-aminosalicylique, les fluoroquinolones, l’amikacine… Ces antibiotiques présentent les inconvénients d’être plus chers, à prendre pendant plus longtemps et de provoquer plus fréquemment des effets secondaires (Nathanson et al., 2004).

• l’apparition d’effets secondaires : les antibiotiques anti-tuberculeux peuvent générer

certains effets secondaires. Le médecin doit vérifier l’absence d’effets indésirables sur le patient en évaluant :

o La fonction hépatique et rénale : l’isoniazide, la rifampicine et la pyrazinamide

sont métabolisées par le foie. Une toxicité éventuelle se marquera par une cytolyse induisant une augmentation du taux des transaminases hépatiques. La pyrazinamide et ses métabolites sont excrétés par voie rénale et entrent parfois en compétition avec l’acide urique, provoquant un hyperuricémie (Tattevin, 2007).

o La vision : l’éthambutol présente une certaine toxicité sur le nerf optique qui

nécessite donc un examen régulier du fond oculaire.

o Le système neurologique : une neuropathie périphérique (engourdissement et

picotement des doigts et des pieds) peut être provoquée par l’isoniazide. La prise de vitamine B6 peut aider à remédier ce symptôme.

o Troubles digestifs, douleurs articulaires, …

o Interactions médicamenteuses avec les anti-épileptiques, les anti-diabétiques

8. La résistance aux antibiotiques anti-tuberculeux : définitions et