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Test sur les m´ et´ eorites

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4.6 Tests sur les donn´ ees martiennes

4.6.3 Test sur les m´ et´ eorites

Les observations ChemCam sur les m´et´eorites de fer correspondent aux cibles martiennes poss´edant des hautes teneurs en fer pour lesquelles la composition est partiellement contrainte. Au vu de leurs spectres LIBS, nous savons en effet qu’elles devraient ˆetre compos´ees presque exclusivement de fer (d´ependant de la fraction de nickel). La somme des ´el´ements majeurs (sans le fer) dans ces objets, quantifi´ee par le MOC, est cependant relativement importante et ce mˆeme pour les derniers tirs affranchis de l’influence de la poussi`ere. Un exemple est donn´e avec la m´et´eorite Ben Nevis (Figure 4.20.a) o`u il apparaˆıt que la somme des oxydes d´ecroˆıt dans un premier temps (traduisant l’influence de la poussi`ere de surface d´ecroissante), puis tend vers une valeur d’´equilibre (∼25 wt.%) apr`es ∼10 tirs et jusqu’au 50e tir. Il existe des m´et´eorites mixtes (m´esosid´erites) interm´ediaires entre les m´et´eorites m´etalliques

et silicat´ees qui permettraient d’expliquer cette importante somme d’oxydes, mais celles-ci sont plutˆot rares et correspondent `a la plus faible fr´equence d’observation sur Terre. Des reliques de chondrules sont parfois associ´ees `a des alliages Fe-Ni (e.g., Bunch et al., 1970) correspondant probablement `a des pro- cessus exog`enes avec m´elange de diff´erentes sources lors d’impacts (e.g., Wasson, 1985). Cependant une surestimation des ´el´ements majeurs dans les donn´ees ChemCam est l’explication la plus r´ealiste. En effet, cette importante somme d’oxydes est observ´ee de mani`ere similaire sur toutes les m´et´eorites analys´ees `a Gale. La pr´esence exclusive de m´et´eorites d’alliage Fe-Ni silicat´es apparaˆıt improbable. `A Meridiani, des m´et´eorites de fer (e.g., Heat Shield Rock, Fe ∼93 wt.%) et de potentielles br`eches d’impacts ont ´et´e iden- tifi´ees par Opportunity grˆace `a son APXS (Schr¨oder et al., 2008; Fleischer et al., 2011). Les m´et´eorites de Gale n’ont pas ´et´e analys´ees par APXS ce qui aurait pu permettre de lever le doute.

Figure 4.20 – a) Profils tir-`a-tir de la sommes des ´el´ements majeurs SiO2, TiO2, Al2O3, MgO, CaO, K2O

et Na2O (en wt.%) pour la m´et´eorite Ben Nevis (sol 1981). Apr`es les 10 premiers tirs lasers correspondant

`

a la poussi`ere, la somme des oxydes reste constante et relativement importante, traduisant probablement un artefact de mesure. b) Profils tir-`a-tir de la somme (en wt.%) des mˆeme ´el´ements majeurs quantifi´es par le mod`ele MOC sur l’´echantillon de goethite pure analys´e au LANL. Une surestimation des ´el´ements majeurs est observ´ee qui croˆıt avec la profondeur d’ablation. c) Intensit´e totale du spectre par tir en fonction de la somme des oxydes pour l’´echantillon de goethite.

Un probl`eme de surestimation des ´el´ements majeurs dans les m´et´eorites `a partir des donn´ees LIBS est cependant d´emontr´e par nos exp´eriences de laboratoire. En effet, il est possible d’appliquer l’algorithme MOC sur les donn´ees acquises au LANL, car la fonction de r´eponse de cet instrument est connue et une correction Earth to Mars a ´et´e d´etermin´ee (Clegg et al., 2017). Cette mˆeme correction a ´et´e utilis´ee pour permettre l’extension de la base de calibration de ChemCam `a partir des spectres obtenus au LANL. Les profils tir-`a-tir obtenus sur l’´echantillon de goethite pure analys´e au LANL montrent une augmentation de la somme des ´el´ements majeurs (SiO2, TiO2, Al2O3, MgO, CaO, K2O et Na2O)

avec la profondeur, et atteignent 14-16 wt.% apr`es ∼10 tirs (Figure 4.20.b). La goethite utilis´ee dans nos ´echantillons ´etant tr`es pure (cf. Annexe C.3), il s’agit ici d’un artefact LIBS dont la raison reste inconnue. Des effets de variations avec la profondeur ont d´ej`a ´et´e observ´es dans les donn´ees ChemCam (e.g., d´ecroissance du signal d’hydrog`ene tir-`a-tir dans des mat´eriaux indur´es ; Rapin, 2016) qui semblent inh´erents `a la m´ethode. Dans l’´echantillon de goethite, une augmentation de l’intensit´e totale des spectres tir-`a-tir est ´egalement observ´ee sur les 5 points d’observation (Figure 4.20.c), et un effet de matrice li´e `a l’ablation et `a l’´emergence du crat`ere pourrait ˆetre responsable de cette surestimation.

Ce r´esultat d´emontre que le fer n’est probablement pas le seul ´el´ement mal quantifi´e dans les m´et´eorites. Le fer est certainement sous-estim´e, mais les autres ´el´ements majeurs sont par ailleurs sur- estim´es dans cet type de matrice particulier. Cette observation permet d’expliquer pourquoi dans les m´et´eorites de fer, la somme des oxydes (sans le fer) ne d´ecroˆıt jamais en dessous de 20 wt.%. Nous mon- trons qu’il ne s’agit probablement pas d’un probl`eme de contamination ext´erieure, ni de la pr´esence de m´et´eorites mixtes.

Bien que les ´el´ements majeurs apparaissent surestim´es, nous faisons l’hypoth`ese que les ten- dances relatives restent globalement justes entre les diff´erentes m´et´eorites. De cette mani`ere, il est possible de comparer la somme des oxydes majeurs avec l’abondance en fer pr´edite. La Figure 4.21.a, b repr´esente l’abondance en fer quantifi´ee `a partir du mod`ele MOC et du mod`ele de cette ´etude en fonction de la somme des autres oxydes majeurs dans les m´et´eorites de VRR. La composition moyenne des roches et des sols de VRR est ´egalement repr´esent´ee. Pour le mod`ele MOC, une faible anti-corr´elation est pr´esente entre l’abondance en fer et la somme des oxydes (R2=0.74). La plus haute concentration quantifi´ee par

le MOC est de ∼53.7 wt.% FeOT.

En revanche, la quantification d´evelopp´ee pour cette ´etude montre une relativement bonne anti-corr´elation (R2=0.96) entre la concentration en fer pr´edite et la somme des autres ´el´ements majeurs

(Figure 4.21.b). L’un des pˆoles de cette tendance est coh´erent avec une composition proche de la poussi`ere et/ou du sol et/ou de la roche encaissante. La teneur en fer maximum observ´ee pour ces cibles est de 99.9±8.6 wt.% FeOT. Il peut paraˆıtre surprenant d’exprimer le fer sous forme oxyd´ee, le fer pr´esent

dans les m´et´eorites ´etant du fer natif au nombre d’oxydation z´ero, mais le mod`ele n’est pas sensible `a l’´etat d’oxydation, l’intensit´e de la raie de l’oxyg`ene ´etant principalement domin´ee par la composition atmosph´erique. Cette droite de m´elange est donc en accord avec la pr´esence de mat´eriaux ayant une composition m´et´eoritique avec un degr´e de contamination variable par la poussi`ere/le sol ou d’inclusions silicat´ees. Par cons´equent, ce mod`ele semble capable d’identifier les m´et´eorites comme telles ainsi que de mieux d´eterminer leur abondance en fer. `A l’avenir, cet outil permettrait d’identifier de mani`ere plus rigoureuse les m´et´eorites de fer pr´esentes dans le crat`ere Gale, ainsi que de les distinguer entre elles par leur degr´e de contamination ou leur nature, ce que le mod`ele MOC du fer ne permettait pas.

Figure 4.21 – Sommes (en wt.%) des ´el´ements majeurs SiO2, TiO2, Al2O3, MgO, CaO, K2O et Na2O,

quantifi´es par ChemCam dans les 12 s´equences d’analyse des 7 m´et´eorites de VRR, en fonction de l’abon- dance en fer quantifi´ee par a) le mod`ele MOC ; et b) le nouveau mod`ele (en wt.%). Les sommes des ´

el´ements majeurs dans les m´et´eorites sont probablement surestim´ees (voir texte), mais nous faisons l’hy- poth`ese que les variations relatives entre cibles sont justes. La composition moyenne des roches et sols de VRR est ´egalement repr´esent´ee (carr´e rouge). Le R2des r´egressions lin´eaire correspond `a respectivement `

a 0.74 et 0.96.

4.7

Conclusion

La courbe de calibration du fer d´ecrite dans ce chapitre a ´et´e r´ealis´ee dans le but d’am´eliorer la dynamique de quantification des donn´ees ChemCam pour de faibles enrichissements en oxyde de fer dans les roches de la ride de Vera Rubin. Le deuxi`eme objectif de ce travail est de permettre de mieux contraindre la teneur en fer pour des cibles poss´edant de tr`es fortes abondances, comme observ´e dans cer- taines figures diag´en´etiques de Jura. Pour ces deux points, le mod`ele actuel de quantification des spectres ChemCam semble peu ad´equat.

Ce chapitre a d´ecrit la m´ethode permettant de construire la courbe de calibration. Le nouveau mod`ele est bas´e sur la comparaison d’´echantillons g´eologiques avec un spectre LIBS de fer pur. Cette m´ethode est relativement analogue `a la m´ethode ICA du mod`ele MOC (Forni et al., 2013), `a la diff´erence que le spectre utilis´e dans notre ´etude provient d’un ´echantillon naturel. La seconde am´elioration r´eside dans l’augmentation du nombre d’´echantillons dans la base de calibration, en particulier pour des abon- dances sup´erieures `a 20 wt.% FeOT (55 nouveaux ´echantillons). La RMSE traduisant la qualit´e du mod`ele

est relativement bonne, et globalement inf´erieure `a celle du mod`ele MOC. Le niveau critique (la concentra- tion nette r´eelle la plus faible en fer qui peut ˆetre d´etect´ee de mani`ere fiable par rapport `a la composition moyenne de VRR et en tenant compte des faux positifs) permettrait d’identifier des variations de l’ordre de +2.5 wt.% FeOT. Une application sur des cibles martiennes dont la composition est bien contrainte

n’est possible qu’`a travers les cibles de calibration port´ees par le rover. Le mod`ele montre des r´esultats coh´erents avec les cibles de calibration dites s´edimentaires (l´eg`erement surestim´es en moyenne), bien que leurs abondances soient en dessous de la gamme de composition pour laquelle le mod`ele a ´et´e d´evelopp´e. En revanche, une sous-estimation apparaˆıt pour les cibles vitreuses ign´ees, mais ces cibles sont connues pour ˆetre particuli`erement sujettes `a des effets de matrice physiques (Clegg et al., 2017).

La comparaison des r´esultats entre les pr´edictions du mod`ele de cette ´etude et ceux du MOC sur les roches de VRR est coh´erente pour des concentrations inf´erieures `a ∼22.5 wt.% FeOT (nouveau

composition. Au-del`a de 22.5 wt.% FeOT et jusqu’`a ∼26 wt.% FeOT, le nouveau mod`ele enregistre des

enrichissements imperceptibles dans les r´esultats MOC. Un examen de l’intensit´e des raies du fer pour ces spectres particuliers indique que ces variations sont bien r´eelles. Par cons´equent, l’hypoth`ese selon laquelle le mod`ele actuel des donn´ees ChemCam n’est pas totalement adapt´e pour certaines concentrations en fer apparaˆıt v´erifi´ee et le d´eveloppement d’un nouveau mod`ele de quantification du fer justifi´e. Finalement, notre mod`ele appliqu´e aux m´et´eorites de fer montre une anti-corr´elation avec le degr´e de contamination par la poussi`ere/le sol ou d’inclusions silicat´ees, ce qui indique la coh´erence de la pr´ediction pour de tr`es hautes abondances en fer.

Les ´echantillons pr´epar´es pour cette ´etude sont en train d’ˆetre incorpor´es dans la base de cali- bration ChemCam de mani`ere `a ´etendre la repr´esentativit´e de sa gamme de composition chimique. Les r´esultats pr´eliminaires du mod`ele PLS r´ealis´es au LANL, en utilisant cette base de calibration ´etendue et appliqu´es au mˆeme jeu de donn´ees `a VRR (roches et figures diag´en´etiques), sont coh´erents avec les nˆotres (Ollila Ann, communication personnelle). Les mˆemes cibles sont d´etect´ees comme enrichies en fer par le mod`ele PLS.

Une ´etude d´edi´ee `a ces cibles enrichies en fer est n´ecessaire. L’objectif du chapitre suivant est d’utiliser cette nouvelle m´ethode de quantification pour les roches de VRR, afin de permettre une ´etude g´eologique. Ce prochain chapitre inclura la quantification des figures diag´en´etiques, ainsi que les roches s´edimentaires.

Le fer dans la ride de Vera Rubin

5.1

Contexte de l’´etude

Ce chapitre porte sur l’application de notre m´ethode de quantification du fer dans les roches s´edimentaires de la ride de Vera Rubin (VRR). La m´ethodologie de cette courbe de calibration LIBS, d´evelopp´ee en laboratoire `a partir de 437 ´echantillons, est d´ecrite dans le chapitre pr´ec´edent.

Pour rappel, ce besoin d’une nouvelle quantification du fer a ´et´e motiv´e par deux objectifs. Tout d’abord nous voulons appliquer le mod`ele sur les figures diag´en´etiques pr´esentes dans les roches s´edimentaires de Jura (VRR), riches en fer (50-55 wt.% FeOT) d’apr`es le mod`ele de quantification MOC.

Selon L’Haridon et al. (2019), ces structures form´ees apr`es d´epˆots des s´ediments sont suppos´es ˆetre tr`es concentr´ees en oxyde de fer. Cependant, il est important de d´efinir cette notion de “tr`es concentr´ees” : s’agit-il de concr´etions riches, ou uniquement compos´ees d’oxyde de fer ? Ces cibles nous permettront de tester la m´ethode. Une quantification plus rigoureuse de ces structures associ´ees aux veines de sulfates de calcium permettra ´egalement de confirmer leur mod`ele de formation.

Ensuite, la partie la plus importante de ce chapitre se focalisera sur la composition en fer dans la matrice des roches de la ride (sans les figures diag´en´etiques). Cette nouvelle m´ethode permet de quantifier des variations de concentration plus subtiles dans les roches s´edimentaires que le mod`ele MOC actuel. Les variations de concentration entre les terrains pr´e-VRR et les roches de la ride seront particuli`erement scrut´ees, ainsi que les abondances en fer le long de la ride elle-mˆeme. Dans les cibles riches en fer, les abondances des autres ´el´ements majeurs seront ´egalement ´etudi´ees car elles pourraient nous renseigner sur la nature des phases min´erales porteuses du fer. Finalement, la distribution spatiale des enrichissements en fer permettra de mieux contraindre les m´ecanismes de formation de ces phases, et en particulier de l’h´ematite, dont la concentration est particuli`erement importante `a Pettegrove Point d’apr`es les r´esultats CheMin (Rampe et al., 2020b). Ces r´esultats seront ensuite discut´es, en lien avec l’environnement g´eochimique associ´e au d´epˆot, et plus particuli`erement sur les conditions redox associ´ees aux fluides. Finalement, au vue des observations, une s´equence d’´ev`enements possible est propos´ee me- nant `a la formation de la ride telle que nous l’observons aujourd’hui.

← Image d’illustration : Autoportrait de Curiosity `a partir de l’instrument MAHLI sur le site d’´echantillonage de Rock Hall `a Vera Rubin (sol 2291). NASA/JPL-Caltech/MSSS

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