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Synthèse de novo du cycle dithiolane

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Toutes les molécules possédant un motif dithiolane présentées jusqu’à présent sont basées sur la modification de l’acide thioctique. Elles possèdent donc toutes un groupe d’ancrage de type [1,2-dithiolane-3-yl], asymétrique. Afin d’étudier l’influence de cette géométrie sur la formation de la SAM, nous avons décidé de créer un analogue symétrique du dérivé 5 possédant une fonction d’ancrage de type [1,2-dithiolane-4-yl]. Pour cela, le cycle dithiolane a dû être créé de novo.

L’idée retenue ici est de former une fonction 1,3-diol puis de former un cycle dithiolane symétrique par une double substitution nucléophile.

CHAPITRE 2 – Synthèses et Caractérisations des dérivés soufrés

La figure 2.19 représente le schéma réactionnel global conduisant à la formation du dérivé dithiolane ester ferrocène symétrique 35 s’inspirant de la stratégie de synthèse développée par Guillonneau et al.126

Figure 2.19 – Synthèse du dithiolane symétrique 35.

La synthèse commence par la protection d’un des deux alcools sous forme d’éther benzylique. Son obtention est confirmée par l’apparition de signaux correspondant aux protons aromatiques en RMN 1H. La bromation du deuxième groupe hydroxyle permet d’obtenir le composé 29. Celui-ci se distingue du composé 28 par un déplacement du CH2 en α du brome à 3.41 ppm alors qu’il était de 3.63 ppm pour l’alcool. Le dérivé 30 est synthétisé en présence de diéthylemalonate et d’une base forte, le malonate ainsi déprotonné réagit sur la fonction bromure par une substitution nucléophile entrainant la formation du diester. Les signaux caractéristiques à 4.19 ppm et 1.24 ppm intégrant respectivement pour 4 et 6 protons apparaissent sur le spectre RMN et correspondent aux deux chaînes alkyles des esters. L’étape clé, conduisant à la formation du groupement 1,3-diol, est réalisée par la réduction des fonctions esters par les hydrures d’aluminium lithium. Ce diol possède un signal particulier en RMN puisque la molécule est stabilisée grâce aux liaisons hydrogènes intramoléculaires formant un cycle à six chainons en conformation chaise. Le groupement diol présente ainsi deux doublets de doublets issus des couplages différents entre les deux protons diastéréotopiques du CH2 et celui du CH (figure 2.20).

Figure 2.20 – Illustration des couplages entre protons du 1,3-diol 31 en RMN 1H.

Synthèse de novo du cycle dithiolane

Ainsi, l’un est en position « syn » par rapport au CH, tandis que l’autre est en po-sition « anti ». Il apparait donc trois constantes de couplage : deux couplages vicinaux

3Jcis = 7.5 Hz et 3Jtrans = 4.0 Hz et un couplage gemini 2Jgem = 10 Hz.

Les fonctions diols sont ensuite activées par une double mésylation entrainant l’ap-parition d’un singulet intégrant pour six protons correspondant aux deux méthyles des mésyles. Ces alcools activés permettent la formation du cycle dithiolane par une double substitution de l’intermédiaire réactif « S22–» formé par réaction entre le Na2S et le soufre cristallin. La cyclisation est attestée par la disparition des signaux des mésyles mais aussi par la conservation des couplages « cis » et « trans » des CH2 impliqués dans le cycle nouvellement formé et dont les déplacements chimiques sont proches de ceux du dérivé dithiolane asymétrique (3.14 ppm pour l’asymétrique et 2.77 et 3.23 ppm pour le symé-trique).

Pour former l’ester 35, il convient de rompre dans un premier temps la fonction éther, ce qui est fait par réaction en présence de BBr3.SMe2, pour obtenir le précurseur dithiolane symétrique 34. Il est important de noter que le rendement de cette seule étape est très faible puisqu’inférieur à 4 % (alors que dans les mêmes conditions un rendement supérieur à 90 % était avancé dans la littérature126). Ce très faible rendement s’explique en raison d’une dégradation importante du cycle dithiolane lors de la déprotection de l’alcool, et d’une réaction de polymérisation du produit isolé. Les modifications du temps de réaction, de la température ainsi que du réactif de déprotection n’ont cependant pas permis d’obte-nir le composé avec de meilleurs rendements. Une fraction isolée du dérivé 34 a cependant permis une caractérisation par RMN du proton, montrant les signaux du cycle dithiolane symétrique, avec son jeu de doublets à 2.80 et 3.25 ppm, ainsi qu’un déplacement à 3.62 ppm caractéristique d’un CH2 en α de la fonction alcool comme pour le dérivé 2.

En tenant compte de ces difficultés, le couplage de Steglich a été réalisé dans un second temps directement sur le brut ce qui a permis d’obtenir tout de même le dérivé dithiolane ester symétrique 35 avec un rendement approximatif de 15 %. Le dérivé 35 a été caractérisé par RMN et montre des signaux identiques au dérivé 33 pour la composante « dithiolane symétrique », et au dérivé 5 pour la composante « ferrocène ester ».

Malgré un rendement global inférieur à 1 % après ces huit étapes, la quantité d’ester symétrique 35 a été suffisante pour les études effectuées sur la formation des SAMs. Ce-pendant, nous proposons dans la figure 2.21 une voie alternative qui permettrait d’obtenir également le dérivé 35 probablement avec un meilleur rendement.

CHAPITRE 2 – Synthèses et Caractérisations des dérivés soufrés

Figure 2.21 –Proposition de synthèse du dérivé symétrique 35 par une voie alternative.

L’utilisation d’un précurseur 1,3-diol s’avère donc une technique efficace pour former de novo un cycle dithiolane. Cette stratégie a été utilisée pour la formation d’un analogue de l’acide thioctique possédant une chaîne alcane sans fonction chimique sur sa partie terminale. Nous avons donc formé dans un premier temps un diol, possédant une chaîne alcane linéaire à neuf carbones, qui a par la suite été cyclisé (figure 2.22). Le diol alcane

Figure 2.22 – Synthèse du dérivé alcane 38.

est ainsi obtenu par réaction d’un aldéhyde, l’heptanal, sur un ester, l’acétate d’éthyle, en présence d’un amidure de lithium ce qui permet d’obtenir l’intermédiaire non isolé présenté dans la figure 2.22.127 Cet hydroxyester intermédiaire est ensuite réduit par l’hydrure d’aluminium lithium pour former le diol 36. Il a été caractérisé par RMN mais aussi par spectroscopie infrarouge montrant l’absence d’une bande à 1740 cm-1 (vibration d’élongation de la liaison C=O) et la présence d’une large bande à 3320 cm-1 (vibration d’élongation de liaison O–H).

Les alcools sont ensuite mésylés ce qui est confirmé par l’apparition d’un double signal en RMN à 3.00 et 3.05 ppm. Enfin, le cycle dithiolane est formé selon la réaction présentée précédemment avec le réactif intermédiaire S22– pour obtenir le dérivé alcane 38. Le cycle dithiolane formé présente ainsi des caractéristiques similaires à celui de l’acide thioctique. Le CH2 en α du soufre a un déplacement chimique de 3.16 ppm et celui en β est dédoublé à 1.91 et 2.45 ppm.

Conclusions

A partir d’un 1,3-diol, il est donc aisé de concevoir un cycle dithiolane. Ceci peut être mis à profit pour l’élaboration de molécules complexes dont les synthèses seraient incompatibles avec une fonction dithiolane pré-existente, ou bien pour l’élaboration de molécules nécessitant un cycle dithiolane non naturel (comme le dithiolane symétrique).

2.6 Conclusions

Pour conclure, une gamme importante de composés a été élaborée, permettant d’étu-dier, de manière précise et séparée, l’influence des trois parties de l’adsorbat : le groupe d’ancrage (composés 5/17/19/20/21/35 ou 8/26/27), l’espaceur (molécules 5/8/11, 17/27 et 20/26) ou le groupe terminal (dérivés 8, 9, 10, 13, 14 et 15)

A l’aide de la méthode électro-assistée développée au laboratoire, nous allons pouvoir étudier, à très faibles concentrations, les cinétiques d’adsorption de tous ces différents dérivés. Nous pourrons ainsi discriminer les différences qui peuvent exister entre les thiols et les disulfures tant en termes de thermodynamique que de cinétique. Les différences de potentiels standards entre certains dérivés, nous permettront par ailleurs d’étudier, indé-pendamment mais simultanément, l’adsorption de plusieurs dérivés lors de l’élaboration de monocouches mixtes.

3

Introduction

3.1 Introduction

L’objectif d’apporter des éléments pour une meilleure compréhension du mécanisme de formation des monocouches auto-assemblées a été un fil conducteur tout au long de ma thèse et a conduit à de nombreuses expériences. Afin de suivre la cinétique d’adsorption, la méthode électro-assistée développée au laboratoire et décrite dans le chapitre 1 a été employée. Des solutions d’adsorbats ayant des concentrations, allant de 50 nM à 20 µM, ont été étudiées, marquant ainsi une vraie rupture avec les expériences généralement présentées dans la littérature. Nous détaillerons l’ensemble des cinétiques obtenues pour le dérivé ester 5 ainsi que les paramètres clés associés. En première approximation, la cinétique d’adsorption semble correspondre à une cinétique de type Langmuir, cependant un examen minutieux de l’allure des courbes conduisent à une interprétation différente. Nous verrons, par la suite, les cinétiques du dérivé triazole 8, où un temps de latence sera mis en évidence lors de la formation de la SAM.

Pour rappel, comme nous l’avons décrit dans le chapitre 1, deux grands types de modèles sont développés dans la littérature :

– le premier basé sur une adsorption aléatoire des molécules sans aucune interaction entre les différentes molécules. Les modèles cinétiques de Langmuir et ses variantes décrivent typiquement ce type d’adsorption,37,40–44

– le second tenant compte de ces interactions dans le processus d’adsorption, favori-sant ainsi préférentiellement l’adsorption d’une molécule à proximité d’autres, plu-tôt que de manière aléatoire sur la surface. Ces cinétiques sont caractérisées dans certaines conditions par une adsorption à l’allure de « sigmoïde » traduisant un temps de latence initial. Les modèles de Kisliuk et JMAK entrent dans cette caté-gorie.45–49,128,129

3.2 Cinétique de formation des SAMs à partir du dérivé

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