• Aucun résultat trouvé

Cinétiques d’adsorption

Dans le document en fr (Page 30-34)

1.3 Modèles d’adsorption de la formation des SAMs

1.3.4 Cinétiques d’adsorption

Les isothermes présentées précédemment ne sont qu’une vue à l’équilibre du système, elles correspondent donc à la partie thermodynamique du processus de formation de la monocouche. Ainsi, elles ne permettent pas d’obtenir d’informations sur la cinétique de formation de la SAM.

Pour cette raison, d’autres modèles ont été développés pour comprendre la cinétique de formation de la monocouche. Huit modèles sont ainsi présentés dans ce manuscrit : une cinétique purement limitée par la diffusion, quatre variantes du modèle cinétique développé par Langmuir, le modèle de Kisliuk et deux modèles développés par Johnson, Mehl, Avrami et Kolmogorov faisant intervenir une première phase de nucléation.

Cinétique purement limitée par la diffusion

Pour une adsorption purement contrôlée par la diffusion, le taux de recouvrement au cours du temps dans un milieu semi-infini obéit à l’équation 1.19.35,36

Γ(t) =pkDt avec kD = 4DC

2B2 ml

π (1.19)

avec D la constante de diffusion et Bml le nombre de molécules par unité de surface pour une SAM dense.

Le taux de recouvrement est ainsi proportionnel au flux de molécules qui arrivent à la surface de l’électrode. Ce modèle ne prend en compte ni la saturation de la surface, celle-ci étant semi-infinie, ni la diminution du nombre de site vacant. Il n’est donc applicable que pour des temps très courts lors de l’adsorption des quelques premières molécules.

CHAPITRE 1 – Introduction

Cinétique d’adsorption de Langmuir et ses variantes

En raison des contraintes liées au modèle purement limité par la diffusion, la cinétique prédominante dans la littérature suit une loi cinétique d’adsorption de Langmuir dont l’équation est la suivante :

θ(t) = 1 − e−kt (1.20) Elle admet les hypothèses qu’il n’existe aucune interaction entre molécules et que la surface est recouverte jusqu’à saturation.37 Ce type de cinétique fait donc intervenir une constante de vitesse apparente k qui inclut la concentration en substrat, les constantes d’adsorption ka et de désorption kd. La courbe obtenue a la forme d’une exponentielle inverse. Il s’agit d’une adsorption aléatoire proportionnelle aux nombres de sites vacants. Bien que le modèle soit assez simple, il décrit, relativement bien, bons nombres d’exemples de la littérature lors de l’adsorption de dérivés thiols sur une surface d’or.38,39

Afin de prendre en compte certaines limitations, des modifications ont été apportées. Ainsi, lors d’un échange moléculaire sur une monocouche déjà formée, il peut apparaitre un temps de latence d’échange tc qui peut être introduit dans l’équation 1.20 afin de donner l’équation 1.21 suivante.40,41

θ(t) = 1 − e−k(t−tc) (1.21)

Quand l’adsorption suit une cinétique de Langmuir mais est aussi limitée par la diffu-sion des molécules à l’électrode, la constante de vitesse n’est plus dépendante du temps mais de sa racine carrée (équation 1.22).

θ(t) = 1 − e

kt (1.22)

Ce type de modèle cinétique est particulièrement adapté à l’adsorption de dérivés thiols sur or polycristallin dans le cas de solutions extrêmement diluées.42,43

Enfin, il est possible de trouver dans la littérature certains exemples expérimentaux dont les modèles cinétiques nécessitent la prise en compte de la concentration en dérivés thiols dans la solution ainsi que la concentration surfacique en espèces thiols. La réaction n’est donc plus du premier ordre en dérivés thiols mais du second ordre.42 C’est typi-quement le cas de molécules adsorbées sur des nanoparticules d’or. En effet, l’une des particularités des nano-objets est un accroissement important de la surface géométrique. La concentration d’espèces adsorbées à la surface des nanoparticules n’est donc plus né-gligeable en comparaison à celle de la solution. Il en résulte une vitesse de réaction, lors de l’échange des dérivés thiols, dépendante des thiols en solution mais aussi de ceux déjà greffés sur ces nanoparticules.44 Le taux de recouvrement au cours du temps suit alors 16

Modèles d’adsorption de la formation des SAMs

une cinétique d’adsorption selon l’équation 1.23.

θ(t) = 1 − 1

1 + kt (1.23)

Afin de comparer les différentes subtilités, le modèle de Langmuir et ses variantes sont présentés dans la figure 1.4.

Figure 1.4 – Comparaison des modèles cinétiques : (—) Diffusion pure ; (—) Langmuir 1er ordre ; (—) Langmuir avec latence de 25 s ; (—) Langmuir limité par diffusion ; (—) Langmuir 2ème ordre

Un nombre conséquent d’exemples est donc décrit dans la littérature sur la formation de monocouches coïncidant avec une forme d’exponentielle inverse caractéristique d’une cinétique de type Langmuir sous ses différentes variantes. Cependant, certains systèmes, notamment d’échange sur monocouches déjà formées, montrent un temps de latence initial non négligeable caractéristique d’une phase de nucléation incompatible avec ce modèle cinétique. En effet, ce temps de latence est caractérisé par une courbe en forme de sigmoïde et non en forme d’exponentielle inverse tronquée comme obtenue avec l’équation 1.21.

Modèle de Kisliuk

Afin de prendre en compte ce temps de latence initiale qui peut être dû à des inter-actions entres molécules, certains chercheurs tels que Dannenberger et al. ont utilisé un autre modèle que celui de Langmuir.45 En effet, les auteurs précisent que, bien que dans une première approche les cinétiques d’adsorption semblent correspondre à une cinétique de Langmuir, des subtilités dans l’analyse des données expérimentales montrent qu’une cinétique de 1er ordre ne peut pas être utilisée. Afin d’expliquer ces résultats, les auteurs font appel au modèle de Kisliuk (équation 1.24).

θ(t) = e(1 + k

E)kLCt − 1

e(1 + kE)kLCt + kE (1.24) avec kE et kL deux variables intégrant les constantes de vitesse d’adsorption et de désorp-tion ainsi que les cœfficients de « collage », et C la concentradésorp-tion en soludésorp-tion de l’adsorbat.

CHAPITRE 1 – Introduction

Ce modèle a la particularité d’introduire une non-équivalence des sites d’adsorption au travers de cœfficients de « collage » SDet SE. Ces coefficients traduisent la plus grande probabilité pour un adsorbat d’aller se greffer à proximité de molécules similaires (SE) plutôt que dans un endroit de la surface n’interagissant qu’avec des molécules du solvant (SD). Bien que ce modèle décrive relativement bien les cinétiques non exponentielles, la description physique des cœfficients kE et kL est difficile à percevoir.

Modèle JMAK : Johnson, Mehl, Avrami et Kolmogorov

Dans les années 1940, Johnson, Mehl, Avrami et Kolmogorov (JMAK) ont développé un modèle cinétique faisant intervenir une étape de formation de noyaux de nucléation sui-vie d’une croissance en îlots autour d’eux jusqu’à saturation.46–49Initialement utilisé pour décrire les transformations de phases d’alliages métalliques, ce modèle a été étendu par la suite à la croissance non uniforme d’îlots,50,51 de nucléations hétérogènes52 ainsi que de contraintes limites liées à une large variété de systèmes physiques tels que les oxydes mé-talliques,53,54les transformations graphite-diamant55et la cristallisation de films minces56

ou de protéines.57 Appliquée à la formation de monocouches sur surface d’or, la vitesse d’adsorption est liée à la formation des noyaux (phase 1) puis est proportionnelle aux périmètres des îlots au cours de la phase de croissance (phase 2) selon l’équation 1.25.

θ(t) = 1 − e−(kt)n (1.25) Le coefficient « n », aussi appelé coefficient d’Avrami, traduit la dimensionnalité de la croissance ainsi que la dépendance en temps de la phase de nucléation. Lorsque n = 2, la croissance est bidimensionnelle (2D) et la phase de nucléation arrive rapidement à terme. Il s’agit d’une adsorption avec nucléation par saturation de site ou JMAK2. Lorsque n = 3, il s’agit d’une croissance bidimensionnelle (2D) mais avec la formation constante de points de nucléation au cours de l’adsorption, on parle d’une adsorption avec nucléation constante ou JMAK3. L’adsorption de type JMAK3 peut être observée dans certaines céramiques où de plus en plus de sites de nucléation apparaissent au cours de la transformation. Le terme exponentiel prend ainsi en compte le chevauchement des îlots lors de la phase de coalescence et dépend du temps. A titre informatif, lorsque n = 1, l’équation de JMAK se résume à l’équation 1.20 de Langmuir. Le coefficient d’Avrami permet donc de caractériser un phénomène qui peut avoir lieu lors des premiers instants de la formation de la monocouche. La figure 1.5 résume ces différentes cinétiques.

Ces modèles n’ont jamais été directement observés lors de l’élaboration de mono-couches à base de thiols en solution. Cependant, le modèle JMAK a permis de mettre en évidence de manière indirecte l’adsorption de dérivés soufrés par nucléation lors d’expé-riences d’échanges avec une monocouche de 1-Adamantanethiolate58ou de polyoxométal-18

Caractérisation et suivi in situ de la formation des SAMs

Figure 1.5 – Comparaison des modèles cinétiques : (—) Diffusion pure ; (—) Langmuir 1er ordre ; (—) JMAK2 ; (—) JMAK3

late.59Ainsi, Wang et al.59ont pu observer par cryo-TEM à différents temps, la formation de trous sur des nanoparticules d’or recouvertes de α-K9AlW11O39. Ces trous, correspon-dant à l’incorporation de 11-mercaptoundecanoate par déplacement progressif des POMs, grandissent au cours du temps et ne se forment qu’à certains endroits. La désorption des POMs n’est donc pas aléatoire et les auteurs ont démontré que la cinétique de désorption suivait le modèle de JMAK3. Saavedra et al.58 ont, pour leur part, mis en évidence que l’échange d’un adamentanethiolate par un alcane thiol résultait d’une cinétique JMAK2. Il existe donc un nombre conséquent de modèles dans la littérature que ce soit pour re-présenter les systèmes dans leur état d’équilibre (paramètres thermodynamiques clés), que pour décrire la cinétique de formation de la monocouche (constantes de vitesse d’adsorp-tion ou d’échanges). Les isothermes ou les cinétiques d’adsorpd’adsorp-tion qui en découlent, per-mettent d’émettre des hypothèses mais négligent fréquemment des paramètres clés propres au système comme par exemple la non-équivalence des sites d’adsorption ou bien l’exis-tence d’interactions entre molécules au sein de la monocouche. Les cinétiques d’adsorption découlent toutes de l’équation de Langmuir à laquelle sont ajoutées des corrections afin de correspondre au mieux aux observations expérimentales. Nous nous intéresserons ainsi, dans la partie qui suit, aux techniques développées pour le suivi cinétique de la formation de ces monocouches.

1.4 Caractérisation et suivi in situ de la formation des

Dans le document en fr (Page 30-34)