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9. Conclusion et discussion

9.1. Synthèse des résultats et vérification des hypothèses

Pour commencer, notre étude confirme partiellement l’hypothèse selon laquelle les élèves redoublants interrogés pensent que tous les étudiants des écoles post-obligatoires n’ont pas tous les mêmes chances de réussite. En effet, bien que la majorité d’entre eux affirment que le programme des différents établissements secondaires est identique et que le succès des études est avant tout dû à des facteurs internes (efforts, volonté, travail personnel), il apparaît qu’une minorité d’élèves avancent une cause externe pour expliquer leur échec : la réputation de leur école. Ces derniers disent que dans un autre établissement ils obtiendraient de meilleures notes car ailleurs c’est plus simple, ailleurs il y a plus de tolérance, les élèves travaillent moins. De plus, nous avons relevé dans les raisons rapportées par les élèves pour expliquer leur redoublement que selon certains d’entre eux les professeurs sont trop sévères et que les exigences sont trop élevées. Les élèves dont nous venons de citer les propos vont donc dans le même sens que Draelants

(2006) pour qui la bonne réputation d’une école influence les enseignants qui, pour la maintenir, n’hésitent pas à se montrer plus exigeants et à sélectionner les élèves qui n’atteignent pas le seuil de réussite qu’ils ont fixé.

En ce qui concerne la seconde hypothèse que nous avons formulée, les résultats viennent infirmer celle-ci. En effet, lorsque, dans les deux groupes (S+) et (S-), nous comparons le nombre d’élèves redoublants et non redoublants, nous aurions dû, pour confirmer notre hypothèse, obtenir un nombre d’élèves redoublants plus important dans le second groupe.

Or, les non doublants sont plus nombreux dans les deux catégories : 106 contre 33 chez les (S+) et 15 contre 5 chez les (S-). Cela signifie également qu’un élève redoublant sur huit éprouve un sentiment d’appartenance négatif à l’école, bien que notre faible échantillon ne permette pas de généraliser cette proportion à la population visée.

Ces données conduisent logiquement à infirmer notre troisième hypothèse selon laquelle, comme le sentiment d’appartenance influence les orientations motivationnelles (Goodenow, 1993, cité par David, 1999), les élèves redoublants auraient tendance à se diriger vers un but d’évitement du travail. En effet, dans l’analyse quantitative, les statistiques démontrent que les élèves, qu’ils soient redoublants ou non, se dirigent davantage vers un but de maîtrise. Les adolescents disent d’ailleurs clairement qu’ils viennent à l’école dans le but d’apprendre de nouvelles notions et que de comprendre la matière travaillée leur semble important. Pourtant, ils semblent hésitants lorsque le travail à effectuer requiert de nombreux efforts. En effet, ils ne s’opposent pas à l’idée que leurs professeurs diminuent le nombre d’exercices ou proposent de résoudre des problèmes faciles. Apprendre et progresser ne sont donc pas des objectifs sans conditions.

Procédons à présent à la vérification de notre quatrième hypothèse. Si nous reprenons les informations recueillies dans les questionnaires, nous constatons que les quarante-et-un élèves redoublants sont plutôt insatisfaits des notes qu’ils obtiennent dans les différentes matières. De plus, ils ajoutent qu’ils éprouvent quelques difficultés à comprendre les notions expliquées par leurs professeurs et les tâches qu’ils doivent effectuer. Bien que nous ne puissions faire le lien entre leur perception de compétence et leur redoublement, nous pouvons néanmoins affirmer que les élèves redoublants interrogés sont loin de penser que tout leur semble facile à l’école. Cependant, les obstacles rencontrées n’apparaissent pas, selon leurs dires, insurmontables, dans la mesure où ils ne sont pas si nombreux pour risquer de compromettre l’année en cours. Nous pouvons, en somme,

confirmer notre hypothèse selon laquelle les élèves redoublants ont une image de soi et une perception de compétence plutôt négatives.

Quant à la cinquième hypothèse, les résultats que nous avons obtenus vont partiellement dans le sens de celle-ci. En effet, les élèves, qu’ils soient redoublants ou non, expliquent leurs mauvais résultats par des causes majoritairement externes (malchance, difficulté de l’épreuve, sévérité de l’enseignant). Ce constat vient donc appuyer les propos de Weiner et al. (1972, cités par Doise et al., 1991) qui, comme nous l’avons mentionné dans le cadre théorique, soutiennent que les élèves attribuent généralement leurs échecs à des causes externes pour protéger leur estime de soi et pour éviter d’être submergés d’émotions négatives. Cependant, la raison principale qu’ils invoquent tous deux pour expliquer leurs mauvaises notes est une cause interne : le manque de travail. Cela rejoint les raisons fournies par les élèves pour justifier leur redoublement qui sont cette fois majoritairement internes (manque de travail, de maturité, difficulté à lire, mauvais résultats, etc.). Seuls sept élèves avancent des causes externes (exigences trop élevées, professeurs trop sévères). Ces résultats viennent par conséquent contredire notre hypothèse et renforcer les constats de Lorenzi-Cioldi (2002) selon lesquels les élèves qui étudient dans les sociétés occidentales ont tendance à internaliser les événements vécus, car ils pensent s’autodéterminer, être maîtres de leur propre destin et donc responsables des événements qu’ils endurent.

Nous allons, à présent, procéder à la vérification de notre sixième hypothèse initiale selon laquelle les raisons rapportées par les élèves de première année seraient plus conformes à celles de leur(s) enseignant(s) par rapport à leurs camarades de quatrième année et à leur(s) professeur(s).

Il nous semble important de mettre en évidence que deux types de réponse apparaissent dans les raisons citées, qu’elles proviennent des élèves ou des dires des enseignants selon les élèves. En effet, il y a des causes et des conséquences qui précèdent la conséquence finale qu’est le redoublement. Les conséquences sont les faits sur lesquels certains enseignants ont pris appui pour expliquer l’échec des élèves, autrement dit les mauvais résultats, les notes insuffisantes, les lacunes présumées par ces derniers en observant le bulletin scolaire. Hormis un élève qui a cité de son côté ses mauvais résultats, les autres élèves des deux degrés n’ont mentionné que les causes qui les ont conduits à obtenir des

notes insuffisantes, comme si ces derniers avaient cherché à comprendre et étaient conscients des raisons pour lesquelles ils avaient terminé leur année académique en situation d’échec. Parmi les nombreuses causes citées, nous pouvons notamment rappeler : des problèmes de santé, de famille, un manque de travail, de motivation, l’exigence de certains enseignants, excès d’absences. Nous avons tenu à expliciter ce qui peut paraître insignifiant, mais qui aura une incidence sur la vérification de notre hypothèse, certaines des raisons des enseignants ne correspondent pas à celles des élèves à cause de cette différence (cause-conséquence) observée dans les résultats.

Les résultats obtenus vont dans le sens de notre hypothèse. Neuf des dix-sept témoignages d’élèves de première année sont conformes aux discours des enseignants qui concernent le manque de travail, le manque de motivation, les mauvais résultats. Tandis que, du côté des élèves de quatrième année, ils sont sept à être en accord avec leur(s) professeur(s). Le manque de travail est la seule cause commune avec les élèves de première année. Nous avons relevé d’autres causes sur lesquelles les élèves de quatrième année et leur(s) enseignant(s) s’accordent : les problèmes de santé ou maladie, l’excès d’absences, les difficultés de lecture .

La dernière de nos hypothèses concerne les sentiments éprouvés par les élèves lors de l’annonce de leur redoublement. Les résultats que nous avons obtenus confirment notre hypothèse selon laquelle les élèves redoublants éprouvent des émotions majoritairement (27 sur 35) négatives. En effet, parmi les émotions négatives exprimés par les élèves redoublants nous avons notamment relevé tristesse, malaise, regrets, frustration, honte, déception, démotivation, peur, énervement, haine et infériorité. Nous avons cependant constaté que le sentiment qui a été cité à six reprises est neutre : les élèves n’ont rien ressenti. Seuls deux élèves considèrent leur redoublement utile et sont heureux d’avoir plus de temps pour intégrer les différentes notions et atteindre les objectifs fixés par les enseignants.

Après avoir vérifié toutes nos hypothèses, nous allons à présent mentionner les apports et les limites de notre recherche.

9.2. Analyse critique de notre recherche