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8. Présentation et analyse des résultats

8.2. Analyse détaillée

8.2.2. Sentiment d’appartenance à l’école : distinction entre X et Y

Nous avons regroupé les établissements X et Y pour mettre en évidence le sentiment d’appartenance à l’école des élèves. Nous avons voulu comparer les réponses des adolescents aux questions « Préfèrerais-tu être dans un autre établissement ? Pourquoi ? » (items 30 et 31). Nous sommes parties du principe que les élèves (environ 82% ; n=144) qui ont répondu par la négative se sentent appartenir positivement à leur établissement (S+) alors que ceux (environ 12% ; n=20) ayant répondu par l’affirmative ont un sentiment d’appartenance négatif à leur école (S-).

Nous avons alors voulu comparer les élèves ayant un sentiment d’appartenance à leur école positif (S+) avec ceux ayant un sentiment d’appartenance à leur école négatif (S-).

Pour cela, nous avons relevé les justifications de chaque groupe (S+) et (S-) qui sont les réponses à la question 31 (« Pourquoi ? ») et avons établi un tableau comparatif.

SENTIMENT D’APPARTENANCE A

50 élèves se sentent bien dans leur école. 5 élèves sur 20 n’aiment pas l’ambiance de leur école.

19% (n=144)

28 élèves aiment leur école.

5 élèves sur 20 n’aiment pas leur école et/ou les personnes qui la fréquentent.

16% (n=144)

23 élèves ont leurs amis dans l’école. 1 élève sur 20 a ses amis hors de son école.

9% (n=144)

13 élèves vivent à proximité de leur école.

---

8% (n=144)

12 élèves aiment la réputation, la beauté et l’historique de leur école.

1 élève sur 20 pense qu’il est plus facile d’étudier dans une autre école que la

18 élèves n’ont pas répondu à la question 31.

1 élève sur 20 n’a pas répondu à la question 31.

(N. B. : Les additions des pourcentages n’atteignent pas toujours 100% car certains élèves ont donné plusieurs réponses.)

Ce tableau met en évidence quelques raisons émergentes du sentiment d’appartenance à l’école. Celles que l’on voit apparaître autant pour les (S+) que pour les (S-) sont des raisons concernant le fait d’aimer ou ne pas aimer l’école et l’ambiance ainsi que de se sentir bien ou mal dans celle-ci. Ces raisons semblent être des facteurs déterminants pour les élèves. Il s’agit des arguments les plus récurrents, autant pour les élèves ayant un sentiment positif que pour ceux qui ont un sentiment négatif quant à leur appartenance à l’établissement.

Comme nous l’avons vu dans le point précédent (« Sentiment d’appartenance : tendance générale des redoublants et des non redoublants »), les questions 14, 16, 19 et 21 sont d’autres items liés à cette même thématique. Nous allons voir si les élèves qui s’étaient situés (S+) et ceux qui se trouvaient être plutôt (S-) aux questions précédentes (30 et 31) confirment leur position par ces autres items.

Tout d’abord, l’item 14 « De façon générale, je me sens différent(e) des autres élèves de cette école. » a retenu notre attention : en effet, les (S+) devraient se rapprocher de « pas du tout d’accord ». Cela renforce l’idée de Boucher et Morose (1990, cités par Guité, 2007) selon laquelle « (…) plus un individu a un fort sentiment d’appartenance à un groupe, plus il a tendance à adopter les valeurs, les normes et les règles de conduite de ce groupe » (p. 417). La fréquentation régulière d’un groupe influence le comportement de la personne qui côtoie ce dernier, comportement qui se conforme de plus en plus à celui du groupe ; par conséquent, les différences existant entre les membres du groupe s’estompent peu à peu. A l’inverse, les élèves qui ont un sentiment d’appartenance à l’école négatif devraient se situer plutôt du côté de « tout à fait d’accord » car ceux-ci prétendent ne pas appartenir à leur école et nous supposons fortement qu’ils pourraient se sentir différents des autres élèves de leur établissement. Les résultats confirment nos suppositions et, de ce fait, donnent raison aux propos des auteurs précédemment présentés : le mode et la moyenne sont à 3.00. De plus, le maximum 7 (« pas du tout d’accord ») n’a jamais été choisi alors que le minimum 1 (« tout à fait d’accord ») quant à lui, a été coché à plusieurs reprises : les élèves (S-) tendent donc plutôt vers « tout à fait d’accord » quand on leur demande s’ils se sentent différents des autres élèves de leur école, école à laquelle ils ne se sentent pas appartenir.

Ensuite, l’item 16 proposait : « Les élèves de ma classe m’acceptent comme je suis. ».

(S+) (S-)

Mode 1 1

Moyenne 2.00 2.00

Nous nous attendions à voir les (S+) répondre « tout à fait d’accord » étant donné qu’ils se sentent appartenir à leur école et donc devraient se sentir bien acceptés par leurs camarades. En effet, ils ont répondu le plus souvent (environ 50% ; n=142) « tout à fait d’accord ». La moyenne étant proche de « tout à fait d’accord » renforce ce résultat.

Les (S-) quant à eux auraient dû se situer plus proches de la réponse opposée, étant donné qu’ils ne se sentent pas vraiment appartenir à leur école. Or, ils se situent également proches de « tout à fait d’accord » : le mode qui correspond bien à la réponse « tout à fait d’accord » a été choisi par 8 élèves sur 20 et la moyenne se rapproche également de cette réponse, ce qui pose un problème d’illogisme. Ces élèves se sentent à la fois ne pas appartenir à l’école et tout à fait acceptés par leurs camarades. Afin de répondre à ce paradoxe, nous supposons que les élèves n’aiment pas certains aspects de leur école, ce qui explique qu’ils ne se sentent pas en faire partie, mais qu’ils ont néanmoins des amis qui les acceptent et desquels ils sont proches. Il semblerait que tous ces élèves se sentent acceptés, quel que soit leur sentiment d’appartenance à l’école. Cela indique ici, que le fait d’avoir un (S-) n’empêche pas les élèves de se sentir acceptés.

L’item 19, « Ici, les professeurs me respectent beaucoup. », devrait également nous donner des indications quant au sentiment d’appartenance à une école.

(S+) (S-)

Mode 2 3

Moyenne 3.00 3.00

Les (S+) ont répondu plutôt du côté de « tout à fait d’accord », ce qui était prévisible car ils se sentent bien dans leur école. De plus, le mode renforce le fait que ces élèves se sentent respectés par leurs professeurs et appartenir positivement à leur établissement.

Pour les (S-), la réponse qui a été la plus cochée est légèrement plus élevée que celle des (S+), ce qui les rapproche du côté pour lequel nous aurions imaginé les voir pencher.

Malgré le fait que ces élèves voudraient changer d’établissement car, selon les dires de

certains d’entre eux, ils estiment que leurs professeurs ne leur conviennent pas, ils se sentent néanmoins plutôt respectés par ceux-ci. Nous pouvons supposer que l’enseignement du professeur est jugé inconvenant, c’est-à-dire l’enseignant en tant que professionnel et non en tant que personne.

L’item suivant indiquait : « Je peux vraiment être moi-même dans cette école. » (item 21).

(S+) (S-)

Mode 1 3

Moyenne 3.00 3.00

Une fois de plus, nous nous attendions à voir les (S+) situés plutôt vers « tout à fait d’accord » et les (S-) plus proches de « pas du tout d’accord ». Malgré le fait que tous deux aient une moyenne qui tend vers « tout à fait d’accord », la réponse la plus récurrente diffère pour les (S+) et les (S-). Nous constatons une légère tendance dans les réponses des élèves qui vont dans le même sens que nos suppositions, c’est-à-dire que les élèves (S-) sont un peu plus proches de la réponse « pas du tout d’accord ». Nous pouvons relever malgré cela que les (S-) ont répondu 3.00 pour la moyenne et 3 également pour le mode, et cela sur une échelle allant de 1 à 7, ce qui reste relativement positif contrairement à leur sentiment d’appartenance à l’école négatif.

Toujours en partant du principe suivant : les élèves ayant répondu par la négative à la question 30 ont un sentiment d’appartenance positif à leur école et les élèves ayant répondu par l’affirmative à la même question ont un sentiment d’appartenance négatif à leur établissement, nous allons établir des liens avec les questions portant sur les attributions causales, c’est-à-dire aux causes données pour expliquer leur échec scolaire.

Les items traitant de cette thématiques sont les items 22 (« Quand j’obtiens de bons résultats, je pense que c’est généralement dû à : mes compétences et mes aptitudes, mon intelligence, mes efforts, la facilité de l’épreuve, la chance, la sympathie de l’enseignant, autre ») et 23 (« Quand j’obtiens de mauvais résultats, je pense que c’est généralement dû à : la malchance, la sévérité de l’enseignant, la difficulté de l’épreuve, mon manque de capacités ou de connaissances, mon manque de travail, mon manque d’intelligence, autre »).

Voici, d’une part, les causes auxquelles les (S+) et les (S-) attribuent à leurs réussites (item 22) :

(S+) (S-)

1er choix Efforts (61, 2% ; n=71) Efforts (8 sur 16 élèves) 2e choix Compétences et aptitudes (46% ;

n=112)

Compétences et aptitudes (8 sur 16 élèves)

3e choix Facilité de l’épreuve (55% ; n=76) Facilité de l’épreuve (7 sur 10 élèves)

Nous constatons des points communs entre les élèves : qu’ils soient (S+) ou (S-), ils pensent tous que lorsqu’ils obtiennent de bons résultats, c’est tout d’abord grâce à leurs efforts. Tous semblent penser que s’ils font des efforts, ils auront alors une chance de réussir. Les efforts sont une cause interne à chaque individu, variable (selon si l’on décide ou non d’en fournir) et contrôlable. Même les élèves qui n’ont pas un sentiment d’appartenance positif à l’école semblent conscients que l’effort contribue à la réussite.

Les élèves (S+) et (S-) s’accordent également à penser qu’obtenir de bons résultats est lié aux compétences et aux aptitudes personnelles. Il s’agit de la cause qui a été majoritairement cochée en second choix. En effet, les compétences et aptitudes sont internes à l’individu, stables et non contrôlables. En ce qui concerne le troisième choix également, nous constatons que les (S+) tout comme les (S-) ont choisi de répondre la facilité de l’épreuve, qui est externe, stable et incontrôlable, ce qui nous a interpelées.

Nous proposons de justifier cela ainsi : les élèves (S+) sont à l’aise à l’école et dans leurs apprentissages dans la mesure où il n’est pas difficile selon eux d’obtenir de bonnes notes aux évaluations. Nous pensons que le fait de se sentir bien peut aider un élève à se motiver. Si nous prenons appui sur la littérature, nous pouvons émettre l’hypothèse que ces élèves sont valorisés dans leur milieu scolaire et ont développé une relation de confiance et de sécurité avec leurs enseignants ; un sentiment d’appartenance positif à l’école engendre, selon Goodenow (1993, cité par David, 1999) et Ryan et al. (1994, cités par David, 1999), une plus grande motivation à apprendre et à s’engager dans les diverses tâches, ce qui peut expliquer que lors des évaluations, les élèves ont le sentiment de réussir facilement puisque, s’étant complètement investis au cours des leçons, ils comprennent et intègrent plus vite les notions qu’un élève qui n’éprouve aucune motivation et ne fait pas preuve de persévérance.

Les élèves ayant un sentiment d’appartenance négatif à l’école ont également choisi de répondre la facilité de l’épreuve. Sachant que ces élèves voudraient changer

d’établissement pour plusieurs raisons, nous pensons que leur troisième choix peut se justifier ainsi : en choisissant la facilité de l’épreuve ils ont attribué leur réussite à un facteur externe, stable et incontrôlable, ce qui montre que leur réussite ne dépend pas d’eux. Ce sont des élèves qui, pour certains, n’aiment ni l’ambiance, ni les professeurs et qui jugent leur établissement plus difficile que les autres. Donc, ils pensent peut-être qu’avec tous ces inconvénients, il vaut mieux se fier à la facilité de l’épreuve malgré le fait que ce facteur soit hasardeux plutôt qu’à un facteur interne, qu’ils seraient susceptibles de mieux gérer. Ce constat nous permet de faire un lien avec la notion de contrôlabilité de la cause qui devrait, selon Tardif (1992, cité par Crahay, 2003) être prioritairement prise en compte par rapport au lieu de causalité. En effet, si un élève échoue à une évaluation et pense qu’il ne pourra pas remédier dans l’avenir à cet échec, étant donné que ce dernier est dû à un facteur qu’il ne peut ni contrôler, ni maîtriser, il risquera d’être démoralisé et démotivé face à ses apprentissages futurs. Différents auteurs (Blouin, 1985, 1988 ; Borkowsky et al., 1990 ; Covington, 1987 ; Weiner, 1984, 1985, cités par Crahay, 2003) expliquent que « (…) les émotions associées aux attributions causales plus que les attributions causales elles-mêmes sont les facteurs qui déterminent l’engagement, la participation et la persistance dans l’action des élèves » (p. 251). Un échec justifié par une cause non contrôlable risque donc d’amener l’élève vers un cercle vicieux dans lequel de nouveaux échecs le guettent.

D’autre part, les causes données par les élèves interrogés pour expliquer leurs échecs sont les suivantes (item 23) :

(S+) (S-)

1er choix Manque de travail (64% ; n=132) Manque de travail (12 sur 19 élèves)

2e choix Difficulté de l’épreuve (48% ; n=131) Malchance (4 sur 6 élèves) 3e choix Sévérité de l’enseignant (38 sur 55

élèves)

Manque de capacité ou de connaissance (1 sur 6 élèves)

Ces résultats sont surprenants : quand on a demandé aux élèves (S+) pourquoi ils réussissaient, ces derniers ont répondu entre autres que c’était grâce à la facilité des épreuves. Cela met en évidence que leurs réussites ou leurs échecs peuvent dépendre de facteurs externes tels que les enseignants dont la personnalité, les attentes et les exigences semblent avoir une forte influence sur l’obtention de bons ou de mauvais résultats. A ce

propos, Galand et Philippot (2002) mettent en évidence qu’il existe le choix du but poursuivi par l’élève qui est fortement influencé par trois prédicateurs : l’engagement affectif et les pratiques de l’enseignant et les différents climats scolaires. Les pratiques et la personnalité de l’enseignement sont donc deux facteurs qui ont un impact sur le climat scolaire qui lui-même influence la motivation de l’élève et donc ses résultats scolaires.

La première réponse qu’ils ont donnée est le manque de travail, ce qui montre quand même qu’ils savent que l’échec est aussi lié à des raisons internes et plus précisément, sur lesquelles ils peuvent agir. Cependant, nous pouvons nous questionner : sont-ils réellement conscients qu’ils n’ont pas suffisamment travaillé ou répètent-ils un discours qu’on leur a rabâché pendant toute leur scolarité ?

La même réponse a aussi été donnée en premier choix par les élèves ayant un sentiment d’appartenance négatif à l’école et cela renforce ce qu’ils avaient répondu majoritairement en premier choix à l’item précédent : ils attribuaient leur réussite à leurs efforts, ce qui va de pair avec le fait d’attribuer leurs échecs à leur manque de travail. Le second choix est la malchance et le 3ème choix des (S-) est le manque de capacités ou de connaissance. Ces élèves pensent que s’ils échouent, ça n’est pas seulement dû à leur manque de travail ou de capacité, mais également à un facteur externe. Autrement dit, s’ils échouent, ils estiment qu’ils ne sont pas seuls responsables, ce qui s’accorde bien avec leur souhait de changer d’établissement.

En conclusion, nous constatons que certains élèves admettent que s’ils échouent c’est avant tout par manque de travail et que s’ils réussissent, c’est grâce à leurs efforts. Ils semblent penser que sans travail, on ne peut pas réussir. L’action de travailler est

« interne », donc propre à chacun, variable et contrôlable, ainsi, les élèves prétendent qu’ils doivent s’investir et fournir des efforts s’ils veulent réussir.

Nous constatons également que quand ils réussissent, deux facteurs sur trois sont des facteurs internes alors que quand ils échouent, il y a plus de facteurs externes qui entrent en compte. Il est effectivement plus facile de s’attribuer son propre succès et de trouver des causes externes à sa personne en cas d’échec. Attribuer son échec à des causes externes, stables et incontrôlables est un processus appelé biais de complaisance par Weiner et al., (1972, cités par Doise et al., 1991). Il s’agit d’une manière pour les élèves qui se trouvent dans une situation d’échec, d’une part, de se protéger des émotions négatives que pourrait engendrer l’adoption du processus d’internalité défini par Lorenzi-Cioldi (2002) et, d’autre part, selon Blouin (1985, 1988, cité par Crahay, 2003), de

maintenir une haute estime de soi. Seligman et al. (1978, cités par Crahay, 2003) ont également observé que les personnes qui vivent des événements négatifs leur causant du tort tels qu’un redoublement ont tendance à les attribuer à des causes externes, stables et incontrôlables, cela étant notamment dû à la crainte de subir les moqueries des camarades promus.

Après avoir analysé les différences et les similitudes entre les élèves ayant un sentiment d’appartenance à l’établissement soit positif, soit négatif, nous avons dissocié parmi les étudiants ceux qui ont déjà vécu un redoublement (S+ : n=33 ; S- : n=5) et ceux qui n’ont pas connu cette mesure (S+ : n=106 ; S- : n=15) afin à nouveau de faire des observations.

(S+) (S-)

École C École N-B École C École N-B

Red. Non red. Red. Non red. Red. Non red. Red. Non red.

N=20 n=87 n=13 n=19 n=4 n=10 n=1 n=5

Elèves redoublants : 87% (33 élèves) Elèves non redoublants : 88% (106 élèves)

Elèves redoublants : 13% (5 élèves) Elèves non redoublants : 12% (15 élèves)

Pour ce faire, nous avons pris appui sur les réponses aux items 30 et 34, à savoir s’ils préfèreraient changer d’établissement et s’ils ont déjà été redoublants. Les analyses porteront sur des thématiques spécifiques qui sont la réputation de l’école, c’est-à-dire l’opinion que les élèves nourrissent à l’égard de l’établissement dans lequel ils poursuivent leurs études et l’influence que peut avoir celle-ci sur leurs apprentissages actuels, et les attributions causales, autrement dit les causes mentionnées par les élèves pour expliquer leurs échecs et leurs réussites. Il s’agit d’analyses qualitatives car le nombre réduit d’élèves ne nous permet pas de faire des statistiques approfondies.

8.2.3. Sentiment d’appartenance positif à l’école