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Pour autant, tous les Italiens malades et blessés n’oubliaient pas qu’une épée de Damoclès restait suspendue au-dessus de leur tête, et que leur destin dépendait des visites médicales que les commissions sanitaires effectuèrent périodiquement.

La peur d’être déclaré apte était alors permanente. Et lorsque la sanction tombait, le moral s’effondrait. Ainsi, un soldat raconta à son oncle, fin juin  :

J’ai passé la visite et, comme vous le savez, je n’ai pas de chance et la commission italienne m’a reconnu apte, et soyez certain que j’en suis malheureux. Après toutes les souffrances que j’ai supportées sur notre front, il me faudra aller sur le front fran-çais ; je ne sais quel sera mon sort, mais mon espoir est minime parce que le front n’est pas le rêve¹.

Tandis qu’un autre le  septembre  annonçait la bonne nouvelle à un parent : Je ne sais pas si je t’ai dit qu’il y a peu de jours j’ai passé une visite médicale de contrôle et je suis content de t’annoncer que je suis encore inapte. Donc soyons de bonne humeur, car, en comparaison de ceux qui sont dans les tranchées, ici je suis très bien. Le temps passe et la paix approche².

Le fait d’être déclaré inapte au service armé permettait en effet d’échapper au front et de rester à l’arrière loin de la guerre. Aussi les résistances furent-elles nombreuses, au grand désarroi des autorités françaises qui ne pouvaient rien faire. Le médecin aide-major J. Bosviel avoua ainsi son impuissance :

uant à l’intervention chirurgicale, on ne peut y contraindre le patient, d’après la loi italienne, si celui-ci s’y refuse, et il s’y refuse le plus souvent pour la raison très simple que sa hernie entraîne son passage et son maintien dans l’auxiliaire³. Mais il faut bien reconnaître qu’il fut de plus en plus difficile d’échapper à la sur-veillance sanitaire et aux mailles du filet des commissions de révision. Ces hommes, fussent-ils travailleurs, restaient avant tout des soldats susceptibles d’être versés à tout moment dans le service actif. Et si certains d’entre eux tentaient de déser-ter ou d’échapper aux contraintes militaires, la surveillance judiciaire saurait les en dissuader.

 Surveillance judiciaire

Tout au long de leur séjour en France, les travailleurs et les combattants italiens furent en effet soumis à une surveillance judiciaire permanente. Le problème fut

. SHD/GR,  N  : CP du  au  juin .

. SHD/GR,  N  : CP d’Is-sur-Tille, s. p. , ,  et  compagnies, sept cent trente neuf lettres lues,  septembre .

. SHD/GR,  N //ouvriers italiens : rapport du médecin aide-major J. Bosviel, le  mars  au sujet de la  centurie des COMI.

 L   …

cependant de déterminer précisément les champs de compétence des juridictions des deux justices militaires, italienne et française. Si les combattants bénéficièrent de leur propre tribunal, les travailleurs se trouvèrent au cœur d’un imbroglio judi-ciaire aux implications morales et politiques et n’obtinrent un tribunal militaire ita-lien que tardivement. L’enjeu était de taille, car il fallait tenir compte du caractère exceptionnel de la situation en faisant preuve d’exemplarité mais aussi de clémence. . Un imbroglio judiciaire

Les troupes italiennes en France eurent à leur disposition leurs propres tribunaux militaires. Mais cela n’alla pas de soi. Une convention franco-italienne, signée le  septembre , reconnaissait le fait que les tribunaux militaires des deux pays avaient compétence pour juger des crimes et des délits commis par des soldats de leur armée respective qui se trouvaient dans le territoire de l’autre. Le principe de l’exterritorialité des troupes étrangères était ainsi pleinement reconnu. Cependant, la convention restait floue concernant la situation militaire des prévenus. Les Fran-çais estimaient que cette convention ne s’appliquait qu’aux troupes combattantes, les Italiens quant à eux estimaient que cette convention concernait les soldats, combattants certes mais aussi travailleurs.

La question du II corps d’armée italien, troupe combattante, ne posa donc pas de problème. Le corps d’armée eut à sa disposition son propre tribunal militaire, installé près le  de marche et qui ne fut placé sous la dépendance disciplinaire et administrative de la Base italienne en France que le  janvier ¹. Ce tribunal militaire jugea les combattants coupables de crimes et de délits en France jusqu’à la cessation de ses activités le  février  et sa dissolution le  mars ².

Le sort des travailleurs italiens, n’étant pas considérés par les Français comme des combattants, provoqua un conflit judiciaire entre les deux pays³. En outre, la convention concernant les TAIF n’avait pas abordé la question judiciaire, et les autorités italiennes devaient transférer leurs prévenus en Italie pour qu’ils y soient jugés, ce qui provoquait d’énormes difficultés procédurières. Il y avait donc un vide dans lequel les Français s’engouffrèrent pour contester l’exterritorialité de ces troupes auxiliaires en France⁴. À plusieurs reprises, l’autorité judiciaire française intervint en effet et réclama que lui fut remis l’Italien qui avait commis un crime ou un délit militaire. Ce fut en avril  qu’un cap fut franchi, portant atteinte au

. AUSSME, E -/ : circulaire n  du général Albricci à la BIF, au tribunal militaire, au  régiment de marche et au QG du II CAI, le  février .

. AUSSME, E -/ : lettre du commandant de la BIF au tribunal militaire du II CAI, le  mars .

. Ministero della Difesa,L’esercito italiano nella Grande Guerra (-), vol. VII : « Le operazioni... »,op. cit., p. -.

. AUSSME, E -/ : note n - pour les armées du  bureau (justice militaire) de l’état-major du GQG des armées du nord et du nord-est, le  mars .

S   prestige et à l’honneur de l’armée italienne. Dans la nuit du  au  avril , en effet, la gendarmerie française, sans se soucier de la réaction des autorités italiennes, pro-céda à l’arrestation du soldat Pietro Del Zotto, auxiliaire de la  compagnie des TAIF, accusé de complicité de vol d’une paire de chaussures avec un soldat français à l’encontre d’un autre Italien de sa compagnie. Les Italiens craignirent immédiate-ment que cette affaire ne fasse un précédent et décidèrent d’agir¹. Ils s’appuyèrent sur la convention judiciaire de  en en faisant une lecture large, et en réclamant la création d’un tribunal militaire ayant juridiction sur les travailleurs italiens. Les Français « se firent tirer l’oreille », et après plusieurs mois de négociations, consen-tirent à permettre la création d’un tribunal militaire pour les travailleurs mais seule-ment pour les Troupes auxiliaires italiennes en France. Et encore, cette autorisation arriva en décembre , soit au moment où ces troupes d’auxiliaires étaient sur le point d’être rapatriées en Italie. En attendant, les militaires coupables étaient trans-férés au tribunal militaire de Turin, ou bien, en cas de fautes légères, affectés à la Compagnie spéciale des TAIF.

. La création d’un tribunal militaire pour les TAIF

Le général Tarditi n’accepta pas cette solution, et décida de façon unilatérale, de créer un tribunal militaire pour ses propres troupes, par la circulaire du  sep-tembre  (avec rétroactivité au  août ²), siégeant à Paris, les audiences étant tenues dans les villes où se trouvaient les commandements des groupes, à Châlons-sur-Marne, Neufchâteau ou encore Nevers. L’avocat général et le président furent nommés respectivement le  et le  septembre ³, tandis qu’à côté de juges enquêteurs et juges rapporteurs, des juges régimentaires furent créés de manière à réaliser l’instruction au sein des unités des Troupes auxiliaires italiennes en France plus rapidement⁴. Le tribunal militaire des TAIF finit par étendre sa juridiction aux autres travailleurs en France. Le traitement du Groupe des compagnies auxiliaires « A » ne posa pas de problème. Rapidement en effet, la mission militaire italienne obtint un accord avec le Grand uartier Général américain pour placer ces tra-vailleurs italiens sous la juridiction du tribunal militaire des TAIF dès le  octobre. Le cas des Centuries d’ouvriers militaires italiens fut cependant plus compliqué, le ministère français des Affaires étrangères s’y opposa. Le général des TAIF prit alors

. AUSSME, E -/ : télégramme du général Tarditi au colonel Brancaccio, le  juin . AUSSME, E -/ : rapport n  du colonel commandant le  groupe des TAIF, au général Tarditi, le  avril .

. AUSSME, E -/ et F -/.

. AUSSME, F -/ : rapport sur l’activité des TAIF, par le général inspecteur Boyl, Nangis le  février , f -.

. AUSSME, E -/ : circulaire de l’avocat militaire aux commandants des groupes de TAIF et du Groupe des compagnies auxiliaires « A », le  septembre .

 L   …

la décision unilatérale le  novembre  de placer ces troupes sous la juridiction de son tribunal militaire.

Le tribunal fonctionna cependant assez mal, car l’instruction se heurta à d’énormes difficultés. Ses moyens furent en effet réduits, l’instruction ne reposant que sur une dizaine de personnel seulement, entre juges d’instruction et juges rap-porteurs. En outre, il fallait compter avec le déplacement continu des unités, le rapatriement fréquent des accusés, et la transmission des documents qui devaient être fournis par les services judiciaires d’Italie. Ces difficultés ne faisaient que ralen-tir la procédure, et ce, alors que les plaintes ne cessaient d’arriver au tribunal. En outre, le volume des affaires traitées dépendit en grande partie du fait que le tribu-nal des TAIF prit sous sa juridiction le Groupe des compagnies auxiliaires « A », composé de mauvais soldats coupables de désertions, de crimes et de délits divers. Cette décision provoqua une augmentation de près de quatre cents procédures d’un coup, pour lesquelles il fallut procéder à l’instruction, à l’interrogatoire des préve-nus, à l’audition de preuves à décharge, ce qui alourdit considérablement le travail du tribunal et ce qui aggrava son engorgement¹.

Tout cela eut une incidence sur le rendement du tribunal de l’Inspectorat. Nous n’avons pas retrouvé le bilan d’activité du tribunal miliaire du II corps d’armée italien. Seules quelques décisions apparaissent au détour de la correspon-dance des responsables italiens lorsque les affaires sont importantes, comme par exemple les désertions. En revanche, l’activité du tribunal militaire des Troupes auxiliaires italiennes en France peut être mieux connue du fait de la conservation de plus d’une centaine de jugements dans les archives militaires de Rome. La première audience du tribunal de l’Inspectorat eut lieu le  octobre , mais les séances ne furent pas très nombreuses du fait des difficultés de procédure, du fait de l’opposi-tion sourde mais réelle des autorités françaises et surtout du fait de son bref temps d’activité. Il n’y eut que vingt audiences d’octobre  à janvier , avant d’être dis-sous le  février  à l’heure du rapatriement de l’Inspectorat. D’après un compte rendu d’activité rédigé par l’avocat militaire du tribunal au début de l’année , le tribunal militaire des TAIF eut à instruire huit cent quatre-vingt-trois plaintes, dont cent firent l’objet de sentence et deux cent soixante-dix-huit débouchèrent sur un non-lieu et renvoyées à un autre tribunal, tandis que quatre-vingt-cinq devinrent des actes d’accusation qui pourraient déboucher sur une sentence, si les troupes n’étaient pas rapatriées². Le ratio apparaît assez faible, car, rapporté au nombre d’auxiliaires concernés, soit entre   et  , le nombre de plaintes ins-truites tourna autour de , à  , nettement moins qu’en Italie. Dans ce pays, d’après Antonio Gibelli, Bruna Bianchi, Enzo Forcella, Alberto Monticone,

Gio-. AUSSME, F -/ : rapport sur l’activité des TAIF, par le général inspecteur Boyl, Nangis le  février , f .

S   vanna Procacci et Giorgio Rochat, la proportion des plaintes était en effet de l’ordre de  à  ¹. Alors, ces militaires auxiliaires ont-ils bénéficié en France d’une justice militaire plus clémente ?

. Une justice militaire entre exemplarité et clémence

Il est difficile de répondre à cette question, mais il semble bien que les soldats italiens furent relativement épargnés par les poursuites judiciaires.

Les autorités italiennes ne voulaient pas, en effet, donner une mauvaise image de leurs troupes en France en rendant publics les actes d’indiscipline de leurs hommes. Aussi était-il conseillé « de laver le linge sale en famille » et de régler des pro-blèmes à l’amiable, par le biais d’arrêt de rigueur. De fait, les officiers durent sans doute fermer les yeux sur des vols ou d’éventuels comportements d’insubordina-tion ou de refus d’obéissance en les faisant passer pour des actes d’indiscipline qui ne tombaient pas sous le coup du code militaire. C’est du moins ce qui ressort d’une étrange affaire au sujet d’un vol commis par un lieutenant des Troupes auxi-liaires italiennes en France (TAIF). Ce dernier, le  octobre , fut accusé, sur dénonciation, de s’être emparé de   francs destinés à payer les hommes de sa compagnie. Mais l’affaire n’aboutit pas. En fait, le  décembre , l’avocat du tri-bunal des TAIF écrivit au général Tarditi une lettre qui montrait à quel point les Ita-liens étaient soucieux de soigner leur image ou du moins de ne pas donner à leurs alliés des arguments contre eux. L’avocat demanda en effet au général Tarditi de se contenter d’infliger au responsable une punition plutôt que d’instruire pénale-ment l’affaire : « L’ordre juridique et la discipline seront suffisampénale-ment rétablis, et on aura ainsi l’avantage, ce qui n’est pas rien, d’éviter qu’une enquête plus minutieuse et plus profonde nécessairement dans les milieux français, ne jette le discrédit sur notre armée et sur nos officiers². » De fait, l’affaire fut enterrée, et le  janvier , rien n’avait encore été officiellement trouvé, en dépit d’une enquête interne. Sans doute faudrait-il tenir compte également du statut de l’accusé. Un sous-officier ou un simple soldat n’aurait pas suscité autant de sollicitude !

. Il y eut, d’après les chiffres donnés par le ministre Nitti, lors de l’amnistie du  septembre ,   plaintes, dont   pour les émigrés déclarés réfractaires, sur plus de cinq millions de mobilisés. Voir Enzo F, Alberto M,Plotone di esecuzione. I processi della prima guerra mondiale, Bari-Roma, Laterza, ,  p. ; Bruna B, « Le ragioni della diserzione. Soldati e ufficiali di fronte a giudici e psichiatri (-) »,Storia e problemi contemporanei, , , p. - ; Giovanna P,Dalla rassegnazione alla riolta : mentalità e comportamenti popo-lari nella Grande Guerra, Roma, Bulzoni, ,  p. ; Antonio G,L’Officina della Guerra : la Grande Guerra e le trasformazioni del mondo mentale, Torino, Bollati Boringhieri, ,  p. ; Gior-gio R, « L’efficienza dell’esercito italiano nella Grande Guerra »,Italia contemporanea, , , p. - ; Mario I, Giorgio R,La Grande Guerra...,op. cit., p. -.

. AUSSME, E -/ : lettre de l’avocat militaire capitaine Prassone, du tribunal militaire des TAIF, au général Tarditi, le  décembre .

 L   …

Mais lorsque cela n’était pas possible, soit parce que la gendarmerie française avait arrêté des hommes soupçonnés de désertion, soit parce que les actes commis étaient trop graves pour ne pas faire l’objet d’une procédure judiciaire, le tribunal militaire fut saisi, mais toujours en dernier recours. Les archives militaires italiennes ont conservé quatre-vingt-trois sentences judiciaires et quarante-sept ordonnances de non-lieu dont les attendus donnent une idée de l’esprit dans lequel la justice mili-taire italienne a été rendue en France¹. Dans l’ordre d’importance, les désertions furent les plus nombreuses, représentant   du corpus étudié, sentences et ordon-nances confondues. Puis vinrent, dans des proportions bien moins importantes, les refus d’obéissance et les insubordinations avec insultes et menaces à l’encontre d’un supérieur ( ), les vols et les complicités de vol ( à  ), et quelques cas iso-lés concernant des homicides et des blessures sur une tierce personne, des soup-çons de mutilations volontaires et des simulations de maladie, et des accusations de diffamation à l’encontre d’officiers.

Les actes d’indiscipline dépendirent certes de l’état physique et mental des auxi-liaires, qui n’était pas très brillant, mais aussi des événements militaires qui aggra-vèrent la situation. Il est en effet symptomatique de constater que les cas d’insu-bordinations et de désertions furent les plus nombreux au moment des offensives allemandes, en mars-avril, en mai et en juin-juillet-août , représentant respec-tivement,  ,  à   et   des sentences du tribunal. Par ailleurs, les soldats accusés ne se trouvaient pas tous dans les secteurs touchés par les combats. Mani-festement, ces cas traduisaient une grande lassitude et une grande fragilité de ces vétérans, blessés et malades pour la plupart, qui se trouvaient en plus loin de chez eux. Le tribunal militaire tint compte de cette situation particulière.

Les désertions furent donc très nombreuses mais cela ne signifiait pas pour autant un refus de la guerre en terre étrangère. La raison tint fondamentalement à la nature du code militaire italien. Les Italiens appliquèrent en effet naturellement leur vieux code militaire qui datait de  et qui se montrait bien plus intransigeant que le code militaire français. Ainsi, le militaire coupable de  heures et une minute d’absence non justifiée en zone des armées était porté déserteur. Un retour de per-mission dépassant de quelques jours la date fixée, était passible de désertion et de dix ans de réclusion. Une absence de plus de trente jours non justifiée, signifiait la peine de mort et le coupable devait être fusillé dans le dos. En outre, faire la guerre en terre étrangère aggravait les peines encourues.

Le fait de se trouver en France rendit toutefois plus fragile la situation des soldats italiens. Beaucoup d’entre eux en effet se perdirent lors du voyage d’Italie en France. Certains parce que descendus du train dans une gare pour aller aux toilettes ou pour embrasser un ami ou un parent sur le quai, avaient vu le train partir sans eux, à charge alors de se débrouiller pour retrouver leur unité en France et arriver ainsi en retard à

S   leur unité. D’autres furent victimes de l’éloignement de leur famille. En permission, le temps de voyage était plus long, rater une correspondance signifier des heures, voire des jours de retard,a fortiori, si l’on habitait le sud de l’Italie, l’Egypte ou la Tunisie. L’annonce du départ pour la France prit également au dépourvu beaucoup d’auxiliaires, qui se précipitèrent chez eux pour y prendre de l’argent et du linge, embrasser la famille, régler la location d’un lopin de terre, fixer la situation d’une sœur de quatorze ans à charge depuis que le père était mort¹. Ils partirent alors en retard d’Italie et rejoignirent, par la force des choses, leur unité en France tardive-ment. D’autres se plaignirent de leur condition et quittèrent leur unité pour protes-ter, non pas pour fuir la guerre. Ainsi, certains, internés à la prison de Champfleury pour des raisons futiles (ne pas s’être mis au garde-à-vous, s’être assis sur son lieu de travail...) et souffrant de conditions dures (demi ration, interdiction de courrier et de visite, interdiction de permission) s’évadèrent pour se rendre à Châlons-sur-Marne plaider leur cause auprès du colonel commandant leur groupe et dénoncer le traitement que leur infligeait leur commandant d’unité². D’autres également ne supportaient plus le comportement des Français et tentèrent de rejoindre l’Italie pour, d’après leurs déclarations, poursuivre ainsi la guerre chez eux. D’autres enfin s’étaient retrouvés hospitalisés dans des hôpitaux français et de ce fait, n’avaient pu être localisés par les autorités italiennes qui les avaient portés déserteurs. La plupart du temps, le tribunal sut se montrer compréhensif, n’hésitant pas à stigmatiser les mauvais traitements infligés par les officiers à l’encontre de leurs hommes. Leur état