• Aucun résultat trouvé

Gouvernance et performance financière de l’entreprise

3.1. Structure d’actionnariat et performance financière de l’entreprise :

La relation éventuelle qui peut exister entre la structure du capital et sa relation avec le rendement de l'entreprise a suscité l’intérêt de plusieurs études et recherches. Dans ce cadre s’inscrit l’étude d’André et Schiehll (2004)1, qui ont tenté d’étudier le lien entre la structure de propriété et la performance financière des entreprises canadiennes. Pour mener leur étude, ils ont travaillé sur un groupe de 178 sociétés canadiennes cotées à la Bourse des Valeurs Mobilières de Toronto, sur une période de trois ans (1997-1998-1999). Ces auteurs ont utilisé l’analyse de corrélation de Pearson et le modèle de régression multi-variée. Quant aux variables utilisées, elles sont de natures différentes :

 la variable dépendante : relative à la performance future anticipée, mesurée par le Q de Tobin (Q t+1) et calculée à la fin de l'exercice financier ;

 les variables indépendantes : concernent le niveau de propriété managériale et la participation de l’actionnaire dominant.

Les résultats de l’étude démontrent que la relation entre le niveau de la propriété managériale et la performance des entreprises est négative. Ceci est dû, selon les chercheurs, aux conflits d’intérêts entre les actionnaires dominants et les actionnaires minoritaires qui aboutissent à un mauvais rendement de l’entreprise et une diminution de sa valeur sur le marché.

Lee (2005)2, quant à lui, a essayé d’étudier l’impact de la part de la propriété familiale (structure à contrôle minoritaire) sur la performance financière de 29 groupes industriels coréens, pour une période de 7 ans (1990 – 1996). Le traitement des données s’est effectué par trois méthodes : la modélisation linéaire, la modélisation non linéaire et la méthode de régression par morceaux, et ce, utilisant les variables suivantes :

1. Les variables dépendantes comprennent :

- la rentabilité financière : mesurée par le rendement des actifs (ROA) ;

- la rentabilité économique : mesurée par le rendement des capitaux investis (ROE) ; - le taux de marge : mesuré par la rentabilité des ventes (ROS).

1 André, P., & Schiehll, E. (2004). Systèmes de gouvernance, actionnaires dominants et performance future

des entreprises. Revue Finance Contrôle Stratégie, 7(2), pp. 165-193.

2 Lee, J. T. (2005). Structure de propriété, stratégie de diversification et gouvernance des entreprises

109

2. La variable explicative comprend :

- l’actionnariat familial : relatif au pourcentage de capital directement détenu par la famille, où trois zones ont été identifiées : zone 1 : 0-10%, zone 2 : 10-22% et zone 3 : 22-100%.

Les résultats de l’étude illustrent que la modélisation linéaire de la relation propriété-performance ne permet pas de mettre en évidence de relation significative entre les deux variables. Or, avec une analyse non linéaire employant le modèle de la régression par morceaux, les résultats obtenus font apparaître une relation positive dans la zone intermédiaire et une relation négative dans les zones des deux extrémités. Selon l’auteur, l’effet négatif d’enracinement de la concentration actionnariale l’emporte sur celui de convergence des intérêts dans la première et la troisième zone.

Pour l’étude d’Alimehmeti et Paletta (2012)1, elle a pour but d’étudier la relation entre la concentration de la propriété et la performance financière des entreprises italiennes et de son évolution au fil du temps, afin d'évaluer les effets de la crise mondiale. L’étude a été menée sur un échantillon de 203 entreprises cotées en Italie. Les données de l’échantillon sont recueillies pour deux périodes : avant et après la crise (2006-2007 et 2008-2009). Pour leur analyse, les auteurs ont utilisé la méthode de régression des moindres carrés ordinaire, en identifiant deux types de variables :

 la variable dépendante : relative à la performance financière, mesurée par le rendement des actifs (ROA) ;

 la variable indépendante : comprend la concentration de propriété, mesurée par le pourcentage d’actions de propriété (votes) du plus grand actionnaire.

Les résultats montrent que la performance des entreprises étudiées est associée positivement à la concentration de la propriété pour les années 2006-2007 et 2009. Toutefois, en 2008 l’année de crise, la relation positive entre la concentration de la propriété et la valeur de l'entreprise se transforme à une relation négative. Selon les auteurs, cela est dû à l’augmentation des effets d’expropriation contrastant avec les effets de surveillance qui dominent les autres années.

Pour ce qui est de Madiwe (2014)2, il a tenté d’étudier l’impact de la structure d’actionnariat sur la performance financière de 49 entreprises allemandes cotées en bourse, et ce pour la période allant de 2008 à 2011. Cette relation est testée par la méthode de

1 Alimehmeti, G., & Paletta, A. (2012). Ownership concentration and effects over firm performance :

evidences from Italy. European Scientific Journal, 8(22), pp. 39-49.

2 Madiwe, J. (2014). Ownership structure, inside ownership and firm performance. Applied Financial Research, pp. 1-11.

110

corrélation basée sur le coefficient R de Pearson et la méthode de régression des moindres carrés ordinaire. À cet effet, l’auteur a utilisé plusieurs types de variables.

1. Les variables indépendantes explicatives comprennent :

- la répartition de la propriété : calculée par le pourcentage total des actions détenues par les détenteurs de blocs ;

- la propriété interne : mesurée par la fraction des actions détenues par le conseil de surveillance d'une société donnée.

2. la variable dépendante : comprend la performance financière mesurée par le ROA et le Q de Tobin.

Les résultats de l’étude concluent que la structure de propriété est une variable endogène qui n'est pas liée à la performance de l'entreprise durant la période de crise. Alors qu'une relation faible entre la propriété intérieure et la performance de l'entreprise existe, mais la propriété par le conseil de surveillance est très rare chez les entreprises allemandes. Par ailleurs, l’étude de Mard et al. (2014)1 a traité la relation entre la structure de l’actionnariat et la performance financière des sociétés cotées françaises, et ce à travers la relation entre la performance financière et la concentration de l’actionnariat d’une part, et la relation entre la performance financière et la nature de l’actionnariat d’autre part. L’étude a été menée sur un échantillon de 238 sociétés cotées de l’indice SBF 250, sur une période allant de 2004 à 2008. Un modèle linéaire a d’abord été testé, mais il n’a pas conduit à des résultats significatifs, puis, une modélisation non linéaire a été envisagée.

Afin de mesurer l’association entre la concentration de l’actionnariat et la performance financière, les auteurs ont introduit les niveaux de détention par le premier, le second et le troisième actionnaire (variables ACT1, ACT2 et ACT 3) comme variables explicatives de la performance financière, mesurée par le Q de Tobin orientée par les anticipations des investisseurs d’une part, et par le ROA d’autre part, pour mesurer une performance comptable passée.

Après leur analyse, les chercheurs sont arrivés aux résultats suivants. D’abord, concernant la relation entre la performance financière et la concentration de l’actionnariat, les résultats démontrent que le 1er actionnaire détient en moyenne 38,80 % du capital, le second 9,9 % et le 3ème 4,6 %. Pour ces auteurs, le lien avec la performance financière n’est positif que pour des niveaux intermédiaires de concentration (entre 30% et 70%) de détention pour les trois principaux actionnaires. Pour la relation entre la performance

1 Mard, Y., Marsat, S., & Roux, F. (2014). Structure de l'actionnariat et performance financière de

111

financière et la nature de l’actionnariat, les résultats obtenus démontrent que l’actionnariat familial est associé positivement à la performance financière, jusqu’à un certain niveau évalué entre 23% et 44% selon les mesures de la performance. Au-delà de ce niveau, le lien devient négatif. À l’inverse, il apparaît qu’au-delà d’un certain seuil de détention, les actionnaires financiers peuvent avoir un impact favorable sur le rendement de l’entreprise.

Dans le même contexte, Khaldi (2014)1 a essayé d’étudier l’impact de la structure d’actionnariat sur la création et la répartition de la valeur partenariale de 103 entreprises françaises cotées, pour la période observée 2006, 2008 et 2010. L’analyse des données s’est basée sur la méthode de régression multiple, en utilisant les variables suivantes :

1. Les variables relatives à la gouvernance d’entreprise comprennent : l’actionnariat institutionnel et l’actionnariat salarié.

2. Les variables à expliquer sont :

- la rente organisationnelle : mesurée par la part de la valeur partenariale créée par l’entreprise (la différence entre les ventes d’opportunités et les coûts d’opportunités) ;

- la valeur partenariale appropriée par l’entreprise : mesurée par la rente totale – la partie qui revient aux parties prenantes explicites ;

- la valeur partenariale des parties prenantes explicites : mesurée par la part de la valeur appropriée par chaque partie prenante.

Les résultats de l’étude révèlent que seul le pouvoir actionnarial des salariés ressort positivement associé à la valeur partenariale créée par l’entreprise, et ce pour les années 2006 et 2010. En revanche, en 2008 l’année de crise, le pouvoir de l’actionnariat salarié a perdu son influence sur la création de valeur. Pour l’auteur, en période de crise la variable d’ajustement est souvent le capital humain ; ceci dit les salariés se retrouvent fragilisés et leur influence diminue.

L’étude de Cole et al. (2015)2 a tenté de déterminer l’impact de la structure du capital sur la performance financière et boursière de 30 entreprises américaines, opérant dans trois secteurs différents : le secteur industriel, le secteur de la santé et le secteur de l'énergie, sur une période de dix ans (2004 – 2013). Pour le traitement des données, les auteurs ont utilisé la méthode de régression simple, en utilisant les variables suivantes :

 la variable indépendante : comprend la structure du capital, mesurée par le rapport entre le passif à long terme et l'actif total ;

1 Khaldi, M. A. (2014). Impact des mécanismes de gouvernance sur la création et la répartition de la valeur

partenariale. Thèse de doctorat. France : Université de Grenoble.

2 Cole, C., Yan, Y., & Hemley, D. (2015). Does capital structure impact firm performance: an empirical study

112

 la variable dépendante : comprend la performance de l’entreprise, mesurée par plusieurs indicateurs, à savoir : le cours boursier, le rendement des actifs, le rendement opérationnel et la marge bénéficiaire.

Les résultats de cette étude font référence à une certaine influence quant à la relation entre la structure du capital et la performance de l'entreprise. Cette relation peut varier d'un secteur à l'autre, ainsi que d'une variable à l'autre. Dans les trois secteurs étudiés, la structure du capital impacte négativement le rendement des actifs et le rendement opérationnel. Les entreprises américaines financées par la dette dévalorisent leurs performances potentielles. Par conséquent, la relation entre la marge bénéficiaire et la structure du capital est positive dans le secteur industriel, négative dans le secteur de l'énergie et inexistante dans le secteur de la santé. Par ailleurs, la structure du capital et le cours des actions sont indépendants l'un de l'autre dans les trois secteurs étudiés.

Abeywardhana (2015)1, pour sa part, a testé le lien entre la structure de l’actionnariat et la performance financière des PME du secteur industriel au Royaume-Uni, sur une période allant de 1999 à 2008. L’analyse des données s’est basée sur la méthode de corrélation de Pearson et de régression multiple, en employant les variables suivantes :

1. La variable indépendante relative à la structure du capital ; 2. Les variables dépendantes relatives à :

- la performance financière : mesurée par la rentabilité des actifs (ROA) ;

- la performance économique : mesurée par le rendement des capitaux investis (ROCE) ;

- l'effet de levier : mesuré par le ratio dette / capitaux propres.

Les résultats de cette étude révèlent qu'il existe une relation négative et significative entre l'effet de levier et la performance de l'entreprise.

Dans le contexte japonais, Mizuno et Shimizu (2015)2 ont essayé d’étudier l'impact des investisseurs institutionnels sur la gouvernance et la performance financière des entreprises. L’étude a été menée sur une période allant de 2005 à 2010, en utilisant1 334 entreprises cotées à la Bourse de Tokyo, à l'exclusion des banques et des institutions financières. Le traitement des données s’est basé sur la méthode d'analyse dynamique. Les variables relatives à la performance de l’entreprise sont mesurées par le rendement des

1 Abeywardhana, D. K. (2015). Impact of capital structure on firm performance : Evidence from

manufacturing sector SMEs in UK . European business research conference (pp. 1-12). Sri Lanka: University

of Kelaniya Sri Lanka.

2 Mizuno, M., & Shimizu, H. (2015). The influence of institutional investors on corporate governance and firm

113

actifs (ROA), la rentabilité des capitaux investis (ROE), la rentabilité des actions (SPR) et le Q de Tobin.

Les résultats de leur analyse révèlent que la gouvernance d'entreprise a été améliorée par la présence des investisseurs institutionnels dans les entreprises étudiées.

De ce qui précède, il apparaît que les résultats des études empiriques avancent un certain nombre d’arguments favorables et défavorables pour expliquer la relation entre la structure de l’actionnariat et la performance financière de l’entreprise, et ce, dans différents contextes. Certaines recherches montrent qu’il y a une relation positive entre les deux variables, alors que d’autres ont conclu à un lien négatif. Tandis que, certains auteurs ont abouti à une absence de relations. Ceci peut être dû aux nombreux facteurs utilisés, tels que les variables de concentration et les performances choisies, le contexte institutionnel et le secteur d’activité choisi, etc.